Les visions shoegaze de Pills For Tomorrow…

Pills For Tomorrow est un groupe d’indie pop aux accents shoegaze et psychédéliques, originaire de Grenoble. Un univers musical qui sert d’alternative aux analgésiques. Une invitation au mystique et aux expériences transcendantales. Fondée en 2021, la…

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Doodseskader baigne dans son sang…

Doodseskader (Trad du néerlandais : escadron de la mort) est né de la rencontre entre les esprits de Tim De Gieter (Amenra, Much Luv Studio) et de Sigfried Burroughs (Kapitan Korsakov, Paard). Tout au long de ses trois années d'existence, Doodseskader a…

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A.S. Dragon

La fureur du dragon

On les croyait voués à battre le fer kitsch rock de la tribu Tricatel, les voilà devenus un vrai groupe, avec une chanteuse, Natasha, et un album, " Spanked ". AS Dragon pourrait même être la meilleure chose qui soit arrivée au rock français depuis bien longtemps. Nous les avons rencontrés en plein milieu d'une tournée qui confirme, après celles des plages, de Burgalat et de Chamfort, leur excellence scénique. Où tout fût question d'attitude, de confiance et de persévérance.

Racontez-nous la genèse de cet album.

Hervé Bouétard (batterie) : On a rencontré Natasha en janvier 2002. Peu de temps après, on s'est mis à composer, en essayant les nouveaux morceaux en concert avec Bertrand Burgalat… Ca nous a permis de les roder, puis après on les a terminés à l'arrache au studio. Ca s'est fait très rapidement : cet album, c'est un peu une photographie de ce qu'on incarnait il y a un an. Certaines sont issues de jams, d'autres ont été apportées individuellement puis arrangées par le groupe ou bien composées ensemble… En fait notre méthode de travail est multiple. On essaie toutes les pistes possibles. C'est un vrai travail de coopération : il n'y a pas de leader. On est tous à même de composer, même si on n'est pas des foudres de guerre ! Mais il n'y a pas de dictature.

Avant l'arrivée de Natasha, on avait l'impression que vous étiez un peu le " groupe de studio " de Tricatel, le backing band de Burgalat ou de Houellebecq…

Michael Garçon (claviers) : On était un peu plus que ça, en fait. On ne se contentait pas de jouer ce qu'on nous demandait de jouer. On apportait déjà notre touche. C'est vrai que le groupe s'est soudé très rapidement autour de Michel Houellebecq… Mais si on fonctionnait bien en faisant notre travail de backing band, il nous arrivait aussi de travailler comme arrangeurs. A cette époque on commençait déjà à composer des petits trucs… On savait déjà qu'on pouvait composer, arranger. Donc le tournant s'est fait très facilement.

Hervé : On savait qu'on allait finir par devenir un groupe à part entière, avec nos compos, et puis on a rencontré Natasha, et là tout s'est accéléré. Le fait de trouver quelqu'un pour chanter nous a permis de canaliser nos compos… C'est à partir de là qu'on est devenu un vrai groupe.

Dans quelles circonstances vous êtes-vous tous rencontrés ?

Michael : Bertrand Burgalat cherchait un groupe pour accompagner Michel Houellebecq. En fait, au départ il voulait un groupe qui existait déjà, des gens qui se connaissaient entre eux. Il a d'abord demandé à Eiffel de participer au disque, mais vu qu'ils avaient une carrière à gérer, ils n'ont pas suivi… Comme la tournée de Houellebecq se préparait, Bertrand a donc dû lui-même monter un groupe. Il a récupéré Hervé et Stéphane (Salvi, guitares) du groupe Montecarl, moi qui venais de la musique électronique avec Kojak, et Fred Jimenez à la basse, qui avait proposé ses maquettes à Tricatel et dont le jeu lui a tout de suite plu. Il y avait aussi Peter Von Poehl qui travaillait beaucoup en compagnie de Bertrand, qui était un peu son bras droit. Puis Peter est parti au moment où Natasha est arrivée, et Fred en septembre 2002. C'est David Forgione qui le remplace.

Et Natasha ?

David Forgione : C'est Michael, qui sort beaucoup, qui l'a rencontrée. Et quand AS Dragon s'est mis en quête d'une chanteuse, il nous l'a présentée, et ça l'a fait tout de suite.

Michael : Elle ne connaissait ni Tricatel ni AS Dragon. Elle a écouté, et par politesse je pense, a dit qu'elle trouvait ça bien. Le lundi d'après, je l'ai appelé et dans la semaine on faisait déjà une télé et un concert.

Hervé : Depuis le début de cette aventure on a eu beaucoup de chance. Ca a fonctionné tout de suite.

A ce moment aviez-vous déjà des compositions toutes prêtes ?

Hervé : En fait on a quasiment tout repris à zéro, parce qu'on est parti du principe qu'avec Natasha il fallait une refonte : pas qu'elle colle à notre truc, mais qu'on fasse tout vraiment ensemble. Il a fallu qu'elle écrive plein de textes. Du gros boulot ! Mais on aime bien travailler dans l'urgence, saisir l'instant. On n'a fait aucune maquette, aucune pré-production : on a enregistré directement plutôt que de remachouiller des morceaux pendant des mois. C'est un peu la façon de Tricatel de bosser, et on s'y est fait. C'est assez créatif et surprenant.

Mais ne craignez-vous pas en même temps d'être vite catalogués " Tricatel " ?

Hervé : Ouais… Mais on a l'impression que depuis qu'on est là, son image a un peu changé : pour beaucoup c'était un label élitiste, parisien, easy listening,… Je pense que nous lui avons insufflé - mais sans prétention ! - un truc nouveau, un peu plus rock, un peu plus urbain, un peu plus spontané. On n'est pas du tout second degré, kitsch… Même si je pense que Tricatel ne l'a jamais vraiment été ! Puis on préfère être sur un label indépendant que sur une major : il n'y a pas de sous, mais il y a plein d'autres avantages.

En live, votre structure rythmique est impressionnante. Vous êtes, techniquement, le groupe français le plus imposant sur scène… Sans pour autant être labellisés " Made in France ". Comment vous positionnez-vous dans le paysage rock français ?

Natasha : On écoute plus de musique anglo-saxonne que française.

Hervé : On n'est pas du tout influencé par la scène française, même s'il y a des groupes en France qu'on apprécie beaucoup, mais…

Natasha (l'interrompant) : Si, on aime tous Gainsbourg, mais on essaie d'éviter de le dire parce que c'est tellement évident… A part ça, c'est vrai que le rock français, ce n'est pas vraiment notre source d'inspiration.

Hervé : Les seuls groupes intéressants en France, ils ne vendent aucun disque, et on ne parle jamais d'eux. Nous on aime bien les Married Monk, ce genre… Mais on n'est pas très " chanson française ".

Vous estimez ne pas être influencés par la chanson française, mais en même temps certains de vos titres sont chantés en français. Qu'est-ce qui vous attire dans la langue française ?

Natasha : Les quotas ! (rires) Plus sérieusement, si le morceau peut fonctionner en français, c'est un plus parce que c'est notre langue. On s'exprime forcément plus directement en français, même si musicalement c'est plus facile en anglais… Mais il ne faut se priver ni de l'un ni de l'autre, même s'il est difficile de faire sonner un texte en français, surtout en rock, sans tomber dans un truc grossier. C'est compliqué parce qu'on ne peut pas se permettre d'être aussi simpliste en français qu'en anglais… Mais si ça passe bien, c'est finalement plus révélateur du groupe que ce qu'on fait en anglais.

En cas de problème, il y a toujours Baudelaire (le morceau " Un Hémisphère dans une Chevelure ") !

Natasha : La poésie du XIXe et le rock actuel, pourquoi pas ? Si ça peut fonctionner, tant mieux !

Et les poètes maudits sont assez proches des rockeurs d'aujourd'hui...

Natasha : Mais carrément !

Hervé : Ce sont toujours des gens qui ont du mal à supporter leur époque. A travers le temps on se retrouve… C'est le point commun.

C'est vrai que vous sonnez très rock'n'roll… Très soul aussi.

Hervé : Ben c'est notre tronc commun à tous : la soul, la musique black des sixties et des seventies,… Mais on aime bien aussi la new wave, le punk rock, la musique jamaïcaine, enfin de tout, quoi.

D'où les reprises de " Tears of a Clown " avec Burgalat, et ici, de Betty Davis ?

Natasha : On y est venu très vite parce qu'on s'est retrouvé sur scène 4 jours après notre rencontre, donc forcément… Betty Davis, c'est une espèce de challenge : avant d'arriver dans le groupe, je n'avais jamais vraiment chanté.

Sans blague ! ?

Hervé : On a vu directement qu'elle avait du potentiel… Mais depuis elle a beaucoup travaillé !

Natasha : Ce que j'ai amené surtout, c'est la fraîcheur, parce que je n'avais aucune expérience, et en même temps je suis assez spontanée, je me jette pas mal à l'eau. C'est ça qui a plu, au groupe et au public. C'est ça, en fin de compte, la définition du rock : le fait de se mettre en danger.

 

Didier Lockwood

Didier Lockwood, violoniste d exception

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A l'occasion de ses trente ans de carrière, et du concert accordé dans le cadre du 'Tourcoing Jazz Festival', 'l'enfant du pays', Didier Lockwood, a bien voulu se soumettre à nos questions. Il est sans conteste un des musiciens dont on peut dire qu'il a réellement apporté un nouveau sens au jazz et au violon. Un entretien aussi charmant que passionnant…

Quel bilan tirez-vous de vos trente ans de carrière, et pourquoi était-il il important de sortir un double album à cette occasion ?

Trente ans de carrière en milieu professionnel, ça vous donne un coup au cœur ! Le bilan de cette carrière, est évidemment très positif. Trente CD, 3000 concerts un peu partout, c'est évidemment formidable, et c'est pourquoi, j'ai voulu, dans " Globe Trotter ", retracer mes impressions de voyage. Je crois que je n'ai jamais voulu m'arrêter en si bon chemin, et peut-être est-ce une espèce de boulimie. Et puis fêter ces trente ans de carrière, c'était aussi important, dans le sens où la vie n'est pas indéfinie.

Les voyages vous ont-ils toujours inspirés ?

Oui, absolument. En fait, partir de Calais, découvrir des ambiances très différentes m'a vraiment enrichi, c'est évident, et sur " Globe Trotter " solo, j'ai vraiment essayé de retracer ces parfums, ces impressions de voyages tellement diverses. Cela m'a aussi permis de découvrir des musiciens, des compositeurs, ce qui est toujours très intéressant.

D'ailleurs, on passe de l'Inde au Maroc sans même se rendre compte des enchaînements musicaux. Ce travail a-t-il été si compliqué ?

En fait ce que vous me dites prouve que le but est atteint, donc tant mieux ! Il fallait en effet créer des liens entre ces voyages musicaux, et ces voyages tout courts. Il y a longtemps que je m'intéresse à ces techniques et, enfin de manière plus générale, à l'électro. Donc, comme aujourd'hui, on a la possibilité d'exploiter, de traiter les sons, autant s'y essayer, et que cela ressemble à des sons intéressants. Je crois, en tout cas, que c'est une voie à suivre.

Mais on a l'impression que vous ne jouez pas seul, alors que pourtant, c'est le cas. Comment avez-vous travaillé la superposition des sons, notamment sur " Globe Trotter in Argentina ", et " In Texas "…

Oui en effet, je me suis créé un accompagnement grâce à une machine qui tourne en boucle, ou si vous préférez, à l'aide de séquenceurs, d'échantillonneurs, de pédales d'effets. Le fait de jouer aussi avec un violon à six cordes donne peut-être cette impression. En réalité, c'est surtout vrai dans le morceau " in Andalusia " où la basse rythmique donne de l'ampleur à une musique hispanisante.

Quand vous dites que " Globe Trotter " a été enregistré dans les conditions du 'live', cela signifie t-il que vous avez voulu garder l'unicité de l'improvisation, et que par là-même, aucune erreur n'était possible ?

Oui, j'ai une passion évidente pour l'improvisation, et il s'agit en effet d'un solo en temps réel. Cela signifie surtout que je voulais offrir aux auditeurs de ce disque, les sensations qu'ils peuvent retrouver sur scène. Je voulais que l'essence de la scène transparaisse dans ce double album.

Le son du violon est parfois transformé. Diriez-vous que le violon est un instrument polymorphe ?

Ce qui est sûr, c'est que l'on peut produire des sons très nouveaux, qu'on ne pouvait pas faire avant. Il faut donc exploiter toutes les ressources de cet instrument.

Le deuxième CD de ce double album, avec la participation de Benoît Sourisse, André Charlier, et Stéphane Guillaume, est peut-être plus réservé aux initiés…

Oui, c'est peut-être un langage du jazz de plus haut niveau, mais qu'elle soit jazz ou rock, tant que la musique procure des émotions, peu importe. L'essentiel est vraiment le ressenti qu'ont les personnes quand ils écoutent tel ou tel morceau. C'est vrai que le solo est plus accessible, mais je voulais qu'il y ait un côté " grand public " pour fêter mes trente ans de carrière !

Et vous préférez jouer en solo, ou avec " le new quartet " ?

J'aime les deux, mais c'est vrai que jouer en solo est une totale introspection, sur " Globe trotter ", c'est donc ma vérité personnelle du voyage. Je crois que le solo me correspond plus, parce qu'il y a une extrême liberté à l'improvisation.

Vous avez écrit un livre, puis ouvert un centre musical en 2000. Vous sentez-vous quelqu'un de polyvalent ?

Oui, j'aime bien découvrir des horizons un peu différents, et certaines personnes me surnomment d'ailleurs " VTT " : violoniste tout terrain !

Vous avez donc créé le CMDL (Centre Musical Didier Lockwood) à Damaries-les Lys en 2000 (NDR : soyez rassurés, il ne s'agit pas de l'antre de la Star Academy, située également à Damaries-les Lys !) Pourquoi ce projet vous tenait-il à cœur ? En quoi la pédagogie est-elle un moteur ?

Oui, ça a été plutôt rapide. En fait, j'aurais préféré créer un Centre de Musique à Calais, mais je n'étais pas vraiment soutenu, enfin, disons que cela avait l'air assez compliqué. Mais la pédagogie, la transmission est très importante, car c'est une énergie positive, et aider les musiciens est épatant.

En ce qui concerne le recrutement des professeurs, avez-vous privilégié 'l'affectif' ?

Il est évident que j'ai choisi des musiciens que j'aimais. Ce sont tous mes lieutenants qui enseignent au CMDL ! En fait, je ne voulais pas prendre de professeurs titulaires, parce que je voulais qu'il y ait avant toute chose une passion, que la musique soit plus importante que tout le reste. Mais ce n'est pas une critique, puisque certains ont refusé de me suivre dans ce projet, et sans doute aussi parce qu'ils n'avaient pas la fibre pédagogique. C'est donc important d'être pédagogue, mais aussi passionné.

 

 

Girls In Hawaii

La dream machine...

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Le premier album de Girls In Hawaii vient donc de sortir. Le 31 octobre très exactement. Un disque très attendu pour ce sextuor dont les prestations scéniques et le premier Ep (" Found in the ground - The winter ") avaient fait l'unanimité dans l'éloge. Avant de se produire en première partie de Venus, à la Maison de la Culture de Tournai, ce 28 octobre dernier, Antoine et Lio nous ont accordé cette interview. Pour celles et ceux qui l'ignoreraient encore, ce sont les membres fondateurs, mais aussi les compositeurs du groupe Un entretien fort sympathique qui devrait vous permettre de beaucoup mieux cerner leur univers sonore…

Pour le groupe, le collectif jaune orange leur a servi de tremplin. Le premier déclic qui leur a permis de prendre confiance. " Nous nous produisions pour la première fois dans le cadre d'un festival organisé à Bruxelles. Et plusieurs personnes de ce collectif étaient présentes. A l'issue du set, elles sont venues nous féliciter. Nous dire qu'elles avaient beaucoup apprécié notre prestation. L'énergie qui s'en dégageait. Personnellement, j'estime que nous n'avions pas été très transcendants. Mais ces encouragements nous ont fait chaud au cœur. Pour nous, ce collectif nous a apporté le premier contact, les premiers compliments ; et les premières propositions de concerts viennent de chez eux. Nous avons toujours été invités à toutes leurs fêtes et on a conservé d'excellents contacts avec eux. Leur mission est à la fois insensée, hors de l'ordinaire et pas du tout évidente à mettre en œuvre. Ils parviennent à toucher un large public avec très peu de moyens. Parce que ce collectif, c'est quelque chose de vraiment très très petit…"

Le deuxième coup de pouce leur est venu d'un concours organisé par Studio Brussel : le 'Démopoll'. Une drôle d'aventure, puisqu'elle leur a permis de se produire à l'AB Club. Mais les organisateurs se sont rendu compte que les musiciens étaient wallons. Résultat des courses, lors de leur set, aucun représentant de cette radio n'était présent. " Pourtant on entretient de bons contacts avec la Flandre. Mais pour y jouer ce n'est pas évident. Parce qu'il existe énormément de groupes, de salles pour y jouer. C'est un peu comme en Angleterre. Enfin, pas tout à fait, mais presque. Et la réaction d'un Flamand est instantanée. Ou il aime ou il n'aime pas. Et s'il n'aime pas, il décroche. Chez eux, c'est 'musique, musique, musique'. Ils peuvent assister à des concerts tous les jours. Des tonnes de groupes s'y produisent. Aussi bien le week-end qu'en semaine. Et y faire sa place, ce n'est pas évident… " Enfin le troisième soutien leur est venu de Magic et des 'Inrockuptibles'. Ce qui leur a probablement permis de se produire au 'Glaz'art à Paris et dans le Nord de la France. A Tourcoing notamment. Antoine tempère : " Les Inrocks ? Nous leur avions transmis une démo de deux ou trois titres, dans le cadre d'un autre concours. Via le net. La critique n'était pas très pointue, mais très favorable, je le reconnais. Mais maintenant on va avoir droit à un examen de passage. Ou l'album est encensé ou il se fait démolir ! "

L'occasion était donc belle de parler de ce premier album. Et en particulier du climat qui a entouré son enregistrement. " Il n'a pas été facile à réaliser. Parce qu'au départ, nous avions amené des démos. Et qu'il a parfois fallu recommencer 3 fois la prise avant de parvenir à restituer la bonne ". Pas de producteur. Une auto production ! Pas pour des raisons financières, mais simplement parce que le groupe craignait de faire un mauvais choix. De ne pas trouver celui qui aurait collé à leur feeling.

" Nous n'avons pas la chance de connaître 10.000 personnes impliquées dans la musique, en Belgique. Bien sûr, nous aurions pu nous renseigner pour engager un pro. Cependant, nous ne voulions pas de formatage : des prises studios réalisées en une semaine ; très, trop rapidement. Nous préférions se prendre la tête. Bosser. Passer un an et demi à se disputer, à se mordre, à se tirer les cheveux en travaillant dans notre 'home studio'. Mais au moins nous avions l'assurance d'être maître du jeu. A l'avenir, il n'est pas exclu que nous fassions appel à un producteur. Mais pour cet opus, ce n'était pas prévu. Nous voulions conserver l'aspect spontané, naturel de notre musique. Une certaine fraîcheur. Nous disposions ainsi d'un éventail de compos assez large. Mais pour ces raisons, nous avons délibérément écarté certaines chansons. A l'avenir, soit elles figureront sur la flip side d'un single, soit elles finiront à tout jamais dans la poubelle ". Maintenant qu'il est officiellement paru, quelles sont les premières impressions du groupe à son sujet ? " Nous attendons le feedback des médias, les chroniques de cet album. Et jusqu'à présent la critique a été plus que favorable. Bien sûr, l'album alterne le bon et le moins bon (NDR : modeste !) Mais intrinsèquement, nous sommes fiers du résultat. Et puis nous l'assumons complètement… "

Pour composer leurs chansons Antoine et Lio se servent d'une 'dream machine'. Mais qu'est ce que c'est que cette 'dream machine' ? " Un truc super ! Digital. Qui te permet de stocker des informations sur un disque dur. Elle fixe les idées. On en a toujours une à notre disposition. " A l'origine limitée à huit pistes, elles est depuis passée de 16 à 24 pistes. Mais qu'est ce qui a poussé ce duo à s'intéresser à la musique ? Pas les disques de leurs parents, en tout cas. Lio était surtout fasciné par ses cousins, lorsqu'ils jouaient de la guitare. " Des Italiens ! Ils m'ont appris à en jouer. Et mon apprentissage a été très rapide ". Le père d'Antoine était guitariste. Il a même sévi au sein d'un groupe, il y a quelques années. " Mais comme à la maison, il y avait toujours une guitare, j'ai été naturellement attiré vers la musique. " En parcourant les quelques articles consacrés au groupe, les noms de Blonde Redhead et de Papas Fritas reviennent régulièrement à la surface. Alors, Girls In Hawaii serait-il le chaînon manquant entre ces deux formations ? (Antoine exhibe le badge de Papas Fritas épinglé sur son pull) " Blonde Redhead surtout ! Lors de l'enregistrement de l'album nous écoutions souvent le 'Way You Walk' des Fritas, mais nous ne sommes pas vraiment accros à leur musique. En fait, ce sont des groupes qu'on aime bien, parce que leur démarche est très intègre. Ils concoctent leurs disques dans leur coin, sans se mettre de grosse pression… "

Le choix du patronyme Girls in Hawaii soulève inévitablement quelques légitimes interrogations. D'autant plus que lors de leur set accordé au festival de Dour, en août dernier, le public comptait quelques jeunes et jolies filles très fleuries. Serait-ce leur fan club ? " Absolument pas. De temps à autre, il arrive de retrouver ces filles qui portent ces colliers de fleurs. Mais tant que l'initiative n'est qu'épisodique, je trouve qu'elle est chouette. Par contre, j'apprécierais moins si nous devions nous produire constamment devant un public qui se couvre de fleurs et les lancent en l'air en jouant, pourquoi pas, du ukulélé. Parce que notre musique n'a strictement rien à voir avec les traditions hawaïennes. C'est simplement un bête nom qu'on a choisi pour le fun. Notre idée était qu'en vivant en Belgique, à Bruxelles, sous la pluie, il était possible de rêver un peu… "

 

Black Rebel Motorcycle Club

Il y a toujours un message à faire passer...

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Lors de la sortie de leur premier opus éponyme, j'en avais conclu que si vous aimez ou avez aimé Jesus & Mary Chain, Le Velvet Underground, My Bloody Valentine et Joy Division, vous adorerez la musique de BRMC. A cause de leur musique sauvage, ténébreuse et bruitiste, dont les ballades lancinantes, fiévreuses et soniques s'impriment sur un tempo implacable. Mais le Black Rebel Motorcycle Club (NDR : patronyme choisi en hommage au nom du gang de motards emmené par Marlon Brando dans 'L'équipée sauvage', un film qui remonte à 1952) se veut avant tout authentique, reprenant le flambeau de ses illustres prédécesseurs pour perpétuer la tradition du rock'n roll. Et leur second opus, " Take them on, on your own ", en est la plus belle illustration. Rencontre avec Robert Levon Been, chanteur/bassiste et co-compositeur du trio californien…

Alors Black Rebel Motorcycle Club ou BRMC ? A l'instar des formations qui ont réduit leur nom par les initiales, la formation californienne ne risque-t-elle pas, un jour, d'être tentée de suivre le même chemin. "C'est étrange, car à l'origine nous nous appelions BRMC. Mais lorsque nos Cds sont arrivés dans les bacs des disquaires, personne ne parvenait à mettre la main dessus. En fait, ils étaient classés dans le répertoire 'BR' au lieu de 'BL'. Donc, on a dû se résoudre à reprendre le patronyme dans son intégralité. Ce qui est amusant, c'est qu'aujourd'hui tu me demandes si un jour nous pourrions faire le chemin inverse. Franchement, je n'en sais trop rien..."

Black Rebel s'est forgé une réputation de groupe réservé, parlant peu. C'est un peu leur modus vivendi. " Nous avons toujours voulu mettre notre musique en avant plutôt que le groupe. Mais il est exact que depuis quelque temps, on se pose des questions. Notamment depuis que nous avons été invités aux MTV awards. Nous y avions joué 'live'. Et les journalistes, les médias, s'intéressaient plus à notre prestation qu'à la raison pour laquelle nous avions décroché ce prix. J'avais le sentiment que pour eux la musique était devenue accessoire. Qu'ils ne comprenaient pas notre langage. Pourtant, il y a toujours un message à faire passer, même si personne ne prend la peine de l'écouter. Mais il est vrai que pour l'instant, nous sommes un peu à la croisée des chemins… " Etonnant, lorsqu'on sait qu'un jour, un des musiciens du combo a déclaré 'Notre musique signifie plus pour le public, qu'elle signifie pour nous !' Ce qui méritait une explication. Robert reconnaît que cette phrase possède un poids énorme. " Tout dépend de l'interprétation qu'on lui donne. Je ne me souviens plus de l'endroit où on a tenu ce discours, mais nous l'assumons. Lorsque je vois l'étincelle dans les yeux de nos fans, j'y lis le bonheur. Et ils le manifestent plus spontanément que nous. Mais composer, enregistrer, se produire en public et assumer du bonheur en même temps, c'est un peu beaucoup. J'admets que nous produisions un certain effet sur les gens, mais je veux garder mes distances par rapport à ce phénomène…"

" Mais de là à ce que 'Stop !' la première chanson du nouvel opus confesse 'Nous ne vous aimons pas, nous essayons seulement de vous juger', il y a manifestement un pas difficile à franchir. Robert s'explique : " Si je me souviens bien, cette chanson a été écrite à Londres, lors de notre premier périple sur le Vieux Continent. A cette époque, nous étions un peu paranos. Nous nous posions beaucoup de questions. L'intérêt que nous portaient les gens nous paraissait un peu trop soudain. Ils nous considéraient comme le groupe dans le vent. Un hype ! Et nous n'aimions pas beaucoup nous retrouver dans cette position. Lors d'un set accordé dans un petit club à Londres, j'ai eu l'impression que c'était le message que le public nous adressait. Il n'aimait pas vraiment le groupe. Il était venu, non pas pour nous voir, mais pour être vu. Alors, lors d'une jam, sur laquelle reposaient une ligne de basse et le jeu de batterie, j'ai commencé à improviser ces paroles. Je ne pense pas qu'une telle situation pourrait encore se reproduire aujourd'hui, mais si elle survenait encore, je réagirais différemment. En chantant pour eux plutôt que de les haïr. Plutôt que de leur dire d'aller se faire foutre. C'est dans ce contexte qu'il faut replacer ces mots… 'Stop !' est une chanson qui a été composée sur scène. Nous jouions ce morceau à la fin de chaque spectacle, parce que nous ne voulions pas terminer notre set sur une note calme. Nous voulions qu'elle s'achève sur un mode rock. Avec du volume. Quatre titres sont issus de prestations 'live'. 'Heart & soul', par exemple. Nous avons réalisé les prises à quatre endroits différents : Paris, Tokyo, Londres et… (NDR : à cet instant quelqu'un est entré dans le local pour aller prendre une bière dans le frigidaire. Et j'ai cru comprendre… Los Angeles). Les versions étaient bien sûr différentes ; mais ensuite on a essayé de mettre toutes les pièces du puzzle ensemble en n'en sélectionnant que les meilleures. Pour atteindre une forme d'apogée au niveau du son. On en a fait en quelque sorte, un 'best of'… "

Sur leur nouvel album figure une composition à caractère politique, 'US governement'. A ma connaissance, elle constitue leur seule concession dans ce domaine. Alors, engagement ou accident ? " Tout est accident ! Même se retrouver au sein d'un groupe. En fait, cette chanson a été écrite à nos débuts. Il y a longtemps. A l'époque, nous la jouions déjà 'live'. Très, très fort ! Et nous la réservions à la 'b side' de notre premier disque. Mais au moment où nous allions le sortir, le 11 septembre est arrivé ; et face au désarroi des victimes, nous pensions qu'il était inutile d'en rajouter une couche. Mais au fil du temps, nous avons commencé à la maîtriser de mieux en mieux sur scène ; et, pour ne pas désavouer nos fans, nous en avons conclu qu'il serait ridicule de la cacher sur une flip side… " Paradoxal, lorsqu'on sait qu'à leurs débuts, la formation avait déclaré qu'ils n'avaient pas uniquement l'intention de s'adresser à un public bien ciblé. Aux cool kids, en particulier. Et que s'ils se rendaient compte que c'était le cas, ils changeraient de fusil d'épaule. " Cet épisode remonte également aux débuts du groupe. Nous vivions à San Francisco. Nous étions dans le trou. Mais on essayait d'en sortir. On cherchait à gagner les faveurs du public. Nous n'appartenions à aucune scène. Nous étions considérés comme un groupe local. Bien sûr, je n'ai rien contre les groupes locaux. Mais si à SF il existe de nombreuses scènes impliquant de nombreux groupes, nous avons eu un mal de chien à y trouver notre place. Encore que je me demande si nous l'avons un jour trouvée ou si nous la trouverons un jour. Et je pense que ce n'est pas plus mal. Regarde la 'New York revolution' ! Ou si tu préfères, la musique de la nouvelle génération. Les médias veulent absolument enfermer tous les groupes qui y émargent dans le même sac. Du formatage ! Nous ne voulons surtout pas y être associés. Et encore moins récupérés. C'est une campagne de marketing, à laquelle nous refusons de souscrire ! Nous voulons créer de la musique qui plaise à tout le monde. Depuis la jeune fille au vieillard, plutôt que de cibler un public particulier. 'Cool kids f*****g !'

En parlant de formatage, aurait-il un œuf à peler avec les Strokes, les White Stripes, Interpol, les Warlocks et les Kills ? " Je ne mettrai pas les Kills dans le même sac. Ce sont des groupes qui possèdent d'indéniables qualités artistiques. Mais ils sont différents. Et on n'a pas le même feeling. J'apprécie plus particulièrement les White Stripes, Interpol et les Warlocks. On a joué avec ces derniers à Los Angeles. Devant 20 personnes. Ils sont authentiques et véhiculent un esprit bien personnel. C'est la raison pour laquelle je pense qu'ils sont respectables ; mais on ne peut pas dire que tout ces groupes soient rock'n'roll. Ils font de la pop. Seul leur déguisement est rock'n roll. Ils n'écrivent pas des chansons hymniques qui portent les gens, mais cherchent un mode d'évasion. Pour nous, notre devise est 'Stay awake !' (Restons éveillés !). Maintenant, je suis conscient qu'aujourd'hui, il faut plaire aux jeunes. Et que pour y parvenir, il faut soigner les pochettes, accorder des interviews, remplir les pages des magazines. Mais nous, on veut aller au-delà de tout ce strass. Avoir une démarche plus profonde… " Peut-être dans l'esprit des Stones. A cet égard, 'We're all in love' me semble tellement hanté par l'esprit des Stones ? Et en particulier par la composition 'Gimme shelter'… " C'est la meilleure chanson que les Stones ont écrite depuis 1970 ! On ne nie pas l'évidence. Et il est vrai que nous essayons de faire revivre l'esprit de cette époque. Dans le domaine de l'amour, tu peux être en compagnie de quelqu'un, mais en même temps très éloigné de cette personne. Et cette tension est terrible. Mais dans le même ordre d'idées, lorsque tu es éloigné de cette personne, tu ressens de l'espoir, de l'optimisme, au plus profond de toi-même. Il existe en nous cette idée d'euphorie de l'amour, lorsque vous êtes éloigné de l'autre. Comme si vous viviez une profonde angoisse. Du 'non dit' ! Car vous pouvez côtoyer l'autre, sans déclarer votre flamme. Cette situation existe. Vous ne pouvez pas la voir, l'entendre ou la toucher, mais vous savez que ce sentiment brûle au plus profond de votre âme… "

Lorsqu'on écoute la musique de BRMC, on ne peut s'empêcher de penser au Velvet Underground, à Joy Division et surtout à Jesus & Mary Chain. Les prestations 'live' baignent même dans un nuage de fumée, comme chez le défunt J&MC. Des comparaisons qui reviennent régulièrement chez la plupart des journalistes. Mais qu'en pense notre interlocuteur ? " Je ne sais pas. Contrairement aux apparences, les comparaisons, ce n'est pas mon fort. Chacune de ces formations pratique de la bonne musique. Ce sont, quelque part, des légendes. Et être comparés à ces légendes, c'est un compliment. D'autre part, il y a sans doute une certaine paresse de la part des médias qui se contentent de telles analogies. Car, il existe autre chose derrière tout cela. Maintenant, il est exact que tous les groupes passent par le stade des comparaisons ; c'est la transition nécessaire avant de parvenir à acquérir sa propre identité…" 

Par contre, Robert voue une grande admiration au défunt groupe britannique The Verve. " Un groupe génial, expérimental. Qui était parvenu à pousser le son dans ses limites. Un concentré d'énergie. Aussi bien à travers la musique que les lyrics. Mais lorsque Nick McCabe est parti, tout s'est écroulé. A ce moment là, je me suis rendu compte que l'univers de la musique avait perdu quelque chose de vital. Tout ce qui a suivi 'Nothern soul' n'a plus jamais eu la même dimension. Triste ! Ce groupe était fantastique, parce que sa musique évoluait sans cesse. J'ai assisté à trois de leurs sets 'live', dont un à San Francisco. C'est ce que j'ai vu de meilleur sur scène à ce jour. Tout comme le Primal Scream… " Ah, bon ! (NDR : le seul concert de Primal Scream, auquel votre serviteur a assisté fût tout bonnement catastrophique. Il y a presque 20 ans. A l'AB de Bruxelles. Je lui ai donc fait part de mon étonnement. Et il s'est simplement mis à rire. Faut croire que la bande à Bobby Gillepsie a fait d'énormes progrès sur les planches. Enfin, au bout de deux décennies, ce serait quand même dommage de ne pas être parvenu à s'améliorer. Attention, je parle bien de prestation scénique ! Les albums de Primal Scream sont, pour la plupart, de petits bijoux. Dont acte !)

Petit détail amusant, le père de Robert, n'est autre que Michaël Been, le leader du défunt Call, une formation fondée en 1979, dont le premier opus est une petite merveille. Ce qui avait d'ailleurs, à l'époque, poussé Peter Gabriel à les soutenir. J'avais même lu, dans un article, que Michaël était devenu le manager de BRMC. Bob rectifie. " Non, pas du tout. Il est le responsable du mixing lors de nos tournées " Donc, quelque part, il apporte son expérience au groupe. Robert semble assez gêné d'en parler. " J'ai beaucoup de mal à expliquer sa contribution. Je savais qu'il était capable de faire du rock'n'roll. Mais il est âgé de 47 ans. Il est difficile de parler de son père quand il ne fait pas un métier comme Monsieur tout le monde. Qu'il n'est pas garagiste ! Je me mets à sa place. On attend que je confesse qu'il m'a procuré des conseils, mais non, ce n'est pas le cas. Il mixe, et puis c'est tout. Le monde de la musique est tellement chaotique. Il change constamment. Dans ce domaine, il n'existe pas de règle d'or. Ce n'est déjà pas facile de parler de nous. D'expliquer les raisons pour lesquelles vous prenez telle décision, signez sur tel label. Alors, parler de son père… Je pense que du moment que vous fonctionnez à l'instinct, le reste… "

Merci à Vincent Devos

 

Raphael

Raphaël, l archange sibyllin?

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Raphaël est ce jeune poète de la pop française. Un style, un univers, des mélodies qui donnent des frissons. Et pour ne rien gâcher, un charme fou au regard profond et ténébreux. Rencontre avec le Rimbaud des temps modernes…

Vous êtes multi-intstrumentiste, chanteur, auteur, compositeur, quels autres talents nous cachez-vous ?

Aucun, hormis peut-être que j'ai longtemps hésité entre faire de la musique et du tennis. J'étais très admiratif d’Yvan Lendl et de David Bowie ! D'ailleurs un des premiers disques que j'ai écoutés était " Let's dance " de Bowie. J'étais fou de ce titre. Mais comme tout le monde, au début, je n'étais rien, et je ne dois cela qu'à l'apprentissage de la guitare et du piano, qui sont venus relativement tôt dans ma vie. Et puis, vers l'adolescence, j'ai commencé à écrire et le reste s'est fait naturellement.

Justement, vous évoquez David Bowie, dont vous avez assuré la première partie, lors d'un de ses concerts. Que gardez-vous de cette expérience ?

C'était, bien sûr, un grand moment…que dire d'autre ? Oui, un grand moment…

Pour une chance, c'est une chance " de vivre de ce métier ?

Oui absolument, je suis chanceux. Il n'y a pas d'horaires. Quand on a une envie, il faut la réaliser, et pour l'instant, je dois dire que je fais ce que j'ai envie de faire ; autrement dit, ce que j'aime, je le fais.

Vos textes révèlent une sphère qui vous est propre. Comment décririez-vous cet univers ?

J'ai du mal à décrire cet univers, sinon de dire qu'il est sûrement mystérieux. Mais il est très difficile d'en parler soi-même. Disons que j'aime ce qui a rapport aux voyages, au thème de la route, qui revient d'ailleurs souvent dans " La Réalité ". L'idée d'aller de mer en terre, de traverser des pays, comme peuvent le faire les marins, me plaît beaucoup. A mon avis, les hommes libres sont Saint-Exupéry et n'importe quel marin. La route et l'aventure sont, à mon sens, synonymes de bonheur. Enfin, musicalement, mon univers porte principalement sur l'imaginaire…

Le duo avec Jean-Louis Aubert " Sur la route ", est-il une opération " marketing " ?

Non, parce que je ne raisonne pas du tout de cette manière. En fait, il fallait un titre qui porte l'album, justement parce que les autres morceaux sont d'un abord moins facile. En tout cas, ce n'est pas stratégique puisque je connais Jean-Louis Aubert depuis trois ans ; c'est un ami pour qui j'ai une vraie tendresse et que je vois pratiquement deux fois par semaine. Je suis très admiratif de ce Salinger de la chanson française. Et en fait, pour l'anecdote, j'avais écrit " Sur la route ", juste avant de partir en vacances avec Jean-Louis Aubert. On la fredonnait souvent, ce qui nous avait donné envie de faire un duo, mais je ne pensais pas que ce serait pour " Sur la route ". J'avais plutôt envisagé un duo sur " Il y a toujours ". Mais comme " Il y a toujours " était plus intimiste ou moins accessible, le duo ne fonctionnait pas sur ce morceau. C'est pourquoi, nous en sommes revenus à " Sur la route "…

Vous dites aujourd'hui de votre premier album " Hôtel de l'univers ", qu'il est " naïf ". Ce n'est pourtant pas le sentiment que l'on en a, même après trois ans…

Je pense que j'ai dit cela dans le sens où il était plus contestataire, et que foncièrement, ce n'est pas ce dont j'ai envie. Je ne le renie pas, j'en suis même plutôt content, mais j'avais envie de parler de la société de manière plus brutale, alors que pour " La Réalité ", l'imaginaire prend le dessus. D'autant que ma seule ambition est de faire de la chanson populaire, et que je n'ai pas de discours en particulier. C'est aussi ce que j'admire chez Jean-Louis Aubert ou Renaud, c'est l'intemporalité de leurs chansons. Idéalement j'aspirerais à cela mais le chemin est long.

Le temps qui passe revient souvent dans La Réalité. Cette notion vous angoisse ?

Je n'ai pas le sentiment que ce thème revienne souvent, mais il est vrai que les textes amènent peut-être à une libre interprétation. C'est votre perception et peut-être est-ce vous qui avez raison, mais chacun interprète selon son vécu. Sinon, je ne suis pas plus angoissé que cela par le temps qui passe, par la mort peut-être, mais comme tout le monde.

Comment appréhendez-vous le travail d'écriture ?

Je pense que plus on écrit et plus on a envie d'écrire ; j'ai donc décidé d'écrire tout le temps, de manière beaucoup plus régulière qu'avant. Je crois aussi qu'écrire est non seulement une défense mais surtout, elle permet de retrouver l'espérance…

(Interview réalisée à l'occasion de sa tournée, en France)

 

 

 

 

The Raveonettes

Nous ne sommes pas des copi(ll)eurs

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Bien que vivant à Londres, les Raveonettes nous viennent du Danemark. Un duo partagé entre Sune Rose Garner (NDR : le mec) et Sharin Foo (NDR : la fille, et quelle belle fille !) qui voue un véritable culte à l'imagerie des 50's et des 60's ; mais dont la musique semble à la fois influencée par la noisy de Jesus & Mary Chain, la surf music des Beach Boys, le rock'n roll de Buddy Holy et les groupe féminins qui ont sévi au cours des sixties, tels que les Crystals ou les Ronettes. Pas pour rien que Richard Gottehrer (Blondie, Go-Go's) a accepté de produire leur dernier album, alors qu'il avait déclaré, il y a belle lurette, avoir mis un terme définitif à sa carrière. Encore que sa volte-face méritait une explication…

Mais tout d'abord plantons le décor. L'interview se déroule en compagnie de deux correspondants d'un autre website. Je fais face à Sharin. Qui va mener les trois quarts de l'interview. Mes genoux pratiquement collés contre les siens. Impressionné par sa beauté toute scandinave, j'affiche une fébrilité inhabituelle. Ce qui n'empêchera pas la conversation d'être émaillée de grands éclats de rires… Oui, justement, comment expliquer la présence de Richard Gottheherer à la mise en forme de 'Chain gang of love' ? " Nous avons rencontré Richard à Berlin. Nous y avons fait connaissance. Et au fil de la conversation, il s'est épanché. Il a abondamment parlé des sixties, et puis du bon temps qu'il avait passé en compagnie de Richard Hell & The Voivoids. Fatalement, je lui ai parlé de notre musique. Précisant qu'elle était inspirée par les 50's, et en particulier par les groupes de filles de cette époque. Et qu'en outre, nous aimions ce qu'il avait réalisé en leur compagnie. Nous avons gardé le contact, et nous lui avons transmis une démo. Il nous a répondu qu'elle lui plaisait et nous a suggéré de travailler ensemble sur ce projet. Ainsi, nous sommes donc parvenus à le sortir de sa retraite… "

Lorsqu'on écoute la musique des Raveonettes, on ne peut s'empêcher de penser à celle de Jesus & Mary Chain. A cause de leur art à rendre leur noisy mélodique. A Suicide aussi. Enfin, à la musique des eighties, en général. Et puis aux groupes féminins qui ont émaillé les sixties, tels que les Go Go's, les Cookies et les Angels. Des influences que revendique d'ailleurs le duo. " Nous en sommes mêmes fiers, parce qu'elles sont évidentes à l'écoute. Nous n'avons pas peur de le proclamer. Et on peut même y ajouter Buddy Holy, les Everly Brothers et Television. Toutes ces références s'y retrouvent. En mélangeant toutes ces sonorités qu'on aime, on est parvenu à créer notre propre style, quelque chose d'original. Par contre, nous ne supportons pas qu'on nous dise que fassions du copi(ll)age. Nous ne sommes pas des copi(ll)eurs, nous écrivons nos chansons… " Pourtant, dans le futur, le duo n'envisage pas de confier la production à un des frères Reid (NDR : les deux, ce serait un peu difficile, puisque les frangins sont en bisbille depuis un bon bout de temps). " Nous rêvons de pouvoir travailler un jour sous la houlette de à Phil Spector. Ce serait beaucoup plus intéressant, je pense "

Chez les Raveonettes, l'imagerie a une grande importance. Suffit d'analyser la pochette de ‘Chain gang of love’, pour s'en rendre compte. L'imagerie influencée, à l'instar des Cramps, par les films d'épouvante et de série b ; mais aussi les thrillers d'Alfred Hitchcock et de Roger Corman. " Oui, nous sommes des fans de ces films. Surtout ceux des fifties. Ces vibrations cinématographiques correspondent très bien à notre musique. Nous aimons, en outre, restituer cette iconographie, comme des affiches de cinéma. Elle donne également un sens à notre musique… " Mais alors, quel est le duo qui mérite le titre de Bonnie & Clyde du rock'n roll ? Les White Stripes ? Les Kills? Ou les Raveonettes? Une question qui déclenche l'hilarité générale. " Les Kills! Parce que leur musique transpire la plus forte connotation sexuelle… " Un groupe que les Raveonettes apprécient beaucoup. Mais aussi Interpol et les Warlocks. Certains médias ont même écrit que le duo avait confessé que tous ces groupes avaient de nombreux points communs avec eux. Ce qui surprend très fort Sharin. " Qui a dit ça ? Moi ? Je ne pense pas avoir un jour effectué une telle déclaration. Ce que nous avons en commun ? Rien avec Interpol. Nous les apprécions beaucoup, et c'est réciproque. Nous avons tourné et fait la fête ensemble. Les Warlocks ? Le mur de son ! Un son sonique et très intense. Mais notre sensibilité est davantage pop, davantage noisy, davantage bruyante. Les Kills ? C'est un duo comme nous qui essaie de trouver la chanson simple, efficace et immédiate. Composé d'un garçon et d'une fille. Qui chantent. Dont l'attitude est sexy. Notre approche du retour aux roots est similaire. Mais nous évoluons à quatre sur les planches…"

Paradoxalement, les Raveonettes ont dû attendre de s'imposer sur la scène internationale avant d'être reconnus dans leur pays. Sharin confirme. " Il est très difficile de mener une carrière au Danemark lorsqu'on pratique une musique alternative. En fait, les Danois éprouvent toutes les peines à faire le premier pas lorsqu'ils sont confrontés à la nouveauté. Ils attendent toujours la reconnaissance dans les pays anglo-saxons pour leur emboîter le pas. Maintenant nous y sommes également populaires. Nos chansons passent enfin à la radio et le public achète nos disques. "

Pour composer leurs chansons, les Raveonettes se sont imposé des règles : pas plus de 3 minutes pour une chanson (ou exceptionnellement) et un maximum de trois accords. Pourquoi ? Sharin nuance : " Nous préférons parler de canevas plutôt que de règles. Nous avons imposé cette trame sur notre premier mini elpee ('Whip it on'). A l'époque, Sune en avait un peu marre de la musique. Surtout celle qui était surproduite. Et puis il traversait une période de déprime. Il a donc voulu revenir à quelque chose de plus basique, de plus simple. Finalement, en imposant des contraintes, on a tendance à devenir plus créatif. A se fixer des défis. Et à parvenir à repousser nos limites. C'est un peu comme chez les écrivains ou les journalistes. A qui on impose un nombre de lignes. Ou un peintre. Qui décide de n'utiliser que certaines couleurs… Toutes nos chansons sont écrites avec la même clef. En si bémol pour le mini elpee et en si bémol majeur pour le dernier opus. D'une durée de maximale de trois minutes. Et avec un maximum de trois accords. Enfin, sur 'Chain gang of love', on a un peu cassé le canevas. Certaines plages comptent plus de trois minutes et débordent jusqu'à quatre accords. Ces lignes de conduites n'ont pas été élaborées comme des contraintes, mais des outils pour explorer… " Et en 'live' alors ? " Nos sets sont régis par des règles très strictes. Nous essayons de recréer le même son que sur le disque. Un peu comme si c'était une bande qui défilait… " Ah bon !… Dune Rose Wagner est entré dans la loge depuis quelques minutes, et tout en se tenant en retrait, il reste attentif à la conservation. Et justement, lorsque la conversation se porte sur Jack Kerouac, auquel on lui prête une manière similaire de composer, il se manifeste. " Ce n'est pas vraiment au niveau des lyrics, mais de la façon dont il écrivait. A cause de la spontanéité du genre 'stream of consciousness', si vos préférez. La voie mouvante et insaisissable de la conscience. Et donc, j'écris très vite, sous une forme qu'on pourrait qualifier d'écriture automatique…"

Merci à Vincent Devos.

 

 

 

 

Supergrass

Sans la musique nous serions probablement au bord du suicide...

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Supergrass est, pour l'instant, allergique aux interviews. Surtout Gaz Coombes et Mickey Quinn, respectivement chanteur/guitariste et bassiste du groupe. C'est donc Danny Goffey, le drummer, qui les a remplacés au pied levé. Si certaines questions allaient inévitablement demeurer en suspens, cet entretien devait au moins permettre de rencontrer un autre son de cloche. Ce fut rarement le cas. En fait, le trio (passé depuis l'arrivée du frère de Gaz, à un quartet), s'est fabriqué une telle carapace, qu'il devient de plus en plus difficile de lui tirer les vers du nez. Difficile, pourtant, de comprendre qu'on ne puisse récolter l'une ou l'autre info, au sein d'un terreau aussi fertile que le Supergrass ( ?!?!? ). Heureusement, en creusant un peu, on finit toujours par trouver…

' Life on other planets' constitue le titre de leur quatrième album. Un titre qui en vaut bien un autre. Encore qu'on aurait pu croire qu'il serait une réponse, à peine voilée, aux médias, coupables de les avoir imaginés figurants dans le film 'La planète des singes'. Ce n'est pas le cas. La science-fiction n'est pas la tasse de thé de Danny. D'ailleurs sa réaction fuse, lorsqu'on lui parle de 'La machine à remonter le temps' d'H.G. Wells ou de 'La guerre des étoiles' de Georges Lucas : " A mon avis, c'est toi qui viens d'un autre monde ! " Réponse facile, il faut l'avouer. Même le surnaturel n'a pas l'air de le chiffonner. Sur 'Brecon beacons', les lyrics font pourtant des références bizarres aux sorcières galloises. Danny s'explique : " La chanson est inspirée d'un fait divers imaginaire qui s'est produit dans une petite vile du Pays de Galles, au sein de laquelle une fille a été assassinée. Les sorciers étaient accusés. Or, ce crime avait été commandité par la municipalité. C'est même un policier qui avait commis le crime. Mais la rumeur persistante était parvenue à jeter le discrédit sur des innocents. Même si c'était des sorciers… " En y réfléchissant bien, cette histoire tient bien la route et aurait même pu faire l'objet d'un faits divers…

Mais qu'est ce qui inspire essentiellement les lyrics des chansons ? Pas la politique, en tout cas. La guerre en Irak ? La position de Tony Blair dans ce conflit ? Pas davantage. " Nous avons notre avis personnel sur le sujet, mais nous ne connaissons pas suffisamment la situation et les enjeux pour prendre position. Ce ne serait pas honnête de notre part. " Alors ce n'est pas demain la veille que Supergrass composera une chanson à caractère socio-politique. " C'est vrai que nous pourrions davantage nous consacrer aux questions du bien être social. Nous essayons d'y apporter notre écot, en participant aux concerts caritatifs. Mais de là à écrire un texte sur le sujet… Tu sais, on ne comprend pas toujours ce qu'on raconte dans nos chansons. Ce qui s'explique facilement, lorsqu'on sait que certaines d'entre elles sont écrites par différents intervenants. Ce qui justifie, aussi parfois qu'une même chanson est susceptible d'avoir une signification différente. Aussi bien celles et ceux qui écoutent que pour les musiciens… "

Les relations avec la presse (NDR : surtout britannique) ne sont donc pas au beau fixe, pour l'instant. Faut dire que Gaz a déclaré récemment qu'au plus les groupes ou artistes devenaient médiocres, au plus ils prenaient de la place dans leurs colonnes. Pensait-il à Oasis en faisant cette déclaration ? Danny rectifie : " En fait Gaz parlait surtout des tabloïds. Tu sais cette presse qui passe son temps à photographier les artistes accompagnés de jolies nanas. Ce n'est pas notre truc. Mais c'est vrai que si elles ne posaient pas en notre compagnie, personne ne voudrait nous photographier… " (rires)

Sans la musique, les membres de Supergrass vivraient probablement comme des reclus. " Parce que notre situation nous a obligé à parler avec vous. Lorsque nous étions jeunes, nous sortions beaucoup à Oxford. C'était avant que nous ne devenions aussi connus. Nous étions et nous sommes toujours des êtres sociables. Notre vision de l'existence n'est pas négative. Mais pour nous, la vie serait très difficile sans la musique. Nous serions probablement au bord du suicide. Probablement… (rires)… car nous ne sommes pas foutus de faire autre chose… " Mais comment un (super)groupe comme Supergrass parvient à décompresser ? En général, les artistes qui ont atteint un statut semblable, se réfugient dans le cocooning. Danny nuance " Tout dépend si tu es déprimé… Je ne suis pas nostalgique et préfère regarder vers l'avant. Personnellement, je préfère m'extérioriser. Sortir et boire un coup… ouais ! "

En chroniquant leur dernier opus, j'avais conclu que Supergrass n'en finissait plus de revisiter l'histoire de la pop britannique, adressant, pour la circonstance, quelques clins d'œil au glam de Bowie et de Bolan. Et, empruntant même, sur 'La song', l'un ou l'autre riff aux Stanglers. " Oui, mais après 8 années d'existence, on peut quand même affirmer que le groupe s'est forgé sa propre identité. Nous ne voulons pas piquer les idées des autres, même si on ne peut nier l'influence de tel groupe ou de tel artiste. La musique de Bowie est intemporelle. On peut écouter n'importe laquelle de ses chansons. L'oublier un certain temps. Et puis y revenir. Elle plaira toujours autant. J'apprécie aussi beaucoup le rythm'n blues. Sly & The Family Stone, Marvin Gaye. Mais nous écoutons tellement de choses différentes. Nous n'avons pas de préjugés, pourvu que ce soit bon… " Originalité, cet elpee est parsemé de bruitages curieux : des oiseux qui pépient, des moutons qui bêlent, etc. " C'est parce qu'on est légèrement tarés. Parfois il existe trop d'espace entre les plages. Et en réfléchissant à la question, on s'est dit qu'on pouvait y glisser des bruits d'animaux. C'est sans doute de l'enfantillage ; m'enfin… "

Danny aime jouer des drums sur un tempo rapide. Il a l'habitude de jouer de cette manière. Mais sur le dernier opus, quelques titres sont imprimés sur un tempo plus lent. " Gaz et Mickey préfèrent jouer plus lentement, plus doucement. Mais c'est plus difficile pour moi. Jouer vite est plus marrant. J'y prends vraiment mon pied… " Le 9 décembre dernier, Taylor Hawkins, le drummer de Foo Fighters est monté sur scène pour y remplacer Danny, lors d'un concert accordé à Amsterdam. " En effet, nous étions à la même affiche. Et Taylor était venu me voir avant le concert, pour me demander de lui refiler quelques petites astuces techniques. Il a encore besoin d'apprendre. Au cours du rappel, je lui ai fait signe de monter sur les planches. Et il s'est mis à jouer très, très vite. A la fin du morceau, je lui ai sauté dessus et je l'ai aplati. Dave Grohl s'est alors fâché, en me criant 'Ca ne va pas la tête, saute pas sur mon batteur !' "... (rires)

Merci à Vincent Devos.

Quelle est la chanson que Danny préfère chez :

Bowie ? " Hang on to yourself "

Curtis Mayfield ? Il mime, mais ne se souvient plus du titre.

Smiths ? " Asleep "

T Rex ? "Ride the white swan"

Stone Roses ? "Bye bye badman"

Happy Mondays ? "Wrote for luck"

JJ Cale ? Passons le mot grossier…

The Who ? " I can't explain "

The Beatles ? "Helter skelter" et "Happiness is a warm gun"

The Kinks ? "Thank you for the days"

Supergrass? "Richard the Third"

M83

Les paysages sonores cinématographiques de M83

En prélude à leur concert aux Nuits Botanique (le samedi 27 au Cirque Royal), nous avons rencontré les deux jeunes gens de M83, fans de noisy rock mais aussi d'Iron Maiden, auteurs d'un album excellent, " Dead Cities, Red Seas & Lost Ghosts ", mélange improbable d'électro, de shoegazing, de krautrock et de cold wave. Bizarre, mais jouissif : imaginez-vous sur une plage déserte battue par un vent glacial, perdu dans ce coin de terre où votre écho se noie, à des milliers de kilomètres de la moindre âme qui vive. Imaginez-vous sur une autre planète, rouge et sulfureuse, à dormir dans votre caisson en attendant la délivrance. Au dehors, des bruits lointains ricochent sur votre sarcophage. Il fait chaud, et des voix sans corps vous bercent de leurs ululements craintifs. Rêve ou cauchemar ? C'est ça, l'effet M83.

Qu'est-ce qui a changé pour vous entre la sortie de votre 1er album et de ce deuxième ?

Nicolas : Le premier album (M83) était quand même différent. Il était beaucoup plus ambient. Sur celui-ci on a essayé un truc plus noisy, plus rock.

Avez-vous du faire face à une certaine pression ?

N. : Ouais, mais juste dans le sens de vouloir faire mieux, tout simplement ! C'est une pression positive, constructive : on voulait essayer de garder le même son tout en le faisant évoluer.

Combien de temps avez-vous travaillé sur cet album ?

Anthony : Pareil que pour le premier : un an, de la composition au mixage puis à l'enregistrement. Ce n'est pas énorme…

Comment vous êtes-vous rencontrés ? Est-il exact que vous êtes issus de la Côte d'Azur ?

N. : Ouais ! D'Antibes. On s'est rencontrés au lycée. Et on est devenu potes parce qu'on écoutait le même style de musique. On a alors fondé un petit groupe de noisy rock qui a vécu pendant 2-3 ans, et puis après on s'est mis à l'électro.

Antibes, c'est un peu la ville ennuyeuse, où les jeunes se mettent à la musique parce qu'il n'y a rien d'autre à faire, pour créer leur propre amusement ?

N. : Je ne sais pas… Moi je fais de la musique depuis que je suis super jeune, donc je ne me suis jamais posé cette question ! (rires)

A. : On ne s'ennuie pas à Antibes ! C'est cool, il y a la mer, le soleil. C'est sympa !

On a du mal à déceler vos influences : ok, il y a le noisy rock, la pop, l'électro,… Mais du métal aussi, non ?

N. : (agréablement surpris) Ca fait plaisir que tu parles de métal, parce qu'on est des fans de Judas Priest ! (rires) Même si on écoute aujourd'hui plus de noisy, de pop, d'électro et de krautrock… Je pense que notre musique mélange le tout.

Comment composez-vous ? Exclusivement par ordinateur ou bien utilisez-vous également des instruments live ?

A. : En fait, pour la composition, on n'utilise pas d'ordinateur… On utilise que des machines, des synthés, des boîtes à rythmes, des trucs ainsi… De la guitare aussi. Mais on n'a pas de logiciels.

Et en live ?

N. : En live, on a maintenant un batteur et un bassiste, et donc c'est un peu plus noisy, plus rentre dedans, plus rock en fait… Et puis on voulait montrer autre chose. En fait, je pense que cette nouvelle tournure colle mieux au deuxième disque.

Votre musique est un peu fantomatique, comme le suggère le titre de l'album… On dirait qu'elle a été composée sur les " ruines d'une civilisation perdue ". Les voix, par exemple, sont comme fossilisées.

A. : Ouais ! C'est notre son à nous. On voulait incorporer un peu plus de voix par rapport à notre premier disque, et les utiliser de façon originale, " fantomatique ", comme tu dis. Ca fait partie de notre son : empiler des synthés, des boîtes à rythmes, de la batterie, et les mixer comme un mur de sons.

Ces voix, d'où viennent-elles ?

A. : Ce sont de vraies voix. Elles ont été enregistrées en compagnie d'amis musiciens, qui appartiennent plus ou moins au même label que nous, Gooom. Nous avions envie de travailler avec eux, parce qu'on partageait les mêmes affinités musicales. Cela s'est fait naturellement.

Des noms ?

N. : Il y a la chanteuse de Cyann & Ben, Benoît de Villeneuve (qui va bientôt sortir quelque chose sur Gooom), deux copines à lui, et Montag, un Québécois qui fait de la musique électronique. Il s'est chargé des pistes de violon.

Gooom est une structure assez atypique dans le paysage musical français, comme votre musique. Comment vous positionnez-vous par rapport à la scène électro française ?

A. : On ne se pose pas trop la question, en fait… On n'essaie pas de ressembler à tel ou tel groupe ou de faire partie de la même mouvance musicale. On fait juste notre musique comme on la sent.

On parlait d'Antibes tout à l'heure : on a l'impression que votre environnement influence directement votre travail. Votre musique est assez cinématographique, remplie de " paysages sonores ", si vous préférez…

A. : C'est vrai qu'on regarde beaucoup de films, des vieux, des plus récents, des films SF,… Ce côté spatial, atmosphérique vient sans doute de là. Les images évoquent pour nous de la musique.

Vous avez composé la musique d'un film, justement !

N. : Ouais ! D'un documentaire… Sur la PAC, la " politique agricole commune " : c'est vachement excitant, c'est super rock'n'roll ! (rires) Mais c'était un reportage de la BBC. Il colle bien à notre musique, parce qu'il recèle beaucoup de paysages.

Votre musique, en tout cas, est difficile à décrire, mais s'accorde bien en effet à l'élément spatial… Dans quel état d'esprit l'avez-vous composé ?

A. : Dure comme question… Tout dépend du moment, du temps qu'il fait dehors. En fait, c'est assez bizarre.

Bizarre, vous avez dit " Bizarre " ? Nicolas et Anthony nous auraient-ils trompés sur leurs origines terrestres ? Des fans de Judas Priest ! ? Rendez-vous aux Nuits pour en avoir le cœur net, avec à l'affiche également : " rinôçérôse ", The Eternals et Zongamin.

 

 

Fireside

On écoute vraiment de tout : d Aphex Twin à Tchaikovsky?

En Suède, Fireside est un groupe de rock plutôt connu, qui arpente les scènes en compagnie des Hives et des Hellacopters, des amis d'enfance et de tournée. Ici, la réputation du quatuor est encore à faire : si on parle souvent de " feu " pour les décrire, c'est de feu d'allumettes, d'un incendie qui peine encore à s'embraser… Mais " Get Shot ", un sixième album bourré de chansons faciles à chanter et de refrains malins, devrait changer la donne. " Allô, les pompiers ! Y a la maison qui brûle ! " : avec son rock énervé mais pas minet, Fireside met le feu à nos tympans. Les jeux de mots faciles, ça nous connaît… Encore un : " Il n'y a pas de fumée sans feu ". Autrement dit : derrière ce rock enlevé se cachent sûrement des types bien, qui ne demandent qu'à mieux se faire connaître. Nous avons voulu en avoir le cœur net, direction… Leuven, pour une interview-vérité. Juste avant un concert furibard, le bassiste Frans Johansson a répondu à nos questions. Et révélé que malgré cette violence qui sourd de leur musique, ils sont d'adorables personnes. Et de sacrés buveurs de bières.

Votre nouvel album est fort différent des précédents : il sonne davantage comme un mélange de pop, d'EMO, de folk et de rock psychédélique… Qu'en penses-tu ?

Oui, je suis d'accord… Sauf en ce qui concerne l'EMO ! Je pense qu'il est le résultat d'un bon mélange de pop songs et d'éléments plus rock… Tu sais, on écoute autant les Beatles que les Stones, même si les gens pensent qu'on écoute des trucs plus violents…

C'est clair qu'il y a toujours une tension dans votre musique, entre calme et violence, mélodies pop et passages plus colériques. Comment faites-vous pour garder cet équilibre ?

Je ne sais pas… On écrit juste des chansons : c'est assez simple, en fait… L'un d'entre nous vient avec un riff, par exemple, et on essaie de créer une chanson autour, de développer une idée. Le principal, c'est que la chanson soit bonne. On ne pense pas à cet équilibre dont tu parles… Si elle sonne bien, c'est OK : on garde le titre… Suivant ! On ne se dit jamais avant de se lancer dans l'écriture d'une chanson : " Essayons de faire sonner ce morceau comme ceci ou comme cela ", on vient chacun avec son truc, et puis tout le monde y va de son commentaire, on rajoute une ligne de basse, un couplet, de la voix par-ci par-là, … Rien de très révolutionnaire !

Il n'empêche que cet album marque une cassure, non ? Vous étiez plus " hardcore " dans les années 90…

C'est vrai que de 1992 à 1995-96, on nous rattachait à cette scène hardcore… Mais ce n'est pas de notre faute ! Il s'agit d'un amalgame : en Suède cette scène était très vivace, et comme on jouait dans le même circuit de salles, on nous a rapidement catalogués " hardcore "… Même si cette étiquette ne nous a jamais collés à la peau : on n'a jamais été un groupe " en colère ", ce genre, on voulait juste être considéré comme un groupe de rock ordinaire… Mais le fait de jouer fort, et voilà vous êtes hardcore !

Fireside existe donc depuis plus de dix ans…

En 1992, Kristofer (ndr : Astrom, le chanteur) et Pelle (Gunnerfeldt, le guitariste) ont fondé le groupe, et m'ont demandé de les rejoindre, tout comme Frederic (drummer à l'époque et remplacé depuis par Per Nordmark). C'était juste un hobby : on jouait ensemble pour le fun… Mais dès nos premières répétitions, la musique sonnait vraiment bien ! N'empêche, c'était juste pour se marrer : quand t'as 17/18 ans, que tu joues dans un groupe de rock, c'est vraiment le pied ! Que demander de plus ? (Il sourit comme un enfant)

Qui a produit ce sixième album ?

Kalle Gustafsson Jerneholm des Soundtrack of Our Lives. Jusque là, on produisait nous-mêmes nos albums, mais pour celui-ci on a voulu un vrai producteur, de manière à pouvoir davantage déléguer. Passer plus de temps à se relaxer et à essayer de nouveaux trucs… Kalle est un peu le cinquième membre du groupe, il vient avec des idées, et tout le toutim… Et puis c'est un bon ami, donc c'était vraiment sympa de travailler avec lui.

Vous êtes connus en Suède, mais beaucoup moins ici…

Oui, c'est exact : ici on joue en général devant 300/400 personnes… Mais j'espère que cet album va changer le cours des événements ! Mais ce qui est cool, c'est qu'ici les gens se lâchent beaucoup plus en concert. En Suède, c'est moins chaud, les gens ne bougent pas, sauf dans les festivals.

Pensez-vous profiter du garage-punk revival, et de la notoriété de vos voisins de palier, The Hives, The Hellacopters, Turbonegro,… ?

Je pense que c'est une bonne chose, même si je ne sais pas si on fait partie d'une quelconque " scène rock suédoise "… Il y a toujours eu des bons groupes rock en Suède. La seule différence aujourd'hui, c'est qu'ils sont maintenant en couverture des magazines anglais ! Ce revival a commencé en Suède en 1995/96, mais c'est seulement aujourd'hui qu'on en parle en dehors de nos frontières ! Les groupes que tu mentionnes sont nos amis. Je les aime bien. Certains sont meilleurs que d'autres, certains sont franchement mauvais… Turbonegro, par exemple, est un sacré bon groupe.

Pelle a produit The Hives, tu as joué avec The Soundtrack of Our Lives, et Kalle de ce même groupe a produit votre album… C'est clair qu'il y a une réelle entente entre vous ! C'est valable aussi pour les autres groupes ?

Oui, parce que la Suède est un si petit pays : tu finis par rencontrer tous les autres groupes… Evidemment tu t'entends plus avec certains qu'avec d'autres. Soundtrack of Our Lives, The Hellacopters : ce sont des groupes qui jouent depuis tellement longtemps… C'est normal qu'on les connaisse ! Bon, maintenant il y a toute une flopée de nouveaux groupes qu'on connaît un peu moins, mais il suffit en Suède de jouer dans un festival, et tu sais vite qui est qui ! (rires)

Et pas seulement en rock, mais aussi en country-folk, en électro, en nu-jazz…

Ouais, il y a beaucoup de ces songwriters folk-americana… Un peu trop à mon avis ! (rires)

Justement : Kristofer a sorti des albums solos beaucoup plus folk que ce qu'il écrit au sein de Fireside… Est-ce important pour lui de garder cette indépendance, d'avoir ce projet plus personnel ?

Il s'agit de deux choses complètement différentes. Il fait des trucs de son côté, et ça ne nous regarde pas. Fireside n'a rien à voir avec ses projets personnels. Nous sommes un groupe. Kristofer, c'est Kristofer, point barre.

De quand date cette carrière solo ?

1996/97. A cette époque on tournait tellement qu'il en a eu vraiment marre… C'est la raison pour laquelle il a entamé une carrière solo en compagnie de Hidden Truck (NDR : le nom du groupe qui l'accompagne). Pour faire un break. Je pense que ça lui a fait du bien… Il faisait ses trucs de son côté, et nous du nôtre.

Comment composez-vous au sein du groupe ?

Pelle et moi composons la musique, et Kristofer écrit les paroles.

Et Kalle, le producteur : avait-il vraiment un rôle primordial ?

Oui. Il était vraiment le cinquième membre du groupe. Il nous a vraiment secondés, en nous poussant à écrire les meilleures chansons possibles… Avec lui on les écoutait 500 fois, on y rajoutait des instruments, de nouveaux éléments, de nouveaux sons, etc. Et puis c'est toujours bien d'avoir un point de vue extérieur, et de pouvoir se concentrer uniquement sur ton boulot d'écriture. Ce qui n'était pas possible quand on produisait et enregistrait tout, nous-mêmes.

La chanson centrale de " Get Shot ", " I'm Coming Home ", surprend par sa mélancolie : voilà une chanson triste et lente au milieu de neufs hymnes pop rock bien enlevés. C'est délibéré ?

Oui. On voulait qu'il y ait une pause au milieu de l'album, sinon il aurait été trop rentre-dedans, constamment rentre-dedans… Un petit break, c'est bien : tu te relaxes, et puis ça repart ! (rires)

Cette chanson est assez proche des travaux solos de Kristofer…

Oui, je sais. Mais c'est Pelle qui l'a composée. Kristofer a juste écrit les paroles.

Ces textes semblent plus dépressifs quand il écrit pour lui, et parlent davantage d'amour. On a l'impression qu'il ne privilégie pas les mêmes thèmes selon qu'il écrit pour ses albums solos ou pour Fireside.

Chez Fireside, ce sont davantage des chansons punk-rock : les textes doivent être plus immédiats. Pour ses Hidden Truck, c'est plus passionné, désespéré. Mais je ne pense pas qu'il se dise " Je dois écrire comme ceci pour Fireside, et comme cela pour mes chansons solos "… Je pense qu'il écrit ses textes, et s'il les trouve bons pour Fireside, il les garde pour Fireside… De toutes façons, ce ne sont que des paroles !

La musique est bien plus importante ?

Non, mais les textes ne sont pas aussi importants.

Idem pour les titres ? Par exemple, " Swinging Sid's Chain Around " ne veut rien dire ?

Si, bien sûr ! C'est un hommage à Sid Vicious. Un jour il est entré dans une discothèque avec une chaîne, qu'il s'est mis à faire tourner au-dessus de sa tête, sur le dance-floor. Cela nous fait marrer ! Mais ce ne sont que des mots. On ne veut pas que les titres de nos chansons aient un rapport avec la musique. Du moment que le titre sonne bien, ça nous convient.

Et " Get Shot ", le titre de l'album ?

C'est une référence aux Happy Mondays.

Vous aimez les citations ?

Tu sais, on écoute vraiment de tout : d'Aphex Twin à Tchaikovsky…

En parlant d'électro, c'est un peu un des parents faibles de votre musique… Une option pour le futur ?

Pourquoi pas ? Même s'il y aura toujours de la basse, de la guitare et de la batterie ! Mais à l'aide de ce canevas, on peut faire ce qu'on veut, rajouter plein de trucs. En studio, on a l'habitude d'aller dans toutes les directions, d'expérimenter à tout va… Du moment que ça sonne bien, c'est tout ce qui compte.

La confection de cet album a nécessité beaucoup de temps ?

Un an rien que pour l'enregistrement ! Mais bon, c'est parce qu'on a fait pas mal de pauses ! (rires) Le seul problème qu'on a eu, c'est quand Kalle a dû nous abandonner pour partir en tournée avec The Soundtrack of Our Lives… On ne pouvait plus travailler sans lui ! (rires)

Les concerts, justement, c'est important ?

(redevenant sérieux) Absolument. C'est même la chose la plus importante. Tu rencontres tes fans, tu vois…

D'où vient l'idée de la pochette ?

Sympa, non ? On voulait qu'elle ressemble à ces pubs d'Absolute Vodka. La photo a été faite en une seule prise, sans retouches ni rien ! Et puis on voulait voir nos tronches chez les disquaires, parce qu'on ne s'était encore jamais montré en couverture de nos albums…

Merci Frans pour toutes ces précisions.

Y a pas de quoi.

Hollywood P$$$ Stars

Du porno, de l emo et Apollo : une vision de l'Amérique

Non, il ne s'agit pas du titre du nouvel essai de Norman Mailer. Ici, on a plutôt l'habitude de parler musique. Chez Hollywood P$$$ Stars, on est servi, d'autant qu'on n'a pas l'habitude d'entendre du vrai bon rock'n'roll en Belgique, à la sauce EMO (mais pas trop). En plus, Redboy et Anthony Sinatra ne sont pas nés de la dernière pluie garage revival : My Little Dictaphone pour l'un, Piano Club pour l'autre ; ces gars-là ne sont pas des novices. Mais cette fois, c'est donc du côté du rock le plus burné qu'on les retrouve. Hollywood P$$$ Stars qu'ils s'appellent : " ça claque ", comme dirait Anthony. Leur son aussi. Rares sont les groupes belges qui sonnent ainsi dans le rouge (leur couleur préférée), guitares en avant et tout le toutim. Ca fait du bien, comme s'envoyer un rail de coke la main au cul d'une starlette X… C'est une image, comme celle qu'affectionnent ces quatre Liégeois dont le premier EP, " All on the six ", vient de sortir. Entretien.

Quelle est l'histoire d'Hollywood P$$$ Stars ?

Redboy : Anthony (Sinatra, voix/guitare) et moi on se connaissait un peu de vue, parce qu'il organisait un festival à Liège, le 'Liège Rock', et qu'on se rencontrait régulièrement lors des concerts. Puis un jour, on est tombé sur une annonce pour participer au Concours Circuit. Mais il fallait rendre les démos deux jours plus tard… On s'est dit en rigolant qu'on ferait bien un truc pour le gagner, et voilà.

Anthony : Au départ on jouait déjà tous de la musique : lui dans My Little Cheap Dictaphone, moi dans Piano Club… Mais on écoutait aussi de la musique plus dure, et on avait envie de faire quelque chose qui aille plus dans ce sens.

R. : On a enregistré des morceaux en une après-midi puis on a rendu la démo et on a été sélectionné. Quinze jours plus tard, on accordait déjà notre premier concert pour le Concours, ce qui nous a obligé à trouver un bassiste et un batteur. Puis on a passé les éliminatoires jusqu'à la finale, qu'on a gagnée. Alors, tout s'est enchaîné super vite, et Hollywood a un peu pris le pas sur nos autres projets… Maintenant que c'est un vrai groupe, il constitue pour l'instant notre priorité.

Il n'empêche qu'au départ, c'était plus un défi entre potes.

R. : C'était un peu ça, mais on avait quand même la volonté et l'envie de faire un groupe plus rock à côté de nos groupes respectifs, avec des guitares électriques et tout le reste.

C'est vrai que vous sonnez résolument rock, et c'est finalement assez rare en Belgique pour le souligner… Il y a très peu de groupes en Wallonie et en Flandre qui sonnent ainsi " toutes guitares dehors ".

A. : C'est ce qu'on nous dit souvent. C'est vrai que lorsqu'on nous demande de nous comparer avec d'autres groupes en Wallonie, il y a clairement une séparation entre les groupes pop et tout ce qui est musique plus dure, genre hardcore/metal… Mais il n'y a pas de groupe rock, qui enchaîne mélodie et énergie. Pour trouver des groupes de ce style, il faut se tourner davantage vers l'étranger, les USA. Mais en Belgique, ouais !… Bon.

Vous parlez des Etats-Unis… Le rock US est une de vos principales influences ?

R. : En rock, on écoute quasiment que des groupes américains.

Anthony : On est très fan de la scène EMO, mais on n'a absolument pas envie de suivre ce chemin-là dans le sens où c'est vraiment un carcan duquel tu ne sors pas. On a toujours ces influences pop qui nous disent de mettre de la mélodie là derrière, même s'il y a beaucoup d'énergie. C'est très " guitares en avant ", mais on aime que ça reste des chansons avant tout, et que ça soit écoutable.

Quels groupes américains écoutez-vous ?

R. : Notre bassiste est un grand fan de Fugazi. Sinon Blonde Redhead, At the Drive In, Van Pelt, … Mais notre côté pop nous rattrape aussi ; et notamment des groupes comme les Strokes ou les Pixies. On n'est pas braqué : si on a envie de faire des morceaux plus calmes, on le fait. Comme les violoncelles sur " Apollo ". On n'a pas envie que les morceaux se ressemblent trop comme dans l'EMO : on essaie de se diversifier tout en gardant une ligne de conduite, une cohérence.

L'imagerie, le nom, les titres des chansons, … Ca va dans le sens de cette cohérence ?

A. : En fait, quand on a commencé le groupe, on avait deux idées en tête : la première, c'était le style musical, la deuxième, c'était le concept de l'image. On voulait un nom très fort parce qu'on savait qu'en Wallonie, si tu veux qu'on fasse attention à toi, il faut des choses qui claquent. Et on a voulu que ça claque dès le départ. Donc le nom " Hollywood Porn Stars ", qui semble un peu gros comme ça, c'est un peu un cliché du rock… Mais on aime utiliser les clichés du rock : les gros solos à plusieurs guitares, les cordes,… Même si on garde cet esprit de faire des chansons " sérieuses " : on n'est pas The Darkness.

R. : Ca peut être pris pour du second degré, mais on avait vraiment envie d'avoir un concept et une imagerie qui soient cohérents aussi bien au niveau du style que de l'attitude : les T-shirts, les morceaux, les pochettes,… On avait vraiment envie d'un tout homogène qui dégage une image forte et dont on se sent proche.

A. : Ce qui ne veut pas dire qu'on est à plat ventre devant les Etats-Unis, en suppliant d'y aller un jour. On n'est pas du tout dans ce trip-là. On aime juste une certaine idée de l'image et de l'esthétique américaines, sans pour autant en partager les idées politiques.

R. : Les textes, comme celui d'" Apollo ", parlent d'une façon désabusée de l'industrie musicale, du star system. " Betty " parle de Betty Page, la pin up un peu trash des années 50… Tout est un peu lié à ça… Mais c'est ainsi qu'on ressent le groupe depuis le début.

Vous êtes signés sur Soundstation, un label basé à Liège. Etait-ce un choix évident pour vous, vu que vous venez de la région ?

A. : Les affinités qu'on a avec la Soundstation, c'est surtout au niveau de nos choix musicaux.

Redboy : Et puis tous les gens dans le milieu rock indé à Liège se connaissent. Fabrice (NDR : Lamproye, boss du label), on le connaît bien via l'Escalier et la Soundstation, les deux principales salles de concert rock à Liège.

A. : Ca nous plaisait bien de travailler avec lui. Au niveau de la proximité et de la communication, c'est beaucoup plus facile de discuter avec des gens qu'on voit tous les jours que de venir à Bruxelles et essayer d'y organiser une réunion… Enregistrer près de chez nous, c'était une idée qui nous plaisait.

Depuis quelques années se développe à Liège une nouvelle scène rock, vivace et prometteuse, dont vous faites partie. D'où vient le fait selon vous qu'il y ait tant de (bons) groupes à Liège ?

R. : On est tous des passionnés de musique. On se voit souvent, on sympathise, et c'est ainsi qu'on a envie de faire de la musique ensemble, parce qu'on partage des points de vue, on va aux mêmes concerts,…

A. : Il y a aussi cette idée de collectif (NDR : le collectif Jaune Orange), où les groupes travaillent l'un pour l'autre, dans le sens où chacun se pousse. Il n'y a pas de jalousie. On essaie de faire en sorte que les groupes évoluent, s'entraident.

Peut-on parler d'une " nébuleuse " rock à Liège, au niveau des groupes, des associations, des médias, du public ?

R. : Notre bassiste écrit dans Nameless. Le gars qui fait nos lights aussi. Tout est lié : ce sont toujours les mêmes personnes, les fans de rock indé à Liège.

Anthony : En fin de compte, c'est la proximité des gens et des affinités musicales qui fait qu'à Liège ça bouge.