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Le dernier elpee de Steve Wynn, "Northern aggression" remontait à 2010. Son prochain, "Make It Right", paraîtra ce 30 août 2024 et coïncidera avec son nouveau livre de souvenirs ‘I Wouldn't Say It If It Wasn't True’ (Jawbone Press). Lors des sessions, il a…

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L’amour étrange de Coilguns…

Coilguns sortira son nouvel elpee, « Odd Love », ce 22 novembre 2024. En attendant, le combo suisse dévoile un nouveau clip / single, « Generic Skincare », véritable hymne post hardcore et pièce centrale du prochain album qui devrait plaire aux fans de…

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Bernard Dagnies

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vendredi, 19 août 2005 05:00

Pukkelpop 2005 : vendredi 19 août

Tout au long du trajet qui mène à Hasselt, nous avons traversé une multitude d'orages. Plus violents les uns que les autres. A un tel point, qu'on se demandait si le festival n'allait pas connaître une situation semblable à 2003, lorsque les campeurs durent plier armes et bagages, tant il était tombé de précipitations. Le site avait même été transformé en véritable cloaque. En arrivant à Kiewit, on s'est quand même rendu compte qu'il avait plu. Mais dans des proportions raisonnables. Ce qui ne nous empêchait pas de craindre le pire. Car les ondées ont commencé à se manifester. Pour heureusement cesser vers 13 heures. A partir de ce moment, le temps est demeuré menaçant, ne distillant que quelques gouttes voire une averse de brève durée. Finalement, le soleil fera de timides apparitions, préservant ainsi une affiche vraiment exceptionnelle. A croire qu'il existe un microclimat dans cette région, car tout au long de cette journée le reste de la Belgique aura les pieds dans la flotte tant il est tombé des hallebardes. Et connaîtra même des inondations ! Auxquelles nous assisterons sur le chemin du retour, vers 3h30 du matin…

Mauvaise nouvelle, Baby Shambles a déclaré forfait. Une demi surprise, car Doherty continue de filer du mauvais coton. Pas pour rien que les Libertines ont décidé de se passer de ses services. Et même de son talent.

Résultat des courses, le set de The Coral est retardé à 13h05. Tout en avalant un sandwiche, on entend au loin la musique d'un groupe qui ressemble à celle du Clash. Elle vient du club. Au sein duquel se produit Infadels. Une belle occasion pour découvrir cette formation londonienne pratiquement inconnue en Europe. De petite taille, tout de noir vêtu et la boule à zéro, le chanteur harangue la foule d'une voix au timbre fort proche de Joe Stummer. Look années 30 (le chapeau !), le guitariste arpente tout le long de la scène. Et hormis le drummer (NDR : ce serait le fils de Bill Brudford, un personnage qui a notamment milité chez Genesis, King Crimson et Yes) les autres sont aussi agités. En particulier, le claviériste/bidouilleur qui frappe sur une cymbale comme un malade. A la croisée des chemins de Radio 4, de Midnight Runners et de The Rapture, leur cocktail de punk, de funk, de soul, de garage, d'électro et de hip hop devient rapidement épileptique tout en libérant un groove irrésistible. Leur set est, en outre, très précis, ce qui ne gâche rien. Une chose est sûre, ces Infadels devrait facilement fidéliser ( ?!?!?) un public qui aime danser et faire la fête. C'est en tout cas un groupe à suivre…

Décontractés, souriants, les membres de The Coral montent sur la main stage ; mais on a l'impression qu'ils ne sont pas très motivés. L'heure de programmation y est sans doute pour quelque chose ; mais de là à se comporter en touristes… Constituée d'une majorité de chansons issues de leur deuxième album voire du troisième, la première partie de leur show va confirmer ce sentiment de détachement et de quiétude propice à une bonne sieste. Leur mélange de rythm'n blues et de country y contribue largement. Et c'est au moment où on a failli s'endormir que le groupe s'est enfin décidé à en revenir à son style garage/psyché. On aura droit ainsi à « Simon Diamond », « Waiting for the heartaches », Don't think you are the first » (NDR : au cours duquel le claviériste souffle dans un drôle de mélodica), « The operator » (NDR : le clin d'œil à « Astronomy domine » du Floyd circa Barrett), une nouvelle compo au cours de laquelle le guitariste va se servir d'un archet et en finale le décapant « Arabian sand » (NDR : mais si peu pour la circonstance). Et 35 minutes plus tard, la formation liverpuldienne tirait sa révérence…

Bien que né en 1996, Good Charlotte n'a guère évolué. Si sur disque, son post grunge peut encore séduire les très jeunes, sur les planches c'est la guerre ! Surpuissant, le son bombarde les tympans. Aux abris : les marines nettoient une poche de résistance dans un quartier chaud de Bagdad. Et les intégristes ripostent. On ne demande qu'une seule chose : un cessez-le-feu ! Il arrivera 40 minutes plus tard. Une boucherie !

Une puissance du son que Death From Above 1979 parvient à maîtriser à la perfection. Responsable d'un excellent nouvel opus («  You´re a Woman, I´m A Machine »), le duo canadien pratique une forme de drum'n' bass sculptée dans le métal, le punk ou le blues. Sébastien Grainger chante et joue de la batterie pendant que son compère, Jesse Keeler, se réserve la basse (souvent) et les synthés (parfois). Mais en permanence distordue par les pédales, la basse est utilisée comme une six cordes. Maintenant, il faut reconnaître que les festivaliers qui n'avaient pas eu l'occasion d'écouter (NDR : et surtout de réécouter) le double album avant d'assister à leur set, ont dû éprouver de grosses difficultés pour apprécier leur concert.

Les Posies s'étaient officiellement séparés en 1998, mais John Auer et Ken Stringfellow ont décidé de reformer le groupe en engageant une nouvelle section rythmique ; et puis ont enregistré un nouvel album : « Every kind of light ». Avant de repartir en tournée. Ils n'ont plus vingt ans. Le visage émacié, les yeux exorbités, Ken semble subir davantage le poids des ans et des excès en tous genres. Mais musicalement, ils ont toujours la pêche ! La power pop  musclée, électrique, héritée en ligne droite des Byrds et de Big Star est toujours aussi rafraîchissante. Alimentée par les guitares du tandem de base et soulignées par leurs harmonies vocales soignées, limpides, leur set est énergique. Le son puissant, excellent. Tour à tour John et Ken se réservent le lead vocal, interprétant ainsi leurs propres chansons. Pour la plupart issues de leur dernier opus ; même si le combo de Seattle n'oubliera pas d'y inclure quelques classiques comme « Solar sister » ou « Dream all day ». A l'issue de leur prestation la formation s'est quand même offerte un rafraîchissement. En l'occurrence une bonne rasade de whiskey, qu'ils ont bue à la santé du public…

Depuis le temps que la presse française parle des prestations 'live' de The National en termes élogieux, je souhaitais voir ce que cette formation américaine (New-yorkaise d'adoption, elle est originaire de Cincinnati, dans l'Ohio) avait dans le ventre. Pas pour les albums, bien sûr, puisqu'à l'instar du tout dernier (« Alligator »), ils sont tout bonnement remarquables. Surprise, Padma Newsome, violoniste/claviériste et membre semi permanent du combo n'est pas de la partie. Le line up est donc réduit aux frères Dessner (Aaron aux guitares et basse, Bryce à la guitare), aux frangins Devendorf (Scott aux guitares et basse, Bryan – pieds nus ! -à la batterie) ainsi qu'au chanteur Matt Berninger. Il y a bien deux choristes qui participent au premier titre, mais passé cette entrée en matière, on entre véritablement dans le vif du sujet. Sans le concours de Padma, la musique de The National prend une coloration beaucoup plus tonique, plus électrique. Mais une électricité chargée d'émotion très palpable. Qu'accentue d'abord les frères Dessner, capables de jouer de leurs six cordes sans onglet ! Que canalise la section rythmique à la fois solide, souple et efficace. Et que magnifie le baryton profond de Matt. L'intensité des compos, tour à tour intimistes, tragiques, ou impétueuses atteint même son paroxysme lorsqu'il hurle comme un désespéré. A cet instant, on a l'impression qu'il est hanté par l'âme de Ian Curtis. Emouvant ! Pourtant, le quintet peut également évoluer dans un registre plus nonchalant, empreint d'une grande mélancolie. C'est à cet instant qu'on se rend compte du rôle du drummer, dont le jeu très riche et original (NDR : lors d'un morceau, il recouvre les peaux d'étoffe, pour rendre les sonorités sourdes) s'apparente parfois à celui d'un jazzman. Un grand moment du festival ! (NDR : voir également l'interview)

Pour occuper la scène principale à 18 heures, Zornik doit jouir d'une grande popularité en Flandre. Et vu l'accueil que lui a réservé le public, c'est manifeste. Notamment après avoir interprété ses deux singles « Goodbye » et « Believe in me ». Un accueil mérité, même s'il faut avouer que le trio ne sait pas encore trop s'il doit marcher sur les traces de Muse ou de K's Choice. Koen Buyse en est le chanteur/guitariste. Une très belle voix ! Mais, franchement son look (un hybride entre Matthew Bellamy et Brian Molko) prête quand même à sourire. Cause à effet, Phil Vinall (dEUS et Placebo) a produit leur dernier album, un disque masterisé aux studios Abbey Road. Excusez du peu ! Suffirait que le groupe parvienne à trouver sa propre identité, et il pourrait s'exporter assez facilement. C'est tout le mal qu'on lui souhaite.

L'ex drummer de Smashing Pumpkins a donc monté son propre groupe : le Jimmy Chamberlin Complex. Un patronyme très bien choisi. A cause de la complexité de leur musique. On se croirait même revenu à l'époque du jazz rock de Chick Corea, voire du Soft Machine de Mike Ratlege et de Hugh Hopper. Faut dire aussi que Jimmy est avant tout un batteur de jazz ; et qu'il n'est venu au rock que lorsqu'il a rejoint le groupe de Billy Corgan. La prestation des différents instrumentistes a beau être époustouflante de virtuosité, le public a beaucoup de mal à vibrer à l'écoute d'un style musical tombé en désuétude depuis plus de 30 ans…

Stéphane (NDR : notre spécialiste en métal) avait tellement dit du bien de Nightwish, que je me suis décidé à aller jeter un œil au set de ce groupe finnois. Avant qu'il ne monte sur les planches, une bande sonore majestueuse, 'wagnerienne', envahit toute la plaine. Probablement un enregistrement de l'orchestre classique Academy's of St Martin's in the Field, auquel le groupe a fait appel pour l'enregistrement de leur dernier elpee « Once », en 2004 (NDR : pour votre information, sachez que Howard Shore, le compositeur de la bande originale du film « Le Seigneur des anneaux » a également reçu le concours de cet ensemble symphonique). Puis un à un les membres du groupe pénètrent sur le podium en saluant la foule. Il faut cependant attendre quelques minutes pour voir arriver la chanteuse Tarja Turunen. Très belle fille au demeurant ; dont la chevelure de jais retombe sur une longue robe noire recouverte d'un voile jaune. Jaune comme le micro et son pied de microphone. (NDR : qui a parlé de string jaune ?) Elle possède, en outre, une très belle voix. Une voix de sirène, opératique qui domine une musique qui mélange métal, classique, prog et gothique. Dans le style, c'est même bien fichu ; et le public conquis semble apprécier le spectacle. Malheureusement les riffs âcres du guitariste rayent constamment les jolies mélodies et au bout de dix minutes, je préfère m'éclipser…

Le Marquee était plein à craquer pour accueillir la nouvelle coqueluche britannique : The Futureheads. Un quatuor issu de Sunderland responsable d'un premier album surprenant. Un opus éponyme dont les compos évoquent tantôt Gang Of Four, The Jam ou encore XTC. Dans un style déchiré entre post punk, new wave et funk blanc. Le tout raffiné par de superbes harmonies vocales. Car les quatre musiciens chantent en jouant le plus souvent sur la diversité de leurs organes vocaux. Energique, effréné, dévastateur et pourtant hyper mélodique, le set enchante les aficionados mais déconcerte le public peu averti. Les compos défilent à une allure vertigineuse, le combo épinglant la plupart des plages de leur dernier elpee ; et en particulier leur fameuse interprétation a cappella de « Danger of the water » , « Decent days and nights » caractérisé par son riff irrésistible emprunté au « My sharona » de Knack et puis une version absolument mémorable du « Decent days and nights » de Kate Bush, au cours de laquelle le groupe va faire participer le public aux canons à travers une répartition mathématique des 'ooh ooh ooh'. Impressionnant ! Et le deuxième highlight du festival …

Brian Warner cultive la polémique et la provocation. Pourtant, lorsqu'on analyse attentivement ses propos ou ses textes, ils ne sont pas aussi simplistes qu'une certaine presse veut bien nous faire croire. Suffit d'ailleurs d'écouter ses propos dans le film « Bowling at Columbine » pour en être convaincu. Et puis, il ne faut pas oublier qu'il draine une cohorte de fans assez impressionnante. Fallait d'ailleurs voir cette plaine de Kiewit envahie par ces filles et ces garçons qui se maquillent, se coiffent ou s'habillent comme leur idole. Maintenant, il ne faut pas se bercer d'illusions : Brian fait intégralement partie du star system (NDR : pas pour rien qu'il est actionnaire d'une des plus grosses boîtes de crèmes glacées aux States). Aussi, c'est sans le moindre préjugé et avec beaucoup de curiosité que je suis allé voir le spectacle de Marilyn Manson. Une énorme mise en scène accueille la troupe de musiciens dont les maquillages et les vêtements sont plus excentriques et morbides les uns que les autres : des tableaux différents servent de cadre, un écran géant balance des mots issus de ses chansons ; et puis il y a cette potence à laquelle se balance un clavier. Rigolo ! Ce qui l'est moins, c'est qu'on n'entend pratiquement pas le guitariste. Que le son est pourri. La voix de Brian n'est déjà pas terrible, mais elle est régulièrement abrasée par des craquements (NDR : sinistres ?) ; un peu comme lorsqu'on écoute un vieux vinyle rayé. Brian monte sur des échasses. Peut-être pour mieux voir le public, car nous on ne voit rien. En fait, il n'y a pas grand-chose à voir. Et surtout à écouter. Pour nous le spectacle de Grand Guignol se termine à cet instant. N'en déplaise aux aficionados de Marilyn Manson. Un désastre !

Auteur d'une prestation cinq étoiles lors de son passage au Cirque Royal de Bruxelles, dans le cadre des Nuits Botanique, Arcade Fire constituait manifestement une des attractions majeures de la journée. Win Butler, Régine Chassagne, Richard Reed Parry, William Butler, Tim Kingsbury, Sarah Neufeld et Jeremy Gara ont de nouveau reçu le concours du violoniste Owen Pallett (Final Fantasy) pour accomplir cette nouvelle tournée. Hormis Sarah et Owen, qui se consacrent exclusivement à leur archet, tous les autres musiciens changent régulièrement d'instrument. Ce qui confère une coloration très diversifiée à leur solution sonore. Dès les premières notes de l'inévitable « Wake up », on sent déjà un degré d'intensité particulièrement élevé. Win, le leader se tient bien au centre de la scène. Look d'employé de banque (la plupart des hommes de la formation sont vêtus de la sorte), il joue le plus souvent de la guitare. Et assure un des deux lead vocals. D'un timbre qui rappelle David Byrne (Talking Heads). Régine se réserve d'abord les claviers. Puis au fil du set, l'accordéon, le xylophone, l'accordéon et même les drums. Jolie brunette, fluette, une fleur dans les cheveux, elle ressemble à une hawaïenne. Et puis elle dispose d'une voix très fine, aiguë, rappelant tantôt Kate Bush, tantôt Björk. Grand, cheveux bouclés, portant des lunettes, Richard Parry a le visage d'un étudiant de la fac ; c'est aussi un des deux clowns de service. Mais également un musicien talentueux. Il joue de la guitare, des percussions (NDR : il tape sur tout ce qu'il a sous la main, même sur des casques de moto), une contrebasse insolite et des claviers. Will Butler (le frère de Win) est plutôt pince sans rire. Râblé, imprévisible, un peu fêlé, il jette un froid dans le public, lorsqu'en fin de concert, il monte sur les armatures du chapiteau, avec une cymbale et son pied, à plus de 6 mètres de hauteur. Mais il est également excellent musicien. Bassiste, guitariste, il est capable de jouer du xylophone à l'envers. Et puis c'est un percussionniste aussi furieux qu'habile. Tous les musiciens assurent les backing vocaux. Et lorsque les sept voix sont à l'unisson, c'est impressionnant. Surtout lorsque le public les accompagne. Tout au long de leur set, le combo canadien va aligner la plupart des titres de son album « Funeral » : « Tunnels », « Laika », « Power cut », « Haiti », « Rebellion » ainsi que de son Ep. Et lorsque Régine interprète « In the backseat », sans doute en pensant à la disparition récente de ses proches, une larme commence à perler sur son beau visage. Emouvant ! Puis la machine se remet en route. Nonobstant, une multitude de cordes de guitares brisées et quelques petits soucis techniques, l'intensité finit par atteindre son paroxysme. Gorgées de crescendos qui finissent par s'écraser, leurs minis symphonies peuvent adopter des rythmes de new wave dansants, goûter à la simplicité folk ou à la grandeur opératique ; le tout avec une agression cathartique et une tendresse délicate. Et une nouvelle claque ! La troisième de la journée…

Pendant ce temps, le dance hall faisait le plein pour accueillir Goldfrapp. Un bassiste, un drummer et deux choristes/danseuses accompagnent le couple Gregory/Alison. Alliant discrétion et efficacité Will Grégory se charge des synthés, boîtes à rythmes et autres arrangements technologiques. Mais c'est toujours Alison qui focalise tous les regards. Très jolie, de petite taille (NDR : pas plus d'1m60 !), blonde, vêtue d'un tailleur de type Chanel et coiffée d'un superbe chapeau, elle affiche un côté rétro, cabaret, dans l'esprit de Marlène Dietrich. Vocalement, c'est tout à fait différent, puisque son timbre velouté, tendre, sensuel, campe un hybride entre Debbie Harry et Madonna. Leur électro pop avant-gardiste n'empêche en tous cas pas le public de danser. Et vu la qualité du set, il a pu joindre le plaisir des yeux et des oreilles… parfois dans un état de transe…

Je tiens à féliciter les organisateurs du Pukkelpop pour avoir choisi de placer les Pixies en tête d'affiche et non pas M.M. Pourtant, vu la différence de statut accordé par MTV à ces deux groupes, l'inverse aurait pu se produire. Et j'imagine les pressions qui ont dû être exercées pour infléchir leur position. Mais en privilégiant la qualité sur la notoriété, ce festival continue de respecter une ligne de conduite, préserve son image de marque et rend un hommage à un des groupes les plus importants des 20 dernières années. Mais venons-en au show. Les Pixies ont vieilli. Joe Santiago, le guitariste et David Lovering (NDR : affublé de lunettes il ressemble à Walter Meeuws !) n'ont plus un poil sur le caillou. Kim Deal – cigarette au bec, et regard dans les étoiles -  a le look d'une ménagère américaine occupée de préparer une pizza. Il ne lui manque que le tablier ! Finalement, seul Charles Thompson n'a pas top changé. Reformé l'an dernier, le combo s'était produit dans le cadre du festival Werchter. Et on ne peut pas dire que leur prestation fut transcendante. Faut croire qu'à force de tourner, le quatuor a retrouvé ses sensations, car les Pixies ont accordé un des meilleurs sets de leur existence en Belgique. L'osmose entre les musiciens est intacte. La voix de Francis est toujours aussi abrasive et perçante qu'en 1988. Celle de Kim aussi sensuelle. Et sa basse percutante et groovy. Mais la bonne surprise procède de Joe Santiago, dont les six cordes sont aussi tranchantes qu'au début des eighties. Au programme: « Where is my mind », "Here comes your man", « Bone machine », « Monkey gone to heaven », « Vamos », « Debaser », "Caribou », etc. Et puis quelques flips sides de singles. Un seul rappel : « Gigantic ». Pourtant, on sentait Black enclin à poursuivre le set (NDR : dans le passé et en particulier lors de ses expérimentations post Pixies, il pouvait jouer pendant plus de deux heures) ; mais Kim lui a fait comprendre que jouer 1h30, c'était suffisant. N'empêche, on venait de recevoir une claque de plus !

Quelques mots quand même d'Apocalyptica qui jouait au même moment que Maxïmo Park. Constitué exclusivement de violoncellistes, le quintet finlandais semble autant attiré par Richard Wagner que par le métal. Spécialiste, dans le passé, de reprises de Metallica, le groupe s'est enfin décidé à intégrer ses compos personnelles dans son répertoire. Au sein d'un univers scénique glauque, tapissé de crucifix lumineux, le set dégage une énergie incroyable, presque sauvage. Une sensation accentuée par les instrumentistes qui se lèvent chacun leur tour de leur cercueil, sur lequel ils sont adossés… 

Et à une heure du mat, Maxïmo Park faisait irruption au club sous un tonnerre d'applaudissements. Le public est chaud, très chaud ; et dans le premiers rangs, ça pogote ferme. Le groupe de Newcastle aligne les compos de son premier opus dont les inévitables « Graffiti », « Postcard of a painting », et puis les singles « The coast is always changing », « The night I lost my head » ou encore « Apply some pressure. Deux nouveaux morceaux également. Paul Smith, le chanteur, en rajoute une couche, se tord dans tous les sens, et ponctue la plupart des compos d'un jump explosif. Entre chaque titre, il remercie le public et boit une lampée d'eau, reposant la bouteille sur le sol sans baisser la tête, pour ne pas froisser sa chevelure gominée. L'expression qui se lit sur son visage trahit toutes les émotions qu'il essaie de faire passer. Depuis la colère à la peur, en passant par la passion et l'euphorie. Une forme d'art dramatique qu'il veut communiquer au public sur un ton théâtral. Typiquement britannique, la musique opère une sorte de fusion de l'âge d'or des eighties : depuis Wire à Gang Of Four, en passant par XTC, les Smiths et Jam. Dans un style convulsif, parsemé de brisures de rythme ou même de breaks. A gauche de la scène, look à la Graham Coxon (ex Blur), Duncan Lloyd - le guitariste - allie efficacité et sobriété. Tout comme la section rythmique d'ailleurs. Par contre, le claviériste, semble dans un état second. Non seulement, il imite les gestes d'un robot, mais emporté par son délire, il recule imprudemment au fond de la scène, percute un retour de scène, et se retrouve les quatre fers en l'air. Sans trop de mal, heureusement. Une heure plus tard, le quintet se retire. Le public est ravi, mais aussi assommé par la puissance du son. Cinq claques dans la même journée, c'est plutôt rare lors d'un festival…

 

samedi, 17 septembre 2005 03:00

The Big Pop Circus Festival 2005

Associer le cirque et la musique lors d'un festival n'est pas une idée neuve. L'une ou l'autre tentative a même déjà vu le jour. Mais elle n'a jamais récolté le succès escompté. Ce projet ambitieux mérite cependant qu'on s'y attarde ; mais pour le réussir, il faudra une bonne dose de persévérance. Et puis peut-être la participation de l'un ou l'autre groupe local susceptible d'entraîner ses aficionados. C'est en tout cas la conclusion que l'on peut titrer de cette première édition du Big Pop Circus Festival, dont la parfaite organisation méritait davantage que les 4 à 500 personnes qui ont assisté aux concerts de ce samedi 17 septembre (NDR : pour votre information, la journée du dimanche était exclusivement consacrée au cirque) : un superbe chapiteau, une acoustique impeccable, de la petite restauration et des prestations particulièrement convaincantes de tous les groupes à l'affiche ; sans oublier les interventions très remarquées des artistes du cirque Malter ( NDR : un bémol : l'absence de bière blanche !) En outre, la position de Molenbaix (NDR : entre le Mont Saint Aubert et le Mont de l'Enclus) permet à cet événement de briguer le statut de festival transfrontalier en attirant aussi bien le public flamand, wallon que du Nord de la France.

C'est avec plus d'une heure de retard que Willy Willy & The Voodoo Band entame les hostilités. Motif : trop peu de monde (NDR : le public arrivera peu à peu au cours de l'après-midi pour atteindre 400 à 500 âmes vers 20 heures). Et se produire devant une cinquantaine de spectateurs n'est pas forcément excitant. Pourtant, la formation flamande n'a pas failli à sa réputation. Ex Scabs et Arbeid Adelt, Willy Lambregt (NDR : il est également surnommé le Keith Richards du rock belge !) est maintenant soutenu par Pip Vreede (ex Red Zebra, ex Wolfbanes) à la guitare rythmique, Paul Brusseel (ex Mudgang et Revelaires) à la batterie et Marnix Catsyn (ex Soapstone, Revelaires) à la basse. Et leur white trash rock'n'roll implique de plus en plus de compos personnelles. A l'instar de son dernier opus, « Hellzapoppin ». Blues, rock'n roll et boogie constitueront l'essentiel d'un set fort solide, à défaut d'être original.

De La Vega (NDR : nom inspiré du célèbre feuilleton de Walt Disney, Zorro) est issu de Gand. Si le noyau de base implique le guitariste (NDR : sa six cordes est d'un vert étincelant !) JP Debrabander, le bassiste Ben Van De Velde et le drummer (NDR : sur les planches il garde presque constamment le casque sur les oreilles) David Van Belleghem, l'arrivée de la chanteuse Lize Accoe a donné une toute autre dimension à la formation. Elle possède une voix exceptionnelle, sorte d'hybride entre Dani Klein (Vaya Con Dios) et Geike Arnaert (Hooverphonic). Un timbre qui sied parfaitement à leur musique, fruit d'un mélange de dub, rock, soul, funk, (nu) jazz et hip hop. Sur scène le line up est enrichi d'une section de cuivres (deux trompettes et un saxophone), ainsi que d'un percussionniste. Et tout ce petit monde nous plonge dans une atmosphère envoûtante, sorte de trip hop survitaminée. Un set au cours duquel se manifesteront des dompteurs de boas et une très jeune contorsionniste. En fin de parcours, Lize s'aventurera même dans la boule infernale, au sein de laquelle virevoltent deux motards. Impressionnant ! Tout comme le set de De La Vega, d'ailleurs. Avec Absynthe Minded, cette formation constitue probablement deux des plus beaux espoirs du nord de la Belgique.

La naissance de Chilly Pom Pom Pee remonte déjà à 1994. A l'époque, la formation liégeoise se produisait sous la forme d'un quintet. Depuis 2002, suite au départ d'un des guitaristes, elle est donc réduite à la formule du quatuor (NDR : très mathématique tout ça !). Ces fanas de bon vieux rock'n'roll jouent la musique qu'ils aiment sans se prendre la tête et sans détour. Parmi leurs références, on citera les Rolling Stones et les White Stripes. Mais aussi le Clash. Ils rendent d'ailleurs un hommage à Joe Strummer à travers leur chanson « The missing drive ». Leur rock teinté de funk, de reggae et de punk passe en tout cas plutôt bien la rampe sur scène ; même s'il faut avouer qu'il lui manque encore de ce petit quelque chose pour faire la différence. Encore que l'intervention de l'artiste préposée aux cerceaux a donné une dimension assez particulière au show. Costard/cravate, Christophe Loyen se démène comme un beau diable, pendant que Didier Masson et Pierre Lorphèvre, respectivement guitariste et bassiste, triturent leur râpe avec fièvre et passion. Parfois, Chritophe sort un harmonica de sa poche pour insuffler un zeste de blues dans les compos. Apparemment friand de covers, CPPP nous réservera une superbe interprétation du « Debaser » des Pixies et puis en rappel leur cover incontournable du « My generation » des Who.

C'est sous la forme d'un quatuor que Mud Flow monte sur les planches. Un guitariste supplémentaire est donc venu rejoindre le line up du combo depuis le début de l'année. Enfin, du moins pour les prestations live. Auteur d'un remarquable quatrième opus, début de l'année dernière (« A life on standby »), la formation a acquis une maturité scénique étonnante. Sans oublier d'y ajouter un sens de l'esthétisme particulièrement raffiné. Le tout tapissé de projections assurées par le frère de Vincent. Tout au long de leur set, l'émotion et la sensibilité des mélodies sont très palpables. Entrecoupée de passages tendres, intimistes, l'électricité coule à flots comme à la plus belle période de la noisy (NDR : pensez à Ride !). Et la voix bien timbrée de Vincent accentue cette impression de mélancolie tour à tour douce ou  furieuse. Derrière le backing group assure. Charly Decroix aux drums d'abord (NDR : probablement un des meilleurs de sa génération ! Pas pour rien qu'il a remplacé au pied levé celui de Girls In Hawaii, l'an dernier). Et puis Blazz, dont les accès de basse mélodique font merveille dans ce contexte sonore. « The sense of 'me' », « Tribal dance », « Five against six »  et bien sûr le single « Today » constituent les points d'orgue du set. Mais Vincent (NDR : manquerait-il de charisme ?) trouve le public un peu trop amorphe à son goût, abandonne sa guitare et rejoint la foule pour tenter de la réveiller. C'est à cet instant qu'elle se rend alors seulement compte de la qualité du show. Et pour clore le spectacle, le crescendo de « New Eve » nous entraîne progressivement dans un tourbillon dantesque, digne du meilleur Mogwai… Epatant !

Jérôme Mardaga monte sur scène. A sa gauche, son bassiste Sacha Symons prend place sur un siège. A sa droite, Thomas Jungblut - un personnage atypique et plutôt de petite taille – se réserve les drums, installés de profil par rapport au public. C'est son éternel petit groupe de merde. Derrière le trio on aperçoit des machines, un clavier et autres gadgets électroniques. Jérôme est armé d'une guitare électrique. Et il ne s'en séparera que trop rarement. Son set est puissant. Il interprète ses inévitables « Tous les gens que j'aime vont mourir un jour », « Ma femme me trompe », « Moi je voudrais », « J'ai peur des Américains », et autres extraits de ses deux albums (« Un monde sans moi » et « 12h33 ») en ponctuant ses compos d'interventions pince-sans-rire dont il est coutumier (NDR : Avant d'attaquer « Je voudrais », il compare même les Diables Rouges actuels à des tapettes, plus soucieux de leur voiture de sport que de l'honneur de leur nation, sous les vivats du public). Bref, il sait mettre de l'ambiance. Malheureusement, il faut attendre trois bons quarts d'heure avant de changer de registre. Il chante alors en solo « J'ai les mains qui tremblent », dans un style qui peut rappeler Jean-Louis Aubert. Emouvant ! La présentation de ses musiciens et de son staff technique est originale. A travers un conte moderne, il les propose à feu Jimi Hendrix. Mais ce soir, Jérôme a bouffé du métal et n'est avare ni d'énergie, ni d'électricité. En fin de parcours, alors que les motos recommencent à vrombir dans la boule infernale, il s'écrie : 'On aime Motorhead' ! Au bout du compte, j'aurais davantage apprécié que Jéronimo nous propose un set plus nuancé. En incluant un zeste d'acoustique, par exemple. Attention, le show était très bien ficelé, très efficace même, mais d'une efficacité monocorde.

En final, Pillow s'est acquitté de sa prestation avec énormément d'application. On sent que l'expérience de la scène les rend plus sûrs d'eux, même si inévitablement la prestation de Guillaume, le guitariste soliste, se détache du lot. Il est cependant regrettable que le batteur continue de drummer dans un registre aussi indolent, alors que le post rock de Pillow mériterait davantage d'explosivité percussive

 

vendredi, 09 juillet 2004 03:00

Cactus 2004 : vendredi 9 juillet

Le festival Cactus en est déjà à sa 23ème édition. Et il se déroule dans un cadre de verdure tout à fait remarquable : le Minnewaterpark de Bruges. L'équipe de Musiczine y était présente. Johan les deux premiers jours (voir reviews sur le site ne néerlandais), Bernard le vendredi et Grégory le samedi. Non seulement le cadre est remarquable, mais le personnel qui y travaille est aussi accueillant que sympathique. Une seule ombre au tableau : la pluie ! Surtout le vendredi. Deux averses qui n'ont pourtant pas refroidi un public multi générationnel particulièrement enthousiaste.

Vendredi 9 juillet

Auteur d'un superbe deuxième album (« Det er mig der holder traeerne sammen », chroniqué en ces pages), Under Byen (NDR : voir également interview) était invité à ouvrir la manifestation. Pas une mince affaire, puisque la première drache s'est abattue juste avant que la formation danoise ne monte sur les planches. J'avais eu l'occasion d'assister à une petite demi-heure du set, lors de leur passage au Grand Mix de Tourcoing en mai dernier. Et nonobstant des problèmes de balance liés à un test checking opéré dans la précipitation (!!!!), j'avais ressenti chez eux la flamme d'un futur super groupe. Toutes les conditions étaient donc réunies pour montrer ce qu'ils avaient dans le ventre. Et franchement on n'a pas été déçus. Les musiciens sont bien en place. La section rythmique et le pianiste/claviériste posent la trame. La violoncelliste y brode des accents graves. Le violoniste des accents aigus. Et leur trip hop tour à tour atmosphérique, symphonique ou cinématique peut atteindre une intensité phénoménale. Surtout lorsque ce violoniste joue de la scie. Avec un archet. A cet instant, il flirte avec le psychédélisme 'hendrixien'. Sans la moindre guitare. Une sensation accentuée par la performance du percussionniste. Effacé au début, il devient impressionnant au cours du concert, apportant même une impulsion 'wagnerienne' à l'expression sonore. A charge d'Henriette de canaliser les émotions. De sa voix éthérée, sensuelle, 'bjorkienne', tour à tour intimiste ou impétueuse. La formation en profite pour épingler l'un ou l'autre titre de son nouvel opus (NDR : dont la sortie est prévue pour la fin de l'année), et puis se retire après 50 bonnes minutes, le devoir accompli… alors que les premières gouttes de pluie recommencent à tomber…

Déjà que la musique de Macy Gray ne me botte pas trop, mais comme au cours des vingt premières minutes de son set, il tombait des hallebardes, j'ai préféré rester à l'abri. Mais que d'eau ! Ah oui, le concert ! Macy possède une superbe voix. Un hybride un peu écorché entre Lisa Kekaula (Bellrays) et Tina Turner. Beaucoup de présence sur scène, des musiciens balèzes, quatre filles dont deux claviéristes et deux choristes. Mais le mélange de soul, de pop, de r&b, de hip hop, de funk et de jazz, que la formation pratique, m'est assez insupportable. Désolé, mais j'ai pris davantage de plaisir en avalant un excellent sandwiche et une (NDR : peut-être deux, ou même trois) blanches de Bruges. Après tout ce qui venait de verser, je n'allais quand même pas me mettre à l'eau.

A 57 balais, Patti Smith n'a jamais été aussi en forme. Pour preuve, son dernier album « Trampin' », dont la critique est unanimement élogieuse (NDR : voir également en ces pages). Et puis à cause de la prestation qu'elle a accordée ce vendredi soir. Un set qu'elle entame par le titre maître de son dernier opus. Au piano. Et sa voix est déjà impressionnante de précision et d'émotion. Puis la machine se met en marche. Faut dire que derrière elle, le backing group assume. Un backing group au sein duquel on retrouve les fidèles Jay Dee Daugherty (aux drums) et Lenny Kaye (à la guitare). Un line up complété par un bassiste et un claviériste qui se mue épisodiquement en guitariste. Et lorsque Patti empoigne également une six cordes, on se croirait alors en plein trip crazyhorsien, ryhtme tribal à l'appui. Faut dire que l'essentiel de sa prestation va libérer une intensité électrique phénoménale (NDR : il ne manquait plus que Neil Young pour faire une jam !). Une bonne partie du répertoire de son dernier elpee est interprété, avec pour point d'orgue un « Ghandi » proche de l'envoûtement. C'est d'ailleurs une longue ovation qui va ponctuer l'interprétation époustouflante de ce qui risque de devenir un nouveau classique. Classiques qui n'ont d'ailleurs pas été oubliés. Et notamment « Horses », « Dancing barefoot », « Because the night », sans oublier l'hymnique « People have the power ». Patti en profite alors pour faire passer ses messages de paix et de solidarité dans le monde, en particulier pour les enfants. Elle n'a pas changé ! Sur scène elle se démène, dialogue avec la foule ou la harangue comme une prêtresse. Parfois elle avale une lampée d'eau, qu'elle recrache sur les premiers rangs du public (NDR : je l'avais dit, faut pas boire de l'eau quand il a plu ; elle aurait dû commander une blanche de Bruges…) Et en rappel, nous accorde un « Gloria » dévastateur, avant de se retirer. Une claque !

 

 

 

Dans le cadre du "Music In Mind", un festival qui s'inscrit dans la lignée des Nuits du Bota, De Nachten ou accessoirement du Domino, Mercury Rev clôturait l'édition 2004 au Concertgebouw de Bruges. Une salle dans laquelle je n'avais jamais mis les pieds. Mais quelle salle ! Un véritable forum à l'architecture moderne qui en dit long sur la santé financière de la Venise du Nord. Davantage destinée aux concerts de musique symphonique que de spectacles rock, elle a l'avantage (ou le désavantage) de ne disposer que de places assises. Maintenant, il est vrai qu'à l'écoute des derniers albums de la formation américaine, le choix était sans doute plus judicieux qu'on ne pouvait l'imaginer.

Grand Drive en assurait le supporting act. Un trio britannique emmené par les frère Wilson, qui puise essentiellement ses influences de l'autre côté de l'Atlantique. Depuis Simon & Gardfunkel aux Walkabouts en passant par South San Gabriel. Encore que le timbre de la voix du lead singer me rappelle celui de John Power des La's. Les La's, une formation qui a aussi certainement dû influer sur ce band. Tout comme les Turin Brakes. Mais trêve de références, sans quoi, on risque de ne plus s'y retrouver. Semi-acoustiques, leurs compostions sont caractérisées par un soin tout particulier apporté aux harmonies vocales. Paisible mais agréable, leur set manque cependant de relief ; et il faudra attendre leur dernière chanson, une remarquable adaptation du « No One Knows » des Queens of The Stone Age, pour voir enfin l'ambiance monter d'un cran. Avant que le groupe ne se retire sur la pointe des pieds…

Mercury Rev monte sur les planches. Jonathan Donahue s'excuse déjà pour les éventuelles imperfections qui pourraient survenir lors de leur set. Car ils ne sont qu'au début de leur tournée. Il n'y en aura pas. Le sourire malicieux, se frottant régulièrement les mains, il scrute le public de son regard envoûtant. Il empoigne son pied de micro torsadé d'un serpent factice, puis entame « Little rhymes ». Son backing groupe est plus qu'au point. A gauche, la section rythmique impressionne par son efficacité et son inventivité. Le drummer se mue épisodiquement en percussionniste, alors que le préposé aux quatre cordes (NDR : quel look !) se comporte parfois comme s'il était le soliste. A droite, Grasshopper martyrise sa gratte, lorsqu'il ne lui extorque pas des gémissements astraux. Certains diraient psychédéliques. Derrière, Jeff se balance derrière son clavier comme si la fluidité de ses notes le faisait chavirer. Les compositions s'enchaînent naturellement. Pour la plupart issues des albums « Deserter's song » et « All is dream » elles nous entraînent dans un monde imaginaire peuplés d'anges, de démons, de dragons et même d'araignées et de mouches (« Spiders and flies »), un moment au cours duquel, on a presque pensé que Jonathan allait s'envoler… Faut dire que son expression théâtrale a quelque chose de magique, de fascinant, d'extra-terrestre. Tel un chef d'orchestre, il dirige l'ensemble de la voix. Une voix claire, envoûtante, fragile, qu'il est impossible d'effacer de sa mémoire. Parfois, il s'assied derrière un clavier, sur lequel est posé une lampe qui change de luminosité, à une cadence de métronome (NDR : toutes les trente secondes !), pour y jouer de la guitare sèche. Une nouvelle composition a été insérée dans le track list et nous donne un avant-goût de ce que sera le « The secret migration », le prochain opus. Au beau milieu du set, Mercury Rev s'enfonce dans deux longues compos complexes, nous rappelant qu'à l'origine la formation pratiquait une musique très expérimentale. Et paradoxalement, ce seront les rares moments au cours desquels on retombera quelque peu sur terre. Ah oui, et lorsqu'il évoquera les moments difficiles inhérents à la réélection de Bush. Après une longue ovation,  le groupe revient jouer deux derniers titres : « Goddess on a highway » et un magistral « The dark is rising », reflet de la beauté pure du romantisme. Un grand moment ! Le charme de Mercury Rev avait encore opéré ; à un tel point, qu'on avait l'impression que le temps de ce spectacle, la terre s'était arrêtée de tourner…

 

Ayant déclaré forfait à la dernière minute, les Black Keys ont été remplacés par les Domestics, une formation issue de la région lilloise qui jouit d'une certaine réputation sur la scène locale. Un emploi du temps trop chargé ne m'a pas permis d'assister à leur set. Mais d'après les échos recueillis, ils se sont plutôt bien débrouillés. A voir ou à revoir donc…

Les Bellrays s'étaient produits à l'Aéronef en février dernier. Une prestation dévastatrice qui m'avait agréablement surpris. Depuis le quatuor californien a changé de drummer et commis un nouvel album (« Grand Fury »). Mais en prenant soin de ne rien changer à sa musique. On y retrouve toujours l'urgence et la fulgurance de leur soul punk. Un cocktail aussi étonnant que détonnant, fruit d'un croisement hypothétique entre MC5 et Tina Turner. Parce que les Bellrays possèdent une chanteuse noire au timbre vocal exceptionnel : Lisa Kekaula. Un timbre qui évoque tour à tour Janis Joplin, Aretha Franklin et bien sûr Annie Mae Bullock. Elle est un peu plus enveloppée, mais son jeu de scène est aussi sauvage, félin, sensuel et instinctif. Derrière le trio de blancs déverse sa lave de rock'n'roll basique, lorsqu'il ne manifeste pas des accès de blues tribal, venimeux. Lisa en profite alors pour agiter son tambourin, un peu comme si elle voulait reproduire le sifflement du serpent à sonnettes… 

Pour accomplir leur tournée, les Raveonettes ont engagé un second guitariste et un drummer. Si le premier s'est beaucoup déhanché tout au long du set, le second a surtout brillé par son efficacité. Pas seulement parce qu'il conserve constamment un casque sur les oreilles. Mais parce que son drumming robotique (NDR : et son look kraftwerkien !), irréprochable, correspond parfaitement au style pratiqué par le duo danois. Un style fondamentalement noisy, hypnotique (NDR : les mauvaises langues diront répétitif), glacé (NDR : …glacial), monocorde (NDR : … monotone), ténébreux (NDR : … nébuleux) qui doit autant à Jesus & Mary Chain que My Bloody Valentine. A cause de cette électricité constamment distordue, trempée dans le feedback, angulaire. Puis de ces harmonies vocales atonales, échangées entre Sune Rose Wagner et Sharin Foo. Enfin de ce fil mélodique attaché viscéralement au si bémol. Parce que l'attitude est totalement différente, visiblement inspirée de films de série B tournés au cours des fifties et des sixties… Enfin, c'est le message que les Raveonettes essaient de faire passer. Et la reprise du « C'mon everybody » d'Eddie Cochran en est la plus belle démonstration. Mais l'attention du public (NDR : masculin, bien sûr !) est surtout focalisée sur Foo. Elle est très belle. Comme on colle aux affiches ! Aussi belle que Debbie Harry aux débuts de Blondie. C'est peu dire. Bon et le concert alors ? Ben, je confesse avoir partagé une même polarisation que le public… masculin, bien sûr !…

Il appartenait à Hot Hot Heat de clôturer le festival des Inrocks, édition 2003. Un quatuor canadien. De Victoria, très exactement. Un groupe qui a commis son premier album cette année (« Make up the breakdown »), mais dont le succès procède essentiellement de son hit single : « Bandages ». Et la formation a eu le bon goût de ne l'interpréter qu'en fin de concert. Histoire de démontrer que son répertoire ne se limite pas à un single. Steve Bays, le frontman, est un personnage assez pittoresque. Très mince et pourtant à l'étroit dans ses jeans trop serrés, la chevelure abondante et bouclée, il se réserve à la fois le chant et les claviers. Le plus souvent il en joue de la main droite en tenant son micro de la gauche. Parfois il se balance au-dessus de son instrument, lorsqu'il ne se cache pas derrière. Mais lorsqu'il n'en joue pas, il arpente la scène de long en large en haranguant le public, pour l'inviter à danser. Ou à frapper des mains Parfois aussi, tous ses membres tremblent, un peu comme le Prince du début des eighties. Et en chantant ou plus exactement en opérant ses arabesques vocales, il lui arrive de tirer la langue. Un peu comme dans les marionnettes du Muppets Show. Pendant ce temps, les trois autres musiciens assurent leur rôle. Très sobrement, mais surtout très efficacement. Dans un style new wave/power pop contagieux, convulsif réminiscent d'XTC, même si parfois les mélodies ne sont pas sans rappeler Dexy's Midnight Runners. Alternant morceaux issus du dernier opus et de leur précédent EP, Hot Hot Heat accordera même un rappel, au plus grand bonheur du public définitivement conquis par leur prestation.    

dimanche, 22 décembre 2002 04:00

D Hiver Rock 2002 : dimanche 22 décembre

50 personnes pour assister au set d'Au Coin de La Rue, c'était quand même un peu vide. Les absents ont eu tort. Le trio franco-belge (deux Français et un Belge) expérimente une formule de rock/théâtre très au point, mais qui laisse paradoxalement une large place à l'improvisation. Beaucoup d'humour. De métier, aussi. Pas pour rien qu'il parvient à déplacer la plupart des spectateurs de leur siège vers le devant la scène. Pour s'y asseoir sur le plancher des vaches. Trois excellents vocalistes très complémentaires. Dont les harmonies vocales évoquent tantôt les Frères Jacques, tantôt les Négresses Vertes. Trois instrumentistes (un contrebassiste, un guitariste et un clarinettiste/accordéoniste) qui ne craignent pas de tutoyer tous les styles musicaux. C'est vrai qu'il y a un petit côté hybride dans la musique du combo. Une rencontre entre toutes les cultures qui peuplent l'Hexagone. Avec un sens de la fête, de la répartie, et du spectacle auquel le public est invité à participer (NDR : et participe). Franchement, les absents ont eu tort. Car leur spectacle m'a permis de passer un bon moment. Ce n'est pas non plus à négliger !

 

samedi, 21 décembre 2002 04:00

D Hiver Rock 2002 : samedi 21 décembre

450 personnes le vendredi pour les concerts de Raspoutitsa de Mud Flow et de Yel. On peut affirmer qu'il s'agissait d'un succès. Raspoutitsa ? C'est le groupe né des cendres de Larsen Lupin. Une formation tournaisienne qui a troqué le grunge contre du prog rock. Et je dois avouer que nonobstant le côté un peu revivaliste de leur musique, elle est plutôt bien jouée. Les musiciens sont irréprochables, excellents même, et se complètent comme des vieux briscards. Les ombres d'un Ange et de l'Archange (NDR : Gabriel ?) se mettent même à planer. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes s'il n'y avait la voix de Mathieu. Elle ne colle décidément pas à la musique. Et pourtant, elle est capable de changer d'octave. Ah oui, et les textes. A ses débuts le King Crimson avait eu recours à un parolier. Ne rigolez pas, dans le style, si le groupe parvient à progresser, il va devenir le chouchou de Marc Isaye. Et à l'issue de leur prestation, je n'étais pas le seul à partager ce point de vue…

Mud Flow ? Je ne connaissais que leur premier album. Très pop. Très clean. Très mélodique. Très radio. Quelle n'a pas été ma surprise d'assister à un set ravageur et sauvage, sans pour autant que le groupe ne néglige l'aspect mélodique des compositions. Le quatuor bruxellois nous en a mis plein la vue. Pas étonnant qu'il multiplie les clins d'œil à Placebo à Hüsker Dü, dEus, House of Love et aux Scabs. Et les oreilles, bien évidemment. Son chanteur possède le charisme d'un véritable showman. Le band possède le format international, c'est une évidence.  Et franchement, s'il passe près de chez vous, ne le manquez sous aucun prétexte…

Yel est une valeur sûre du rock belge et francophone, en particulier. Normal, puisque les chansons sont interprétées dans la langue de Molière. Partout où le combo se produit il fait l'unanimité. Il ne lui manque pas grand-chose pour monter d'une division. Sur scène, son style se révèle quand même moins britpop. Enfin, c'est ce que la presse avait décrétée à l'issue de l'écoute de son premier opus (NDR : désolé je suis dans l'incapacité d'apporter mon grain de sel, puisque la promo n'est pas arrivée jusque Musiczine…). Moins britpop et plus passionnel. Dans l'esprit de Noir Désir et d'Aston Villa. Les deux ensemble. Le groupe permet aussi à Claudia, la chanteuse de Starving, de partager l'interprétation d'une compo. Avec beaucoup de bonheur, il faut le reconnaître. En final, Yel montre qu'il est aussi capable de tâter du psychédélisme. Et puis en rappel, il a le bon goût de se libérer sous une forme de punk branché sur un numéro de Téléphone piqué chez lez Pixies.

 

vendredi, 20 décembre 2002 04:00

D Hiver Rock 2002 : vendredi 20 décembre

Dyonisos ayant déclaré forfait, la Maison de la Culture de Tournai avait donc décidé de monter un mini festival regroupant 6 groupes en trois jours. C'est à dire Major Deluxe et Morning Star le jeudi 20 décembre, Raspoutistsa, Mud Flow et Yel le vendredi, et enfin Au Coin de La Rue le samedi. Et il faut reconnaître qu'hormis le samedi, le public a répondu présent.

Major Deluxe et Morning Star à la même affiche se comprenait aisément, puisque les deux formations tournent, depuis quelque temps, ensemble. Et que la plupart des musiciens de Major Deluxe servent de backing group à Morning Star. Enfin pour la tournée. Drivé par le chanteur/compositeur/guitariste tournaisien Sébastien Carbonelle, Major Deluxe aligne la bagatelle de 8 musiciens. Sur scène. Dont un trompettiste et une violoniste. Un line up renforcé épisodiquement par une fanfare de quatre cuivres. Le concept est original. Ce n'est pas tout à fait de l'easy listening. Ni tout à fait de la prog pompée dans la Canterbury School (NDR : pensez à Caravan). Et pas davantage du néo prop pop à la sauce Beta Band. Peut-être un peu des trois ! Le seul hic, c'est que l'osmose entre les différents musiciens ne se produit que trop rarement. Bref, la mayonnaise sonore ne prend pas. Elle reste à l'état d'ébauche. Manque de répétition ? Probable ! C'est une certitude dans le chef de la fanfare, qui n'a jamais si bien porté son nom. Et puis, je pense que pour optimaliser ce concept, il aurait fallu un ingénieur du son balaise. Ou alors deux ou trois complémentaires. 29 curseurs ouverts, faut pas non plus demander l'impossible ! Par contre, je suis convaincu qu'en studio, le groupe aura davantage le temps et la patience de tout bien mettre en place. C'est tout le mal que je leur souhaite…

Auteur d'un premier elpee plutôt bien ficelé (« In place in the dust »), Morning Star peut compter en la personne de Jesse D Vernon, sur un chanteur/compositeur particulièrement talentueux. Un gars de Bristol qui a des planches (NDR : au propre comme au figuré !). Avant de fonder Morning Star, il avait sévi au sein des Moonflowers. Pour la circonstance, son orchestre réunit la plupart des musiciens de Major Deluxe, dont Sébastien à la seconde guitare, une clarinettiste, la bassiste de Mellon Gallia… et parfois aussi la mini fanfare ( ?!?!?!). Objectif : frotter, mixer, confronter les genres, les styles, tisser minutieusement des lignes mélodiques, avant de les laisser s'effilocher au gré de l'inspiration, en prenant bien soin d'en capturer les moments les plus intenses… Malheureusement, si Jesse tire facilement son épingle de jeu, les moments d'intensité sont beaucoup trop rares pour véritablement envoûter. Encore une fois, le manque de communion entre les musiciens y est pour quelque chose…

 

dimanche, 11 novembre 2018 17:23

Le futur leur appartient?

Pour assister à la première apparition de The Jai Alai Savant en Belgique, l'AB Club n'avait rallié qu'une bonne cinquantaine de personnes. Faut dire qu'au même moment, les Nuits Botanique accueillaient, entre autres, Miossec, Oxmo Puccino, Cold War Kids et consorts. N'empêche, les absents ont eu tort, et vous comprendrez aisément pourquoi en lisant ces quelques lignes. Pour nous faire patienter jusque 21 heures, la projection d'un film consacré à une prestation `live' frénétique de Bad Brains avait été programmée. A voir ! Mais pour la qualité sonore, faudra repasser?

The Jai Alai Savant monte sur les planches. Ralph Darden en tête. Un musicien de couleur noire habillé dans un élégant costard blanc. La barbe en broussaille, des lunettes foncées et les cheveux en pétard, ce chanteur/ guitariste impose par sa stature. Mais aussi par son charisme. Très habile à la six cordes, il n'hésite pas à se servir d'un éventail assez conséquent de pédales de distorsion. En outre, il possède une belle voix dont le timbre campe un hybride entre Sting et Perry Farrell. A la basse, Nash Snyder, longiligne, la tête rasée apporte ses lignes complexes, palpitantes ou dub, appuyant de temps à autre le `lead' de backing vocaux, pendant que Michael Bravine, aux drums, joue dans tous les registres possibles et imaginables en manifestant une souplesse et une dextérité impressionnantes. Et finalement, ces instrumentistes hors norme pratiquent un reggae/funk/roots/dub/psyché/pop (parfois légèrement teinté de ska) terriblement excitant. Parfois aride, souvent bourré de groove, n'hésitant pas à adresser l'un ou l'autre clin d'?il aux Jackson 5 (« Scarlett Johansson why don't you love me ») ou aux Stones, même si on se rend bien compte que les références majeures de la formation répondent aux noms de Clash, The Police, Fugazi, Jane's Addiction et King Tubby. Si bien qu'après deux ou trois morceaux, certains spectateurs se mettent à remuer les pieds, la tête, les jambes ou même à danser. Faut dire que Ralph n'est pas à un déhanchement prêt sur scène. Et il invite même le maigre public à taper dans les mains tout au long de la version allongée d' « Akebono », moment le plus maquant du set, au cours duquel plus personne ne tenait en place dans la salle. Le groupe a même accordé un rappel, moment choisi par Ralph pour enlever sa veste. Bref, The Jai Alai Savant risque fort, à moyen terme, de devenir `hénaurme'. Vous pensez à Werchter ? Sur la scène principale ? Oui, d'ici deux ou trois ans. Et l'assistance présente lors de ce set se souviendra alors d'un vendredi de mai 2005, au cours duquel un futur super groupe se produisait devant 50 spectateurs? On en reparlera?

dimanche, 11 novembre 2018 17:08

Bloc Party, le critique pense?

Suite aux articles dithyrambiques consacrés aux prestations ‘live’ de Bloc Party (ils ont été plébiscités lors du Printemps de Bourges!), je m’attendais à prendre une claque ce soir. Tout était d’ailleurs réuni pour cette consécration : salle bondée (sold out !), service d’ordre sympa, discret et efficace, public enthousiaste, light show impressionnant et groupe plutôt décontracté. Devient-on trop difficile au fil du temps ? L’oreille critique constitue-t-elle une arme à double tranchant ? L’humeur du moment joue-t-elle un rôle prépondérant dans l’appréciation d’un concert ? L’espoir d’assister à un moment unique modifie-t-il la perception des événements ? Des tas de questions du style m’ont traversé l’esprit à l’issue de leur set ; car franchement, je ne l’ai pas trouvé aussi exceptionnel que prédit. Un show de bonne facture, sans plus. Ce qui n’est déjà pas trop mal. Et puis le public était ravi. N’est-ce pas cela l’essentiel ?

Il revenait à Biffy Clyro, d’assurer le supporting act. Un trio écossais au sein duquel militent les jumeaux Johnston à la section rythmique. Lors du premier titre, on a l’impression que le guitariste et le bassiste jouent dos au public, en tenant leur instrument contre l’échine. En fait, leurs visages sont simplement cachés par leur longue chevelure. Les trois membres du groupe chantent. Parfois en solo, parfois en chœur. Simon Neil, à la six cordes, possède un timbre rappelant Kurt Cobain. Les frangins, empruntent un falsetto dans la lignée de Bob Mould. Et il faut reconnaître que les harmonies vocales sont plutôt soignées. Malheureusement, si leur musique rappelle tantôt Fugazi, tantôt Hüsker Dü, elle est un peu trop brouillonne à mon goût. Seuls les passages plus calmes passent plutôt bien la rampe. Si bien qu’au bout de quelques minutes, cette bouillie sonore finit par agacer.

Dès que Bloc Party monte sur les planches, on est impressionné par les jeux de lumières. Il nous en met plein la vue, en quelque sorte. Des figures géométriques lumineuses (elles changeront de couleur toute la soirée) sont fixées sur 7 énormes pilasses, en oblique, de manière à créer un ensemble à la fois homogène et orientaliste. Ces rectangles allongés sont soutenus par des lasers qui changent également de teinte en fonction des morceaux. Très souriant, Kele Okereke mène la danse. De sa voix haut-perchée, si particulière, il entretient la mélodie tout en triturant sa stratocaster. Installé sur un socle surélevé, en retrait de la scène, Matt Tong paraît jeune. Très jeune. Un sosie d’Harry Potter… Mais, de ses rythmes métronomiques, il assume comme un grand. Gordon Moakes est son complément idéal à la basse. Et puis, il assure les backing vocaux. Le plus souvent par le biais des contre-mélodies. Se consacrant même épisodiquement au xylophone. Enfin, le soliste, Richard Lissack semble avoir pour maître The Edge. Ses riffs tour à tour nerveux, épileptiques, voire bringuebalants, en sont la plus parfaite démonstration. Et puis il y a pire comme choix. Musicalement, les influences cold wave et post punk sont manifestes. Puisées notamment chez Cure et Joy Division. Parfois également chez House Of Love (là ce n’est plus de la new wave). Sans oublier les traces de funk blanc. Pensez à XTC et Gang of Four. En affichant de telles références, le résultat ne peut qu’être intéressant. Mais le problème procède plus probablement du climat que Bloc Party ne parvient pas à entretenir. Dans la musique de la fin des seventies et du début des eighties, c’était en quelque sorte le fil conducteur. Lors du set de ce quatuor londonien, on a davantage eu la sensation d’encaisser une succession de tubes. Après une bonne  heure, le groupe se retire sous les inévitables acclamations.

Et revient pour un rappel –rituel- interpréter quatre autres titres, au cours duquel Kele va descendre dans le public à la manière de Bono. Et la foule apprécie ce type de geste. Bloc Party, on est resté avec nos doutes, nos interrogations, et surtout nos craintes : celles de voir un groupe passer au statut de star, alors qu’il n’en est encore qu’à son deuxième album (« A week en  in the city », est paru début de cette année), sans encore être parvenu à se forger sa propre identité. Et c’est souvent ainsi que de grandes promesses s’évanouissent dans la plus grande indifférence… L’exercice d’un troisième album devrait nous en apprendre davantage.

Setlist

Song For Clay - Wainting For The 7.18 - Positive Tension - I Still Remeber - Hunting For Witches - Banquet - Where Is Home - This Modern Love - Uniform - Like Eating Glass- So Here We Are - The Prayer

Rappel

She's Hearing Voices - Srxt - Pioneers - Helicopter

Organisation Agauchedelalune