Le dernier combat de Malween…

Malween est le projet emmené par Julien Buys, auteur, compositeur et interprète, originaire de Nantes. Julien a quitté le monde de la finance, sans regret, en 2017 pour devenir comédien voix-off le jour et chanteur/guitariste a sein de différents projets…

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Dour Festival 2005 : vendredi 15 juillet

On ne peut pas vraiment dire que les tronches du trio Experimental Tropic Blues Band (NDR : tant qu'ils y étaient, ils auraient pu trouver nom encore plus long !) soient à l'image de leur musique. Il est même assez incroyable que des aussi jeunes gars (NDR : les filles ajouteraient certainement et beaux) pratiquent une musique aussi 'fieftiesante'. Et avec autant d'aplomb. Leur psycho boogie naturellement inspiré du Blues Explosion et des Cramps est, à l'instar du titre de leur dernier EP, de la dynamite. Sur les planches, Psycho Tiger, Boogie Snake et Devil Inferno alignent leur compos à une cadence infernale. Et le public flambe ! Psycho Tiger s'autorise même une séance de stage diving sur le ventre au milieu de la foule (NDR : bravo pour le roadie qui est parvenu à dérouler le fil du micro) alors que Boogie Snake est parvenu à cadencer le morceau final du set à l'aide de la fiche de sa guitare.

La longue tournée opérée par Frédéric Sioen passait donc par Dour. Pour la circonstance, le jeune Gantois a embarqué un backing group constitué d'un guitariste, d'un bassiste, d'un drummer et d'un violoniste. Frédéric se réservant les parties vocales et le piano ; piano qu'il délaisse parfois pour se consacrer exclusivement au chant. Et de son son timbre légèrement rocailleux, il parvient à faire passer des émotions très fortes. Le set va aligner compos issues de ses deux albums, à travers une musique qui mêle allègrement pop, rock, classique, jazz, prog et parfois même flamenco ou funk blanc. Etonnant qu'un garçon aussi talentueux passe si peu sur les ondes francophones.

Comme le déclarait Fabrice, Austin Lace gagne deux heures chaque année. Peut-être que d'ici deux ans, la formation nivelloise sera la tête d'affiche. C'est tout le mal qu'on lui souhaite. Son sens inné de la mélodie contagieuse et le soin tout particulier apporté aux harmonies vocales sont leurs principaux atouts. Des harmonies vocales purifiées par le falsetto suave de Fabrice. Il leur reste sans doute à trouver une image ; quelque chose qui leur permette de passer à l'échelon supérieur. Car comme d'habitude, leurs chansons ensoleillées font mouche. Enzo, le claviériste, va même rejoindre épisodiquement les autres musiciens, au devant de la scène, pour y jouer de la guitare sèche. Une version plus alanguie et davantage élaborée de « Wax » et un « Kill the bee » explosif seront les points culminants d'une prestation très appréciée. Et en particulier par la cohorte de fans que la formation avait déplacée. En finale, Fabrice va même inviter une vingtaine de filles (NDR : que des filles, insistera Fabrice) pour improviser quelques pas de danse et faire la fête sur « Say goodbye ».

Devendra Banhart, c'est l'artiste qui monte. Gradué de l'institut des Arts de San Francisco, ce Californien est aussi doué en peinture, en poésie qu'en musique. Découvert par Michael Gira (NDR : ex Swans et fondateur du label Young Gods), Banhart compte déjà 3 albums à son actif. Mais c'est surtout sur les planches qu'il défraie la chronique. Capable du pire (NDR : sa prestation imbibée d'alcool, accordée au Grand Mix de Tourcoing), mais le plus souvent du meilleur, il affiche un look de hippie circa 1968 (NDR : Grégory pensait même qu'il était la réincarnation du Christ). Et les 3 autres gratteurs qui l'accompagnent auraient pu également naître à la même époque, l'un d'entre eux portant même une superbe tunique indienne. Ce quartet de barbus vient s'asseoir sur le devant de la scène, passant allègrement de la guitare acoustique à l'électrique. Ils chantent aussi tous les quatre, même si le plus souvent Devendra assure le lead vocal. Une superbe voix dont les inflexions me rappellent parfois Jeff Buckley. Derrière le drummer a mis une barbe postiche bleue et porte des lunettes orange. Histoire de rester dans le ton. Tout au long de ce set, le groupe va interpréter un répertoire taillé dans le folk légèrement teinté de psychédélisme. Quittant leur siège au beau milieu de la prestation. C'est le moment que va choisir Devendra pour se consacrer exclusivement au chant. Torse nu, pantalon de velours mauve, il arpente la scène sur toute la largeur. Puis vers la fin du set, invite un artiste en herbe à venir chanter sa propre création. Lui permettant même d'emprunter la guitare d'un des membres du groupe. Et le garçon qui s'y risque s'en tire même plutôt bien. A brûle pourpoint, il ne fallait pas avoir froid aux yeux. Et avant de prendre congé de l'audience, Devendra accordera la plus belle citation du festival : « Merci, chevaliers du soleil »… Un grand moment !

Ayant sévi ou sévissant encore chez Faith No More, Mr. Bungle, Tomahawk, Dillinger Escape Pla, X-Ecutioners, et j'en passe, Mike Patton drive une des formations les plus énigmatiques de la scène underground : Fantômas. Avant que le groupe ne monte sur scène, on assiste à l'érection d'une véritable cage en acier destinée à monter la batterie et ses accessoires. Impressionnant ! Trois grosses caisses, une multitude de toms, une trentaine de cymbales de tout calibre et des percussions en tous genres y entreront. Et en live, le drummer s'y réfugie. Comme dans une cage. Ne laissant apparaître ses mains que pour tourner les pages de sa partition. Bref, un spectacle à lui tout seul ! Et pourtant, il paraît qu'il s'agit d'un remplaçant. Adossés à leurs amplis, le guitariste Buzz Osborne (NDR : imaginez la tête de Robert Smith dans dix ans) et le bassiste Trevor Dunn sculptent les sonorités de leurs décharges électriques. Et puis il y a, bien sûr, Patton. Des yeux perçants, effrayants, fantomatiques. Un claviériste, bidouilleur et surtout un chanteur capable d'inflexions de fou furieux. Mais il est surtout le chef d'orchestre. Canalisant les élucubrations sonores les plus démentielles. Ses sources d'inspiration ? Multiples ! Au hasard, je citerai Pierre Henry, Wagner, Boris Karl-Off, John Zorn, Slayer, Sinatra (NDR : et je vous invite à compléter la liste). En outre, il utilise tout ce qui lui tombe sous la main pour le mettre au service de son esprit créatif : l'orgue de Barbarie et la sirène d'alarme, par exemple. Quelque part, il me fait penser à feu Frank Zappa. Alors, Fantômas serait-il les Mothers Of Inventions du XXIème siècle ? Je suis incapable de répondre à cette question ? Ni même de dire si j'ai apprécié ou non le set. Une chose est sûre, il m'a déboussolé.

B.D.

 

Sébastien a pris le relais en soirée :

Le soleil ne désemplit pas et la foule non plus ! Pour la première fois dans l'histoire du festival, le 'sold out' est décrété en cours de journée ; et il n'est plus possible de se procurer de  ticket combi 4 jours. Hormis les fans de métal/hardcore qui pouvaient se contenter de rester devant la Last Arena, il faudra à nouveau surfer d'une scène à l'autre pour être dans les bons coups. Dommage de manquer Lofofora, Tahiti 80, Austin Lace, Walls of Jericho, Cult of Luna ou plus tard en soirée Fantômas, mais il faut bien faire des choix.

Et le premier de la soirée allait s'avérer gagnant : quoi de mieux qu'un bon groupe de folk dans le Dance Hall pour se remettre en jambes ? Le Bucovina Club Orkestar est annoncé comme un des groupes montants de la world music. Difficile d'étiqueter le mix énergétique livré par les protagonistes sur scène : imaginez une rencontre au sommet balkanique au cours de laquelle des fanfares yougoslaves, ukrainiennes et roumaines se réuniraient. Ajoutez-y une pincée 'gipsy' et vous ne serez pas loin du compte. Derrière ce cocktail harmonieux, on retrouve un Allemand, Stefan Hantel dit Shantel. Une chose est sûre, avant la prestation d'Etienne de Crecy et d'Alex Gopher (NDR : dans un autre genre), le Bucovina Club Orkestar n'a pas eu son pareil pour faire bouger la foule ; et il a fort à parier qu'on parlera encore d'eux dans un futur proche...

Autre groupe d'origine yougoslave (slovène plus exactement), mais autre style pour Laibach, programmé sur la scène principale. Et le passage d'une scène à l'autre nécessite à nouveau une certaine ouverture d'esprit : on passe d'un folk débordant de cuivres et d'énergie à un métal/indus plutôt froid et morose, même s'il s'avère captivant. Nonobstant 20 années de parcours, les occasions de voir les Laibach en 'live' sont plutôt rares. Le début du show évoque Rammstein, les feux d'artifices en moins, mais deux jolies percussionnistes fringuées à la 'Tomb raider' en plus. Assez vite, le grand public - dont la connaissance du genre musical se limite à Metallica ou Marylin Manson - commence à s'ennuyer. Ce qui peut se comprendre ; car certaines compos tirent en longueur. En outre, la langue de Goethe n'est vraiment pas faite pour alléger la solution sonore. Finalement, seuls les véritables amateurs du genre tiendront la distance.

Si les médias ne peuvent s'empêcher de faire référence à Sneaker Pimps, lorsqu'ils évoquent I am X, il faut admettre que depuis son départ, il a pris un virage à 180°. Il a donc définitivement coupé le cordon ombilical avec les autres membres du groupe. D'ailleurs, le show de ce soir n'a plus rien à voir avec celui de son défunt groupe. Des tendances électro, il reste un fil conducteur ; mais ce fil prend sa source dans la new-wave des années 80, que Chris Corner dose avec une énergie propre à I am X. Aux côtés de Chris Corner, au look déjanté et presque androgyne, on retrouve un groupe solide, tonique, qui nous balance un spectacle épatant, sémillant. Pas surprenant d'ailleurs que la 'Petite maison dans la prairie', bien loin du décorum habituel de la famille Ingalls, s'est rapidement animée.

Malheureusement le temps presse, impossible de voir l'intégralité du show. Après avoir manqué le retour de Fantômas, je ne voulais pas louper les Project Pitchfork. Au sein des survivants de la vague électro-goth, ces Allemands figurent parmi les meilleurs. Il y a plus de 15 ans qu'ils militent dans l'underground ; se produisant dans des endroits fermés comme le Steeple à Waregem ou le Cactus de Bruges. Pourtant, ils avaient eu l'occasion de brasser un public plus large en 1997. Lors de l'édition fort sombre du Dour Festival, aux côtés d'autres références du genre comme Sisters Of Mercy ou Das Ich. Mais cette année, pour les fans moins nombreux de gothic/new-wave/indus, l'ambiance est loin de cette mémorable journée de 97 où la plaine de la machine à feu était envahie de 'corbeaux' (NDR : dixit Ponpon, qui ne semble pas spécialement les apprécier ; et traduisez plutôt par 'sosies de Robert Smith' ou aficionados en tenues vampiriques ou sataniques, des expressions bien moins péjoratives). La Popbitch tent n'est remplie qu'à moitié mais les absents auront tort. Et pas seulement parce que leurs tenues de scène sont plus sobres. Confirmant l'impression laissée par leur récent album « Kaskade », bien moins ténébreux que leur précédent « Inferno ». Le groupe teuton donne toujours l'impression de vider ses tripes sur scène ; mais paradoxalement, il le fait en manifestant une sympathie et une joie de vivre assez étonnantes (NDR : il y aura une flopée de paradoxes à Dour !), compte tenu de leurs compos obscures. En outre, les beats et les percussions entretiennent un tempo hypnotique qui incite les premiers rangs à remuer allègrement. Ceux qui les ont ratés pourront toutefois se rattraper lors de leur prochain passage le 1er octobre en salle à Malines, le nouveau temple gothique.

A Dour, il y a à boire et à manger, et sous le même chapiteau j'ai failli frôler l'indigestion (NDR : et si vous me permettez l'expression, c'était à gerber !). Après avoir accordé une prestation en demi-teinte lors de l'édition 97, Anne Clark nous a infligé une parodie de concert. Les mots sont même difficiles à trouver pour qualifier la médiocrité du spectacle. Elle n'a même pas pris la peine d'engager des musiciens, se contentant  de la présence de deux DJs foireux. Ce n'est plus Anne Clark, mais Desireless opérant son come-back dans une émission de variété du samedi soir. Tenue négligée, jeu de scène inexistant (elle reste souvent les bras croisés !), elle se contente d'aligner ses tubes des 80's qui nous trottent encore en tête : « Our Darkness » ou « Sleeper in Metropolis » (NDR : elle aurait d'ailleurs mieux fait d'aller se coucher). Et là aussi un nouveau paradoxe (NDR : on vous l'avait dit !) : alors que la prestation est en toute objectivité insignifiante, il y a 3 fois plus de monde que pour Project Pitchfork. En l'absence de véritables têtes d'affiche à ce festival, le grand public, en quête de noms connus, semble s'être massé et apprécier le show d'Anne Clark. A ne rien y comprendre…

Heureusement, tous les revenants ne ratent pas leur retour : celui d'Anthrax sera plutôt gagnant ! A l'instar d'Iron Maiden, de Slayer ou autre Megadeth, Anthrax est souvent cité comme groupe de référence en matière de hard rock, tendance heavy/métal. Victime de changements de line up tumultueux, il a connu le creux de la vague début 2000. A cette époque, leur patronyme faisait d'ailleurs davantage penser aux envois contaminés par une poudre chimique, transmis par des terroristes, qu'à leur formation. Mais Anthrax avait annoncé la couleur. D'abord, parce qu'on retrouvait la formation sous sa forme originelle. Et bien sûr, Joey Belladonna aux commandes. On pouvait donc s'attendre à en prendre plein la figure. Et, Anthrax – qui vient littéralement de renaître de ses cendres - n'a pas failli à sa réputation : la voix aiguë de Joey, leurs jeans moulants, les cheveux longs bouclés et le trash des guitaristes nous ont replongés dans l'univers du bon vieux hard. Joey, en véritable frontman routinier de la scène, n'a pas son pareil pour exciter la foule. Maintenant, il faut rester réaliste. Un chapiteau aurait suffit pour satisfaire le public branché sur le métal. Pas la scène principale. D'ailleurs, en soirée, mais sur la Last Arena, Hawkwind n'a attiré que quelques centaines d'irréductibles. Faut croire que le métal psychédélique de ces autres vétérans ne fait plus recette.

Le véritable succès de foule de la journée (et sans doute du festival) reviendra à Vive la fête ! Pourtant, le groupe tourne beaucoup en Belgique, et occupe rarement le haut de l'affiche. Sur disque, on a plutôt tendance à se lasser rapidement de leurs compositions simplistes. Les lyrics quelque peu lubriques ('ne soit pas jaloux…', 'laisse-moi te toucher…') ne cassent pas des briques. Sur scène, la boîte à rythmes minimaliste fait vraiment le minimum ; et les mélodies sans grand relief ne volent pas plus haut que le « Da da da » des Trio. Alors comment expliquer que cet assemblage de bouts de ficelle déclenche un tel enthousiasme et surtout attire autant de monde ? Certes, il y a les tenues affriolantes d'Else Pynoo (NDR : elle avait opté pour un minishort et un débardeur qui avait du mal à tenir sur ses épaules). Il y a aussi le déjanté Danny Mommens (ex-dEUS) à la guitare. Faut-il aussi voir en Vive la fête ! un groupe passe-partout voir fédérateur ? Leur style simpliste mais raffiné et surtout voluptueux est en mesure de séduire un large public potentiel, aussi bien wallon que flamand ; ce qui n'est pas toujours le cas d'autres groupes belges (NDR : ainsi, Zornik ou Sttellla n'ont pas le même succès au Sud ou au Nord du pays). Toujours est-il qu'il fallait se faufiler pour approcher la Red Frequency Stage et que Vive la Fête était déjà un des plus grands 'highlights' du festival.

 

S.L.

Dour Festival 2005 : jeudi 14 juillet

Pour couvrir entièrement la 17ème édition du festival du festival de Dour (NDR : la 14ème en ce qui me concerne), il aurait fallu se couper en quatre. Même à trois ! Une manifestation dont le succès est manifestement croissant, puisqu'en arrivant vers 19 heures ce jeudi soir, les bouchons commençaient à se former pour accéder aux parkings ; et on annonçait déjà plus de 25.000 personnes (pulvérisant ainsi tous les records de fréquentation pour un jeudi !), alors que 7.000 campeurs avaient déjà planté leurs installations la veille. 200 groupes étalés sur 6 scènes et 4 jours : il sera de nouveau délicat de tout voir. Par exemple, il faudrait être présent dès 15h30 vendredi pour apprécier Tahiti 80 ou Lofofora, et rester éveillé jusque 3h du mat' pour ne pas rater les revenants de Neon Judgement ! Et dès ce jeudi, certains choix s'avèrent cornéliens : il fallait choisir entre le rock électro noisy/pop des M83, pointés à 19h45 (NDR : ils avaient effectué naguère un passage remarqué sur la Plaine de la machine à feu) et les autres Français qui montent : Luke, programmés à 20 heures. (SL)

Une chaleur torride et moite plombait déjà le Marquee lorsque les Nashville Pussy montent sur les planches. Et face à leur déferlante de rock'n roll, le public en est ressorti comme s'il venait de séjourner dans un sauna. Chez les Nashville Pussy on en a autant pour les yeux que pour les oreilles. Pour les yeux à cause des deux filles. Pantalons de cuir moulants. Poitrine généreuse bien mise en évidence dans son soutien noir échancré pour la guitariste. Body très court pour la bassiste. A côté d'elles, le chanteur/guitariste Blaine Cartwright passe pour un vétéran. Pourtant, c'est bien le mari de Ruyter Suys, la préposée à la six cordes solo. Et c'est elle qui assume l'essentiel du spectacle. D'abord, parce que sur sa râpe électrique, elle sait y faire. En véritable osmose avec son instrument, elle se contorsionne, virevolte, s'agenouille, secoue sa longue crinière blonde et bouclée dans tous les sens et termine même le set en montant sur un des pylônes du chapiteau. Pour y briser ses cordes sur l'armature. Et si le reste du groupe manifeste moins d'excentricité, il reste au diapason. Mais qu'est ce qui peut agiter ainsi ce quatuor basé à Atlanta ? Tout simplement leur rock sudiste. Un rock empreint de sexe, d'humour et d'énergie. Un rock pour lequel les Nashville Pussy donnent tout ce qu'ils ont dans les tripes. Et puis prennent congé de l'assistance, tout en nage (NDR : et nous aussi !).  

Isis, c'est le groupe d'Aaron Turner, le boss du label très alternatif Hydrahead (NDR : Converge, Pelican, vous connaissez ?). Une formation issue de Boston responsable d'une forme de post rock aux accents très métalliques. Et il faut reconnaître que dans le style, elle (NDR : la formation !) ne se débrouille pas trop mal. Pourtant, les fans de la première heure leur reprochent d'être devenus trop accessibles. De commencer à s'adresser à un public plus large. Personnellement, j'estime que leur musique est simplement devenue plus mélodique. Tout au long de leur set on a l'impression qu'Isis développe des paysages soniques, impressionnistes, paysages traversés tour à tour par la tempête, la dissonance, l'harmonie, les hurlements (NDR : extra-terrestres ?), le gothisme, l'ambient, la frénésie, la quiétude, et j'en passe. Avec une vibration sombre et parfois apocalyptique. Incluant même imperceptiblement changements de tons et de rythmes. Au centre de la scène Aaron arrache les notes de ses six cordes ; avec une telle ferveur que parfois, on a l'impression qu'elles sont occupées de pleurer…

B.D.

Arrivé trop tard pour contempler (NDR : il n'existe pas d'autres termes pour qualifier sa plastique) la guitariste des Nashville Pussy, que j'avais eu l'occasion de voir à 3 reprises (Bernard vous en parle toutefois ci-dessus), une petite mise en jambes s'imposait chez le duo franco-finlandais The Penelopes. L'atmosphère électro-punk créée par ces derniers embrase le public entassé sous le grand chapiteau central baptisé 'Dance hall', qui mérite déjà bien son nom vu les nombreux spectateurs qui emboîtent le pas. Déchaîné derrière sa boîte à rythmes (NDR : il a un look rappelant Robert Palmer !) le claviériste balance une déferlante de rythmes énergétiques, hérités en ligne droite de la new wave du début des eighties. Un scénario qui sied parfaitement au chanteur black, qui n'est pas sans rappeler un certain Maxim MC de Prodigy.

Autre chapiteau, autre style, la 'Popbitch tent' accueillait dans une ambiance tour à tour planante et énergique, les M83, dont la prestation allait confirmer les échos unanimement élogieux de leur dernier passage à Dour. Sur disque, les Français ne sont pas des plus abordables ni même des plus faciles à écouter : peu de paroles, morceaux tirés en longueur sur leurs albums « Dead cities, red seas and lost ghost s» et le plus récent « Before the dawn heals us ». A la fois sûrs d'eux mais en même temps sympas et décontractés, ils livrent un show net et sans bavure, qui n'est pas sans rappeler les groupes de la grande époque noisy comme Swervedriver, My Bloody Valentine ou Slowdive. Laissant quand même transparaître en filigrane, des affinités avec un certain Yo La Tengo. Tour à tout intimistes ou électriques, les compos de M83 nous entraînent crescendo dans un flux sonore torrentueux, propice aux passions les plus déchaînées. Le chanteur abandonne son synthé en plein milieu de certains morceaux pour empoigner sa guitare et balancer une flopée de riffs qui font monter l'ambiance. Le public applaudit à tout rompre et contribue à créer un climat propice à l'osmose parfaite : M83 est sans conteste la première grande claque de ce festival. Les absents qui ont préféré Luke ont eu tort !

Effectivement, un petit passage vers la grande scène plonge le festivalier dans un tout autre contexte. Un public plus ado est venu pour Luke, qui complétait l'affiche de Dour après une annulation. Bien que démarrant en force, le concert s'essouffle rapidement. Il faut dire que si leur discographie (NDR : « La vie presque » et « La tête en arrière ») reste agréable à l'écoute, à l'inverse des M83 elle n'est pas encore suffisamment étoffée pour tenir l'heure de prestation qui lui est attribuée. Et quand le leader Thomas Boulard parle d''Une reprise d'un groupe sans lequel nous ne serions pas là', on pense immédiatement à Noir Désir, tant les similitudes avec les Bordelais sont criardes. Raté ! C'est dans le répertoire de la Mano Negra que Luke va puiser un « Pas assez de toi » ; pas trop massacré heureusement, mais suffisamment éloigné de la version originale. Une prestation sans éclat qui ne restera pas dans les annales du festival.

Il est déjà 21h30 et on aurait aimé applaudir Hollywood P$$$ Stars qui, à l'instar des autres artistes belges à l'affiche, récolteront un franc succès. Les HPS n'ont vraiment pas oublié leur premier passage à Dour, et ils n'hésitent pas y faire allusion, on les verra sans doute encore avec plaisir une autre fois car comme bien d'autres groupes, ils semblent fidèles à l'esprit du Dour Festival. Une autre fois car le chapiteau 'Marquee' est trop étroit pour accueillir une foule de fans impressionnante. Et malgré l'heure avancée, il fait toujours aussi étouffant à l'intérieur. Après quelques titres nous déclarons donc forfait pour le reste de la soirée, histoire de garder ses forces pour les jours à venir qui promettent d'être chargés….

S.L

Rock Werchter 2005 : jeudi 30 juin

Écrit par

Cette année encore, le festival Rock Werchter affichait complet. Plus de 280 000 spectateurs se sont donc pressés devant les portes du plus grand événement du genre en Belgique. Herman Schueremans, l'instigateur de ce rendez-vous annuel, peut se frotter les mains: les placards 'soldout' deviennent coutumiers de ses immenses portails. Certains noms de l'affiche aussi…

Jeudi 30 juin 2005

Chaque année, c'est la même rengaine: "Rock Werchter est devenu trop imposant, écrasant et impitoyable pour nos portefeuilles". Peut-être. N'empêche, cette année encore, c'est le même constat: nous sommes parmi les premiers à déballer nos maisons en tissus et courir à toutes jambes le kilomètre symbolique qui nous sépare des portes du bonheur: l'entrée du Rock Werchter 2005. Une fois passé de l'autre côté des immenses clôtures publicitaires, le premier (et pas le dernier) choix cornélien de la journée se pose: The Bravery ou Saul Williams ? Dans notre petite caboche, ce duel psychologique vire à l'avantage du poète Saul Williams. Le magicien noir inaugure les spotlights de la Pyramid Marquee en compagnie d'un dj arborant une belle coupe afro sur la tête. De son côté, Saul Williams a laissé tomber ses rastas pour une tignasse commode et sans fioriture, un peu à l'image de son set. Ici, rien n'est laissé au hasard. Saul déverse son discours en calquant ses mots sur des beats syncopés. Tel un prêcheur fou, il harangue la foule massée à ses pieds. Le roi du 'spoken words' exige une justice nouvelle, exhorte un fifrelin d'harmonie entre les peuples et semble se faire comprendre. Les applaudissements nourris témoignent de l'attention de son auditoire. Le début du concert demeure incantatoire. Puis, Saul Williams lâche "Black Stacey", hymne libérateur et engagé. Le pied du micro serré entre les doigts, il poursuit sa lutte, sa prophétie. Improbable croisement entre Martin Luther King et Malcolm X, cette insatiable panthère noire se met définitivement le public en poche le temps d'une superbe "List Of Demands". Cette sommation dansante marque le triomphe de l'artiste en territoire européen. La performance de Saul Williams s'achève prématurément dans l'allégeance de "Our Father". Le besoin urgent de rafraîchir les mécaniques se fait alors sentir. A Werchter, la rasade de bière vaut son pesant d'or mais elle s'avère nécessaire pour éviter toute fringale dans la terrible ascension qui nous mène vers le haut de l'affiche.

L'étape suivante nous conduit ainsi devant la Main Stage. Les connaisseurs le savent: ils ont un rendez-vous urgent avec l'histoire. Car ce n'est un mystère pour personne, les apparitions de New Order se font rares, très rares. Pour sa part, la Belgique n'avait plus connu de concert de New Order depuis 1985. Dix longues années de supplices balayées en ce jour de grâce. Il est 19h20, le quatuor investit les lieux. Sans la moindre hésitation, Bernard Summer gratte ses cordes et laisse s'échapper le fabuleux riff de "Crystal". A la basse, tel un vieux pirate abandonné par son équipage en pleine mer, Peter Hook vague d'un côté à l'autre de la scène. Dans la fosse, les gens sautillent gaiement et applaudissent chaudement cette impeccable entrée en matière. Heureux de l'accueil, Bernard Summer tente une bouffonnerie anglo-saxonne incompréhensible et repart de plus belle. Derrière ses claviers, Phill Cunningham paraît extrêmement concentré alors que la batterie de Stephen Morris ralentit quelque peu le tempo sur "Regret" et "Love Vigilantes". Curieusement, c'est "Krafty", leur nouveau single, qui relance la machine de guerre. Les spectateurs chantent à l'unisson, frappent dans les mains et entreprennent des danses saugrenues, folles et déstructurées. C'est le moment choisit par New Order pour vénérer le passé post-punk qui lui pend toujours autour du cou. Car depuis le suicide de Ian Curtis en 1980, le mythe Joy Division transpire encore. L'interprétation de "Transmission" amorce le voyage dans le temps. Il est somptueux, nostalgique à souhait. De nombreux fans sont aux anges. New Order le sent et en profite pour placer une frêle compo du dernier album, "Waiting For The Siren's Call". Quelques titres plus tard, c'est l'événement attendu par de nombreux festivaliers qui résonne sur la plaine de Werchter: "Love Will Tear Us Apart", deuxième hommage aux galaxies dépressives de Joy Division. Le titre recueille sans mal la bénédiction populaire qu'il mérite. Mais le meilleur est à venir. Puisque l'apothéose de ce concert repose incontestablement sur les quelques notes synthétiques du tubesque "Blue Monday" qui clôture de main de maître le come-back de New Order.

Pas de temps à perdre. Roisin Murphy, l'égérie de Moloko, s'épanouit en solo sous la Pyramid Marquee. Accoutrée de longs gants et d'un cotillon scintillant, la belle ne dénaturerait guère dans le décor du Moulin Rouge de Baz Luhrman. Régalant les aficionados de Moloko de son irréprochable jeu de scène, Roisin Murphy séduit et conquit un public nouveau. Mêlant son répertoire traditionnel de jazz et de funk, la dame danse et se déhanche, s'abaisse, se relève et se balance. Insaisissable, indomptable, Roisin Murphy dispose d'une voix puissante et d'un charisme à couper le souffle. Des chansons de la trempe de "Ruby Blue" conduisent notre charmante accompagnatrice vers les marches d'une gloire amplement justifiée en ce premier jour de festival.

A l'autre bout du site, les écrans géants projettent une nouvelle aventure de Snoop Dogg: histoire de cul, de drogues et de coups de flingue. Sur ce, le grand black débarque, substances illicites à sa gauche, micro profilé à sa droite. Il regarde une main puis l'autre, hésite et opte finalement pour la gauche. Aspiration maximale, expiration. Le Snoop s'éclipse sous un nuage de fumée. Face à lui, c'est du délire. La température ambiante vient d'augmenter d'une vingtaine de degrés: le public est chaud, chaud, chaud. Le chaman du sexe descend fièrement de la Côte Ouest et s'exalte. 'What's my fucking name?' interpelle le gourou du phallus. "SNOOP DOGG !!!", réplique le harem. Là-dessus, pas de doute: l'assistance connaît son patronyme. Ce type est une star, véritable étendard du gansta rap américain. Adulé ou détesté, force est de reconnaître que l'homme détient une certaine aura et un évident sex-appeal. Pendant près d'une heure, Snoop Dogg tient son public en haleine, enchaîne ses tubes en or qui brille: "Lodi Dodi", "The Next Episode", "Who Am I (What's My Name) ?" ou le bouillonnant "Drop It Like It's Hot". Malgré les sombres nuages qui planent au-dessus des têtes, chacun est bien heureux de trouver une place dans ce gigantesque baisodrome champêtre. En fait, "Signs", le duo ramolli en compagnie du sample de Justin Timberlake, restera le seul point blanc de l'époustouflante exhibition livrée par ce nouvel empereur de la culture Noire américaine.

La nuit recouvre la plaine depuis quelques temps déjà. Pourtant, dans le ciel, les coups de tonnerre se multiplient et viennent illuminer les lieux. Les premières gouttes font leur apparition. De plus en plus grosses, elles transforment rapidement toute surface praticable en une aire marécageuse ondoyante. C'est Woodstock en plein Brabant flamand. Ici et là, des festivaliers délurés plongent dans des marres aux canards improvisées, piscine précaire pour public délétère. Peu importe, le show se poursuit. D'ailleurs, l'orage n'effraie pas Tom Rowlands et Ed Simons, la paire acidulée des Chemical Brothers. Le duo branché de Manchester s'empare de la Main Stage et démarre son set en force: "Hey Boy Hey Girl" pour l'ouverture de la danse (aquatique). Abrités sous les devantures des baraques à frites surpeuplées en ces temps pluvieux, les indécis se jettent à l'eau pour la grande carmagnole électronique du jeudi soir. L'instant est hallucinatoire, irréel et puissant. Les clubbers ignorent la pluie et rebondissent en chœur dans la gadoue. Cette fois, c'est une certitude: les absents ont toujours tort. Car même si les Chemical Brothers semblent disposer d'un abonnement éternel pour le Rock Werchter, il fallait vraiment être couillon pour manquer ce concert-là ! Comme pour donner raison aux irréductibles gogo-dancers, "Galvanize" anéantit soudainement cette pluie incessante. Les frères chimiques auraient-ils appuyé sur le bouton? Ce détail n'est pas raconté dans la chanson mais la légende retiendra certainement la coïncidence. Pour le reste, "Believe" est une implacable bobinette électronique, taillée pour les foules. Les Chemical le savent et ne se privent pas de répandre la bonne nouvelle. Et en parlant de bonne nouvelle: 'les Chemical Brothers seront à l'affiche du Rock Werchter 2006'. Alors, info ou intox ?

 

D Hiver Rock 2005 : samedi 12 février

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Il ne m'a pas été possible d'assister aux prestations d'Occy Altiga, d'Adolina et de Kofeee ; et pour cause, durant leur set, je recueillais les propos des musiciens de Bacon Caravan Creek, que vous retrouverez à travers une interview dans Musiczine, la semaine prochaine.

Quatuor anversois, In-Kata pratique une sorte de post rock dans la lignée d'Explosion In the Sky, voire de Mogwai. Musicalement, le groupe est particulièrement au point. Vocalement, c'est plutôt la cata ( ?!?!?), même lorsqu'il essaient de chanter tous les quatre. Conclusion : soit ils engagent un chanteur, soit ils arrêtent de chanter.

Pi Project est un nouveau projet au sein duquel on retrouve Pierre Surquin. Qui a mis provisoirement sa carrière solo en veilleuse pour se faire plaisir en jouant du rock. Pas du rock climatique comme il pratiquait à ses débuts en cherchant le chaînon manquant entre Wheat et Red House Painters, mais du gros rock bien basique, un peu daté, à la fois hymnique et gothique qui cherche un compromis entre Midnight Oil et Bauhaus. Une formation dont le line up réunit deux guitaristes, un bassiste, un drummer, un claviériste et un chanteur. Qui possède un superbe timbre, soit dit en passant. D'excellentes individualités ne font cependant pas la meilleure équipe. A l'instar du sporting d'Anderlecht dans le domaine du football, si vous voyez ce que je veux dire. D'autant plus que le chanteur n'est pas toujours en phase avec les autres musiciens. Et ce n'est pas « Man told me », véritable hit en puissance, qui me fera changer d'avis. Il n'y a  pourtant aucune raison de jeter le bébé avec l'eau du bain. Leur single deux titres (« After the atom ») est quand même d'excellente facture. Mais le sextuor doit maintenant privilégier la cohésion. C'est sans doute une question de rodage (NDR : ou d'entraînement si vous préférez le langage sportif !)

Malibu Stacy est le vainqueur du dernier Concours-Circuit. Et après avoir assisté à leur set, on comprend mieux pourquoi. En fait, si Ghinzu fut le point d'orgue du festival, Malibu Stacy et Bacon Caravan Creek en sont les révélations. Pour un aussi jeune groupe, Malibu Stacy affiche une cohésion particulièrement étonnante. Mais si leur pop rafraîchissante, allègre et contagieuse, rappelle quelque part Weezer, le chanteur donne une coloration nettement plus britpop à l'ensemble. Véritable showman, il me rappelle même un certain Jarvis Cocker (Pulp). Longiligne, petites lunettes, il se contorsionne avec sensualité et une élégance rare autour de son pied de micro. En outre, il possède une fameuse voix. A mon avis, on reparlera bientôt de Malibu Stacy. Et en bien !

Autre révélation de la soirée, Bacon Caravan Creek a enregistré son premier elpee (« Behind a wish »), fin de l'année dernière. Un disque qui figurait d'ailleurs dans mon top 5 des albums belges. Et leur mélange d'ambient et de pop/rock mélodique prend une toute autre dimension sur les planches. Tout au long de leur set, on est envoûtés par leur solution sonore. Tous les regards sont pourtant braqués sur Nicolas, qui chante (NDR : avec énormément de talent) derrière son pupitre à samples. Presque cold, la basse de Vincent donne le groove, pendant que Jonathan dispense ses accès d'électricité avec une grande sobriété, mais surtout une rare efficacité. Derrière ses drums ou la deuxième machine à samples, Xavier coordonne toute la souplesse des tempos. En y réfléchissant bien, nous sommes alors aux confins de l'univers de Radiohead circa « Kid A » ou encore « Hail to the thief ». Epatant !

Toujours sous le charme de Bacon Caravan Creek et de Malibu Stacy, j'ai rencontré pas mal de difficultés à entrer dans le set de Steels. Et pourtant, ce quintette issu de la région de Dour excelle dans son post rock qui doit autant à Godspeed You Black Emperor qu'à Mogwai. Les compos peuvent ainsi passer du plus atmosphérique au plus fulgurant, sans pour autant perdre le fil de leur coulée continue. Notez bien : le chanteur ne s'appelle pas Tom, mais bien Benjamin. Egalement derrière son pupitre à samples (NDR : aujourd'hui, ça fait tendance !), il possède un timbre capable de passer du falsetto au baryton. Et leur dernière composition m'a furieusement fait penser à « The end » des Doors. Même la manière de chanter de Tom me rappelait un certain Morrison. A revoir, c'est une certitude !

Hulk doit faire un véritable tabac au Pays-Bas. Un trio composé d'excellents instrumentistes qui pratique un blues rock (NDR : ou un rock blues, si vous préférez) que j'écoutais volontiers au cours des seventies. Encore que dans le genre, personne n'est encore parvenu à égaler le défunt et légendaire Rory Gallagher. Le chanteur possède d'ailleurs un look (NDR : les rouflaquettes !) proche du célèbre Irlandais. Si dans le style, le groupe a fait un véritable malheur, il faut avouer qu'en 2005, leur musique fait plutôt passéiste. Un avis que ne partage pas les post-trentenaires (quadragénaires ?) qui estiment avoir pris une véritable claque. M'enfin, tous les goûts sont dans la nature. (Voir également la chronique de leur album "Party time")

Il revenait à Pillow de clôturer le festival. Un quintette qui pratique une musique exclusivement  instrumentale dominée par les guitares (NDR : parfois trois !). Une sorte de concentré de post rock (NDR : encore !) qui puise son inspiration chez Explosions In The Sky, A Silver Mt. Zion ou encore Mogwai. Concentré parce que les périodes de méditation sonore ont été éliminées, pour laisser place à des morceaux qui ne s'éternisent pas inutilement. Mais si les guitares dominent le sujet, le synthé habille les compositions, pendant que la basse donne un ton plutôt cold au climat sonore. Une très belle prestation nonobstant le bris de lanière du soliste, qui a dû jouer assis pratiquement tout le set.

Une belle réussite pour ce D'Hiver Rock dont on attend impatiemment la quatrième édition l'année prochaine. 

Lokerse Feesten 2005 : The Cure (+ Mercury Rev + Cranes)

Aller à un concert de Cure, c'est comme tremper ses doigts gelés dans un vieux bénitier : on le fait seulement parce qu'on y croit – c'est ça, être fan, comme dirait Obispo. Et les fans de Cure sont légion : ils ont même un patronyme à eux, ce qui se fait très rare. Des curistes, donc : souvent de grandes filles qui se donnent l'air blafardes, ou des garçons trop vieux pour mourir jeunes, coincés dans les eighties depuis leur premier choc 'Pornography-que'. Voilà des gens pourtant normaux, qui travaillent et qui dorment, mais qui deviennent un peu foufous dès qu'on leur parle de Bob, de Baudelaire et de Camus… Le romantisme façon fin de siècle, les chemises à jabot et le Rimmel planqué dans le frigo : il y a des tics à respecter pour être un vrai curiste. Certains se piqueraient même les fesses à coup de cortisone, pour ressembler à leur idole quinquagénaire, bouffi par la déprime et la défonce. C'est clair : les curistes préfèrent le Cure pas drôle, celui de la trilogie Seventeen Seconds-Faith-Pornography.

 

On n'est pas là pour rire, et quand les Cranes débutent leur set tout le monde regarde déjà sa montre : plus que deux heures à écumer des bières, en attendant que Bob ramène sa fraise de vieux goth à la Barry Lyndon. Les Cranes, donc : un air de shoegazing à côté de ses pompes, et quelques tubes pour plaire aux fans – s'il en reste.

Mercury Rev ? On l'avait oublié, mais ce groupe a pondu de bons disques, d'abord psychédéliques et bien barrés (pléonasme), ensuite plus orchestraux mais pas moins addictifs. Le dernier, par contre, est d'un ennui profond, comme si le Rev s'affadissait au fil des ans à force de chercher la petite bête. A part quelques pépites extraites de « All Is Dream » et de « Deserter's Song » (l'album de la consécration), rien de ce live ne valait qu'on se tienne l'entrejambes en criant de bonheur. Mercury Rev, déjà de l'histoire ancienne ? Ca fait 15 ans que ça dure, donc oui.

'Et les Cure ?', rétorqueront les sceptiques ? Ils se font vieux et s'accrochent, mais leur musique, elle, demeure étonnamment vivace. Il suffit d'écouter la radio pour s'en convaincre : Interpol, The Killers, VHS or Beta, The Rapture, Placebo, voire les Deftones et Blink 182 (si si)… Ils ont sans doute écouté Cure en pleine montée d'acné, comme tout ado en manque de repères. Une chance : Roger O' Donnell n'est plus de la partie, donc point de synthé chez les Cure 2005. Perry Bamonte lui aussi s'est barré : c'est Porl Thompson qui le remplace, et c'est une deuxième bonne nouvelle. Son doigté légendaire illuminera ce live, même s'il n'a plus de crinière. A 4 au lieu de 5, les Cure se voient donc obligés de resserrer les vis. Finies donc les ambiances synthétiques cheap : la guitare redevient souveraine, les curistes brament en crêpant leurs vieilles mèches. « Open », en ouverture, donne le ton : électrique, forcément. Pendant plus de deux heures, Bob et sa bande revisiteront avec panache une belle partie de leur répertoire le plus glacé, avec en ligne de mire trois albums mirifiques : « Wish », « Seventeen Seconds » et « The Head on the Door »… Du dernier, produit par le méchant Ross Robinson (Limp Bizkit, Slipknot, At The Drive-In, The Blood Brothers,…), les Anglais joueront trois titres, pied au plancher et la tête dans le guidon. Heureusement, « Shake Dog Shake » remettra vite les vieilles pendules à l'heure : grand morceau, qui plus est rare en live. « At Night », « M », « Play For Today » (et sa partie de synthés reprise cette fois par le public), « The Blood », « Push », « A Night Like This », « Never Enough », « End », « A Strange Day »,… Les fans auraient eu tort de ne pas sauter de joie ! D'autant qu'en rappel, c'est "A Forest", "Why Can't I Be You", "Let's Go To Bed" et "Boy's Don't Cry" que les Cure balancent sans crier gare. Il s'agissait sans doute d'un des meilleurs concerts belges de Cure, depuis 10 ans… Et rien ne prévoit une baisse de régime de leur part : après la réédition « Deluxe » de la trilogie et du premier album, voilà que Robert vient d'annoncer un album pour avril 2006 ! Mais quand s'arrêteront-ils ? Jaméééé, et c'est ça qui est terrible.            

 

Rock Werchter 2005 : dimanche 3 juillet

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En ce dernier jour de fête, les choses sérieuses commencent tard, très tard. Il est 17h00 et nos Fucking Dewaele Brothers entre en scène sans leur combinaison magique de 2 Many Dj's. Aujourd'hui, les organisateurs les ont invités sous l'enseigne Soulwax. En règle générale, un peu de changement ne fait de tort à personne. Mais là, on peut dire qu'ils nous ont fait grande peine. On les créditera bien volontiers du son le plus déplorable de Rock Werchter 2005. Et pourtant, on pouvait s'attendre à monts et merveilles… Il faudra s'en faire une raison: Soulwax n'est décidément pas un groupe de festival.

A l'autre bout du site, ce sont les Eagles Of Death Metal qui triturent leurs guitares. Sans Tim Vanhamel et Josh Homme aux commandes, la recette manque de saveur. Le projet reste planté là comme une carotte en plein désert. Seul rescapé de l'équipée sauvage, Jesse 'The Devil' Hughes défend ardemment son projet. Malgré tout le mal qu'il se donne, on se rend compte que la nouvelle mouture des Eagles tient difficilement la route. Le tout est joué à l'emporte pièce et manque cruellement de puissance de frappe. La sentence est lourde de conséquences: à revoir ou à saborder.

La pérégrination vient de commencer. Venus des quatre coins du site, les fans de Queens Of The Stone Age transitent vers une même destination: la Main Stage. Tout le monde veut se rapprocher de la grande carcasse de Josh Homme, leader unique de la formation ricaine. Sous le soleil, la chaleur est accablante, presque insupportable. Cette ambiance sied pourtant bien aux Queens qui entament leur set par le torride "Go With The Flow". La nouvelle brigade du général Homme assure sa part du boulot. "Medication", "If Only", "Everybody Knows That You Are Insane" et "Sky Is Falling" claquent dans l'air comme des myriades d'explosifs hypnotiques. C'est du psychédélisme pour Stoners dépressifs, une vraie musique de junkie. Le géant et toujours là, campé aux avants postes des réjouissances. Dans les mains de Josh Homme, une guitare semble bien frêle. Heureusement que le grand gaillard n'a pas encore inauguré la défenestration de grattes… L'idée pourrait causer de sacrés dégâts. Les accords de "Little Sister" retentissent enfin. Le moment est attendu et ça s'entend. La foule vibre, se bouscule et lève le poing en direction de la scène. C'est un pur instant de rock'n roll dirigé et orchestré par Josh, l'homme qui aime qu'un plan se déroule sans accroc. Plus tard, "Tangled Up In Plaid" se perd dans un enchevêtrement de guitares. C'est insensé, compliqué et éclairé. On sent la fin du concert ; mais toujours aucune trace de la folie douce d'antan. Terminé le Dave frappadingue à la batterie, disparu le nudiste à la barbichette, terminé l'insolente ode à la came: pas de "Feel Good Hit Of The Summer" cet été. Certes, la version 2005 des Queens Of The Stone Age vaut le détour. Oui, Josh Homme est une putain de rock star. Pourtant, il manque la plue-value frénétique: le barjot Nick Oliveri et sa basse. Car ce soir, il fallait être un perfide comédien pour camoufler cette insoutenable carence. Admettons le une bonne fois pour toute: l'autre siphonné du caillou nous manque.

Une fois encore, Dave Grohl est à Werchter. Et quand ce n'est pas en compagnie des Queens Of The Stone Age, c'est derrière le micro de ses Foo Fighters. Dave, c'est un guitariste recyclé, un chanteur étrange et une honnête personnalité. Son principal atout: il a le sens du spectacle. Après, peu importe qu'il braille comme un poulet sans tête, qu'il remplace la fin de ses paroles par des onomatopées étranglées en pleine voltige. On s'en tape. Pour lui, là n'est pas l'essentiel. L'objectif affiché des Foo Fighters: amuser la galerie. Et sur cette observation sociologique de haute volée, on peut une nouvelle fois les féliciter: ils n'ont pas loupé le coche. "All My Life", "Everlong", "Learn To Fly", "My Hero", The One" et tous leurs brûlots énervés trouveront toujours une place de choix dans nos cœurs. Mais le temps est maintenant à la quiétude du songwriting de Tom McRrae. Venu en compagnie d'Olli Cunningham (au piano) et d'Oli Kraus (au violoncelle), le Britannique doit forcer pour se faire entendre. La lutte à scène interposée qui l'oppose aux Foo Fighters tourne rapidement à l'avantage des cris tourmentés de Dave Grohl.

Combat déloyal, artiste jovial: Tom McRae ne semble pas rancunier. Les Foo Fighters en fond sonore, le bel Anglais se présente sur scène tel un poète désœuvré et malheureux. Les compositions du bonhomme renforcent ce sentiment de disgrâce. "Hawaïï", "Hummingbird", "Bloodless" et "Bubblegum" se présentent comme autant de complaintes euphorisantes, écrites pour traverser l'histoire. Le violoncelle confère une douce profondeur aux chansons de son auteur. L'inventaire de son talent s'achève lentement par un "Fools" dépouillé et sensible. La messe est dite.

Ne reste plus qu'à porter un rapide mouvement de l'œil en direction de la Main Stage pour assister au bouquet final offert par R.E.M. aux spectateurs. Peter Buck et Michael Stipe forment toujours la paire. L'un cajole sa guitare, l'autre prend soin de son public. Certains groupes sont insubmersibles. R.E.M fait partie intégrante de ce contingent d'irréductibles rockers. Les Athéniens en connaissent un bout et les fans connaissent leurs tubes: le deal est équitable. "What's The Frequency Kenneth?", "Leaving New York", "Everybody Hurts", "Losing My Religion", "The Great Beyond" ou encore "Man On The Moon" enflamment les derniers instants de cette edition 2005 aussi convenue que réussie. Finalement, qui d'autre que Michael Stipe peut se targuer de conclure un festival dans une débauche de magnificence ? Question difficile, n'est-il pas ? Bah, la réponse attendra bien l'année prochaine…

 

 

 

Rock Werchter 2005 : samedi 2 juillet

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La journée débute sur les chapeaux de roues. Et un effroyable dilemme nous attend sur le site: les vétérans vitaminés de Therapy ? ou la nébuleuse rock And You Will Know Us By The Trail Of Dead ? Notre choix se tourne vers ces derniers. Trail Of Dead, pour les intimes, tape un sacré tintamarre sous les voûtes de la Pyramid Marquee. Devant un parterre dégarni, les Texans se montrent inspirés. Les musiciens pratiquent une sorte de chaise musicale grandeur nature. Chez eux, tout le monde tourne et tricote un nouvel instrument. Une guitare troquée contre une batterie par ici, une basse échangée contre une guitare par là et un micro terrorisé par des chanteurs intérimaires finissent par convaincre de l'originalité de la formation. L'acte se conclu par "Ounce Of Prevention" dans une tourmente de riffs virevoltants et diablement efficaces.

La suite de nos péripéties est moins drôle. Le charme annoncé de Rilo Kiley laisse franchement à désirer. C'est doux et gentil. Mais la pop a déjà connu escapade plus folle…

L'entreprise dégénère rapidement et l'exode vers la Main Stage de Daan devient inexorable. Quel beau crooner que ce Daan ! Costume blanc, lunettes noires, l'homme est raffiné et ça se sent. On ne peut pas en dire autant de ses sbires. Aux claviers, une sorte de mascotte Haribo (c'est beau la vie?) modelée pour l'Eurovision balance sa frange peroxydée comme une langouste exotique. Ce garçon n'a aucune classe, c'est une parodie incarnée. Derrière lui, deux potiches: une bombe sexuelle à la batterie et une jolie créature à la basse. Pour ouvrir la danse, Daan dispose de "Housewife", tube infaillible. Le public à majorité néerlandophone en redemande. Daan l'entend et adresse "Eternity" pour assouvir la pulsion populaire qui envahit peu à peu la plaine de Werchter. L'élégant monsieur ne se pose pas de question: il fume, il boit, s'assied et se couche en coquet de bon aloi. A ses côtés, la troupe de variété qui lui fait office de groupe a pauvre allure. On a beau apprécier les performances de Daan sur disques, il faut bien admettre que le visuel scénique suscite l'incompréhension. La vue d'ensemble reste inconsistante et pas bien méchante. Daan ne montre jamais les dents et même "Victory", son hit, s'encroûte précipitamment dans une gestuelle ringarde digne du 'bébête show'.

Sur ce, on s'éloigne du naufrage et on rejoint les rives de la Pyramid Marquee où Murray Lightburn et les siens dispensent le romantisme exacerbé de The Dears. Chaleureux et réconfortants sur disque, sur scène, les Canadiens chavirent dans une démesure émotionnelle. C'est pompier et larmoyant. Et même le fulgurant "Lost In The Plot" ne modifie guère l'attitude outrancière de ce tragique épisode. Ne reste plus qu'à patienter avant l'avènement pressenti des Londoniens de Bloc Party. 17h20: l'agonie surfaite de The Dears touche à sa fin. Il est temps de se positionner pour assister au concert tendance de la journée.

La silhouette athlétique de Kele Okereke surgit et ses compagnons d'aventure le suivent de près. Du post-punk ? De la cold-wave ? Peu importe, Bloc Party détache les étiquettes et déracine la hache de guerre. "Like Eating Glass" entame la croisade sensible de nos gays lurons. Foudroyant et radical, le message de Bloc Party est belliqueux. Et la bataille ne fait que commencer. Tout sourire, Okereke repart à la charge et expulse "Positive Tension" de l'amplificateur. Une hystérie générale s'empare du parterre public dès les premières notes de "Banquet". Les Anglais assurent le spectacle. Plus rudes et déchirées que sur les enregistrements de Paul Epworth (The Rakes, The Futurheads), les chansons du groupe passent comme une lettre au déchiqueteur électrique. Les pogos sont de plus en plus violents, les titres de Bloc Party de plus en plus incendiaires. Ces garçons se dégourdissent à tout va. Kele torture sa Telecaster. Sans relâche, il empoigne son manche et griffe ses cordes. Le concert s'apaise dans la fournaise de "This Modern Love". Shoegazer invétéré, Russel Lissack, le deuxième guitariste, n'abandonne pas une seconde ses chaussures du regard. Elles doivent beaucoup lui plaire car il assure parfaitement la rythmique du groupe. Bloc Party dispose indéniablement d'une nouvelle notoriété. La formation a grandi et l'image restrictive du groupe hype à la mode n'est plus tendance. Bloc Party a défini son identité. Ne lui reste plus qu'à forcer le respect !

Après l'invasion britannique, on retrouve le Blanc Bleu Belge. Rien à dire, les nationaux de Millionaire sont devenus de sacré poids lourds dans notre paysage musical. La bande de Tim Vanhamel ouvre le "Champagne" en début de prestation. C'est pétillant, mature et intense. Dès l'instant d'après, Millionaire débouche "Love Is A Sickness", titre issu de sa cuvée "Paradisiac". Les petits Belges déboulent et sortent le gros son. Plus tard, "Come With You" produit son effet et Tim se tortille comme un poisson hors de l'eau. La formation a gagné en puissance ce qu'elle a perdu de son funk original. Qui s'en plaindra ?

Après un deuxième album particulièrement réussi, Interpol était considéré par de nombreux observateurs comme une des principales têtes d'affiche de cette édition 2005. Les New-Yorkais étaient attendus au tournant. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le groupe a fait sensation. Le regard défiant un ennemi imaginaire, Paul Banks affronte d'emblée son auditoire. D'une voix grave et sombre, il psalmodie les premiers mots de "Next Exit". L'entame du concert fait du bien là où ça fait mal. Interpol discerne le point sensible de la nature humaine, touche l'auditeur au plus profond de sa grâce. Aristocrates mélancoliques d'un rock ténébreux, les quatre musiciens enfoncent directement le clou en cognant un mirifique "Slow Hands" dans la tronche épatée de milliers de fans transis. Banks allume une cigarette, brave la foule d'une œillade démoniaque et étale son indiscutable charisme au grand jour. "Say Hello To The Angels", chante-t-il entre deux bouffées de tabac. La suite était écrite: "Evil" rencontre une ferveur populaire énorme, incommensurable. A quelques mètres du chanteur, un type récite religieusement les mots professés par l'homme en noir. L'hystérie collective revêt le costume d'Interpol. Le concert approche le paroxysme, monte vers les étoiles et soudain, c'est l'accident. D'irrémédiables problèmes sonores viennent gâcher l'instant. La basse de Carlos D. se retire en coulisse et s'efforce de maintenir ses lignes inquiétantes. Mais l'inquiétude se mue en un accablant constat d'impuissance et le concert s'achève prématurément. L'épilogue nous laisse un goût indéfinissable en travers de la gorge, étrange mélange d'excitation, de surprise et de tristesse.

Mais c'est connu un bon festivalier ne baisse jamais les bras (et dispose généralement de bonnes jambes)! Une course olympique nous conduit ainsi aux alentours de la Main Stage où Nine Inch Nails s'acharne sur la fin de "Closer". La puissance vocale de Trent Reznor est bouleversante. On se met à regretter le doublon entre Interpol et Nine Inch Nails. Et comme pour renforcer cette optique, le bon vieux Trent nous agresse d'un "Hurt" d'une rare violence. Le concert s'achève en force par "Head Like a Hole".

Pour nous, la journée pouvait s'arrêter là, mais pas pour Rammstein. Les Allemands constituent la tête d'affiche proclamée du Rock Werchter 2005. Les t-shirts tamponnés à l'effigie du groupe post-industriel s'amoncellent en nombre aux abords de la Main Stage: ça va péter! Et de fait, les pensionnaires de Berlin-Est boutent les feux d'artifices à la moindre incartade. L'artillerie lourde est en train de chauffer la plaine comme une colonie de Panzers décampant sous les bombardements alliés. Et pourtant rien à faire, la musique de Rammstein est stéréotypée à mort. Les protagonistes de ce grand cirque jouent d'ailleurs sur un physique martial à en perdre les pédales. Et nous, pauvres belettes paranoïaques, on s'interroge sur l'engouement général qui tourne autours de ces zozos. Ces gars véhiculent une imagerie ultra nationaliste et totalitaire. On a beau savoir que c'est du pipeau, ça fout quand même les boules. Quand est-ce qu'on rentre au camping ?

 

Rock Werchter 2005 : vendredi 1er juillet

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En principe, après la pluie vient le beau temps. Ce deuxième jour de festival commence pourtant sous les pâles apparitions d'un soleil dissimulé sous d'épaisses ondées nuageuses. Il fait un peu froid, un peu gris et ce n'est certainement pas la programmation du début de journée qui nous réchauffera. Simple Plan, De La Vega, Kt Tunstall, Sioen et Jimmy Eat World se partagent le bas de l'affiche. Globalement, l'apéro est indigeste. N'est-on pas en droit d'attendre une réception plus alléchante de la part d'une manifestation du standing de Rock Werchter ? La question est posée et l'intérêt de cette édition 2005 ne se trouvait visiblement pas là. Néanmoins, une toute bonne surprise est à mettre à l'actif des organisateurs: la venue du couple théâtral The Dresden Dolls.

L'étrange duo, composé d'Amanda Palmer (piano et chant) et de Brian Viglione (batterie), en impose. Les curieux qui ont fait le déplacement ne s'y sont pas trompés. Ce concert est sans nul doute LA révélation de l'année. C'est la naissance du 'Rock Réaliste de l'Illusion', un théâtre musical épique secrètement fantasmé par Berthold Brecht. Hypnotique et attrayant, le concert mélange rock'n roll et lyrisme, émotion et sophistication. Venu tout droit de Boston, The Dresden Dolls étale son  bagage culturel sous les yeux et les oreilles d'inquisiteurs ébahis. Deux reprises, en particulier, forcent le respect: "War Pigs" de Black Sabbath et surtout, l'inattendue et irréprochable interprétation d'"Amsterdam" de Jacques Brel. La performance est millimétrée. La batterie de Brian semble répondre aux notes dispensées par le piano d'Amanda. Il est 16h45, le duo se retire sous les encouragements d'un public ébloui.

La place est torride, prête pour l'arrivée d'un autre duo: The Kills. De l'autre côté, sur la Main Stage, Shirley Manson et Butch Vig tentent vainement de réanimer Garbage, leur projet boursouflé. Sous la Pyramid Marquee, The Kills a d'autres guitares à fouetter. VV alias Alison Mosshart et Hotel alias Jamie Hince attaquent d'emblée leur dernier album par "Now Wow", titre éponyme et ravageur. Ils repassent ensuite sur "Keep On Your Mean Side" par l'entremise d'un "Cat Claw" hargneux. Planquée sous sa tignasse rebelle, VV est nerveuse, tendue, totalement insoumise aux attaques répétées des décharges électriques de son compagnon. Lui, le beau ténébreux, la regarde comme si c'était la dernière fois. Au fond, une rythmique, impulsée par une boîte à rythmes, astreint le chant alterné des tourtereaux à une rigueur de métronome. Le rock'n'roll des Kills consacre sa source d'inspiration, le Velvet Underground. Sur scène, "Good Ones", le dernier simple est rêche et sauvage. Le concert file à toute vitesse et rien ne perturbe la liesse de ces deux-là. "Fried My Little Brains" retentit dans nos tympans comme le morceau le plus corrosif de ce court instant passé en leur compagnie. Les riffs de The Kills s'estompent vers 18h15 dans une ultime reprise de Captain Beefheart, "Dropout Boogie".

Tranquillement, nous quittons la tente pour rendre une visite aux ancêtres du Velvet Revolver. Scott Weiland (ex-Stone Temple Pilots) et les pensionnés de Guns N' Roses se sont emparés de la scène principale pour un show redouté. Nos craintes sont confirmées d'entrée de jeux par papy Slash et ses potes cocaïnés. Grossis et déguisés en rock stars, ces adeptes de soli dégoulinants et de clichés affligeants singent honteusement leur prestigieux patrimoine. Les poses puent le Jack Daniel's périmé, la voix de Scott Weiland se mue en kalachnikov et flingue les malheureux observateurs postés aux premiers rangs de la débâcle. Les compères essaient de sauver la mise en balaçant " It's So Easy", "Mr. Brownstone" et "Sex Type Thing", trois classiques de feu Stone Temple Pilots. Mais rien n'y fait. C'est carrément naze: le mot est lâché. Et heureusement pour leurs poires rabougries par ces décennies de défonce que personne ne vend de cacahouètes sur la plaine… Allez hop, à l'hospice !

Le point fort du vendredi repose presque entièrement sur la venue de Green Day. Voilà un groupe qui vaut tous les déplacements du monde: plus de quinze ans de carrière dans le rétro et pas une ride en perspective ! Emmené par Billie Joe Armstrong, le trio carbure aux tubes. En 1994, le groupe ramasse le pactole en sortant l'indémodable "Dookie". Dix ans plus tard, c'est au tour de "American Idiot" de se tailler la part du lion. L'événement est donc attendu par des adolescents de tous âges en manque de sensations fortes en cette fin de journée. Et là, pas la peine de faire un dessin, le seul et unique groupe de punk-pop tient la dragée haute à tous ses concurrents. Devant la scène, c'est l'effervescence. L'attente devient longue et chacun cherche la bouffée d'air rédemptrice avant la bataille. Tout à coup, Tré Cool se pose derrière ses fûts, Mike Dirnt enfourche sa basse. Et là, c'est l'explosion: Billie Joe Armstrong déboule et arrache un "American Idiot" des cordes de sa Gibson. Une folie furieuse et tourmentée envahit alors l'assemblée. Le chanteur de Green Day court comme le successeur humanisé du lapin Duracell, il galope, trébuche et fonce vers son micro. Tout de noir vêtu, Billie Joe arbore une sympathique cravate rouge et une étoile communiste au revers de sa chemise. Nouveau disque, nouvelle chanson: "Jesus Of Suburbia" entraîne à nouveau la foule dans un tourbillon de magnitude 7 sur l'échelle de Werchter. La suite se décline en singles: "Holiday", "Knowledge" et l'inoxydable "Basket Case" se chargent de passer les troupes en revue. Le sens de l'entertainment s'incarne parfaitement dans l'idéologie du groupe. Sur "King For A Day", Billie Joe invite un fan surexcité à asperger ses congénères au pistolet à eau. On s'amuse, on s'éclate. On sue, on pue. Et en définitive, c'est génial. Le groupe de Berkeley interpelle le public à intervalles réguliers, histoire de vérifier qu'il subsiste encore quelques survivants à l'étage d'en bas. Pour certains, ce jour de fête était également un jour de gloire. Au beau milieu du concert, Green Day se fait remplacer au pied levé par trois énergumènes piochés au hasard de l'assistance. Une jeune batteuse foutrement douée, un guitariste bouleversé de se retrouver en compagnie de ses idoles et un bassiste simplet, coaché par un Mike Dirnt désabusé viennent assurer la rythmique du groupe. La chanson s'achève dans des accolades et des remerciements. Charitable rocker, Billie Joe offre sa guitare à son éphémère remplaçant. Aux dernières nouvelles, ce dernier dort debout en chantant les huit albums de Green Day et vient juste de se faire interner pour démence en compagnie de sa guitare. La formation américaine tire alors à boulets rouges sur George W. Bush, son 'adorable président' et enchaîne par "Minority". Le divertissement touche à son apogée lorsque nos facétieux enragés s'attaquent à une reprise surdosée de Queen, "Cause yes: We Are The Champion my friend !". Green Day repart, fier du boulot accompli. Mais les fans ne l'entendent pas de cette oreille. Devant un public en transe, Billie Joe revient en solo pour un (désormais) traditionnel "Good Riddance ("Time Of Your Life"). Bref, une bonne journée tient parfois à peu de chose.

Pour se remettre de toutes ces émotions, il ne reste qu'à faire un choix: les multirécidivistes Faithless ou Armand Van Helden. Pour finir, Van Helden sera la dernière attraction de ce 1er juillet. Une journée qui s'achève par un dj-set convenu (Blondie, Ram Jam, The White Stripes ou encore Felix Da Housecat passent ainsi dans l'escarcelle électronique du bonhomme) mais agréable. Néanmoins, on regrettera l'usage abusif de 'compacts discs' tout au long de ce 'poussage de disques' en règle. Toute personne susceptible de nous renseigner sur la disparition des vinyles peut nous contacter dès à présent.

 

Cactus 2005 : dimanche 10 juillet

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La troisième et dernière journée du sympathique festival brugeois débute par un temps splendide qui ne laisse augurer que le meilleur. Les Américains du Youngblood Brass Band et leur jazz teinté de hip hop se chargent d'ouvrir les hostilités. Un MC/batteur au style proche de Zack De La Rocha se charge de communiquer avec le public tandis que la large section cuivres (deux trombones, deux trompettes, un sax, un tuba) produit un son chaud et puissant rehaussé par une rythmique des plus efficaces. Le son (excellent) aide à faire passer un peu mieux les quelques improvisations jazzifiantes qui déforcent un peu le propos de cette formation originale.

Backstage, on aperçoit un vénérable Congolais d'une soixantaine d'années qui attend patiemment que les Youngblood aient enlevé leur matériel de la scène. C'est un des membres de Konono n°1, formation de Kinshasa qui va faire entrer le Minnewaterpark dans une autre dimension. Deux percussionnistes, un batteur (une caisse claire et une cymbale) et trois joueurs de caisses équipées de languettes métalliques amplifiées par des haut-parleurs de gare produisent une sorte de techno préhistorique galvanisée par les chants d'une chanteuse/danseuse et d'un chanteur qui exécute des chorégraphies étranges au moyen de deux tambourins et de son sifflet. Les énormes lignes de basses, les solos en distorsion et le groove produits par les musiciens impassibles (qui changent d'instrument lorsqu'ils commencent à s'ennuyer) vont enchanter, sans peine, l'assemblée qui réservera une belle séance d'applaudissement à un des concerts les plus étranges et radicaux auquel il nous ait été donné d'assister depuis longtemps.

Le concert de Wunmi, chanteuse/danseuse anglo-nigérienne, s'ouvre par une entrée fantomatique de cette dernière. Emballée de la tête aux pieds d'une tunique funèbre, elle exécute une danse sur un morceau de soul psychédélique exécuté par les musiciens hors pair (mention spéciale au guitariste et au batteur) qui composent son groupe. Après un début difficile, la chanteuse (NDR : elle a fait ses premiers pas chez Soul II Soul) fait monter la sauce. Lentement mais sûrement. Le show bascule progressivement dans une séance d'afro-beat fiévreuse qui se termine par la reprise du « Zombie » de Fela Kuti.

Lorsque le tour de Gabriel Rios arrive, on aperçoit des jeunes filles qui se ruent fébrilement vers la scène. Le temps de comprendre et il est déjà trop tard. Impossible de sortir des backstages, la foule est trop compacte et déjà en délire… C'est donc un peu en biais par rapport à la scène que nous sommes obligés de suivre le concert du Portoricain installé à Gand… Même s'il n'a pas encore franchi la frontière linguistique, Gabriel Rios a déjà écoulé en Flandre plus de 20 000 exemplaires de « Ghostboy », son premier album solo réalisé en compagnie de Jo Bogaert (Technotronic). Face à un public acquis à sa cause, le chanteur guitariste aligne des morceaux énergiques où le rock, les rythmes latins et des pointes d'électro se mélangent sans complexes. En espagnol et anglais dans le texte, l'homme nous réserve quelques très bons morceaux ; en outre, il est parvenu à s'entourer d'excellents musiciens, dont le guitariste des non moins excellents Fifty Foot Combo, qui ressemble à une version mexicaine de notre ami Christian Clavier. A côté de la scène, on aperçoit Balo (ancien MC de Starflam) qui s'apprête à aller balancer quelques unes de ces rimes acérées sur une des dernières chansons du set, au cours duquel on pourra aussi entendre une reprise iconoclaste du « Bad Card » de Bob Marley.

Lorsque Transglobal Underground arrive sur scène, on peut de nouveau arpenter la plaine, car le groupe anglais attire un peu moins les foules. Un batteur, une joueuse de sitar, un Mc/percussionniste et un claviériste qui ressemble à un des membres des Village People alignent leurs morceaux efficaces rehaussés par les rimes très rastafari et enflammées de leur chanteur. Leur mélange de dub, musique indienne et drum and bass manque malgré tout un peu d'âme et on s'ennuie quand même un peu… La faute peut-être à un usage un peu trop intensif de bandes sur lesquelles les musiciens jouent un peu mécaniquement et sans feeling.

Après un 'longuissime' et laborieux soundcheck, les quinze musiciens qui forment le nouveau groupe de Lauryn Hill commencent à balancer la sauce. Le set démarre fort par « That Thing », un des hits de son premier album, repris en chœur par la foule. Mais le son est mauvais. Heureusement, il s'améliore par la suite ; et la chanteuse américaine alterne les hits des Fugees, les nouveaux morceaux et les chansons issues de ces deux premiers albums solo. Les intervalles entre les morceaux sont longs. Lauryn Hill ne semble pas péter la forme et on a quelquefois l'impression qu'elle va se mettre à pleurer sur scène ; surtout lorsqu'elle joue ses très belles chansons à la guitare sèche. Coincées entre hip hop old school et les influences ragga, les nouvelles compos laissent cependant espérer la sortie d'un nouvel album assez intéressant. Le concert se termine assez vite, handicapé par les problèmes techniques et un groupe pas tout à fait en place. Lauryn Hill quitte la scène, les gens patientent encore un bon quart d'heure, en espérant un rappel qui n'arrivera jamais, tandis que les musiciens de la chanteuse exécutent derrière la scène une étrange chorégraphie avant de quitter les lieux. Une danse pour la pluie ? On espère que non...

 

Cactus 2005 : samedi 9 juillet

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Désolé pour ce que les Pays-Bas considèrent leur meilleur groupe live et l'avant-garde du mouvement 'électro-fusion', mais je n'ai pu assister au set de Zuco 103. Pourtant, il paraît que leur mélange de mélodies brésiliennes, de drum'n'bass, de triphop, de r&b, de jazz et d'afrobeats réussit à faire bouger les plus coincés, voire les plus encroûtés. Pas d'empêcher les retardataires d'arriver à l'heure. Mea culpa !

Etonnant de voir une formation française se produire lors d'un festival organisé au nord de la Belgique. Et d'y récolter un beau succès. Son nom : Babylon Circus ! Issu de Lyon, ce collectif – ils sont dix – pratique un mélange de ska, de reggae, de musette (NDR : les Négresses Vertes ?), de jazz, de dub, de punk et de musique de l'Est (NDR : pensez au film « Underground » d'Emir Kusturica) sur fond de théâtre et d'engagement sociopolitique (NDR : le pastiche du JT en est une des plus belles illustrations). Un drummer, un claviériste, 4 cuivres, un bassiste, un chanteur/guitariste et deux vocalistes spécifiques. Qui s'expriment parfois dans la langue de Shakespeare, mais le plus souvent dans celle de Molière. Ca bouge dans tous les sens, c'est festif. Le courant passe parfaitement avec le public. Auquel ils leur racontent être tenu d'écourter leur set, parce qu'il doivent se produire le lendemain dans le sud de la France. S'excusent. Exécutent une dernière compo d'une trentaine de secondes et se taillent. Sous les sifflets et les huées. Avant de revenir en fanfare. Et de démentir. Pour terminer sur les chapeaux de roues. Enfin presque puisqu'ils achèveront leur set par un exercice de style a cappella. Ovation ! Et plongée dans le public de plusieurs musiciens qui rejoignent alors la fanfare locale.

Bien que reformé depuis l'an 2000, on ne peut pas dire que les Presidents Of United States Of America aient défrayé la chronique. Ils ont pourtant commis depuis deux albums : « Freaked out and small » et « Love Everybody ». Mais ils sont totalement passés inaperçus. Faute de hit, probablement. Car les P.O.U.S.O.A. sont surtout notoires pour leurs tubes : « Kitty », « Peaches », « Lump », « Zero fighting » etc. ; ou encore leur version du « Video kill the radio star » des Bugles. Et c'est d'ailleurs par ce titre que, le trio ouvre son set. Set et fête riment chez les Presidents, une fête teintée d'humour et d'excentricité. Chris Ballew, Dave Dederer et Jason Finn multiplient les frasques (NDR : lorsque Jason frappe ses baguettes sur les planches, en se promenant à quatre pattes, on est au bord du délire) pour le plus grand plaisir de la foule. Sans pour autant oublier de soigner leur prestation, ponctuée des inévitables tubes. Adressant même un clin d'œil aux Beatles du tout début des sixties, à MC5 (la cover de « Kick out the jam ») et même à Gloria Gaynor, en rappel, pour le célèbre « I will survive ». Rien que leur présence méritait le déplacement !

Depuis qu'il a remporté la médaille d'argent au Humo Rock Rally de 2000, Admiral Freebee s'est forgé une solide réputation dans le nord du pays. Mais Admiral Freebee, c'est avant tout le chanteur/compositeur/multi-instrumentiste (NDR : il joue le plus souvent de la guitare, mais aussi du piano, de la trompette ou de l'harmonica) Tom Van Laere. Admiral Freebee est avant tout un groupe de rock. Qui puise essentiellement son inspiration dans les seventies ; et en particulier chez Van Morrison, les Faces, les Stones et Bob Dylan. En outre, Tom possède une voix écorchée, rauque (rock ?) qui sied parfaitement à ce style musical. Et puis un look d'époque : un large bandeau rouge dans les cheveux et une barbe qui lui mange le visage. Soutenu par un backing group particulièrement solide, Admiral Freebee va alterner titres puissants, électriques et ballades chargées d'émotion (NDR : qu'il interprète alors le plus souvent au piano). Des chansons hymniques que le public reprend même parfois en chœur. En fin de set, Tom se prend même pour Hendrix en jouant de sa six cordes avec les dents. Et puis nous réserve sa compo la plus élaborée « Get out of town », qui débute très doucement avant de se métalliser, puis d'éclater dans une véritable orgie d'électricité. Recueillant un très gros succès auprès du public, Admiral Freebee accordera sans peine le rappel réclamé. Personnellement ce set m'a quand même laissé perplexe. Une excellente prestation sans doute. Mais un peu trop revivaliste, sans aucun doute. Enfin, des goûts et des couleurs….

Pour effectuer sa nouvelle tournée, Will Oldham, alias Bonnie 'Prince' Billy, Palace Brothers, Palace Music ou encore Palace, a eu la bonne idée de s'entourer d'un groupe. Parmi lequel on remarquera la présence du guitariste Matt Sweeney ; un ex Chavez récemment impliqué chez le défunt Zwan de Billy Corgan. Et puis une claviériste (NDR : qui passe son temps disponible à fumer des clopes ou à prendre des photos) et un très jeune drummer. Bref une formule électrique qui dans ses meilleurs moments peut atteindre l'intensité d'un Neil Young ou baigner dans un climat atmosphérique digne de l'album incontournable de David Crosby, « If I could only remember my name ». Instrumentalement, le quatuor est plus qu'au point. Et en particulier la conjugaison des guitares opérée entre Matt et Will. Scéniquement, Will (NDR : casquette yankee vissée sut la tête et barbe en broussaille) se complait dans son monde. Régulièrement dos au public, il prend son pied sans se soucier de la réaction du public, auquel il n'adresse la parole qu'après 45 bonnes minutes. Pour dire merci. De temps à autre, lors d'un changement de tempo, il exécute un petit pas de danse, comme s'il était content de vivre cet instant de bonheur intérieur. Qu'il ne partagera jamais au cours de son set. Dommage…

Je n'avais pas conservé un souvenir impérissable du dernier passage d'Asian Dub Foundation, en première partie du concert de Radiohead à Forest National. Mais il faut leur reconnaître une intégrité intellectuelle qui mérite le respect. Depuis 2000, la formation est passée de l'engagement sociopolitique au militantisme. Un militantisme qui transparaît à travers les lyrics des deux MC's dont le rap acharné parvient à exciter la foule. Et même à la faire danser. Sur une musique qui mêle allègrement drum'n'bass, hip hop, (dub)reggae, funk, ethno et beats. Lors de leur set, l'accent a surtout été porté sur les compos du dernier album « Tank ». Mais les meilleurs moments de leur prestation se sont paradoxalement produits lors de leurs envolées instrumentales. Libérant alors une atmosphère plutôt étrange, au sein de laquelle les percus et les sonorités indiennes étaient davantage mises en évidence. Fidèle à la tradition, Asian Dub Foundation a clôturé son set par « Rebel warrior », issu de son tout premier opus, « Fact & fiction ».