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Je peux vivre mes émotions de manière décuplée… Spécial

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Acteur de formation, Thomas Mustin, décroche des rôles au théâtre, à la télévision ou encore au cinéma et remporte, en 2019, le ‘Magritte’ du Meilleur Espoir Masculin du Cinéma Belge

C’est en 2014, qu’il se lance comme chanteur, auteur et compositeur sous le pseudonyme Mustii. Son premier Ep sort en 2016 et le single « The Golden Age » lui permet de se produire dans de nombreux festivals. Son succès, couronné par le trophée de la Révélation de l’Année aux ‘D6bels Music Awards’, est suivi par la sortie de son premier album, « 21st Century Boy », en octobre 2018. Son second elpee, « It's Happening Now », est paru ce 21 janvier 2022. Une œuvre qui s’inspire d’un drame familial, en l’occurrence la schizophrénie de son oncle disparu tragiquement. De quoi entrer immédiatement dans le vif du sujet…

Se mettre à nu demande du courage et une bonne dose d’introspection. Est-ce une manière pudique de lui rendre hommage ou d’exorciser quelque chose de plus profond qui sommeille en toi ?

Je crois qu’il y a un peu des deux. Mais l’objectif premier était de lui rendre hommage et de me reconnecter avec lui. De me connecter, devrais-je dire. En effet, je n’ai pas eu l’occasion de le faire précédemment parce que sa maladie l’emprisonnait dans une carapace, d’une part, et je n’étais qu’un jeune adolescent, d’autre part.

J’étais moi-même un peu renfermé. On ne se rencontrait pas vraiment. Le désir de créer quelque chose qui puisse établir cette connexion était en moi depuis toujours. C’est ce qui m’a véritablement marqué. Je ne suis jamais parvenu à mettre des mots là-dessus. Je me suis donc demandé si j’allais écrire un court métrage, un texte ou me servir d’une autre formule… Et puis, au cours des dernières années, j’en ai conclu que la musique pouvait être le bon outil pour réaliser cet objectif. En prenant un peu de recul, afin de ne pas rester dans le littéral. Il ne s’agit pas de raconter l’histoire de mon oncle en détail, mais de le faire revivre à travers l’album. C’est thérapeutique aussi, quelque part. De quoi enlever le tabou qui existe toujours autour de la schizophrénie, maladie encore inconnue et ultra complexe. Chaque individu est différent et chaque schizophrénie est différente. Il n’y a aucune prétention de traiter la maladie d’un point de vue médical, mais de l’aborder sur le plan humain. Il faut pouvoir en causer ouvertement. C’est aussi une manière personnelle d’en parler en famille et d’ouvrir le dialogue.

Ne crains-tu pas de devenir, en quelque sorte, le porte-parole des malades mentaux ?

Ce n’est pas du tout mon intention. Je ne souhaite pas devenir le porte-parole des malades mentaux. Il faut le comprendre comme une marque de reconnaissance intime et personnelle. Si ma démarche peut libérer la parole ou si certaines personnes peuvent s’identifier et être touché d’une manière ou d’une autre, tant mieux. C’est un sujet que je voulais aborder, c’est tout. Je veux vraiment éviter d’être considéré comme un donneur de leçons.

En abordant des sujets aussi personnels, qui va finalement se retrouver sur les planches ? Mustii, l’artiste ou Thomas (Mustin), l’homme ?

Pour moi, c’est un peu les deux. J’aime reconnaitre qu’il s’agit de moi, exposant dix. Les émotions sont littéralement passées à la loupe. Il n’existe donc pas deux personnes distinctes. Que ce soit sur scène ou via le projet Mustii, je peux vivre mes émotions de manière décuplée. C’est l’endroit où je me sens le plus libre. Je peux exprimer mes opinions haut et fort et totalement les assumer. C’est vraiment lié à ma personnalité. Je ne joue donc pas deux personnages différents. Mais un seul, évolué, exposant dix. J’aime beaucoup cette métaphore.

De « 21st Century Boy » à « It's Happening Now », la musique est devenue plus électrique, mais en demeurant pop. Pourquoi ce changement de style ?

Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un changement de style radical. Je parlerais plutôt d’évolution. C’est toujours un album pop. J’assume les références rock, new-wave et parfois j’adopte un son plus électrique. Il s’agit de sonorités dans lesquelles je baigne depuis que je suis tout petit. Il s’agit d’un retour aux sources, même si j’ai effectivement connu une phase électro pop au cours de laquelle j’en écoutais beaucoup. Ici, il y avait cette intention de revenir à ce que j’écoutais auparavant, grâce notamment aux vinyles un peu ‘rentre dedans’ et rageurs de mon père ; ce qui m’a fait du bien. Je ne veux surtout pas me cantonner à un seul créneau. Qui sait si le prochain album ne sera pas plus jazz ou hip hop ? Je considère la musique comme un outil. Je suis bricoleur et je teste.

Cet opus a-t-il été taillé spécifiquement pour le live ?

C’est un processus totalement inconscient. Je suis tellement attaché au ‘live’ et à la manière dont les chansons peuvent y prendre une autre dimension qu’il se déroule de manière naturelle lorsque je suis en studio. Effectivement, il a une dimension épique et un peu théâtrale qui se prête bien au terreau de la scène. Je ne réfléchis pas trop. Je crois que c’est tellement dans mon ADN. C’est ce que j’aime faire et pour moi, c’est une fin en soi. Un album est destiné à être transposé sur scène et partagé avec les gens.

« Give me a hand » lance un appel à l’aide, alors que la chanson, imprimée sur un tempo entraînant, est plutôt fédératrice…

C’était en effet le challenge que je me suis imposé dès le départ. L’idée était que je puisse revivre, à travers cet album, la vie de mon oncle et sa maladie. Sa vie était en dents de scie. Il a traversé tour à tour des moments d’euphorie, d’autres plus délicats mais également dangereux. Le disque devait suivre cette courbe et donc surtout ne pas ressembler à un encéphalogramme plat. Il fallait que je puisse rester dans le mouvement en permanence. Les chansons épousent ainsi tantôt un aspect rock et adolescent, tantôt une forme plus directe ou encore une veine plus club. Il recèle aussi des compos plus fragiles ou plus sensibles. Bref, des chansons à l’image de sa vie et de ses émotions. L’inspiration émane à la fois de mon imaginaire et des conversations que j’ai eues avec mon père. 

Tu as choisi la langue De Shakespeare pour interpréter tes chansons. Cette option est-elle liée à une quelconque stratégie d’exportation ou s’inscrit-elle simplement dans une culture musicale bien ancrée ?

Il s’agit purement d’un choix lié à ma culture musicale. Mais je ne suis pas fermé. Je pourrais tout aussi bien essayer de chanter en mandarin ou en allemand. Mais, vu la musique que je compose et la direction que j’ai prise, c’est ce qui me vient instinctivement. J’ai toujours baigné dans l’anglais. Mon meilleur ami est américain et reçu le concours d’une Londonienne talentueuse pur l’écriture. Elle s’appelle Ariana. Ce choix n’est donc pas lié à l’exportation.

Parfois les sonorités d’une langue sont liées aux compositions, au type de production. A vrai dire, c’est ce qui matchait le mieux avec le travail que j’ai produit ces derniers mois.

Tu continues à multiplier les casquettes artistiques. La musique est arrivée sur le tard. Quelle importance revêt-elle parmi l’ensemble de tes projets ?

Je fonctionne projet par projet. Je ne fixe aucune hiérarchie. Je vais retourner sous peu au théâtre et il me passionne tout autant. Ce sont des allers-retours en quelque sorte. Je me nourris de toutes les disciplines. J’aime l’idée que l’on puisse utiliser les outils et s’exprimer de plein de manières différentes.

Existe-t-il d’autres champs d’exploration dans lesquels tu aimerais t’essayer ? Comme la danse, l’écriture, la peinture, etc. ?

Je rêve de réaliser un court-métrage. C’est un projet auquel j’aspire depuis pas mal de temps déjà. Mais, il faut savoir que porter un projet et une équipe sur ses épaules demande un investissement de 3 à 5 ans. Ce n’est pas rien ! Mais clairement, j’en ai très envie.

Tes concerts sont toujours extrêmement théâtralisés, stylisés et millimétrés. Jouer un personnage à outrance, ne risque-t-il pas de dénaturer le naturel et la spontanéité du show ?

Justement, j’essaie au maximum d’éviter de m’installer dans la chorégraphie. Garder une place pour la spontanéité me paraît essentiel. Il faut qu’il y ait du risque et de la vie ; que chaque soir soit différent. Si j’aime effectivement donner une ossature au show, j’ai aussi besoin d’espaces de liberté pour pouvoir vivre et laisser la place à l’intuition. J’admire le travail opéré par Florence Welch (Florence and the Machine). Si effectivement chez elle, on peut distinguer le récit du show, elle demeure une prêtresse libre de ses actes et de ses mouvements. Lorsqu’on la regarde, on imagine que tout est possible. L’instinct et la spontanéité restent des sentiments auxquels j’essaie humblement d’accéder. Il s’agit d’un fil ténu entre l’aspect chorégraphique et l’aspect totalement libre. C’est d’autant plus vrai dans le style de musique vers lequel je m’oriente. Sinon, je ne vois plus l’intérêt.

Chacun de tes shows suscite beaucoup d’engouement. Lorsque tu te produis lors d’un festival, le public n’est pas nécessairement venu pour te voir et d’entendre. Il est parfois difficile de s’y faire une place lorsque l’artiste n’est pas la tête d’affiche. A titre personnel, je me souviens d’une prestation de Patrick Juvet au festival de Dour, recevant tellement d’insultes et de projectiles qu’il est resté une poignée de secondes sur scène avant de repartir. As-tu déjà ressenti une certaine hostilité ou des réactions virulentes à ton égard ?

Personnellement non. C’est aussi le travail du booker de te dénicher des dates là où tu as tout à fait ta place. Il doit pouvoir prendre la mesure des risques. J’ai eu de la chance jusqu’à présent car je n’ai pas vécu de retour négatif, même s’il peut arriver qu’un concert se déroule moins bien parce que je suis moins en forme ou carrément à côté de mes pompes.

Au tout début de ma carrière de chanteur, je me suis produit dans le cadre d’un festival à Mons où il y avait à peine trois personnes sur une grande plaine. C’était un peu particulier. Sinon, je ne me souviens pas d’avoir été victime d’animosité manifeste.

Je me rappelle également ce concert. Je figurais parmi ces trois spectateurs.  C’était en 2016… (rires)

C’était absurde. Ce festival était axé sur l’électro !

Tu travailles en compagnie de Tom Eerebout, un styliste anversois et grand ami de Lady Gaga. Comment s’est déroulée cette rencontre et pourquoi ce choix ?

Il s’agit d’une nouvelle collaboration. Pour réaliser ce nouvel album, je ressentais le besoin de m’entourer de nouveaux visages. C’est une manière de prendre des risques, d’éviter de se reposer sur ses lauriers. J’avais très envie de voir ce qui se passait de l’autre côté de la frontière linguistique dans l’univers de la vidéo et des visuels. J’estime qu’on ne crée pas assez de ponts avec la Flandre. J’ai découvert son univers sur Instagram. Non seulement il apprécie bosser sur des projets internationaux, mais aussi en compagnie d’artistes en développement. Le courant est immédiatement passé. Il aime les challenges. Nous allons travailler une silhouette aussi bien pour la tournée que les concerts.

L’artistique en général est un domaine dans lequel il est difficile de pouvoir se projeter sur le long terme car, il est très aléatoire. Cette crise sanitaire a entraîné des conséquences dramatiques et impactent encore aujourd’hui le monde culturel. Certains artistes ont besoin d’adrénaline pour avancer et finalement, quand on évolue dans l’incertitude la plus complète, la situation ne devient-elle pas plus excitante ?

L’incertitude et l’insécurité sont irrémédiablement liées aux métiers artistiques. En acceptant cette vie, je savais que j’y serai confronté. C’est ainsi que je vis et me sens le mieux. Je ne peux pas tout prévoir et tout tracer. Ce qui peut causer déceptions et frustrations. Mais, en même temps, c’est un moteur énorme en ce qui me concerne. Cette crise sanitaire reste anxiogène. Les artistes craignent en effet que les gens boudent les spectacles vivants, s’isolent ou ne partagent plus les choses ensemble. Ce serait évidemment catastrophique et j’espère vivement que les politiques pourront s’en rendre compte.

Tu as la chance de pouvoir exercer ton métier aussi bien en France qu’en Belgique. Sur le plan artistique, quels sont les points de convergences et de différences entre ces deux cultures ?

Je travaille en France pour le cinéma. Il s’agit d’une question à laquelle il est difficile de répondre. Je dirais que tout dépend des équipes. Je ne suis pas convaincu qu’il faille y voir des différences fondamentales. Cependant, il existe un vrai phantasme sur l’image du Belge et la belgitude. Du point de vue musical, je viens seulement de signer chez AEG, un gros booker. J’ai décroché une première date parisienne en avril qui devrait me servir de tremplin pour me produire en festival. C’est une chouette nouvelle. Les Parisiens sont un peu plus angoissés et stressés. Mais évitons de tomber dans les clichés faciles…

S’il y a un artiste belge qui est parvenu à s’exporter, c’est bien Stromae. La carrière d’un artiste passe inévitablement par la communication pour exister.  Il y a quelques jours, il a créé un véritable buzz médiatique en passant un dimanche soir au journal de TF1. Si les uns pointent le talent ce jeune Belge parti de rien, les autres stigmatisent cette prestation dénonçant une certaine connivence entre le monde artistique et journalistique et la perte ou à tout le moins, le manque d’indépendance qui en découle. As-tu vu cette interview ? Quel est ton avis sur le sujet en tant que non seulement jeune chanteur belge, mais aussi citoyen lambda ?

Ah, je n’étais pas au courant (rires). Personnellement, je trouve dommage qu’un tel ramdam se soit produit autour de cette prestation. Finalement, cette polémique cache la chanson, la thématique et l’interprétation.

J’ai vraiment été très impressionné, je dois le dire. Je préfère m’attacher au fond. Je ne suis pas un grand fan du journal télévisé de TF1. Il me parait plus opportun de consacrer dix minutes à un artiste que de voir certains reportages qui, à mon sens, ne sont pas toujours des plus réussis. Objectivement, cette prestation n’a cependant rien de dommageable par rapport à l’information. Cette affaire me dérange parce qu’on perd en substance le fruit de cette chanson. Je peux comprendre que certains s’offusquent parce que tout y était évidemment préparé. Et alors ? Après tout, plein d’autres artistes, comme les acteurs, franchissent les pas des journaux télévisés pour y faire leur promo. Il y a toujours un moment dédié à la culture. Stromae a parlé de son album et il a chanté. Où est le problème ? Au plus, il y a de la culture, au mieux c’est !

Nous allons bientôt te retrouver au cinéma, aux côtés de Pierre Deladonchamps et Camélia Jordana, dans ‘Vous n’aurez pas ma haine’. Une histoire relatant les attentats au Bataclan. Tu as aussi interprété, il y a quelque temps, le rôle de Patrick Dils qui raconte l’histoire et le fiasco judiciaire d’un homme injustement condamné pour le meurtre d’un enfant, puis relaxé. Ce sont des sujets graves, complexes et très délicats. On raconte que pour jouer ce genre de rôle, il faut véritablement s’imprégner de ces histoires. Comment parviens-tu à faire la part des choses et sortir indemne de ces rôles ?

Il faut prendre de la distance. C’est un travail. Tu rentres dans le personnage durant les séquences tournées, mais il faut pouvoir en sortir. A vrai dire, j’ai un peu de mal avec le mythe de l’acteur qui incarne son rôle en dehors du tournage. Justement, le propre de l’acteur est de jouer à l’instantané, juste au moment où on lui demande. C’est la performance qui prime plus que tout. L’interprétation peut effectivement laisser des souvenirs, des émotions. Il y a des rencontres qui sont marquantes. En revanche, le rôle en lui-même n’existe que le temps du tournage dans la journée. Il ne doit pas te hanter. C’est beaucoup plus sain sinon tu deviens fou. Je ne pense pas que l’acteur a pour vocation de devenir fou. Il faut pouvoir se protéger. C’est un métier au cours duquel la fragilité et la sensibilité sont exposées. Et il faut être capable de conserver cette forme de distance.

Plus anecdotique, ton obsession pour les ‘Babybel’ est-elle toujours d’actualité ?

Parfaitement ! D’ailleurs, juste après notre conversation, je vais aller m’en ouvrir un (rires). C’est justement à cette heure que je les mange habituellement. Il s’agit peut-être de ma plus grande emprise…

Y a quand même pire comme vice finalement…

Oui, bien sûr (rires). C’est quand même un peu gras, je dois donc faire attention… (rires)

Nouvel album « It's Happening Now », paru ce 21 janvier 2022


 

Informations supplémentaires

  • Band Name: Mustii
  • Date: 2022-01-11
  • Rating: 7
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