Quelques heures avant le début du festival, on me signale que mon accréditation est accordée. Je saute dans ma voiture et fonce vers Arras en imaginant figurer parmi les premiers arrivants. Erreur : une foule innombrable se presse aux deux entrées publiques aménagées pour donner accès à la Grand Place, sur laquelle se produit déjà Gojira. Avantage de la presse, une porte plus discrète et nettement moins embouteillée leur est réservée.
Il est cependant trop tard pour prendre des clichés du groupe toulousain ; mais ce premier concert permet de prendre la température des lieux. Entourée d’anciennes maisons classées, la place ne manque pas de charme. En outre, elle est entièrement pavée ; ce qui change des festivals champêtres de notre plat pays. Une règle : lorsqu’on a pénétré sur l’esplanade, il est interdit d’en ressortir avant la fin des festivités. Tous les bistrots et restos de la place ont été transformés en stands. Ils proposent boissons et nourriture. Et si vous êtes belge, et que vous souhaitez qu’on vous serve une ‘mitraillette sauce andalouse’, pensez à demander un ‘américain sauce espagnole’... On est quasi chez les ch'tis à Arras.
La place est déjà à moitié remplie pour écouter les hurlements de Gojira, groupe landais responsable d’un death metal particulièrement brutal. Le volume sonore est poussé à fond. Les tympans sont massacrés par les riffs de guitare de ces enragés qui reconnaissent eux-mêmes avoir été influencés par Metallica dont ils ouvrent l'unique date en France. Les fans présents dès l'ouverture des portes et qui se pressent contre les barrières ne s'y trompent pas : Gojira livre un set assourdissant et énergique, parfaite première ‘première partie’ de cette soirée.
Mais que viennent donc faire les Within Temptation dans le jeu de quilles ?... Ils ont bien attiré quelques fans bien sages. Mais difficile de comprendre leur présence dans un tel contexte. J’estime même l’idée plutôt saugrenue de programmer ces pseudo-gothiques hollandais en seconde ‘première partie’... Pendant que certains attendent avec philosophie que la belle Sharon finisse ses vocalises, d'autres s'impatientent en commençant à scander des ‘Metallica’ à la fin de chaque chanson du groupe. Car, sincèrement, si la musique de Within Temptation n'est pas de mauvaise facture, après 3 chansons, on a fait le tour de la question. C’est d’ailleurs le temps qui est imparti aux photographes pour prendre quelques clichés. Le reste, n’est que de la littérature. Le set de Within Temptation permet cependant d'apprécier la qualité du son. Il y a bien l’un ou l’autre endroit où il interfère ; mais il faut bien chercher. Bref, il est tout bonnement époustouflant. Du grand art !
21:10, 22 000 personnes sont entassées sur la Grand Place. Elles trépignent d’impatience en attendant le groupe phare de la soirée. Les fenêtres de la Grand Place sont, pour la plupart, occupées par des fans (ou des résidents) trop heureux d'assister au show, tout en bénéficiant d’une prise de vue unique. Un téméraire tente même de grimper sur les toits. Le set accuse une vingtaine de minutes de retard et la pression commence à monter. Enfin, les premières notes de la B.O. du film "Le Bon, La Brute et Le Truand" retentissent. Signe que le groupe va bientôt monter sur les planches. Ce qui explique pourquoi la clameur de la foule s’intensifie. Lars Ulrich bondit comme un diable sur sa batterie. Robert Trujillo embrasse ses enfants et s'échauffe déjà les doigts sur les cordes de sa basse. Kirk Hammet allie, comme d'habitude, sobriété, efficacité et discrétion. Quant à James Hetfield, il semble déjà avoir chanté un set avant d'entrer sur scène : pas besoin de round d’observation, il est fin prêt à en découdre avec le public. Et il lui demande d’entrée de jeu : ‘Are you ready to make some big noise ?’ "Creeping Death" et "For Whom The Bell Tolls" ouvrent directement les hostilités. Metallica dégage toujours une énergie redoutable, même après 25 ans de carrière. D'aucuns les pensent has been ? Les Californiens ont de quoi démontrer le contraire. En outre, leur plaisir de jouer est communicatif. Hetfield et ses acolytes enchaînent les titres puisés principalement dans la quintessence de leur répertoire, soit avant la sortie de "Load". La basse de Trujillo est puissante du début à la fin du set, et les solos de Hammet font le reste. Après une demi-heure de concert, la formation nous gratifie d’un extrait de "Death Magnetic", le prochain album à paraître le 12 septembre : "Cyanide". Un titre déjà disponible à l'écoute sur la page MySpace du groupe. Hetfield se réserve "Nothing Else Matters", en solo. De quoi faire quelque peu baisser la température de l’audience qui en a grand besoin. "Sad But True" et "Enter Sandman" confirment que le "Black Album" est celui qui a touché le public le plus large. Ces morceaux sont chantés par le plus grand nombre, mais "Master of Puppets" et "One" déclenchent de légitimes acclamations, également. Les feux d'artifice, esquissés sur "Enter Sandman", ferment en apothéose un "Seek And Destroy", repris en chœur par les 22.000 métalleux présents ce soir. Le concert s’achève par une distribution d'onglets et de sticks de batterie, le tout agrémenté par quelques mots de remerciement visiblement sincères de chacun des membres du groupe.
Un son d'enfer, un écran géant couvrant toute la largeur de la scène, des effets pyrotechniques et une com' envers le public parfaitement rôdée me permettent de conclure que si le côté ‘roots’ des débuts de Metallica a disparu depuis longtemps, ces gaillards ont appris à devenir une véritable machine de guerre ; une machine à laquelle personne ne résiste. Il suffit de voir les sourires affichés par les spectateurs de tous âges, au terme de ce show particulièrement intense, pour se convaincre que ces pionniers du trash metal ont encore des générations de kids à convertir…
Les oreilles encore endolories, je rejoins ma voiture en me réjouissant d'avoir eu la bonne idée de prendre un ticket pour les voir sans m'encombrer de l'appareil photo au Pukkelpop, le lendemain. Je laisserai à d'autres le plaisir de chroniquer leur prestation à Hasselt. Pour une première édition, ‘Rock en France’ peut se targuer d'avoir organisé un concert quasi parfait. Certes, le festivalier lambda a le droit de se plaindre du prix d'entrée (80€ tout de même) ; mais vu le niveau de qualité technique et la parfaite organisation, il aura rapidement oublié cette petite ponction. Vivement l'année prochaine pour la prochaine édition de ‘Rock en France’
Un mot de remerciement au passage à Myriam, Perrine et Sergine, sans qui Musiczine n'aurait probablement pas pu vous ramener de photos de Metallica.
Metallica + Within Temptation + Gojira
(Organisation FLP)