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Philippe Blackmarquis

Philippe Blackmarquis

 

 
jeudi, 27 juin 2024 15:35

En maitresse de cérémonie…

C'est une belle affiche que nous propose l’AB ce soir. Au programme, deux formations qui explorent un univers très 'dark' :  Kælan Mikla et Chelsea Wolfe. Mais dans les deux cas, il s'agit d'une noirceur propice aux scintillements de lueurs brillantes, aveuglantes même.

C'est à 19h45 que Kælan Mikla monte sur les planches. Le trio féminin basé à Reykjavík a été formé en 2013 et on mesure le chemin parcouru entre le Bonnefooi, le café situé en face de l'AB, où les 3 Islandaises avaient joué en 2017, coincées entre la porte et le bar, et la prestigieuse scène de l'Ancienne Belgique. Dès les premières notes de leur morceau éponyme, on est immergé dans un univers spectral, peuplé d'ombres et de sorcières, une cold-dark-wave teintée de folklore islandais, glacée et envoûtante. Mais on retiendra surtout le magnifique “Sírenur”, extrait du dernier album du combo, l'excellent “Undir Köldum Norðurljósum”, une composition d'une beauté déchirante, qui met parfaitement en valeur la voix de Laufey Soffía. Sólveig Matthildur Kristjánsdóttir se consacre, quant à elle, aux voix, aux claviers et à la flûte tandis que Margrét Rósa Dóru-Harrýsdóttir nous gratifie des sons énormes et abyssaux qu'elle tire de sa basse. Une très belle prestation, qui donne envie de se replonger dans l'atmosphère nordique de leurs productions. (Pour accéder la page ‘Artistes’ de Kælan Mikla, c’est ici).

Dès 21h, c'est au tour de la grande prêtresse, Chelsea Wolfe, de monter sur les planches. A ses côtés, son comparse à la scène comme à la ville, Ben Chisholm, se charge de la basse et des synthés, Bryan Tulao (Black Math Horseman, MGR, Mother Tongue) de la guitare et Jess Gowrie (Horseneck, Red Host, The Drama, Mrs. Piss) des drums. Tout de noir vêtue, la Californienne focalise tous les regards. Etablie à Sacramento, Chelsea est responsable, à ce jour, de 8 superbes albums. Aujourd'hui, elle vient présenter le 'petit dernier', paru récemment sur Loma Vista. « She Reaches Out To She Reaches Out To She » constituera donc, tout naturellement, l'épine dorsale de la setlist.

En grande maîtresse de la soirée, Chelsea Wolfe entretient une atmosphère mystérieuse, déroulant les lentes vagues d'un post-doom-folk lancinant... Dans les arrangements du dernier opus, Chelsea a renoué avec le style plus électronique de “Pain Is Beauty”, qui reste, aux yeux de votre chroniqueur, son chef-d'œuvre. Mais le son est ici moins trip-hop / electronica et lorgne carrément vers le ‘power electronics rock’ de Nine Inch Nails. Pour notre plus grand bonheur.

C'est particulièrement audible dans les 2 premiers titres de la setlist : “Whispers in the Echo Chamber” et “Everything Turns Blue”. Pendant “House of Self‐Undoing”, imprimé sur un rythme plus rapide, l'artiste se saisit du micro et ose quelques pas sur le podium. Elle ne se cache plus derrière un voile comme à ses débuts mais on sent qu'elle est toujours très farouche, très fragile. Il y a néanmoins une sérénité dans son attitude, qui n'est pas étrangère à sa décision, il y a quelques années, d'adopter un mode de vie sobre et sans-alcool.

Au moment de “16Psyche”, extrait de “Hiss Spun”, on est de retour dans le versant ‘guitaristique’ de Chelsea Wolfe et le public se manifeste dès les premières notes du riff aux accents ‘bluesy’. Cette incursion dans “Hiss Spun” se poursuit grâce à “The Culling”, un morceau qui permet d'admirer la maîtrise de la dynamique affichée par le band car on passe en quelques secondes d'un mur du son bruitiste à un final apaisé et tout en retenue. Pendant le très beau “After The Fall”, Ben Chisolm qui, à propos, arbore désormais une imposante moustache, passe des claviers à la basse et la beauté pénétrante de la mélodie finit par nous crucifier. Le chant de Chelsea est parfait et ce, en dépit des petits problèmes de voix qui nous avaient été rapportés par son entourage. 

Pour “The Mother Road”, extrait de “Birth of violence”, Chelsea passe à la guitare acoustique et c'est un des moments les plus poignants de la soirée. Le final tout en harmonies mineures est époustouflant et éminemment hypnotique. Ayant acquis les bases de la sorcellerie blanche grâce à sa grand-mère, l'artiste a le talent pour élaborer des élixirs soniques capables de nous emmener très loin.

Autres grands moments : “Feral Love” et “Salt”, deux superbes compos ‘dark-trip-hop’, qui évoquent Portishead et Tricky. Dans “Unseen World”, Chelsea nous guide dans les mondes parallèles en agitant un pendule, avant une dernière série de 3 plages extraites de son dernier opus. Pour clôturer le set, le désormais classique “Flatlands” nous amène tout en douceur vers un rappel qui renouera d'abord avec le post-metal, grâce à “Carrion Flowers” avant de laisser retomber définitivement le rideau sur un déchirant “The Liminal”, interprété en solo à la gratte sèche...

Setlist :

Whispers in the Echo Chamber

Everything Turns Blue

House of SelfUndoing

Tunnel Lights

16 Psyche

The Culling

After the Fall

The Mother Road

Deranged for Rock & Roll

Feral Love

Salt

Unseen World

Eyes Like Nightshade

Place in the Sun

Dusk

Flatlands

Rappel :

Carrion Flowers

The Liminal (Chelsea Wolfe solo)

Crédit photo : Hugues de Castillo

(Organisation : Ancienne Belgique)

Mais où vont-ils s'arrêter ? C'est la question qu'on est en droit de se poser concernant Eosine. Originaire de Liège et emmenée par la très talentueuse Elena Lacroix, cette formation ne cesse de surprendre. Après sa victoire au Concours-Circuit et la sortie de deux remarquables Eps, elle est occupée d'exploser grâce à une série de concerts hallucinants.

Il y a quelques jours, son style shoegaze hybride et innovant a enflammé le podium de la Fête de la Musique, au Cinquantenaire, à Bruxelles. Une prestation énergique et captivante qui a enthousiasmé les spectateurs présents qui, pour la plupart, ne connaissaient pas le combo.

Fait surprenant, la majorité de la setlist est composée de titres inédits. Seuls “Plant Healing”, “Digitaline” et “Progeria”, son dernier single, relèvent de sa discographie. Les 5 autres morceaux sont des compositions récentes et, pour être franc, ils sont époustouflants. L’expression sonore évolue toujours dans un style combinant shoegaze, postpunk, dream-pop et inspiration celtique mais le spectre musical s’élargit grâce à des touches progressives, krautrock et, par moments, carrément grunge.

Le nouveau guitariste, Dima Fontaine, qui militait auparavant au sein du groupe liégeois Naked Passion, n'est certainement pas étranger à cette évolution. Il apporte une palette musicale très riche et renforce parfaitement le travail vocal d'Elena.

Mais ce qui frappe le plus dans ce nouvel avatar d'Eosine, qui est complété par Benjamin Franssen à la batterie et Guillaume Van Ngoc à la basse (remplaçant), c'est la puissance de son show en ‘live’. Le côté shoegaze un peu nonchalant est supplanté, sur les planches, par une énergie brute et une maîtrise étonnante des pulsions et des flux. Le groupe alterne les moments aériens et les envolées rythmiques les plus féroces.

D'ailleurs, le public ne s'y trompe pas car l'espace devant la scène se remplit au fil des minutes et l’auditoire devient plus en plus conséquent. Il finit même par s’enflammer, et lors de la dernière partie du show, les premiers rangs s’engagent dans un ‘pogo’ débridé, et tout particulièrement lors du final, “Digitaline”. Pour faire monter la pression, Elena se lance dans une diatribe vocale insensée sur la rythmique hyperrapide et, conclusion paroxystique, se roule par terre en criant comme une possédée. L'ange habillé de blanc s'était transformée en démon. Le tout, devant une foule médusée, touchée par une sorte de transe. Un moment inoubliable.

On attend impatiemment le nouvel Ep du groupe. Il doit sortir en septembre sur le label Mayway Records, qui héberge déjà les excellents Haunted Youth. Et l'année prochaine, paraîtra le premier album ‘long format’ du quatuor. Tout est en place pour qu'Eosine devienne un des groupes phares du rock belge, au même titre qu'un Whispering Sons. En tout cas, et sans mauvais jeu de mot, au Cinquantenaire, Eosine était déjà un monument...

Pour consulter les autres articles (interviews, chroniques de disques, etc.) consacrés au band, cliquez sur le nom de l’Artiste dans le cadre informations complémentaires., ci-dessous.

Si vous souhaitez écouter les interviews en podcast dans l'émission ‘WAVES’, c’est ici pour Eosine et pour le projet solo d’Elena, Tokyo Witch.

(Crédit photo : Christophe Dehousse)

 

Vous l’avez constaté si vous suivez Musiczine : le groupe anglais And Also The Trees est un des ‘chouchous’ de la rédaction. Et pour cause, cette formation originaire d’Inkberrow, un petit village sis dans le Worcestershire, pratique, depuis 1979, une musique inclassable, enracinée dans le post-punk et rehaussée par un parfum néo-classique voire néo-folk. En outre, elle baigne dans une atmosphère tellurique, romantique, quasi mystique. La voix principale du groupe, Simon Huw Jones, est une personnalité attachante, authentique et d'une remarquable sincérité. Musiczine a eu la chance de pouvoir le rencontrer, dans le cadre du concert exceptionnel accordé par les ‘Trees’ dans l'église ‘La Nef’, à Namur (photos Christophe Dehousse ici). 

Bienvenue à Namur, Simon.

Bonjour, Phil. C'est bon d'être de retour ici.

Comme la dernière fois, je vais te soumettre quelques citations, et dans ta réponse, tu me diras si tu les reconnais et ce qu'elles évoquent pour toi.

Citation n° 1

‘Woods like towns with their sweet deceptive shade
Thorn locked and poison laced
To the outmost and human-less place
Lying foetal unwatched in uprooted earth
A distant ox baying, Still as a boulder cursed…’

‘Les bois ressemblent aux villes avec leur douce ombre trompeuse
Épine verrouillée et poison lacé
Vers l'endroit le plus éloigné et dépeuplé
Fœtus allongé dans une terre déracinée
Un bœuf lointain aboyant, immobile comme un rocher maudit…’

Oui ! C'est un extrait d'une des chansons de notre dernier album, “Mother-of-Pearl Moon”. Elle s'intitule “This Path Through The Meadows”.

La dernière fois que je t'ai interviewé –c’était l'an passé à Bruxelles– vous prépariez l’elpee, mais vous ne saviez toujours pas si vous l’attribueriez à votre projet acoustique, Brothers of the Trees ou à And Also The Trees.

Exact ! Au départ, il était destiné à Brothers of the Trees, à cause de son style plus acoustique. On l'avait même envoyé au mastering. Mais quand on a reçu le ‘master’, mon frère Justin et moi, nous nous sommes posé la question : est-ce un Brothers of the Trees ou un And Also The Trees (AATT) ? Serait-il trompeur pour notre public de sortir cet album sous le nom d'And Also The Trees vu qu'il est peut-être trop différent ? Serait-il déçu ?

A ce moment-là, les chansons étaient sans doute composées sous une forme acoustique, plus dépouillée ?

Non, elles étaient exactement comme elles sont aujourd'hui. L'album avait été enregistré, mixé et masterisé, et était prêt à être gravé. Mais, après l'avoir écouté, j'ai conclu que c'était à 100% du AATT, et Justin m'a confié qu'il était du même avis. Et maintenant, nous constatons que la plupart de celles et ceux qui suivent AATT sont très heureux d'entendre quelque chose d'un peu plus expérimental, de différent. Et la réaction de la presse a également été étonnante.

Comment décrirais-tu ces différences ?

Les chansons ne sont pas tellement différentes mais les arrangements sont plus dépouillés. Il y a pas mal de ‘parlando’ (‘spoken word’) et la batterie est moins présente. En conséquence, on peut davantage se concentrer sur le son des instruments individuels. Je n'ai rien contre les drums, mais j’aime pouvoir identifier clairement la clarinette, par exemple. Distinguer chaque son se déployer. C'est ce que j'ai vraiment aimé dans cet album, et je pense que les auditeurs, en général, ont également apprécié cette nouvelle approche.

A propos de “This Path Through The Meadow”, il existe deux parties dans la compo. La deuxième se distingue par un changement de ton, qui fait l'effet d'une belle surprise. La modulation est un peu progressive, un peu expérimentale, et d'une inspiration très classique. Elle me fait penser à Vaughan Williams et au morceau “Fantasia on a theme by Thomas Tallis”, dont tu avais parlé dans une interview.

Oui, je vois ce que tu veux dire.

Le début de “Fantasia” est étonnant. Les sept premières minutes sont à couper le souffle. J'ai été très ému la première fois que j'ai entendu cette composition : c'était une interprétation réalisée par l'orchestre de Toronto. Tu vois ce que je veux dire ? Il y a une amplitude, une puissance, un souffle, que l'on retrouve dans votre morceau.

Je me souviens de la première fois que j'ai écouté “Fantasia”. La copropriétaire de Reflex Records me l'a fait découvrir quand j'avais 23 ou 24 ans. J'avais entendu beaucoup de musique classique, mais sans y prêter un intérêt particulier. Et puis, j'ai tendu l’oreille à “Fantasia” et il ne sonnait pas du tout comme de la musique classique. Il y avait une véritable modernité. A chaque moment, je me demandais : est-ce que la voix de quelqu'un va entrer ici ? Scott Walker va-t-il commencer à chanter ?

Oui ! J'ai pensé la même chose (rires) !

Ensuite, elle m'a expliqué que c'était une composition d'un musicien anglais, Vaughan Williams. Cette information a complètement changé mon opinion sur la musique classique. Et j'ai voulu en découvrir davantage.

Ce morceau me fait penser à “This Path Through The Meadow”...

Je vois ce que tu veux dire. En général, on nous raconte que notre musique ressemble plus à celle d’Ennio Morricone.

Oui, bien sûr, c'est aussi vrai !

Vers la fin de cette section, il y a un son d'autoharpe ou de dulcimer, qui ressemble à une voix de femme. L'effet produit est assez 'morricone-esque'. Mais en effet, je vois ce que tu veux dire.

Il sonne comme la bande originale d'un film.

Citation n° 2 :

‘Even when lovers twist their naked bodies, skin against skin, seeking the position that will give one the most pleasure in the other, even when murderers plunge the knife into the black veins of the neck and more dotted blood pours out the more they press the blade that slips between the tendons, it is not so much their copulating or murdering that matters as the copulating or murdering of the images, limpid and cold in the mirror.’

“Même lorsque les amants tordent leurs corps nus, peau contre peau, cherchant la position qui procurera le plus de plaisir à l'autre, même lorsque les meurtriers plongent le couteau dans les veines noires du cou et que le sang impur coule à mesure qu'ils appuient la lame qui se glisse entre les tendons, ce n’est pas tant leur copulation ou leur meurtre qui importe que les images de la copulation ou du meurtre, limpides et froides dans le miroir.”

Qui est-ce ? Le Marquis de Sade (rires) ?

Non. Pense à votre dernier album. À ton avis, que représente ce miroir ?

Oh, ne serait-ce pas un texte d'Italo Calvino ?

Oui, c'est extrait du bouquin ‘Invisible Cities'...

C'est le livre dont je me suis inspiré pour écrire “Valdrada”. Mais je ne connais pas bien 'Invisible Cities'. En fait, j'avais déjà écrit un texte de chanson à propos d'une ville imaginaire, sans nom. Ensuite, j'ai lu des extraits du livre de Calvino et j’ai estimé que “Valdrada” était un nom parfait pour ma ville imaginaire. J'ai relié les deux sources au sein de ma chanson.

Pour la 3ème citation, voici un cadeau : c'est un livre. Et il y a un signet, qui désigne une partie précise du texte.

Oh merci ! C'est ‘The Marriage of Heaven and Hell’, de William Blake ! Merveilleux ! Alors, la citation...

Citation n° 3 :

‘If the doors of perception were cleansed, every thing would appear to man as it is : infinite...’

‘Si les portes de la perception étaient nettoyées, toute chose apparaîtrait à l’homme telle qu’elle est : infinie…’

Vois-tu le lien ?

Oui, bien sûr. Le lien, c'est Aldous Huxley, qui a intitulé son livre ‘The Doors of Perception’ en référence à Blake, et puis, bien sûr, les Doors, qui ont baptisé leur groupe en référence à tout cela.

Et après les Doors, des tas de groupes et artistes ont été influencés par les Doors et toutes ces thématiques...

Merci beaucoup pour le livre !

De rien ! Le livre original de Blake était constitué de plaques en cuivre, sur lesquelles il avait combiné ses poèmes et des gravures. Il n'aimait pas l'industrie du livre, qui était déjà présente à cette époque. Il voulait que chaque exemplaire soit unique. Il était incroyable, William Blake. Un vrai rebelle.

Oui, un vrai rebelle.

Citation n° 4 :

‘He that isn’t growing up is growing down.’ Such a man might end his life not as a ripened human being, but as an aged foetus. Adult in worldly wisdom and professional skills ; embryonic in spirit and even in character.’

‘Celui qui ne grandit pas régresse.’ Un tel homme pourrait finir sa vie non pas comme un être humain mûr, mais comme un fœtus usé. Adulte doté de la sagesse du monde et de compétences professionnelles mais embryonnaire dans l’esprit et même dans le caractère’.

Je ne vois pas...

C'est une citation assez difficile à identifier. Je peux te dévoiler que tu as parcouru ce bouquin, il y a longtemps... Il se pourrait même que ce soit le premier que tu aies véritablement lu...

Oh ! C'est ‘Time Must Have a Stop’ de A. Huxley ?

Exact !

D'accord. Justin aurait probablement deviné car il le relit tous les cinq ans...

Citation n° 5 :

‘The other song was a simple piece where Justin, Steven and Nick played in waltz time. I sang the words of an old, anonymous rhyme our grandmother used to narrate to us as children through a haze of cigarette smoke, called ‘There was a man of double deed’. And it was whilst recording this that Justin spontaneously played an accompanying guitar part in the style of a mandolin. It came quite naturally to him and we thought it added a nice touch.’

‘L’autre chanson était un morceau simple où Justin, Steven et Nick jouaient au rythme d’une valse. J’ai chanté les paroles d’une vieille comptine anonyme que notre grand-mère nous racontait quand nous étions enfants à travers une brume de fumée de cigarette, intitulée ‘There was a man of double deed’. Et c'est pendant l'enregistrement que Justin a spontanément joué un accompagnement à la guitare qui sonnait comme une mandoline. Ça lui est venu tout naturellement et nous avons pensé que cela rehaussait le morceau.’

Facile ! C'est moi qui ai écrit ce texte ! Il est extrait de la biographie du groupe, que je rédige en ce moment, et dont je publie des extraits sur notre site web.  

Et ma question est : vas-tu publier cette biographie sous la forme d'un livre ?

Je pense que oui. Ce projet a déjà suscité un certain intérêt de la part des éditeurs, mais je dois d'abord l’écrire. Je ne sais pas encore si j'arrêterai l'historique à la fin des années 80. Ce sont probablement les premières années du groupe qui sont les plus intéressantes.

Ce qui est incroyable, c'est le niveau de détail dans les souvenirs que tu as de l'époque !

Je tenais un journal. Et je peux aussi compter sur Justin et Steven Burrows, notre premier bassiste ; ils ont tous deux une bien meilleure mémoire que moi !

Citation n° 6 :

‘The next instant, I saw her rain-stained tombstonerear an illegible epitaph
under the gnarled branch of a small tree in the wild grass of an unvisited garden in Mexico.’

‘L'instant suivant, je vis sa pierre tombale tachée de pluie à côté d'une épitaphe illisible sous la branche noueuse d'un petit arbre dans l'herbe sauvage d'un jardin non-visité à Mexico.’

C'est le poème ‘A Dream Record’ d'Allen Ginsberg ! Il l’a écrit à la suite d’un rêve qu'il avait fait à propos de Joan, la femme de William Burroughs. C'est un poème que je récite sur l'album de Catherine Ginsb... euh Gainsbourg...

Qu'est-ce que tu as dit ? ‘Gainsbourg’ ?

Je voulais dire ‘Graindorge’, évidemment (rires) !

Catherine va aimer ça (rires).

C'est pour l'album de Catherine Graindorge, “Songs For The Dead”. Je participe à 2 ou 3 chansons, comme chanteur et auteur.

Si je ne me trompe, il s’agit de “Eurydice”, “Orpheus's Head” et “Time Is Broken”.

J'aime beaucoup les albums de Catherine. C’était un bonheur de travailler en sa compagnie. Je n'ai pas encore eu l'occasion de réécouter le ‘produit fini’ mais, en studio, il sonnait vraiment bien. L'enregistrement était vraiment très amusant. Il s’est déroulé à Gand.

Oui ! Au studio La Patrie, de Koen Gisen, le compagnon d'An Pierlé !

Ah tu les connais ?

Oui ! Je suis allé chez eux pour réaliser une interview, il y a quelques années.

J'ai rencontré An là-bas pour la première fois. C'est une artiste incroyable. Elle m'a filé des CD de sa discographie et je lui ai envoyé des albums des Trees.

Tu dois absolument écouter son elpee “Arches”.

Elle m'en a filé cinq, mais je ne connais pas les titres par cœur. Il faut encore que j'écoute. Mais j’aime beaucoup “White Velvet”. J'ai eu un véritable coup de cœur. J'aime la musique pop quand elle est de cette qualité.

Oui ! Ce disque est merveilleux également. Mais tu vas avoir une surprise en écoutant “Arches”. Personnellement, c'est son meilleur album. Tu comprendras pourquoi en l’écoutant. Je n'en dirai pas plus...

Citation n° 7 :

‘Meet beneath the autumn lake
Where only echoes penetrate
Walk through Polaroids of the past
Futures fused like shattered glass, the sun’s so low
Turns our silhouettes to gold...’

Se voir près du lac automnal
Où seuls les échos se font entendre
Marcher dans les polaroïds du passé
Futures fusionnées comme du verre brisé, le soleil si bas
Transforme nos silhouettes en or...’

C'est Ultravox !

Juste ! Et quel morceau ?

“Hiroshima Mon Amour”.

Bravo ! Sais-tu que le titre est tiré d'un roman français ?

Ah non... lequel ?

‘Hiroshima Mon Amour’ de Marguerite Duras.

C'est étrange car cette chanson d'Ultravox, nous avions envisagé de la reprendre, à l'époque...

Quelle belle coïncidence ! J'ai tapé dans le mille (rires) ! C'est étrange car elle est à 90% électronique. Comment comptiez-vous l'adapter à votre style, qui est plutôt acoustique ?

On a tenté quelques essais et puis, à un certain moment, j’ai jugé qu'il fallait que ce soit un hommage réussi, qui rende justice à cette magnifique composition. Finalement, on a laissé tomber. Mais j'adore vraiment ce morceau !

Sais-tu que j'ai interviewé John Foxx ? L'as-tu déjà rencontré ?

Non.

Oh, c'est un homme incroyable. Un véritable gentleman ! On a envie de l'appeler ‘Sir’... (rires)

Pendant l'interview, je lui ai soumis une de mes théories. J'estime en effet que “Hiroshima...” est la première chanson new-wave orientée synthés de l'histoire.

Oh !

Bien sûr, auparavant, on ne peut oublier Kraftwerk, mais ce sont des pionniers. Au début de la new-wave, en Angleterre, Gary Numan a composé “Are Friends Electric ?”, et il a avoué qu'il s'était largement inspiré d'Ultravox.

Ultravox était aussi un groupe punk.

Au début, oui.

Justin et moi, nous écoutions en boucle les deux premiers albums d'Ultravox. Et puis, bien sûr, Ultravox est devenu le groupe de Midge Ure.

Oui, mais avant Midge Ure, un 3ème long playing est paru en 1978, “Systems of Romance”.

Ah, celui-là, je ne le connais pas.

C'est un album très important. Ils y ont développé le côté hybride ‘synthé’ évoqué dans “Hiroshima Mon Amour”, ils se sont éloignés du post-punk pour créer ce style de new-wave synthétique et un an plus tard, Gary Numan a sorti “Are Friends...” et est devenu numéro 1.

Dans ce contexte, on devrait probablement aussi mentionner les Young Marble Giants.

Effectivement. Ne sont-ils pas apparus un peu plus tard ?

Oui, c'est possible.

Simon, merci beaucoup pour cette interview !

Merci à toi : c'est toujours très 'fun' !

Pour écouter et acheter le dernier album d'And Also The Trees, “Mother-of-Pearl Moon”, c'est .

Pour en savoir davantage sur AATT cliquez sur le nom du groupe dans le cadre ‘Informations complémentaires’.

(Photo : Christophe Dehousse)

 

 

 Il existe des groupes inclassables. On les appelle ‘crossover’ et ce mot ne se réfère pas à un modèle de voiture. On pense ici à Nine Inch Nails, Radiohead, Dead Can Dance, etc. Thot, le projet fondé en 2005 par le Franco-bruxellois Grégoire Fray, appartient à cette ‘non-catégorie’. Tout au long de ses 3 elpees et 4 Eps, la formation, dont le patronyme a été emprunté à un personnage du dessin animé ‘Les Mondes engloutis’ ainsi qu’au dieu égyptien du même nom (‘Thoth’), a évolué d'un style post-indus / post-metal très brut vers un post-rock plus sophistiqué. Ce 10 mai 2024, Thot a publié son 4e album. Baptisé “Delta”, il s’agit clairement de la production la plus ambitieuse et la plus aboutie du combo. Un signe qui ne trompe pas, Grégoire Fray est parvenu à convaincre le Mystère des voix bulgares de participer aux sessions. Le collectif est d’ailleurs présent sur plusieurs pistes. Musiczine a rencontré Grégoire Fray et Michael Thiel.

Commençons par préciser les rôles. Grégoire, tu es le fondateur de Thot ?

Grégoire Fray : Oui. Je me charge de l'écriture des morceaux, des paroles, de la guitare, des claviers, de la programmation et de la production. J'assume aussi la direction artistique pour les créations visuelles, et entre autres pour le design des pochettes. Je ne réalise pas les pochettes, mais j'apporte les idées. Tout comme pour les clips vidéo.

Et toi, Michael, tu te consacres aux percussions ?

Michael Thiel : Effectivement. Les percussions depuis fin 2018 et je m'occupe aussi du volet visuel, notamment des vidéos. Ainsi que de certains aspects graphiques comme les artworks.

Votre nouvel opus s’intitule “Delta”. Comment évaluez-vous l'évolution par rapport aux précédents ?

GF : Le titre a été pensé comme l'image de cette évolution. Un delta, c'est un triangle. Chaque facette représente un des trois albums précédents. D'un point de vue musical et artistique, “Delta”, c'est donc la somme quantique des trois précédents. C'est aussi l’embouchure d'une rivière qui se jette dans la mer. Il se reporte un peu à l'album précédent dénommé “Fleuve”. L'évolution a également été humaine puisque le line up a changé au gré des sorties. Et, en toute logique, notre progression musicale a été nourrie par les personnes actives au sein du projet.

Faisons le point sur les membres du groupe.

MT : Alors, outre Grégoire et moi, Stéphane Fedele se réserve la basse, Lukas Melville la batterie et Anaïs Elba les claviers. Lukas et Stéphane participent aussi aux arrangements.

Juliette est également de la partie.

GF : Juliette Mauduit, active au sein du groupe entre 2018 et 2020, a participé aux sessions. Au moment de la crise du Covid, elle a changé de vie et est retournée vivre en France. Elle n’est plus membre de la formation, malheureusement. Mais, avant de partir, elle avait conduit le projet “Delta” jusqu’au bout, tant au niveau de l'écriture que pour les enregistrements. Et elle sera présente au Botanique le 13 juin, lors du concert.

“Sleep Oddity” est ma compo préférée. La chanteuse Lenka Dusilová y est créditée. Qui est-ce ?

GF : Lenka Dusilová est une musicienne tchèque très connue et reconnue dans son pays. Elle joue de la musique depuis plus de 20 ans et a décroché de nombreuses récompenses en République tchèque. Je l'ai découverte en 2022. Je séjournais à Prague et un de mes amis, Tomasz, était son manager. C'est lui qui m'a invité à écouter son album précédent, “Řeka”, un mot qui signifie “rivière”.

Tiens, le monde est petit…

GF : Oui ! Je suis tombé immédiatement amoureux de sa musique et de sa voix. Et, au moment de finaliser “Sleep Oddity”, on a eu l'idée de l'inviter à participer à la chanson.

J'aime particulièrement ce titre parce qu'il affiche un petit côté ‘prog’, surtout à partir du milieu du morceau... Et ce que j'aime aussi, c'est la mélodie de base. A mon avis, c'est la plus belle mélodie composée par Thot depuis les débuts.

GF : Merci ! En fait, la première version de ce titre est parue à l'origine sur l'Ep “Méandres”, en 2022. C'est une ancienne composition que j'ai écrite en formule guitare-voix, fin 2019. J'ai très vite eu envie de la faire chanter par Juliette. Donc, on a réalisé cette version sur “Méandres”. Et puis, quand est arrivé le moment de réaliser les nouveaux enregistrements pour “Delta”, les arrangements ne correspondaient plus à la voix de Juliette. C'est alors qu'on a conclu qu’il était nécessaire qu’une autre voix intervienne. Donc, j'ai contacté Lenka Dusilová et je lui ai donné carte blanche. Elle a repris les choses à sa manière, en ajoutant ses propres idées et je suis très, très content, du résultat.

J'aime beaucoup. C'est superbe !

GF : Après, pour le côté prog, je n'y connais rien, donc je ne peux pas juger (rires).

Bien sûr, c'est un avis subjectif. Le problème de Thot, c'est que votre musique est impossible à classifier. C'est de la musique ‘crossover’. A l'instar de Nine Inch Nails ou Radiohead. Impossible de lui coller une étiquette. On peut avancer des références plus ou moins pertinentes mais pour définir le style de Thot, on en est réduit à devoir combiner des termes comme post / prog / metal / noise / power, etc.

MT : Perso, je dirai tout simplement ‘post-indus’. Le terme ‘post-‘ est maintenant connu, grâce au ‘post-rock’...

Le Mystère des voix bulgares a collaboré aux sessions d’enregistrement. Comment une telle coopération a-t-elle pu se réaliser ?

GF : Je suis fan du Mystère des voix bulgares depuis longtemps. J'ai toujours été intrigué, fasciné, par cette musique, par ces voix, par ces chœurs. Il s'avère que leur musique est présente dans la discographie de Thot depuis longtemps et ce, par le biais de samples.

Sur quels morceaux, par exemple ?

GF : Sur “Icauna”, “Odra”, “Rhein”, “Samara” et “Rhône”.

MT : Et aussi sur “Bosphore” ?

GF : Oui, sur “Bosphore”, également. Et donc, en 2018, j’assiste au concert du Mystère des voix bulgares et de Lisa Gerrard, à l'Ancienne Belgique.

J'y étais également.

GF : Je suis ressorti de ce concert totalement subjugué. J'ai contacté la manageuse du groupe via Instagram et je l’ai invitée à découvrir Thot. Et, plus tard, pendant la conception de “Delta”, je me suis décidé à tenter le coup. Donc, j'ai recontacté cette personne, Boyana Bounkova. J'ai exposé un peu mes envies, mes idées et tout ça. Et puis, après plusieurs échanges de mails, j'ai proposé des idées concrètes. Juliette et moi avons écrit des textes et concrétisé des idées mélodiques. On a travaillé en compagnie d’une amie bulgare, qui nous a aidés à rédiger des paroles dans cette langue, basées sur des contes. Et on a proposé l’ensemble à Boyana, qui en a parlé aux chanteuses. Et la réponse a été affirmative ! Je me souviens du moment où je l’ai reçue. J'en ai presque pleuré.

Bingo ! Et vous êtes allés en Bulgarie ?

GF : On ne voulait pas effectuer ce défi à distance. On voulait y aller. On voulait vivre le truc. Juliette aussi. Michael aussi. On a donc attendu que les règles Covid soient allégées, et on est partis en Bulgarie. On a bossé avec six chanteuses du collectif parce qu’en inviter vingt n'était pas réalisable, ne fût-ce que d'un point de vue financier. On a passé une journée en studio pour enregistrer les morceaux. Et en plus, une version acoustique de “Hüzün”.

“Hüzün” constitue, à mon avis, le ‘magnum opus’ de l’œuvre, le titre le plus ambitieux.

GF : Oui, également au niveau visuel. On a tourné un clip en Bulgarie.

Oui, un clip que j'aime particulièrement, surtout grâce aux références chamaniques.

GF : Tu évoques sans doute le rituel montré dans le clip ? Il s'agit des ‘Kukeri’. Cette tradition existe dans de nombreux pays. On peut la comparer au Carnaval. Les gens se couvrent de peaux de bête, pour chasser les mauvais esprits et annoncer l'arrivée du printemps. Quand on a préparé le voyage en Bulgarie, j’avais l’intention d’en profiter pour tourner un clip. Et “Hüzün”, c'était le morceau idéal pour y parvenir, car la chanson évoque un long voyage. C'est une composition très personnelle pour Juliette, car c'est elle qui a écrit le texte. Elle a directement eu un coup de cœur. On a donc modelé la compo autour de ses idées, et c'est devenu ce que c'est aujourd'hui. Et le chœur des Voix Bulgares occupe une position centrale, au milieu de la chanson. Pour le clip, j'ai passé beaucoup de temps sur internet à chercher des lieux où tourner. Donc, on a vraiment préparé, un peu improvisé, en fonction de ce qu'on voyait, de ce qu'on trouvait, de la météo… favorable, car on a pu bénéficier d’un très beau temps.

Comment avez-vous pu filmer les ‘Kukeri’ ?

GF : Quelques semaines avant le voyage, j’ai découvert, par hasard, des photos des ‘Kukeri’ dans National Geographic bulgare. Des clichés réalisés par un photographe bulgare, Ivo Danchev. Tout s'est organisé dans ma tête. Comme les textes d'“Hüzün” proposent une espèce de rituel intérieur, décrivant ce que Juliette a vécu ; j’en ai déduit qu’il fallait que l'on fasse intervenir les ‘Kukeri’. Ils allaient donner vie à ce passage, au milieu de la compo, où il se produit une sorte d'élévation. Leur présence visuelle allait renforcer cette impression. Donc, j’ai contacté le photographe, Ivo.

Celui du National Geographic ?

GF : Oui ! Je l'ai contacté sur Instagram. Il connaissait les ‘Kukeri’ mais il a fallu dénicher des candidats prêts à assurer une telle représentation en plein été, parce que, normalement, c'est un rituel qui se déroule à la fin de l'hiver. On avait besoin de costumes, parce qu'après les rituels, généralement, ils les démontent. Finalement, tout s'est mis en place presque miraculeusement et on a pu tourner la séquence des ‘Kukeri’ au même endroit que sur la couverture du National Geographic. On a passé quelques heures en fin de journée devant un coucher de soleil à tourner ces scènes du rituel autour du personnage de Juliette.

Et donc, Michael, au niveau des vidéos, comment as-tu abordé le travail de mise en forme, le travail visuel ?

MT : Je me suis efforcé de traduire visuellement les idées de Grégoire. C'est lui a écrit le script du clip et scénarisé ce périple bulgare. Pour moi, c'était surtout un travail de cadrage et de montage. J'ai essayé de définir et d'appliquer de manière cohérente un concept visuel propre à cet album. Pour l’étalonnage, les clips baignent toujours au sein d’une ambiance très sombre. Il y a un côté très bleu nuit, ‘dark blue’, mais également une pointe de flamboyance. Suivant les couleurs ou la lumière utilisée. Ou tout simplement selon le jeu des personnages ou les effets.

Il est intéressant de retrouver cette dualité, que je qualifierais d'alchimique. On part d'une ambiance très 'dark', mais on assiste à un mouvement qui se dirige vers quelque chose de lumineux, comme si c'était un voyage initiatique. On rencontre ce phénomène au sein d’énormément de projets artistiques depuis cinq ou six ans. C'est vraiment une tendance lourde, dans ce milieu.

MT : Je pense aussi personnellement que les groupes qui ne s’enfoncent que dans le 'dark' commencent tout doucement à m'ennuyer. Il faut qu'il y ait un truc en plus. Sinon, cette démarche devient trop répétitive et finit par lasser.

Elle devrait correspondre à un processus de maturation, d'éveil, un peu comme un passage de l'adolescence, de la destruction à un moment où on construit quelque chose.

MT : C'est aussi ça qui fait la force de Thot. Comme tu le disais, il est difficile de mettre le projet dans une case et c'est ce qui en fait sa beauté.

Quid de la pochette et de l’artwork ?

MT : L'artwork a été 'commis' par David Crunelle, un artiste collagiste bruxellois. Il est très minutieux, voire obsessionnel. Il réalise des œuvres de grande taille, créées à partir de tout petits éléments. Et dans cet artwork, une composante graphique a acquis un rôle central car on l'a utilisée pour la décliner en cartes dans les clips vidéo. On s’en est servi un peu comme une rose des vents. Cet aspect cartographique peut aussi ramener à une forme de chamanisme, d'alchimie. C'est une combinaison entre des éléments numériques et des collages, qui permettent d'introduire une dimension plus organique.

En parlant d'organique, on pourrait se référer au monde végétal, qui est omniprésent chez Thot. Un côté tellurique...

GF : C'est intéressant d’entendre le terme ‘tellurique’, parce lors d’une interview, accordée il y a quelques jours, on m'a signalé que Thot avait quelque chose de ‘minéral’…

C'est quasi un synonyme.

GF : Mais ce que j'ai vu dans les artworks de David Crunelle, c'est quelque chose de plus céleste, de stellaire. Pendant l’écriture de “Delta”, j'ai lu énormément de livres qui traitaient d'astrophysique, de la question du temps et de l'espace, etc. Et quand j'ai vu les œuvres de David Crunelle, j’ai compris qu’il s’agissait de l'univers qui se déploie. Dans ses couleurs et ses formes.

Et, en même temps, il existe un rapport quantique entre l'infiniment grand et l'infiniment petit…

GF : Oui, voilà. Effectivement.

Quels sont vos nouveaux projets ? Une tournée est-elle en voie de concrétisation ?

GF : La release party de l'album se déroulera le 13 juin, au Botanique. Sinon, on se produit le 1ᵉʳ juin au Salon à Silly. Et puis, on est programmé aux festivals ArcTanGent à Bristol le 17 août, puis au festival de Pelagic Records...

… Qui est votre label ?

GF : Oui, qui est notre label. Donc ce sera à Maastricht, le 24 août. Et on attend la confirmation pour d'autres dates.

Pour terminer, je vous ai demandé de sélectionner deux ou trois morceaux qui n’appartiennent pas à la discographie de Thot.

GF : Le premier choisi, c'est évidemment un morceau du Mystère des voix bulgares qui s'intitule “Mome Malenko”. C'est la première plage de leur dernier album, “BooCheeMish”, auquel Lisa Gerrard, de Dead Can Dance, a participé. Et comme deuxième titre, “Justice” du groupe RIVE, un groupe belge que j'apprécie beaucoup. J'aime beaucoup les textes de Juliette, qui n'est pas notre Juliette à nous. Ils m'ont beaucoup nourri lorsque je me suis mis à écrire des textes en français.

En effet, c'est la première fois que tu écris des paroles en français.

GF : J'avais rédigé quelques lignes en français sur “Rhône”, un morceau qui figure sur l'album “Fleuve”. Le français est présent sur de nombreux titres, tout au long de “Delta”, en symbiose avec l'anglais.

Et enfin, la sélection de Michael.

MT : J’ai choisi “Ungod” de la formation Stabbing Westward. C’est le titre éponyme. C'est une fresque sonore, 'indus', sombre, ‘électronisante’ qui, je pense, est assez proche de la musique de Thot, en tout cas dans l'idée du voyage...

GF : C'est marrant que tu choisisses ce morceau et ce groupe. C'est une référence qui est souvent mentionnée dans les chroniques des albums de Thot.

Merci !

GF : Merci à toi, Phil.

Pour écouter et commander “Delta”, c'est ici

Pour voir et écouter les dernières vidéos de Thot

-  “Céphéide” https://www.youtube.com/watch?v=X-zxsYaWyH8

-  “Hüzün” https://www.youtube.com/watch?v=xNZQNKp4G5w

-  “Supercluster” https://www.youtube.com/watch?v=b-b9Q3TZHLk

Aziza, c'est le nom du projet éponyme de la jeune chanteuse/bassiste bruxelloise Aziza François. Sa musique est à l'image de son passé au contact de plusieurs cultures. Elle puise son inspiration dans de nombreux styles, que ce soit la musique traditionnelle africaine, la soul, le rock, le hip-hop ou le funk. Par moments, on décèle même des touches de grunge et de jazz-rock/prog. Quant à la voix, c'est une véritable découverte. Elle possède la volupté de Sade, le côté mystérieux de Tanita Tikaram et les tonalités graves de Nico: une alchimie étonnante.

Après la sortie de son 1er single "Maggoty" en mai dernier, un passage pendant les festivals estivaux Forest Sound (BE) et Les Lézarts Verts (FR), Aziza propose un deuxième single, "Haouaz Gun", disponible sur les plateformes de streaming.

“Haouaz Gun” est une invitation à libérer le cri des ancêtres, celui qui a été englouti par les dynamiques coloniales et sociétales. On y retrouve de la soul, des guitares planantes et électriques, un rythme groovy, un son de sabar lointain, comme clin d'oeil aux racines, un mélange de spoken word et de chant. Aziza chante le désir de briller malgré les fractures qui ont marqué les corps, les coeurs et les mémoires de nombreux peuples. "Haouaz Gun" invite à honorer ce passé et à incarner sa propre lumière comme arme la plus précieuse.

Ont participé à "Haouaz Gun":
Théo Teboul: batterie
Diego Higueras: guitare
Morgan le Grelle: enregistrement et mixage
Rémy Deliers: mastering
Aziza: voix, basse, composition et paroles
Maël G. Lagadec et Katy Cardie: artwork

Vous pouvez voir Aziza en solo le 4 juillet pour "Voilà l'Eté" au CCN de Namur.

Ecoutez “Haouaz Gun” ici.

Ecoutez "Maggoty" ici.

Booking: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Photo: Burezi Mugemana - @burezi

 

Sur son nouvel elpee, « Songs For The Dead », Catherine Graindorge communique une dimension métaphysique à son art. Basées sur un poème d'Allen Ginsberg et sur le mythe d'Orphée et Eurydice, les 8 nouvelles compositions révèlent un univers onirique, romantique et paradoxalement, à la fois sombre et éclatant de lumière. Un opus que la violoniste belge a réalisé en collaboration avec, entre autres, Simon Huw Jones, le chanteur du groupe culte And Also The Trees, qui a partagé la profondeur tellurique de sa voix et son inspiration lyrique. Un LP d'une touchante beauté, que l'artiste a présenté à Musiczine au cours d'une interview réalisée en collaboration avec l'émission WAVES.

Catherine, les lecteurs de Musiczine t'ont déjà découverte l'an dernier, lors de notre première interview, au cours de laquelle on a parlé de ton projet réalisé en compagnie d’Iggy Pop et du dernier opus de Nile On waX. On avait juste évoqué celui pour lequel on se rencontre aujourd'hui, qui s'intitule “Songs For The Dead”. Quelle est l'idée derrière ce projet ?

Cet album est une manière de célébrer les êtres chers disparus. Je l'ai construit autour d'un poème d'Allen Ginsberg, ‘A Dream Record’. Dans ce rêve, Allen Ginsberg raconte qu'il retrouve Joan Vollmer, la femme de William Burroughs. Elle est assise sur une chaise et ils discutent. Et puis, tout à coup, il voit sa tombe. Il se rend compte qu'elle est décédée. Et dans la réalité, effectivement, Joan Vollmer a été accidentellement tuée par William Burroughs, son mari. Ils étaient sous l'influence de stupéfiants et d'alcool et ont voulu jouer à Guillaume Tell. Il a tiré une balle de revolver sur un verre posé sur sa tête et il a mal visé. Ce qui m'a interpellée dans ce poème, c'est la question de la disparition subite. Que des événements peuvent basculer tragiquement en un instant. C'est une question qui me hante et m'interroge.

Et tu as voulu combiner ce drame et la mythologie ?

Cette femme qui, tout à coup, réapparaît, et ensuite, re-disparaît subitement, me rappelle le mythe d'Orphée et Eurydice. C'est l'idée de vouloir ressusciter les morts. Orphée va rechercher Eurydice dans les enfers, mais il ne peut pas se retourner s'il veut la ramener à la vie. Et malheureusement, il se retourne, et elle est perdue pour toujours. Mélanger ces deux histoires me semblait en harmonie.

Lorsque tu as eu l'idée de ce projet, c'était dans le cadre des Nuits Botanique...

Lorsque le Botanique m'a proposé une carte blanche, pendant un an, j'ai pu explorer de nouvelles pistes et réfléchir à un nouveau projet. J'avais envie de mettre en scène une figure féminine qui incarne Eurydice et Joan. En l'occurrence, moi. J'ai aussi souhaité incorporer un antagoniste, un homme qui soit à la fois la figure d'Orphée et de Ginsberg, cette figure masculine de la Beat Generation. J'avais envie d'une voix qui ait une dimension poétique, un peu théâtrale, capable d'alterner chant et ‘spoken word’. Mon conjoint, Elie, qui est un fan d'And Also The Trees, m'a fait entendre la voix de Simon Huw Jones et je me suis dit : ‘Oui, elle correspondra bien à mon univers. Simon possède cette dimension onirique...’

Et il affiche aussi un côté 'dark romantic'.

Oui, ça, d'office. Je vais toujours chercher des chanteurs 'dark romantic' (rires)…

Effectivement, on voit le lien avec Iggy Pop, Nick Cave, les Bad Seeds...

Pourtant, Iggy Pop n'est pas si 'dark' que ça... Il a quelque chose de très lumineux. Mais c'est vrai que Hugo Race et les autres... J'aime les personnages dark romantiques. Voilà...

Tu ne pouvais pas trouver mieux que Simon Huw Jones... En plus, il a participé à l'élaboration des paroles.

Oui, ça s'est fait de manière très naturelle. Quand je choisis quelqu'un je fais toujours confiance à mon intuition et souvent, mon intuition est plutôt juste. Que ce soit pour Simon Huw Jones, Iggy Pop ou Hugo Race, il n'y a rien à dire : c'était parfait.

C'est comme si les planètes s'étaient alignées.

Absolument ! C'était étonnant, la facilité avec laquelle Simon Jones a glissé ses textes sur mes musiques.  Comme si on était partis de zéro tous les deux. Je pense que son univers et le mien se combinent à la perfection.

C'est un peu comme un voyage rêvé en dehors d'And Also The Trees. On a la voix de Simon Huw Jones, mais placée dans un écrin musical complètement différent.

Oui, et pour compléter l'historique du projet, à l'issue de ma carte blanche, Paul-Henri Wauters, du Botanique, m'a proposé de jouer à Bozar dans le cadre des Nuits Botanique 2023. Et c’est devenu, d'une certaine manière, un 'try out', mais sous la forme d'un véritable concert, accordé dans une des salles les plus prestigieuses en Belgique. Les morceaux tels qu'ils avaient été construits à ce moment-là ont été utilisés comme 'démos' pour l'enregistrement de l'album.

C'est Pascal Humbert (NDR : un ex-16Horsepower impliqué chez Lilium et Détroit) qui joue de la basse et de la contrebasse. Comme Simon, c'est quelqu'un de très authentique...

Oui. Comme Simon, Pascal est très fidèle à ses idées, à sa conception de la musique et de la vie, également. Tous deux préfèrent aller travailler la terre ou s'occuper d'animaux, plutôt que de coopérer à des projets qui ne les amusent pas du tout...

Et tu as aussi reçu le concours de Simon Ho.

Oui. Simon Ho est un Suisse allemand qui vit à Bruxelles depuis pas mal d'années. On vit dans la même rue. C'est ainsi qu'on s'est rencontrés. C'est un pianiste, compositeur et claviériste formidable. Tant sur le plan humain qu’artistique. Je joue beaucoup avec lui. Comme sur « Eldorado », mon album précédent. Et puis, j'ai aussi convié mon compagnon, Elie, qui joue de la batterie sur deux morceaux et, enfin, ma fille aînée, qui chante sur « Eurydice » et « Time is broken ».

Oui, c'est Lula ! J'avais une question assez abrupte. Pourquoi cet intérêt pour la mort ?

Ce n'est pas un intérêt pour la mort. Disons que c'est peut-être...

Une obsession ?

Oui, c'est une obsession. Elle me hante, en fait, depuis toujours. Moins de manière angoissée aujourd'hui que quand j'étais plus jeune. Mais je ne me ferai jamais à cette absurdité, le fait de perdre quelqu'un qu'on ne reverra plus jamais.

Des êtres chers ?

Oui, je ne m'en remettrai jamais. Et donc, qu'est-ce qu'on peut faire ? L'idée n'est pas d'attendre que le temps passe pour oublier et panser ses plaies, comme on le conçoit dans nos sociétés occidentales. Je pense, au contraire, qu'il faut réserver une place pour les défunts, afin qu'ils puissent nous accompagner dans nos vies et ce, de manière joyeuse et apaisée. Je suis très attachée aux traces laissées et à la transmission.

Et donc, il y existe cette dimension, on va dire, un peu tragique dans ta musique. J'avais imaginé le terme 'Tragic Ambient' pour la décrire. Qu'en penses-tu (rires) ?

Oui, pourquoi pas ?

Parce qu'il y a ce côté mélancolique, auquel je suis particulièrement sensible. Mais, il y a aussi ce côté lumineux. L'idée que l'on va aller chercher une expérience qui, à l'origine, est négative, et qu’ensuite, on essaie de la transmuter pour en concevoir quelque chose de beau. C'est un processus alchimique que l'on rencontre au sein de la littérature 'dark' et dans la musique 'dark' en général. Chez Nile On waX, on détecte une touche cosmique, surtout dans l'album « After Heaven ». Pour tous ces projets, on retrouve cette dualité entre le yin et le yang, entre le dark et le light. Est-ce que ça te parle ?

Oui, complètement. Je serais malheureuse qu'on me dise : ‘Ton album est complètement plombant et dark’. Même si le titre peut sembler un peu lourd, j'ai justement choisi comme pochette une photo de moi que j'ai retrouvée chez ma mère, où l'on me voit, petite fille, jouant de la trompette dans un jardin, en Provence, à côté d'une chaise vide. Je trouvais qu'il y avait une symbolique lumineuse puisque la photo baigne dans le halo d'un soleil éclatant. Pour moi, le mot-clé, c'est l'élévation. S'élever...

Ça élève l'âme.

Oui. On retrouve également ce concept dans la musique classique.

Dans le « Requiem » de Brahms...

Oui, le « Requiem » de Brahms, je vois que tu n'as pas oublié... (rire)

… que tu écoutais avec ton ami allemand lorsque tu étais plus jeune...

Bravo (re-rires) ! Et puis il y a également Bach. Par exemple, la « Matthäus-Passion », la Passion selon St-Matthieu. C’est magnifique ! Ou les oratorios. Il existe une dimension métaphysique dans tout cela. Sans être croyant, on peut y voir le mystère de la vie. C'est l'idée que l'on ne saura jamais, que l'on n’aura jamais de réponse, mais qu'on essaie de vivre, avec nos petits corps d'êtres humains, un peu comme des petits cloportes. En tant qu'humains, on essaie de s'élever par la poésie, par l'amour, par la musique...

Catherine, merci beaucoup. Et une fois de plus, bravo pour ce magnifique album, « Songs for the Dead ». On a attendu presque un an, mais cette attente valait la peine parce que le résultat est magnifique. Faisons un petit coucou en passant à Koen et à An Pierlé, qui ont participé à l'enregistrement.

An a participé avec son sourire et son magnifique accueil mais sinon, c'est Koen Gisen qui a enregistré et mixé.

Oui, au Studio La Patrie, à Gand !

Tout à fait !

Merci beaucoup Catherine et à bientôt.

À bientôt.

 

Catherine Graindorge jouera « Songs For The Dead » en concert :

- le 8 mai à Liège, au Reflektor

- le 9 mai, à Gand, au Palmarium, dans le cadre du Festival Democrazy

- le 12 mai, à Den Haag, au Paard

- le 27 septembre à Bruxelles, au Beursschouwburg.

Simon Huw Jones participera aux 3 concerts, ainsi que Simon Ho et, à la basse, Cyrille de Haes. 

Pour écouter le titre « Joan », c'est ici

Pour acheter « Songs For The Dead » sur le site du label, tak:til/Glitterbeat, c’est et sur Bandcamp, cliquez sur le nom de l’artiste dans le cadre ‘Informations complémentaires’ ; vous y retrouvez les liens vers les réseaux sociaux ainsi que les articles qui ont été consacrés à Catherine Graindorge, dont une interview accordée en 2023. 

‘Ça fait longtemps !’, confie d'emblée Lescop au public venu assister à sa prestation, ce soir, au Botanique. En effet, son dernier concert au centre culturel remonte à 2013 ! C’est même à cette date qu’il avait accordé une interview à Musiczine (à lire ou à relire ici).

Pour être précis, le chanteur français visite la capitale de l'Europe pour la 5ème fois. D'abord, en 2012, en première partie de Daniel Darc, dans le cadre des Nuits Botanique et, rebelote quelques mois plus tard, au sein de la Rotonde. Dès 2013, à nouveau, lors des Nuits et enfin, en 2017, au cours du regretté BSF (Brussels Summer Festival).

Ce soir, il revient après un long hiatus, qu'il a mis à profit pour changer d'air après avoir subi les aléas d'un succès un peu trop rapide. Selon ses déclarations, il a apprécié son rôle d’acteur (sa première passion), écrire des scénarios et former un projet 'rock/glam', baptisé Serpent. Cette période lui a aussi permis de changer de maison de disque. Adieu, le label ‘Pop Noire’ de ses amis Johnny Hostile et Jenny Beth et bonjour Labréa Music / Wagram Music / Turenne Music.

Pour rappel, Lescop est le pseudo de Matthieu Peudupin. Lescop, c’est le nom de famille de son arrière-grand-mère bretonne. Ex-chanteur du groupe punk rochelais Asyl, il a développé, en solo, un style de ‘pop française' fortement inspiré des années '80. Une ‘pop noire’ qui a fait mouche dès son premier hit, le lumineux "La Forêt", et son album éponyme, dont la musique célébrait un mariage parfait entre Daho, Taxi Girl et Indochine, tout en empruntant des accents à The Cure, Joy Division et The Velvet Underground.

Ce soir, le retour s’opère dans l'intimité de la salle du Museum, au Botanique. L'artiste vient y présenter son tout nouvel elpee, “Rêve Parti”, réalisé en coopération avec le musicien-producteur Thibault Frisoni (comparse de Bertrand Belin).

Après une courte introduction, le très beau "Elle" ouvre efficacement le concert. Lescop investit les lieux avec classe et discrétion. Pendant "Exotica", un des 3 hits potentiels de sa dernière production, en l’observant, on constate qu’il a mûri : exit, le polo Fred Perry, le jean et les Converse ; il porte un costume foncé et une chemise brune. Derrière son pied de micro, concentré et les yeux fermés, il affiche un air sérieux, presque grave. Quand il bouge, il s'autorise juste quelques élégants déhanchements, légèrement androgynes.

A ses côtés, un tout nouveau 'band', composé d'un batteur, d'un claviériste/guitariste et d'une bassiste qui prend en charge les voix d'appoint mais aussi celles des chanteuses présentes sur le nouvel album : Halo Maud, dans “Femme Papillon” et Izia dans “La Plupart du Temps”. Tout au long de “La Nuit Américaine” et du puissant “Tokyo, La Nuit”, on remarque la précision des arrangements musicaux et l'efficacité de la mise en scène visuelle.

Pendant “Le Vent”, on sent planer une atmosphère Joy Division-esque : le côté hypnotique et solennel évoque le titre “Atmosphere”, des légendaires Mancuniens. Le premier grand frisson de la soirée intervient pourtant un peu plus tard, à la faveur de nouveau hit de Lescop, “Les Garçons”. Le clin d'œil à “Cherchez Le Garçon”, de Taxi Girl, saute aux oreilles et il est impossible de ne pas danser, à tout le moins de se déhancher sur cette composition finement ciselée.

Comme prévu, le final du concert sera consacré aux ‘vieilleries botoxées’, comme l'annonce avec humour Lescop. Tout d'abord, le puissant “Marlène” et ensuite, en apothéose, “La Forêt”. Dès les premières notes, l'ambiance monte de plusieurs crans et, à ce moment, comme d’habitude, Lescop descend du podium pour se mêler au public. A quelques mètres seulement de l'artiste, on se met à danser en remuant la tête, comme ensorcelés par la mélodie envoûtante.

Après des applaudissements nourris, Lescop revient pour le rappel. Visiblement ému, il évoque le courage qu'il faut avoir pour partir, quand les choses ne vont plus bien, comme l'a fait Marlène Dietrich, en quittant Berlin. ‘Dans les couples, c'est la même chose’, ajoute-t-il, ‘il faut pouvoir, à un moment, dire adieu à son 'Rêve Parti'’. Et d'enchaîner sur la chanson titulaire de son dernier opus, suivie d'un tout dernier titre, “Un Rêve”.

Un concert absolument parfait, même si votre serviteur n'a pas eu la chance, cette fois, de prolonger la soirée auprès de l'artiste, comme en 2012. En compagnie de mon amie Valéria, nous nous étions retrouvés à faire la fête avec l'artiste dans ‘Bruxelles, La Nuit’, car, il faut le savoir, Mathieu aime Les-c(h)oppes.... Hum...

Setlist

Elle
Exotica
La femme papillon
David Palmer
Radio
La nuit américaine
Tokyo, la nuit
La plupart du temps
Grenadine
Le vent
Les garçons
Le jeu
Tu peux voir
Marlène
La forêt

Encore

Rêve parti
Un rêve

Organisation : Botanique

Personne ne sait qui ils sont vraiment. Seuls éléments connus: il s'agit d'un duo, composé d'un homme et d'une femme et ils sont basés entre Bruxelles et Liège. Hier, ils ont annoncé la sortie de leur premier album vinyle, un double album, intitulé “City Scars”. Les morceaux ont été dévoilés sur Bandcamp et ils ont posté deux vidéos sur Youtube.

Le style musical est intriguant. “Double Darkness” porte bien son nom car l'ambiance est “dark', vraiment très dark. On pense à la noirceur de The Sisters of Mercy, qui se distingue par des voix sépulcrales mais ici, pas de guitares: les arrangements sont 100% électroniques. Les rythmes lents et répétitifs évoquent également la synthwave, chère à nos amis français. Et pour rehausser le tout, il y a cette ambiance occulte, presque luciférienne, qui donne à penser que le duo doit avoir des racines “black metal” et/ou “gothiques”.

La présence d'invités sur l'album permettra aux curieux d'identifier le milieu auquel le duo appartient. On retrouve en effet ici Marc Dibak, alias Mongolito (également dans Wolvennest), Corvus von Bvrtle (The Radiant Light et Wolvennnest), Bones (Dread Sovereign et TerrifianT), ainsi que Muzah (Desertion) et Moyen.

Pour en savoir plus, rendez-vous au Magasin 4 le 26 avril prochain, où le duo organisera le “release concert” de son album et partagera l'affiche avec ses invités: Stieglitz, un projet belge de hard-synthwave et Minos, un musicien suisse installé à Bruxelles. A découvrir absolument!

Pour écouter l'album et le commander, c'est ici ou ici.

Pour regarder les vidéos, c'est

Pour plus d'infos sur le concert au Magasin 4 le 26 avril, c'est ici

La 31e édition du festival “Les Nuits Botanique” se déroulera du 24 avril au 5 mai prochains à Bruxelles. Le nouveau directeur du centre culturel, Frédéric Maréchal, qui a succédé il y a peu à Paul-Henri Wauters, a souligné lors de la conférence de presse, qu'il souhaitait capitaliser sur les acquis, importants, du festival. “Nous voulons le faire évoluer, mais sans opérer de révolution”.

Les fondamentaux du festival resteront donc bien présents cette année: un focus clair sur les artistes émergents, une place importante accordée aux créations exclusives et aux avant-premières (“releases”), un intérêt croissant pour les arts plastiques et une formule tarifaire toujours ciblée (un ticket pour une salle).

Exception à cette dernière règle et grande nouveauté: le 4 mai sera une journée “All Access”, comme dans les festivals dits 'classiques'. Pour un prix de 38,5 EUR, le visiteur aura accès aux 4 salles du Bota et ce, de midi à minuit. Au programme de cette journée: Actress · Beak> · bar italia · Big|Brave · Deena Abdelwahed · Drahla · Famous · Hotline TNT · Fievel is Glauque · Tapir! · Lucidvox · La Sécurité · Voice Actor · Charlène Darling Groupe · Florence Sinclair · Mayssa Jallad · Kee Avil · keiyaA · Lambrini Girls · Lou K et Voice Actor.

Autre grande nouveauté: le partenariat avec les Halles de Schaerbeek, qui se trouvent à un jet de pierre du Bota. Le nouveau directeur des Halles, Matthieu Goeury, connaît justement très bien Frédéric Maréchal, ainsi qu'Olivier Vanhalst, le programmateur du Bota. “Les planètes se sont parfaitement alignées pour favoriser cette collaboration”, note F. Maréchal, “vu que les Halles ont décidé d'intégrer la musique dans leur spectre artistique.” Les Nuits feront donc escale aux Halles à 5 reprises: à l'occasion de l'ouverture de festival (Alto Fuero), en soirée électronique (Rainbowarrior avec Rebeka Warrior x Radio Vacarme) et pour les concerts, entre autres, de Lala &ce, Mount Kimbie et Karpe.

Au chapitre des créations exclusives, épinglons Alto Fuero, un duo formé spécialement pour Les Nuits par Victoria Palacios et Loto Retina, deux artistes français résidant à Bruxelles. Lors de la conférence de presse, le duo a accordé un showcase, révélant une musique inclassable, basée sur des chants multilingues, des sons de flûtes trafiquées et des rythmes désarticulés, le tout créant un univers onirique, psychotrope, voire chamanique. A découvrir!

L'autre showcase a permis de découvrir Shoko Igarashi, une saxophoniste originaire du Japon et basée dans notre capitale. Au programme, un croisement entre le jazz-rock des années 70, évoquant par moments Wayne Shorter, la chanson pop japonaise et les musiques de films d'animation. Etonnant!

En clôture du festival, le 10 juin, une autre création aura lieu dans la salle du Musée Bota: l'interprétation par le pianiste Stéphane Ginsburgh d'une dixième sonate de Prokofiev, imaginée par Jean-Luc Fafchamps d'après les esquisses de l'artiste russe.

Pour compléter le programme, la désormais traditionnelle nuit “Bota By Night” ouvrira ses portes le 27 avril, dans le Chapiteau, pour un florilège de découvertes électroniques, pour la plupart avant-gardistes. Au programme: Safety Trance • Taahliah • SoFTT • Waltur • Nídia • Lamin Fofana • 33EMYBW & Joey Holder • Anina • Shoko Igarashi • Ziúr w/ Elvin Brandhi & Sander Houtkruijer • Gaiko x Baum et Astrid Sonne.

Notons, par ailleurs, que le Botanique a conclu un accord avec la SNCB, qui permettra aux détenteurs d'un ticket pour un concert de recevoir une réduction de 50% sur le transport en train. Une bonne nouvelle!

Enfin, on a également appris qu'un mini-festival “Les Nuits Weekender” se tiendra du 1er au 3 novembre. Il occupera 3 salles du Bota et accueillera une vingtaine d'artistes par jour pour un prix démocratique se situant autour de 45 euros la journée.

On l'aura compris, le Bota ouvrira en force la saison des festivals et prouvera, plus que jamais, que Les Nuits ne riment pas avec “ennui”...

Pour consulter le programme complet du festival, c'est ici

Pour écouter la playlist du festival, c'est .

THOT, le projet bruxellois de Grégoire Fray, sortira son 4e album, “Delta”, le 10 mai prochain, sur le label allemand Pelagic Records (Mono, The Ocean, BRIQUEVILLE, Psychonaut, etc..).

Après avoir évolué au gré de nombreuses collaborations (Magnus Lindberg de Cult of Luna, Ben Chisholm de Chelsea Wolfe, T. Raumschmiere, Catherine Graindorge), G. Fray franchit une nouvelle étape de sa carrière en invitant les chanteuses du chœur polyphonique “Le Mystère des Voix Bulgares” à participer à son projet. Autre nouveauté: il a ressenti la nécessité d'écrire dans sa langue maternelle, le français, ce qui donne une nouvelle dimension à sa musique.

Musiczine a pu découvrir les titres de “Delta” en avant-première et l'impression qui s'en dégage est, en tous points, grandiose. Le style musical s'est encore enrichi par rapport aux productions précédentes. C'est toujours de l'indie-rock, bien sûr, mais rehaussé par des éléments post-rock, industrial, prog-rock, pagan, post-metal et power-electro.

Forgé entre la Belgique, la Bulgarie et la République tchèque, "Delta" est un opus foncièrement organique. Les 10 titres gravitent autour de l’insaisissable question de la place de l’art et de l’amour dans notre existence.

Dans le lineup du groupe, on retrouve le noyau des musiciens actifs depuis plusieurs années aux côtés de Grégoire Fray (guitare, voix, claviers, composition). Ce sont Juliette Mauduit au chant, Lukas Melville à la batterie, Stéphane Fedele à la basse et Gil Chevigné à la co-composition. Deux nouveaux membres sont venus renforcer ce noyau: Anaïs Elba (Sïan Able) aux claviers & voix, et Michael Thiel aux percussions, pour muscler et styliser l’ensemble sur scène. A noter, au passage, que ce dernier n'est pas un inconnu vu qu'il dirige le label Weyrd Son Records et est le fils du regretté Marcel Thiel, alias Snowy Red, un des artistes légendaires de la new-wave en Belgique. Sur “Delta”, on remarquera également la présence de la chanteuse tchèque Lenka Dusilova.

Le premier single issu de l'album, "Supercluster", et sa vidéo, viennent d'être dévoilés aujourd'hui. Pour regarder, c'est ici. Il sera suivi par "Hüzün" le 9 avril et "Céphéide" le 10 mai. Le release show aura lieu le 13 juin à l'Orangerie du Botanique (Bruxelles).

Tracklist de “Delta”:
Euphrate
Céphéide
Sleep Oddity (ft. Lenka Dusilova)
Bateleur
The Last Solstice
Hüzün
Blind Streets
Supercluster
Morning Waltz
Estuaire

Photo: par Michael Thiel

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