La disparition de Gelatine Turner…

Gelatine Turner, c'est un projet chanson porté par deux frères, Pierre au son et Romain au chant. Ensemble ils composent une chanson hybride entre pop et alternative. « Disparaître », c'est une marche hypnotique, un souffle qui s'emballe, une perte de repère…

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Deux versions des mêmes chansons Spécial

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Voici deux ans, lors d'une première rencontre, cet ex Saints s'était montré peu loquace, passant le plus clair de son temps à boycotter les questions qui lui étaient posées. De retour en Belgique pour une nouvelle tournée des petits clubs, mais en solo, Edmund était particulièrement surpris de nous revoir. Et peut-être également touché. Une insistance qui a sans doute enfin permis de lever une partie du voile qui recouvre l'histoire de ce chanteur, compositeur, interprète que guitariste aussi talentueux et prolifique...

Ton dernier album, "Character Assasination" est double, mais se limite sur le deuxième disque à une adaptation acoustique du premier. Une raison?

En fait, au départ, il ne devait y avoir qu'un seul disque enregistré en compagnie de mon groupe, mais comme je n'étais pas satisfait du résultat, je suis retourné en studio pour en réaliser une nouvelle mouture, avec pour seul accompagnement la guitare sèche. J'ai à la fois voulu revenir à une écriture plus basique et démontrer que j'étais capable d'aborder mes compositions sous des angles différents. Ce qui explique pourquoi j'ai réalisé ces deux exercices de style.

Pour chacune des versions, tu as choisi un titre différent: "Character assassination" et "Death of the howdy doody brigade" Une raison? Et que signifient ces deux titres plutôt curieux?

Les deux titres sont très liés, mais recèlent différentes significations. "Character assasination" exprime une face cachée et symbolique de mon caractère dans la musique. Je m'efforce constamment de détruire mon passé, mes expériences antérieures pour pouvoir me ressourcer entièrement. C'est un "leitmotiv". "Death to the howdy doody brigade" exprime sans doute le sentiment que j'ai éprouvé après avoir enregistré la première version du disque. A moins qu'il ne reflète le sort des Aints lorsque je les ai liquidés...

Sur ces disques, tu interprètes un classique de Johnny Cash, "Ring of fire", une chanson qui a déjà été reprise par un nombre incalculable d'artistes. Il existe même un spot publicitaire qui s'en est inspiré pour vanter les mérites de jeans. Que représente pour toi ce mythique folk singer?

Je n'ai pas repris cette chanson par admiration pour Johnny Cash, mais simplement parce que j'aime cette chanson depuis ma plus tendre enfance. Et puis, je souhaitais en réaliser une version très personnelle. C'est vrai qu'il en existe de multiples. La dernière que j'ai entendue appartient à Dick Dale. Elle m'a particulièrement amusé. Mais j'ignorais que ce titre avait servi de bande sonore pour une pub. Je n'ai jamais vu ce spot passer à la TV australienne.

As-tu le sentiment d'être sous-estimé? Ne penses-tu pas qu'une signature chez un major pourrait t'ouvrir les portes du succès?

Je pense recueillir un certain succès. Mais je ne désire pas supporter une quelconque pression sous prétexte d'acquérir une plus grande notoriété. Je n'ai pas à me plaindre de ma situation actuelle. Ce que je récolte me paraît justifié et pas davantage. Relever d'un label major soulève d'autres problèmes. Et pas nécessairement faciles à résoudre. Trop de monde pense que signer sur une major permet de vivre pour le mieux dans le meilleur des mondes. Je ne partage pas ces idées préconçues. Pourtant, si la proposition était intéressante, je ne dis pas que je la refuserais. Mais, jusqu'à ce jour, aucune ne m'a semblé suffisamment solide pour être étudiée. Personnellement, j'estime essentiel de préserver mon intégrité artistique. Conserver le contrôle de ma création. Enregistrer des disques lorsque j'en éprouve le désir. Des conditions difficilement admissibles pour un label major.

Oui, mais justement, un label indépendant doit avoir les reins solides pour voir défiler une telle prolifération de disques. Est-ce que ce système est viable, surtout lorsque les ventes ne suivent pas?

Sur un label major, un artiste a droit à approximativement un album tout les deux ans. Or, j'estime que le rythme d'une sortie annuelle constitue le minimum pour rester dans le coup. La période qui sépare les enregistrements s'allonge exagérément à cause de la campagne de promotion, campagne dont il est indispensable d'amortir le coût, souvent beaucoup plus élevé que le prix de revient du disque lui même. Au cours des sixties, les artistes de rythm 'n blues, de blues, et de rock 'n roll gravaient un vinyle tout les deux mois. Ils se remettaient constamment en question, travaillaient sur leurs nouveaux projets à peine la matrice mise en boîte. Ils pensaient à se renouveler constamment. Evidemment, je concède que la sortie trop rapide d'un nouvel opus s'effectue au détriment du précédent, surtout lorsque le laps de temps qui les sépare est très réduit. Mais dans ma perspective artistique, dès que mes chansons sont terminées, reproduites sur bandes et suffisamment solides à mon goût, je n'attends qu'une seule chose: la graver sur un album.

Considères-tu ta musique comme une religion?

Ma musique n'est pas une religion, mais elle polarise une grande partie de mon existence. Et même davantage. Je suis totalement hanté par la musique. Et en même temps, il existe une déchirure entre cette obsession et la partie de ma vie qui me comble. Cette déchirure peut également expliquer le titre de mon album. Mais lorsque tu es totalement obsédé par la musique, tu cherches à te protéger, à t'isoler du monde, à te couper des autres. J'en suis conscient, mais j'essaie de me remettre en question, de prendre du recul par rapport à cette passion. J'y ai tellement consacré de temps qu'elle y a pris une place très importante dans ma vie.

Est-ce la raison pour laquelle on te qualifie de taciturne?

Ah bon? Je n'avais jamais entendu cette réflexion à mon sujet.

L'inspiration te vient en tournée ou à la maison?

Rarement en tournée. Nonante pour cent de mes chansons sont écrites chez moi. J'ai besoin d'une concentration optimale pour les concevoir. Mais les voyages peuvent être également une source d'inspiration.

Pourquoi tes lyrics sont-ils obliques? Y réserves-tu une place pour ton sens de l'humour?

La perspective de mon écriture est très personnelle. Je rédige essentiellement à la troisième personne. Ce qui explique sans doute pourquoi mes textes sont obliques. Mon sens de l'humour. Il s'exerce à travers les mots à double sens...

Es-tu un guitariste pyrotechnique?

Non, pas du tout. Disons qu'en compagnie des Aints, je suis parvenu à libérer une certaine intensité électrique. Mais cette technique est plutôt réservée aux groupes de metal yankee. Je préfère la guitare acoustique. Elle offre davantage de versatilité. J'écris d'ailleurs la plupart de mes compositions à l'aide de la guitare sèche. Même si sur scène, j'aime en amplifier le son (rires)...

N'est-ce pas un handicap de toujours changer de musiciens?

Mon but est d'atteindre un résultat chaque fois différent. Que ce soit en studio ou live. Au cours des quatre à cinq dernières années, je n'ai jamais tourné deux fois avec la même formation. C'est vrai que parfois certains musiciens sont interchangeables. Ou que d'autre me côtoient plus régulièrement comme la flûtiste ou le drummer Mark Dawson. Mais je n'ai aucune exclusive dans ce domaine...

 

(Version originale de l'interview parue dans le n° 37 - octobre 95 - de Mofo)

 

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