La 21ème édition du Dour Festival coïncidait également avec ma 17ème participation. C’est donc toujours l’esprit léger que je me dirige, chaque année, vers le site de la Plaine de la Machine à Feu. Très vite toutefois, les embûches commencent à se multiplier. Sur la route, il faut se farcir un contrôle de très antipathiques policiers. Puis les inévitables files. Soit franchir toute une série d’étapes avant enfin de parvenir à l’entrée. Largement de quoi altérer mon enthousiasme. Mais c’est aussi le prix à payer, dorénavant, pour se lancer dans l’aventure d’un grand festival…
A tout instant de la journée (NDR : ensoleillée, il faut le préciser), une des cinq scènes (NDR : la 6ème –Red Frequency– n’ouvre que le vendredi) offre toujours un set intéressant à découvrir. Et mon programme débute par les ‘Picard’. Les Fatals Picards tout d’abord. Sur la grande scène. A contrario de ce que leur patronyme laisse supposer, ils ne sont pas issus du Nord de la France, mais bien de Paris ; et ça se ressent. Leur mélange de ska et de variété s’avère agréable à écouter sur disque. Leur tube et clip « Bernard Lavilliers », pour lequel ils avaient reçu le concours du Stéphanois, avait fait un tabac. Mais leur prestation est à cent lieues de véritables artistes du genre comme Marcel et son Orchestre. Le public ne s’y trompe pas et déserte en partie la plaine. Pourtant, celui des Francofolies lui aurait réservé un excellent accueil… autre endroit autres mœurs. Mais comme dirait Bernard (NDR : notre rédac’ chef, pas Lavilliers), ‘Il ne faut pas nous la faire…’
A premier abord, leur homonyme Pascal Picard et son band ne m’emballait pas davantage. Faut dire que sa pop gentillette passant en boucle sur la bande FM commence à me gonfler. Et pourtant, surprise (NDR : il y en a toujours à Dour), la jeune et souriante Canadienne va nous dispenser un set plutôt rock. Armée de sa guitare sèche, elle aligne les titres de son opus « Me, myself and us », dont son inévitable tube « Gate 22 ». L’interprétation très subtile de son répertoire séduit l’audience du Dance Hall. Une audience qui avait déjà pu vibrer lors du show accordé par la Flandrienne Selah Sue, dont la soul apaisante avait été unaniment appréciée.
Changement de scène et de style (NDR : il faut bien s’y faire à Dour) : Meshuggah monte sur les planches du Club-circuit Marquee. Vous ne les connaissez pas ? Leur patronyme se traduit littéralement par ‘taré’, en judéo-allemand… Leur style de musique est assez original. Oscillant quelque part entre métal et mathcore, il est raffiné par des accès de prog à la King Crimson. En 20 ans de carrière, la formation suédoise s’est forgé une solide réputation. Leur dernier opus, « ObZen » est paru en 2008. Et leur show accordé ce soir est plutôt emballant, pour autant que l’on ait une oreille avertie. Car les expérimentations et les changements rythmiques pointus, ce n’est pas du goût du festivalier lambda. En tout cas, c’est toujours un plaisir d’écouter un groupe qui excelle dans son style, même si l’on n’est pas un fan inconditionnel du genre. Et bonne nouvelle pour les fans de ce combo : un Dvd live serait en préparation…
Toujours aussi intense, mais un peu plus abordable, le set d’Isis restera un moment fort de ce festival (NDR : n’ayons pas peur des mots !) La formation se produit sur la grande scène. Le son est très puissant (NDR : mais pourquoi ai-je oublié mes boules-Quiès en ce début de festival ?) mais précis. Le chant d’Aaron Turner est impeccable. Les envolées planantes construites en crescendo sur disques sont ici décuplées. Pas besoin de substance psychotrope pour apprécier une telle solution sonore. A ranger du côté de grands ténors comme Neurosis, Cult of Luna ou même Fugazi.
Quelle est la manière de retomber sur terre après un tel concert ? Cocoon semble être le dérivatif idéal. De leurs ballades relaxantes et agréables, le combo hexagonal cherche à nous placer sous couveuse (NDR : tiens, je comprends à l’instant l’origine du nom du groupe). Le public claque des doigts et balance les bras de gauche à droite. Mais au fil du temps, leur pop guimauve devient lassante ; et on espère une petite étincelle pour percer ce cocoon soporifique… Elle viendra lors du titre final « Chupee », un morceau ponctué par les applaudissements des spectateurs. Enfin celles et ceux qui étaient parvenus à résister jusqu’alors.
Evoluant quelque part entre chanson française, blues et rockabilly, la prestation des locaux Saule et les Pleureurs est bien plus nuancée. Montois, Baptiste Lalieu a le chic pour mettre son public en poche. Il s’en approche et leur avoue qu’il aimerait tant les rejoindre si son micro le lui permettait. Car quoique prolongée d’une passerelle, la grande scène ne permet pas de réaliser de show comme lors des autres grands festivals. Pas davantage d’écrans vidéo de chaque côté du podium ni de micro sans fil. Dans ces conditions et vu l’amplitude du plateau, les temps morts sont inévitables. Mais cette situation oblige aussi les fans à rester dans les premiers rangs ; et même si la foule n’est pas très dense, la fête a bien lieu. Et Saule est rejoint par l’équipe Waf ! (NDR : dont la joviale Christine Mass de Plug RTL) pour mettre une dernière fois l’ambiance et immortaliser les farandoles dans le public, en vidéo.
Le reste de la soirée est malheureusement moins drôle : les très attendus Friendly Fires ont déclaré forfait. Motif : un de leurs membres est malade. Il ne reste plus qu’aux inconditionnels de se consoler en (re)lisant notre review du festival ‘Les Inrocks’ 2009, au cours duquel ils avaient fait très forte impression.
Je n’apprécie guère Tryo. Et notamment leur pseudo-écologisme ainsi que leur alter-mondialisme pour bobos. En 2003, il avait accordé à Dour un set tout simplement insipide. De quoi mériter leur étiquette de chanteurs de rue (NDR : encore que quelque part, c’est un manque de respect vis-à-vis de ces derniers). Bref, restons un tant soi peu objectifs, et reconnaissons que leur jeu de scène a bien évolué. Les percussionnistes se mettent davantage en évidence et les chanteurs communiquent agréablement avec le public. M’enfin, je n’ai guère eu de regret de quitter ce spectacle pour assister à celui d’Isis…
Il est déjà minuit, et les orages annoncés et redoutés m’incitent à rejoindre le parking presse. Je ne tiens pas à rester embourbé dans un cloaque. Aussi, je laisse le soin à Jérémie, davantage fan d’electro, de couvrir la suite nocturne du programme. Car si finalement les orages violents ne frapperont pas Dour, la pluie va commencer à s’abattre. Et elle va même tomber en abondance… Qu’importe, ce n’est pas le temps pourri qui va arrêter notre photographe Jérémie. Et il livre un condensé de son stage surfing.
Dr. Lektroluv a le sens du second degré. Il s’affiche comme fan de Derrick. Vêtu d’un costard argenté, il est affublé d’un masque de Derrick. De couleur verte. En fait, son casque n’est ni plus ni moins qu’un vieux téléphone blanc, comme dans la série allemande culte (NDR : enfin presque). Le concept a son style et au niveau de la performance, l’artiste n'a pas rencontré de problèmes pour enflammer un Marquee presque plein. Tantôt plus hard tantôt plus intimiste, les rythmes parviennent à envoûter le public. Et pour être complet, on précisera que les Belges de The Subs ont participé au set.
Après leur prestation accordée dans le cadre du ‘7 ans du Culture Club’ à Gand en compagnie de Bloody Betroots et co, MSTRKRFT a également livré un set entraînant, plaisant et relativement mainstream, dans un Marquee bondé. Au programme : une bonne partie de leurs compos, mais également de nos nationaux Sound of Stereo, ainsi que l'incontournable remix de « D.A.N.C.E. » qu’il va directement enchaîner par le « Da Funk » des Daft Punk. Le public est ravi. Jérémie aussi car il avait estimé le set précédent à Gand beaucoup plus ‘hard hitting’ et limite trop techno.
Tout comme la pluie, Deadmau5 démarre en trombe. Il porte un casque de souris. Son set est plus hard que prévu, nonobstant la succession de gros hits. Le jeu de scène est original. Les jeux de lumières sont excellents et son set VJ. A plusieurs reprises, il parvient à faire décoller son show. Notamment lors de « Daft Punk - Harder Faster Better Stronger ». Mais au fil du temps, l’enthousiasme s’atténue. En cause un style qui devient de plus en plus minimaliste. Il perd alors une bonne partie de son audience. Faut dire qu’au loin on peut entendre Steve Aoki qui semble être au meilleur de sa forme.
La course entre les scènes n’a pas permis d’assister à l’intégralité du set de DJ Matthew Herbert. Une chose est sûre, l’expression sonore était largement teintée de bon vieux funk, dans un dance hall à moitié plein ou à moitié vide, c’est selon. Alors que la pluie redouble d’intensité sur la Plaine de la Machine à Feu.
Une pluie qui va finir par lasser Jérémie. Mais il n’était pas au bout de ses peines. Après deux heures du matin, il n’y a plus de navette pour rejoindre le parking. Il a donc fallu qu’il s’y rende à pied. Sous les trombes d’eau. Mais il en faut bien plus pour décourager vos dévoués reporters ; Jérémie et Sophie vous ont déjà réservé déjà de nombreux clichés dans notre rubrique ‘Photos’ ; et vous pourrez bientôt lire la suite des aventures de l’équipe de Musiczine, vécue lors de l’édition 2009 du festival de Dour… A suivre !