En 25 ans, Lisa Gerrard s’est forgé une solide notoriété dans le monde de la musique. Que ce soit chez Dead Can Dance, par ses ‘soundtracks’ (NDR : « Gladiator », par exemple) ou à travers ses travaux en solo. Pourtant la petite salle Vauban (environ 1000 places) du Zénith de Lille était loin d’être remplie. Dommage pour ‘Les Gens de la Lune’, qui avaient osé cette programmation audacieuse.
En guise de décor, deux tentures blanches ornent l’arrière-scène avant d’en baliser le sol suivant des parcours symétriques. Avant le concert, une bande-son diffuse des chants d’oiseaux.
Accompagnée par un pianiste et un claviériste, Lisa est épaulée plus rarement par un choriste et un décorateur sonore.
Le concert épouse des allures de célébration mystique. Sobre et épurée, la musique fait la part belle aux longues mélopées, aux œuvres atmosphériques et cérémonielles (la rythmique-synthétique- ne s’ébrouera que pour trois morceaux) et à ces accords amples et majestueux longuement tenus.
La playlist a parcouru « The Silver Tree », dernière réalisation en date, mais a opéré des incursions dans le répertoire plus ancien, dont quelques rares compositions de Dead Can Dance. Le point final du concert sera d’ailleurs « The Host of Seraphim », datant de 1988 (sur l’album « The Serpent’s Egg »), qui reste à mes yeux la plus belle réussite de toute la carrière de DCD.
Lisa est un personnage. Ses mouvements sont lents et dignes, sa gestuelle est atypique fort stéréotypée et semble chargée d’une signification ésotérique. Durant tout le concert, elle quittera d’ailleurs rarement l’espace défini par son micro et ce tabouret placé à sa droite, sur laquelle elle s’appuiera souvent dans une posture figée. Tout se passe comme si, grande prêtresse d’une cérémonie religieuse, elle s’oblige à un rituel codé, accompli devant un public parfaitement respectueux. Habillée d’abord d’une longue robe blanche étroite, augmentée d’une traine, elle réapparaîtra en noir pour la deuxième moitié du concert.
L’attraction principale sera bien sûr cette voix multiforme et ce chant si particulier, qui font de Lisa une très grande dame. Flirtant parfois avec une variété anglo-saxonne jazzifiante, elle nous assène le plus souvent des vocalises quasi-incantatoires et chargées d’émotion et de souffle oriental. Jamais prise en défaut, elle décoiffe par sa puissance et provoque de fréquents frissons de bonheur. Elle sera vraiment à la hauteur des espérances du public, qui lui réservera deux ovations debout.
Certes, il faut pénétrer cet univers si particulier, se laisser transporter et y abandonner tous ses repères. Mais le jeu en vaut la chandelle, car Lisa Gerrard a donné, ce soir-là, un très bon concert.
Organisation A Gauche De La Lune