La substitution d’Edouard van Praet

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Des adieux au Dancefloor pour ouvrir les portes de l’enfer… Spécial

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Il y a plus de trois ans que les carrières de Marie Davidson et de Pierre Guerineau sont suivies –attentivement– par Musiczine. Un pied à Montréal et l'autre à Berlin, les deux artistes produisent une musique électronique particulièrement novatrice à travers deux projets : celui personnel de Marie Davidson et le duo Essaie Pas. Leur univers musical évolue quelque part entre ‘ambient’ introspective et ‘minimal synth’, tout en affichant un côté ‘clubbing’ nu-disco/techno. Le tout sublimé par une prose 'voice-over' déclamée ou chantée. Le caractère onirique, quasi-cinématographique, est omniprésent, un peu comme si on écoutait la bande-son d'un film imaginaire.

Nous avons retrouvé Marie Davidson le jour du concert qu’elle a accordé en solo, au Beursschouwburg, à Bruxelles, dans le cadre d'une soirée 'Nose Job' orchestrée par Rick Shivers. Elle venait y présenter sa nouvelle production individuelle, « Adieux au Dancefloor », parue sur Cititrax, le second label de Veronica Vasicka, la 'boss' du célèbre label new-yorkais Minimal Wave. 

Par quel hasard as-tu rencontré Veronica Vasicka ?

Marie Davidson (MD) : On s’est produit lors d'une même soirée à Montréal en septembre 2015. C'est ainsi que je l'ai rencontrée.

Le titre « Adieux au Dancefloor » est un peu contradictoire parce que le contenu est dans l'ensemble très dansant.

MD : Oui mais il figure à la fin du disque. C'est la petite touche d'humour noir pour clôturer.

Le morceau correspond aussi à une période où tu en avais un peu marre de la vie nocturne et du clubbing?

MD : Oui, oui, bien sûr.

Surtout à Berlin ?

MD : Oui, à Berlin mais ailleurs aussi. Attention : j'aime la danse et la musique dansante mais le monde de la 'nightlife' a quelque chose de fatiguant, de 'drainant'... Je m'y suis sentie frustrée. Ce qui m’a donné l’envie de prendre mes distances et d’ironiser  en y ajoutant un peu d'humour. Il existe tellement de musiques 'dark' dans ce domaine ; et j'avais envie de faire quelque chose de...

...de fun ?

MD : Oui, exactement.

La chanson recèle un côté pop française, un peu dans l’esprit d’Elli & Jacno, voire même de Lio...

MD : Oui, je dirais plutôt Lio. Il existe une connexion avec la ‘chanson française’ qui est assez inhabituelle pour moi. C'est aussi le seul titre de l'album composé en compagnie de Pierre (NDR : Guerineau). J'ai écrit les paroles et la musique mais Pierre a mis sa touche, bien française, dans les arrangements.

On voit bien le lien avec « La Chute », le dernier titre de l'album d'Essaie Pas, et avec Christophe, un chanteur que Pierre apprécie tout particulièrement...

MD : Oui, exactement. Beaucoup d'idées ont été suggérées par Pierre. J’ai beaucoup apprécié de travailler auprès de lui, sur cette compo.  

Sur ton elpee, certaines plages s’ouvrent vers de nouveaux horizons, notamment « Inferno ».

MD : Il ouvre les portes de l'enfer ? (rires)

Son profil techno-industriel évoque même Orphx...

MD : Je ne peux pas cacher qu'Orphx m’a énormément influencé. Je n'y ai pas pensé consciemment quand j'ai composé « Inferno », mais le lien est clair. Ce sont des amis et une grande source d'inspiration. Mes nouveaux morceaux empruntent un peu cette direction : ils sont plus énergiques, plus concentrés sur les rythmiques. L’élément mélodique est toujours bien présent ; mais l’aspect rythmique est plus accentué qu’auparavant.

D'ailleurs, tu as collaboré à l’enregistrement du dernier opus d’Orphx. Notamment sur un titre qui me botte particulièrement : « Walk Into The Broken Night ». En fait, la musique et la voix développent un univers assez différent de celui proposé habituellement. Il est assez 'dark', presque 'gothique' même...

MD : Ce sont eux qui l’ont composé, y compris les paroles. Ils écoutent beaucoup de musiques différentes et sont influencés par un large éventail de styles : shoegaze, industrial, new-wave, cold-wave, musique classique, etc. Ils sont très ouverts et possèdent une grande culture musicale. Pour réaliser ce dernier album, ils ont voulu incorporer certaines de ces influences dans leur musique, qui est en général plus techno.

Depuis que vous avez signé chez DFA pour Essaie Pas et Cititrax pour ton elpee solo, as-tu constaté un changement dans l'évolution de ta carrière ?

MD : Oui, je reçois plus de propositions, il y a plus d'opportunités ; mais dans l'ensemble, je continue à faire ce que je faisais avant, du mieux que je peux.

J'ai notamment lu un article consacré à Essaie Pas dans The Guardian...

MD : Oui, DFA a fait pas mal de 'com'. Du côté de Cititrax, Veronica Vasicka a réalisé l’artwork de l'album en personne en se basant sur des photos de Corinne Schiavone, une très bonne photographe de Los Angeles. Veronica s’est également chargée du mastering. Mais question 'com', il n'y a rien eu de particulier. Tout s’est fait naturellement.

Depuis que tu vis à Berlin, je suppose que tu as retrouvé des tas de musiciens et d'artistes qui viennent d'un peu partout. De Montréal ? De New York ?

MD : Oui, Berlin est une ville très cosmopolite.

Night Musik s’y est établi ?

MD : Oui, Shub Roy. C’est un ami. Un Montréalais.

Ancient Methods également, fer de lance de la scène techno-indus...

MD : J'aime beaucoup Ancient Methods mais je ne le connais pas personnellement.

C'est Michael Wollenhaupt; il est très chouette.

MD : J'aime aussi le projet qu’il a monté en compagnie d’Orphx : Eschaton.

Qu’écoutes-tu pour l'instant ?

MD : Le nouveau release de Schwefelgelb (NDR : l'Ep « Dahinter Das Gesicht »). Ce sont aussi des amis.

Oui, Sid Lamar et Eddy ! Ils proposent une musique particulièrement techno-EBM.

MD : C'est très contemporain; bien réalisé et particulièrement efficace.

Et si tu devais sélectionner un 'classique', par exemple, le premier titre sur lequel tu as flashé quand tu étais jeune et qui aurait défini ce que tu allais devenir musicalement?

MD : D'abord, j’ai été marquée par le « Smells Like Teen Spirit » de Nirvana. J'avais 7 ans. Mais il n'existe pas vraiment une chanson qui soit idéale pour définir mon style, vu que je ne parviens même pas à le définir... (rires). Il est le fruit d’une combinaison de tellement d’éléments.

Oui, tu aimes aussi le disco, les musiques de films et même les Doors, non ?

MD : Oui, j'adore les Doors. D'ailleurs, une composition me touche toujours énormément aujourd'hui, c'est « You Forget To Answer ». Elle figure sur l'album « The End » de Nico. Quand je l’ai entendue, elle a provoqué un déclic dans ma vie.

Dans quel sens ?

MD : Je ne pourrais pas l'expliquer. C'est métaphysique. Quand je l'écoute maintenant, elle me fait encore de l'effet. J'en ai des frissons. C'est un langage musical et esthétique qui me correspond. Et m’atteint droit au coeur. Cet album a été produit par John Cale. Il date de 1974. Brian Eno joue du synthétiseur sur certains titres.

Ce qui est bien chez Nico, c'est que sa musique est super 'dark'. Même ses œuvres précédentes. Elles sont très dépouillées, sombres. Notamment à cause de sa voix. Elle est peut-être la première chanteuse gothique de l'histoire !

MD : Oui, ça c'est vrai ! (rires)

Parmi tes influences, on pourrait également citer les musiques de film de John Carpenter, je crois, non ? « Assault on Precinct 13 », par exemple ?

MD : Oui ! Et encore plus « Halloween III ». John Carpenter ne l'a pas réalisé mais il a composé la musique et c'est juste énorme. C'est aussi une référence importante pour moi.

Et là, tu travailles sur des nouveaux morceaux ?

MD : Oui, toujours. Ne t'inquiète pas... (rires) C'est un principe qui ne changera jamais : je ferai toujours de la musique...

Merci, Marie !

MD : Merci à toi.

Pour écouter et commander l'album « Adieux au Dancefloor » de Marie Davidson, c’est ici 

Pour écouter l'interview réalisée en août 2015 dans l'émission WAVES, en français, c’est , et en anglais, c’est encore ici

Photo : Corinne Schiavone

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