Lorsqu’on évoque la famille Allman, on pense immédiatement au célèbre groupe des frères Allman, une formation issue de Macon en Georgie, et dont le malheureux Duane, génie de la slide, est trop tôt disparu suite à un accident de moto. Depuis, son frère Gregg est devenu le leader incontesté de l’ABB. Devon est le fils aîné de Gregg. Il a vécu auprès de sa mère à St Louis, dans Missouri ; mais il a hérité des gènes musicaux de son célèbre paternel. Devon est devenu guitariste, comme son oncle, et il possède une voix rappelant manifestement celle de Gregg. En 1999, il fonde Honeytribe, mais abandonne le dessein dès 2001. Cependant, en 2005, il décide de réactiver le projet. Pour la circonstance, Devon est épaulé par Mark Oyarzabal aux drums, George Potsos à la basse et Jack Kirkner à l'orgue. La formation est sur la route depuis et a notamment ouvert les concerts de Gov't Mule, Little Feat, Cheap Trick et, bien entendu, de l’Allman Brothers Band. "Torch" constitue le premier album de Honeytribe. Il a été enregistré aux studios Ardent de Memphis pour le label LiveWire. Provogue se charge de la distribution européenne.
La plage éponyme ouvre l’opus. Une plage qui boute instantanément le feu aux poudres. Faut dire qu’une chanson qui s’intitule "Torch" est lourde de significations. Ce brûlot met en exergue le talent des différents acteurs ; mais surtout la guitare et l'orgue, comme chez l’ABB. Instrumental, "Mahalo" flirte avec les origines sudistes. Une plage que j’apprécie tout particulièrement. A cause de cette coloration sonore proche de Santana, et puis des accords bien en avant concédées par la Gibson Les Paul de Devon. Sans oublier l'orgue Hammond très lyrique soulignant chaleureusement la ligne mélodique. Cette remarque procède sans doute de la rencontre entre le fils Allman et du redoutable guitariste espagnol qui drive le Vargas Blues Band, en compagnie duquel il a tourné et enregistré. La voix de Devon n’est pas ravagée et rauque comme celle de son père, mais elle en a le timbre et la puissance. Ce chant est ainsi bien mis en valeur tout au long de la reprise impeccable de l'une des plus célèbres chansons de Bob Marley, "No woman no cry", un fragment au cours duquel la guitare bénéficie du concours de Pedro Arevalo, invité à la slide. Le jeune Allman signe "When I call home", une bien jolie ballade blues. Il la chante passionnément tout en se réservant une envolée très remarquée sur les cordes. "Perfect world" est un blues puissant aux accents volontairement dramatiques. Les riffs sont très appuyés. La section rythmique passe en force. Une situation idéale pour permettre enfin à la guitare de tenter l’aventure. A cet instant la voix de Gregg n’a jamais été aussi proche de l'organe paternel. Proche de l’ABB mais en plus coriace, "Mercy mercy" trempe dans le blues rock sudiste. Devon n'assure que la guitare rythmique, cédant le rôle de soliste à un invité prestigieux : le jeune Joe Bonamassa. Dans son style désormais bien connu, ce dernier en profite pour déverser une orgie de notes. Toujours aussi rugueux, "Something I know" pêche un peu par son excès de densité ; un titre cependant bien imprégné des claviers de Kirkner. Southern blues savoureux, "Heaven has no mercy" autorise la cohabitation entre le quatuor largement amplifié et la National steel slide d'Arevalo. Le spectre de l’Allman Brothers Band réapparait chaque fois que la Gibson de Devon est rejointe par la slide de Pedro Arevalo. "Why you wanna bring me down?" en est probablement la plus belle illustration. Mais le chemin est encore long avant de rivaliser avec le plus célèbre des jam bands sudistes. Bref intermède instrumental, "511 Texas Avenue" est uniquement interprété par Devon à la guitare acoustique. Cet album de bonne facture, mais trop court, s’achève par le vigoureux "Nothing to be sad about".