Soirée événement destinée aux aficionados de doom metal et de post-hardcore, programmée ce mercredi 29 mai, au Grand Mix de Tourcoing, en compagnie du quintette californien d’adoption (la formation est, en fait, originaire de Boston) Isis. Projet d’Aaron Turner, le fondateur du label indépendant Hydra Head Records, Isis en est déjà à son troisième album, « In the ocean of truth », un opus surprenant, complexe, riche en réflexions existentielles, dans lequel le clavier se fait plus présent aux dépens des hurlements ténébreux d’Aaron. Un indispensable de votre discographie de l’année 2006. Et vu la réputation dont ils jouissent sur scène, on s’attendait à une belle claque, place Notre Dame.
Pour chauffer la salle, le projet qu’Isis souhaitait présenter dans le cadre de cette tournée, n’y est pas allé par quatre chemins. Il a choisi Oxbow. Un combo californien qui affiche déjà 20 années d’existence au compteur. Un groupe ‘culte’ qu’on peut franchement qualifier de ‘schizophrène’ en raison de la double personnalité développée à travers deux styles musicaux différents : le post-hardcore lorsque le combo se retrouve à quatre, le blues minimaliste quand Eugène Robinson et Niko Wenner sont réduits à un duo. C’est d’ailleurs sous cette configuration que Docteur Jekyll et Mister Hide nous ont proposé l’ouverture des festivités. Immense, de corpulence impressionnante, à la couleur de peau café, Eugène, véritable sosie de Michael Clarke Duncan (l’acteur qui endosse le rôle du condamné à mort John Coffie dans le film « La Ligne verte »), monte sur scène, flanqué d’un roman écrit en 1895 par Thomas Hardy, « Jude the obscure », une histoire sombre, pessimiste, triste, teintée de colère et d’injustice. Des sentiments qu’Eugène incarne à merveille sur les planches. Nikko sculpte un relief musical très blues à l’aide de sa guitare sèche. Eugène s’y ancre pour y dispenser un set intense, douloureux, rythmé par des moments de clameur et de silence, d’incantations et de prières. De déhanchements malsains aussi. Sans oublier le petit grain de folie. Quelque part entre un Jesus Lizard ‘unplugged’ et la Nico du Velvet Underground, le duo nous propose une bien belle prestation. La scénographie mêlée au personnage impressionne. Le public est surpris, dans le bon sens du terme. Le temps d’un rappel et d’une petite bière pour enfin vivre l’épilogue de la soirée.
Le set d’Isis s’ouvre par quelques notes dispensées au piano. Bryant Cliffort, le guitariste/claviériste (Il collabore également à un autre projet, Red Sparowes, groupe de post-rock qui jouait le même soir à Bruges) en est le responsable. Progressivement, les guitares de Michael et d’Aaron, la basse de Jeff et la puissance du batteur, l’autre Aaron, viennent envahir le public, dans un mur du son décoiffant. Cinq figures charismatiques, montées sur des tapis de pédales à effets sonores multiples, vous prennent alors au fond des tripes durant près d’une heure trente. Atmosphères tantôt pesantes, froides et inquiétantes, tantôt violentes, mécaniques et explosives, les cinq virtuoses nous emmènent dans l’univers de Neuroris, Cult of Luna, Amen Ra, Godflesh, Tool ou Mogwai. Derrière ce génie de technologie, les influences de Pink Floyd et du Led Zep s’imposent dans un tsunami de sons, bien huilé qui frôle la perfection. Le concert atteint des sommets quand « In Fiction », un des titres phares du quintette, fait exploser les décibels. Le moment d’un rappel et déjà le groupe quitte la scène. Le temps semble si court lorsqu’on est si proche du divin…
Organisation Grand Mix Tourcoing