La Flemme tente de nous endormir…

La Flemme émerge comme un tourbillon coloré dans le paysage musical français, entraînant son public dans un univers où convergent des sonorités pop garage, des textures psychédéliques et une indéniable énergie nerveuse. Originaire de Marseille, ce groupe de…

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Bernard Dagnies

Bernard Dagnies

lundi, 05 novembre 2018 17:48

Le serpent et le loup...

Il aura donc fallu attendre presqu'une année pour voir sortir le premier véritable album d'Experimental Tropic Blues Band. Pourtant, Dirty Wolf (alias Psycho Tiger) et Boogie Snake prévoyaient sa parution vers le mois de mai. Apparemment, les événements ne se sont pas déroulés comme ils l'imaginaient. Vous le constaterez vous-même à la lecture de cet entretien que les deux chanteurs/guitaristes avaient accordée lors de la dernière édition du festival d'Hiver Rock. Une interview au cours de laquelle, on ne pouvait, non plus, passer sous silence les différents projets parallèles menés par les différents membres de l'E.T.B.B.

Quand on parle de l'Experimental Tropic Blues Band, on évoque d'abord ses prestations 'live'. C'est sur les planches qu'il a bâti sa réputation. Peut-on affirmer que c'est l'endroit qui vous motive le plus ? Le moteur du groupe en quelque sorte ?

Dirty Wolf : Effectivement, c'est sur la scène qu'on s'exprime le mieux. Pour l'instant, nous sommes en studio pour terminer notre album. En fait, on s'est rendu compte que lors de l'enregistrement de nos deux précédents disques, nous n'étions pas parvenus à y communiquer ce feeling 'live'. C'est ce qu'on va essayer de faire sur cd. Mais c'est très difficile à concrétiser…

Lorsque vous êtes sur les planches, Dirty Wolf baragouine en anglais entre les morceaux. Est-ce le reflet d'un l'attitude ?

D.W. : Ouais, c'est l'attitude ! Parfois, j'ai du mal à parler en français. Surtout quand on joue une musique comme la nôtre. Tu m'imagines balancer : 'Allez les gars' ou 'Est-ce que vous voulez du sale rock ?'. C'est ridicule… 'Come on' ou 'Do you wanna dirty rock', ce n'est pas pareil ! Maintenant, je ne sais pas trop pourquoi, mais on a toujours fait ainsi. Cependant, lors de certains concerts, je parle quand même dans ma langue natale. Notamment, lorsqu'il se produit un événement assez marrant. Finalement, j'aime bien les groupes qui parlent en anglais. Ca me dépayse un peu. Même si je parle très mal l'anglais. Surtout moi…

Lors de vos sets, il arrive régulièrement que vous vous laissez porter par le public. Lors de l'édition du festival de Dour 2005, je pense que c'était Boogie Snake.

Boogie Snake : (s'adressant à Dirty Wolf) Oui, mais tu l'as fait aussi !

D.W. : Ouais, ouais…

Pas trop les boules, quand même ?

B.S. : Il y avait tellement de monde, qu'il n'était pas possible de tomber. Et de se casser quelque chose.

D.W. : Il aime ça, hein !

B.S. : J'adore le snake diving !

Sais-tu que dans le passé, Peter Gabriel était coutumier du fait ?

B.S. : Non ! Je pensais plutôt à Iggy Pop ou des gens comme lui.

D.W. : C'est vraiment une sensation étrange.

B.S. : Physique.

D.W. Etrange aussi, car c'est incroyable de voler au-dessus de la foule. Tu vois leurs têtes de près. Et cette situation te communique une énergie incroyable.

B.S. : Alors qu'ils prennent des godasses dans la tronche.

D.W. : Ou alors, ils te tirent le froc. Ou encore tu finis par tomber…

Et des tas de filles crient à poils ?

D.W. : Non, là alors, je suis trop fatigué (rires)

Pour jouer une musique comme la vôtre, il faut adorer le blues et le rock'n roll. Mais qu'est ce qui vous a poussé à fonder un groupe semblable ?

B. S. : Notre admiration pour des artistes comme Elvis, Bo Diddley, Bob Log, John Spencer, etc.

D.W. : Les Cramps…

B.S. : R.L. Burnside, Skip James, Blind Willie Johnson, Otis Rush, et puis toute l'écurie du label Fat Possum…

Ce qui explique pourquoi on vous décrit parfois comme les héritiers naturels des Cramps et du Jon Spencer Blues Explosion ?

D.W. : Surtout des Cramps ! (rires)

A l'instar de la bande à Lux Interior et de Poison Ivy, votre répertoire inclut des reprises (NDR : le premier elpee des Cramps était exclusivement constitué de covers). N'envisagez-vous pas, dans le futur, l'enregistrement d'un album exclusivement consacré à ce type d'exercice ?

B.S. : Non, je ne le pense pas. Ce type de projet pose trop de problèmes de droits d'auteurs. Et on ne sait pas trop comment s'y prendre pour aborder le sujet. Enfin, il faut aussi en payer un certain prix…

D.W. : Pour l'instant, on joue sur scène, une version du « Garbage man » des Cramps (NDR : elle est sur le nouvel album !). Une autre de Bo Diddley et aussi d'Alan Vega.

B.S. : D'André Williams également (rires)

Vu le style musical pratiqué, ne craignez-vous pas que dans un futur plus ou moins proche, vous aurez rapidement fait le tour du sujet ?

B.S. : A premier abord, cette musique paraît, assez limitée. Mais en vérité, elle offre bien plus d'alternatives qu'il n'y paraît. Dans l'univers du rock, il y a toujours moyen d'emprunter une direction différente.

D.W. : La question ne se pose même pas, car on joue de la musique pour se faire plaisir et on a envie de continuer pour cette même raison. Qu'on soit seul, à deux, à trois ou à quatre, on continuera à faire du Tropic. Et tant pis si ça ne marche plus. J'espère simplement que j'aurais toujours la force de continuer… J'en ai même la quasi-certitude. Mon avis peut paraître prétentieux, mais j'ai trop la flamme pour m'arrêter. Et je pense que mon acolyte blond partage mon opinion.

Revendiquez-vous d'autres legs ?

D.W. : Bien sûr, nous ne sommes pas seulement influencés par le blues et le rock'n roll. Nous apprécions également la musique très dure, directe. Celle où on sent que les musiciens mettent leurs tripes sur la table. Un don de soi. Et que l'on ressent au plus profond de soi-même.

B.S. : J'apprécie aussi la musique country. Pour l'instant j'écoute beaucoup Johnny Cash.

Arbitrairement, je vais considérer l'E.T.B.B. comme groupe fédérateur au sein d'une multitude de projets auxquels vous participez. Colonel Bastard, c'est un projet solo imaginé par Psycho Tiger ?

D.W. : (d'une voix caverneuse) Dirty Wolf…

Seasick implique Boogie Snake ?

D.W. : Il ne s'appelle pas Boogie Snake dans Seasick, mais JJ.

Et enfin il y a Two Star Hotel au sein duquel militent le guitariste et le bassiste de Seasick. C'est tout ?

D.W. : A peu près. Ce n'est déjà pas si mal non ? Ah oui, il y a aussi l'Electric Ladies Blues, un ensemble auquel participe la copine de Boogie Snake.

Je suppose que vous multipliez les projets pour élargir votre horizon musical ?

D.W. : Nous ne souhaitons pas élargir notre horizon musical, mais on a trop d'énergie à dépenser. Trop d'idées. Alors pourquoi se limiter à un seul projet ?

B.S. : Il n'est pas possible de se contenter d'un seul projet. Nous écrivons trop de chansons. Et puis, nous ne pouvons concevoir de ne se concentrer que sur un style de musique. Nous avons besoin d'autre chose. De ressentir d'autres vibrations.

D.W. : En vérité, ce n'est pas l'E.T.B.B. qui est fédérateur, mais Seasick. C'est notre premier groupe. Nous participons à son aventure depuis 11 ans.

B.S. : Quatorze ans !

C'est ce groupe qui a emporté le Concours-Circuit dans la catégorie métal, en 2004 ? Un résultat plutôt étonnant, non ?

D.W. : Ce prix a provoqué un véritable scandale !

B.S. : J'ai vu des gens pleurer de dépit, parce qu'on avait décroché la palme (rires). Enfin, plus exactement parce que leur groupe préféré n'avait rien gagné. Pitoyable !

A propos de Seasick, j'ai lu qu'ils reconnaissaient pour influences majeures la physique nucléaire et les expériences sur le conditionnent du cerveau humain par Milgram et Hasch. (fou rire général). Vous assumez ?

B.S. : Il fallait bien écrire quelque chose, non ?

D.W. : Ce n'est pas vrai ! C'est parce que Jean-Jacques et Ben sont influencés par tout ce qui se rapporte à l'univers gothique et romantique (rires) : Clyde Barker, les films de série B ou d'horreur, etc. Et je crois que ce sont ces caractéristiques qui sont reflétées chez Seasick. Vraiment ! C'est la raison pour laquelle on écrit des textes semblables. J'ai également lu qu'on écoutait Seasick comme on regarde un film de David Lynch. Et c'est une bonne comparaison. Parce que la musique est très violente et directe. Surtout dans la manière de la donner. Personnellement, j'estime qu'elle est plus punk que metal.

B.S. : C'est sans doute la raison pour laquelle nous avions été versés dans la catégorie métal, lors du Concours-Circuit.

D.W. : C'est dans la manière d'exprimer la musique.

B.S. : Qui libère une énergie parfois dure à encaisser…

On dit de Colonel Bastard qu'il pratique du karaoké-rock-théâtral au sein duquel il n'y a pas de réelle ligne conductrice, mais une improvisation constante…

D.W. : Du karaoké'n roll. Très exactement ! Non, attention, je tiens à mettre les points sur les 'i' (rires). Je reconnais que c'est assez improvisé. Pas les paroles, ni la musique. En fait, je glisse un cd dans le lecteur et je chante dessus. Il n'y a pas de groupe pour m'accompagner. J'apporte quand même mon propre compact disc. L'impro, c'est la mise en scène. Il faut imaginer que je suis seul sur scène. Je dois me donner à fond sur la musique, même si elle est 'nazze'. Sur de l'électro, par exemple. Or, je déteste l'électro. Enfin, il n'y a pas que de l'électro. Donc, je chante sur un support sonore. Qui importe peu, finalement. Je fais en quelque sorte du théâtre en musique. Dès que je monte sur scène, je cherche des endroits où je vais pouvoir me jeter. Où je vais pouvoir faire des trucs. Je ne prévois pas ce que je vais accomplir. Faut que ce soit du 'live' ! Et tant pis si je me casse la gueule ou si je me pète des doigts. C'est ainsi. Ces risques font partie du show… (il souffle)

L'album de Two Star Hotel est paru chez Sounds Of Subterrania! Et sa distribution a été confiée à Sonic RendezVous. Curieux non ?

B.S. : Il faut savoir qu'Al et Ben Plastic ont fondé un groupe qui a connu un certain succès au cours des années 80 : Hiatus. En Allemagne. Et dans le milieu 'crustcore'. La formation a même accompli une tournée mondiale. Jusqu'aux States. Et apparemment, ils ont conservé leurs contacts avec l'Allemagne. Notamment de cette époque. Ce qui explique pourquoi ils se sont retrouvés sur ce label.

On dit de Two Star Hotel, qu'il pratique du Plastic avant-rock ? Une explication ?

D.W. : Je pense qu'ils seraient plus aptes à répondre à ces questions. Parce qu'on risque de raconter des conneries…

Vous relevez du Collectif Jaune Orange. Etes-vous simplement groupe membre ou êtes-vous impliqués dans le conseil d'Administration ?

D.W. : Tout le monde a son mot à dire dans Jaune Orange. Les gens imaginent que c'est un gros bazar. Mais ce n'est pas du tout le cas. C'est une structure très familiale. Il n'y a qu'une ou deux personnes vraiment responsables. Finalement, cette association n'existe que par hasard. Et tous les gens qui en dépendent s'entendent bien. Tout roule parfaitement…

Qu'est-ce que vous a apporté ce collectif ?

D.W. : Enormément. Et d'ailleurs, on commence seulement à en recueillir les fruits. Parce que le collectif prend une ampleur de plus en plus importante et jouit de plus en plus d'une excellente notoriété. Les gens prennent, aujourd'hui, au sérieux, Jaune Orange.

Et Girls In Hawaii y est sans doute, un peu pour quelque chose ?

D.W. : C'est Jaune Orange qui a découvert Girls In Hawaii. Depuis, il a pris une toute autre dimension…

Que devient l'harmoniciste Lord Bernardo ? Il avait notamment participé à l'enregistrement du mini album « Dynamite Boogie ».

D.W. : On le voit de moins en moins. En fait, il a son propre groupe : Stinky Lou & Goon Mat, en compagnie duquel il tourne beaucoup, sans compter ses collaborations diverses. Mais pour nous, c'est plus un ami qu'un musicien. Il vient parfois encore nous rejoindre, mais quand il est libre. C'est-à-dire très épisodiquement…

Vous êtes actuellement en studio. Peut-on lever un coin du voile qui recouvre les sessions d'enregistrement ? Y a-t-il des invités ?

D.W. : John Roo est notre ingénieur du son. C'est un bosseur. En outre on partage la même philosophie en matière de musique. Et c'est devenu un pote. D'ailleurs, on ne peut pas travailler en compagnie de gens avec lesquels on ne s'entend pas. Et pour l'instant on ne travaille qu'avec des amis. Les sessions d'enregistrement se déroulent à Waimes… On n'a invité personne. Rien que nous trois et l'ingénieur du son. On a même emporté nos tartines.

B.S. : Et quelques bouteilles de whiskey…

Et pour la musique ?

D.W. : C'est du rock'n roll. Maintenant, il est difficile d'en dire davantage tant que tout n'est pas terminé. Notamment les parties vocales et le mixing. Mais on y est presque. On a voulu prendre une nouvelle direction, même s'il recèle beaucoup de boogie. Et puis il est très puissant, plus puissant que tout ce qu'on a enregistré jusqu'à présent.

Et la date de sortie de cet opus ?

D.W. : Il part au mastering le 27 avril, donc 3 semaines plus tard, il devrait être dans les bacs. Si tout va bien. Et pour ton info, il s'intitule « Gangrene blues » (rires). Parce que nous considérons que nous somme quelque part la gangrène du blues. (NDR : en définitive, il s'appelle « Hellelujah »)

(La suite de l'interview nous propulse le 26 janvier 2007. Juste pour obtenir quelques éclaircissements relatifs à l'entretien que vous venez de lire. Dirty Wolf nous répond par téléphone.) L'album devait sortir en mai 2006. Il compte huit mois de retard. Vous avez rencontré des contretemps majeurs ?

D.W. : Non, pas vraiment. En fait, ce retard est dû à la confection de la pochette. Tout simplement.

Lors de notre rencontre, vous m'aviez répondu, que lors des sessions d'enregistrement, vous n'aviez reçu le concours d'aucun invité. Ce qui est loin d'être le cas, puisque Arno est venu apporter son concours à l'harmonica, sur deux de vos chansons (« Twice blues » et « Dry whisky »).

D.W. : A cette époque, ta question nous avait pris de court. En fait, nous avions eu l'accord verbal d'Arno pour qu'il vienne jouer de l'harmonica sur l'une ou l'autre de nos chansons. Mais il n'était pas encore passé en studio. Et on s'est dit, merde alors, comment as-tu fait pour savoir ce que personne ne savait ? Et pour ne pas que l'affaire capote, on a préféré tout nier en bloc. On aurait eu l'air malin s'il avait décliné l'invitation. Pour le reste tu peux savoir que Lio qui joue au sein d'Electric Ladies Blues et dans Le Prince Harry nous accompagne au piano sur deux titres. Je te le signale, car on va bientôt parler de ces groupes. Et en bien !

Quoique responsable d'un premier album de bonne facture (« G »), paru au printemps dernier, Malibu Stacy est avant tout un groupe de scène. Depuis leur victoire au 'Concours Circuit' en 2004, les Visétois n'arrêtent d'ailleurs pas de tourner. Et si vous ne les avez jamais vus en 'live', c'est que vous n'assistez jamais au moindre festival ! Ou alors que vous êtes collés devant votre téléviseur du matin au soir. C'est d'ailleurs à l'issue de leur prestation à Dour que la formation nous a accordé cette interview. En l'occurrence le chanteur David et le bassiste Paulie. Très à l'aise pour parler de tout, même au second degré… sauf de musique. Jugez plutôt par vous-mêmes…

Leur premier opus a donc été enregistré à Bologne sous la houlette de Francesco Donadello (Yuppie Flu). Une expérience humaine qui aurait pu être intéressante. Apparemment ce ne fut pas le cas. Paulie s'explique : « En fait Francesco passait la plupart de son temps à regarder la TV ou à manger des pizzas. Ah oui ; et aussi à régler des pédales durant des heures. Pendant ce temps là, on attendait. Hormis ces quelques détails, il travaille plutôt bien. » David nuance : « Il fait quand même correctement son boulot ? » Paulie reprend déjà le crachoir : « Il est surtout lent ! Mais il y a pire : Matteo (NDR : Agostinelli), le superviseur ! Lui n'en avait strictement rien à branler des sessions. Il passait son temps à accorder des guitares. On doit l'avoir crédité dans les remerciements spéciaux ou quelque chose du style. Ceci dit, Francesco est plutôt compétent. Mais il ne fait pas grand-chose… » Maintenant, le plus important est de savoir si le groupe est satisfait du résultat. Paulie embraie : « Au départ, nous n'étions pas trop satisfaits. Mais en écoutant des disques d'Elvis Presley, on en a conclu qu'on avait fait le bon choix au niveau du son. On s'est même reproché de copier le King ! Plus sérieusement, on voulait un son un peu sourd comme dans les années 50 ou 60. Et finalement, je pense que l'objectif est atteint... » Après l'Italie, la formation s'est envolée aux States. A Los Angeles, très exactement. Pour y tourner le clip de ‘LosAngeles’. Et manifestement, on ne peut pas dire que le voyage leur a laissé un souvenir touristique impérissable. Paulie est néanmoins satisfait de ce périple : « A L.A., j'ai battu mon record de burgers ingurgités. J'en ai avalé quatre de suite. Avec des frites ! Mais cette expédition reste pour moi un excellent souvenir ! Surtout que ces aliments étaient excellents. La viande était bien grillée… » David enchaîne : « Effectivement, leurs burgers sont délicieux. Mais la bière n'est pas terrible… » Paulie confesse : « Mais notre meilleure aventure nous est arrivée le dernier soir. A l'hôtel. En fait, on s'est retrouvé dans une maison de passe. Du côté de Venice Beach. On l'avait aussi bien cherché. Bref, il y avait plein de putes. Et des miroirs partout. Et on s'est bien rincé l'œil (NDR : les yeux ?). Mais le problème c'est qu'on y a dormi. Un peu gênant, quand on voit tous les mecs qui entraînent les prostituées dans les chambres. Non, mais tu imagines te glisser dans un lit en te demandant s'il n'y a pas des traces visqueuses sur les draps. Beuurk ! On partait donc lendemain et on s'est mis à boire comme des porcs. Et on ne s'est réveillé que lorsque les taxis sont arrivés. Si bien que lorsqu'on a repris l'avion, on était complètement déchirés… » Oui, mais ils étaient quand même partis en Californie pour y tourner un clip ? Paulie acquiesce : « Tout à fait ». Et David confirme : « Oui mais on s'y rendait en toute décontraction ! Un peu comme si on prenait des vacances. » Paulie argumente : « En fait on disposait d'un budget qui nous a permis de partir là-bas. Dans une ville où nous rêvions nous rendre. Bien sûr, il y a eu le tournage de la vidéo. Mais l'important, c'est qu'on s'est bien amusés et qu'on a bien rigolé. La seule contrariété vécue a été causée par le décalage horaire… »

Justement à propos de budget, Malibu Stacy a failli ne pas signer chez Bang ! Ce qui méritait une explication. C'est toujours Paulie qui s'explique. « Après avoir sorti l'Ep, Pias nous a contacté pour nous proposer un contrat. En fait, nous n'avions alors pas encore signé chez Bang ! Mais Bang ! nous a rappelé que nous avions enregistré l'Ep chez eux et qu'il n'était pas question d'aller voir ailleurs. On a alors discuté ; et ils ont doublé le budget. On a finalement opté pour le label qui avait effectué la meilleure proposition. Nous souhaitions nous engager auprès de la firme susceptible de mettre le plus de moyens à notre disposition. Nous ne voulions pas gamberger, mais bien avancer. Faire ce que nous avions envie de faire. » David se défend : « Nous avons appliqué une technique rencontrée dans les soumissions d'entreprise. Quand tu envisages de remplacer ta toiture, tu contactes plusieurs entrepreneurs. Et puis tu choisis celui qui te semble le plus intéressant en matière de qualité/prix. On a fait pareil ! »

L'ancien bassiste, Jean-Christophe a cédé sa place à l'ex-claviériste Paulie. Et ce dernier a refilé les claviers à un nouveau venu, Jérôme (présent tout au long de l'interview, mais muet). Mais qu'est devenu Jean-Christophe ? Paulie clarifie : « Il est toujours avec nous. Mais il est devenu notre tourneur. Il a changé de fonction. Et il n'en rate pas une pour nous tancer. Quand on joue, il est derrière la table de mixage. Si j'ai le malheur de louper une note à la basse, il se tord de rire. Et ça me fait chier. Ca me perturbe. Et j'ai alors besoin d'une demi-heure pour me reconcentrer. » Pourquoi a-t-il choisi la basse, alors ? Il se justifie : « Je ne suis pas bassiste, mais guitariste. Et chez Malibu Stacy, au départ, on m'a confié les claviers. Mais lorsque Jean-Christophe a cessé de jouer au sein du groupe, j'ai voulu reprendre la basse, parce que les claviers me faisaient super chier (rires). Je déteste cet instrument. Et Jérôme a pris le relais. J'ai en quelque sorte sauté sur l'occasion pour passer à autre chose. C'est quand même plus marrant de tenir quelque dans la main que de taper sur un truc posé sur un pied. » Le phénomène des chaises musicales, quoi ! « Exactement ! Chaque membre du groupe essaie de monter en grade. Et mon prochain objectif sera le chant… (rires). Il faudra que je porte des lunettes. Arbore un look différent. Sans oublier de laisser pousser une mèche de cheveux sur le côté…  Non c'est pour rigoler. Ca ne marchera pas… »  Et chanter en anglais aussi bien que David. Mais pourquoi chanter dans la langue de Shakespeare, lorsqu'on est francophone ? David réplique : « Chez moi, c'est totalement naturel. A cause de la musique que j'écoutais quand j'étais très jeune. Et puis parce que c'est l'expression qui colle le mieux à la musique pop/rock qu'on pratique. En outre, j'ai vécu un moment en Ecosse et j'aime parler cette langue. »  

Le jeu de scène de David est impressionnant. Il bondit parfois sur les planches comme un chat. Et manifeste une expression corporelle digne des plus grands showmen. Pourtant, il n'a jamais fait ni de théâtre, ni de gymnastique ou exercé une quelconque activité sportive. Il confirme : « Non, jamais. C'est naturel. Mais je ne pense pas que je sois vraiment souple. Disons que j'ai plutôt de la détente. En fait je ne suis pas du tout souple (NDR : il se lève et parvient difficilement à mettre le bout des doigts au sol, les jambes tendues. Dans le même temps, Paulie y pose la paume des mains, sans la moindre difficulté). Paulie se met à frimer : « Ma copine me reproche souvent de ne pas être assez souple au lit. Mais d'y être quand même performant (NDR : vantard !). Pourtant, tu vois, je réussis plutôt bien les exercices de souplesse. En fait, lorsque je fréquentais l'école secondaire, j'ai remporté un prix de souplesse lors du concours de fin d'année. Non, non, je ne déconne pas ! Mais il est vrai que je ne suis pas parvenu à battre le record établi par un ancien élève, dix ans plus tôt. » Pour l'expression théâtrale, David manifeste toujours la même modestie : « Non, non, je n'ai jamais fait de théâtre. Sur scène je ne fais vraiment pas attention à ce que je fais. Ni ne réfléchis à prendre l'une ou l'autre pose… » Qui peuvent néanmoins faire penser à Jarvis Cocker ou à Morrissey… David admet : « J'aime beaucoup la musique des Smiths, même si Morrissey se fait vieux ; et bien sûr de Pulp. Mais mon attitude sur scène n'a strictement rien à voir avec mes goûts musicaux. D'ailleurs, j'aime beaucoup la musique britannique en général… » Evidemment Paulie n'a pas manqué l'occasion d'en rajouter une couche : « J'ai suivi des cours à l'Académie. Et un jour, un type m'a demandé si j'aimais la poésie, etc.  Je pensais qu'il voulait me draguer. En fait, il souhaitait que je rejoigne leur troupe de théâtre. Parce qu'elle ne recelait pas assez de mecs. Ou si tu préfères, il y avait trop de filles à son goût. C'est ce que je voulais dire… »

Sans quoi pour leurs goûts musicaux, difficile de leur tirer les vers du nez. Le Fisher Z de John Watts ? Connaissent pas ! La fin de l'histoire de Weezer ? Un événement peu important, puisque les dernières années vécues par le groupe américain n'étaient quand même plus très convaincantes. Et Paulie d'ajouter : « La plupart des journalistes nous parlent de Weezer comme si c'était une influence majeure. Mais on n'a jamais essayé de s'en inspirer. En fait, on a tous écouté le premier album de cette formation. Qu'on appréciait beaucoup. Par la suite, on n'a plus jamais beaucoup accroché à leur musique. »

Pour votre info, sachez que ce n'est pas le Collectif Jaune Orange qui les a boostés à leurs débuts. Ils ont rejoint l'équipe après le concours. Ce qu'ils ne regrettent pas, parce qu'ils trouvent que les gens qui l'animent sont très chouettes. Et Paulie d'insister : « Finalement, je pense que le Collectif bénéficie aujourd'hui de notre statut ». La jolie fille peu habillée qui figure de dos sur la pochette est un mannequin. Ce qui coupe les ailes au canard selon lequel ce serait une copine des membres du groupe. Ces derniers ne sont pas davantage des fans des Simpsons auxquels ils ont quand même emprunté le nom de la poupée de Lisa. Ils estimaient simplement que le patronyme sonnait bien… Par contre, ils ont bien piqué le célèbre 'Hey you, what's that sound ? Everybody look what's going down', immortalisé par les Rhymes Digitales, pour le reproduire lors de la fin de leur chanson 'Feck'. On imagine donc que le groupe a dû payer des droits d'auteur pour utiliser cette phrase… Paulie rectifie : « Ces paroles ne sont pas des Rhymes Digitales, mais de Buffalo Sprinfield. En fait, au départ, c'est également ce qu'on pensait. Puis, on s'est rendu compte de notre méprise. Et finalement ce n'est pas plus mal, car chez Buffalo Springfield, ils sont presque tous morts. Il ne reste plus que Neil Young. Et à mon avis, il s'en tape complètement de cette reproduction (rires). Notre label nous l'a quand même fait remarquer et aurait souhaité qu'on l'expurge. Or c'est cette version là qui passe le mieux et qui fait en quelque sorte l'originalité de la chanson. Donc on a décidé de la garder. Et jusqu'à présent, on n'a pas rencontré de problèmes… »

mercredi, 13 décembre 2006 04:00

Une histoire de famille...

Danielson, c'est avant tout Daniel Smith. Un personnage autour duquel gravite toute la famille : frères, sœurs, épouse, belles-sœurs et amis (très proches) ; quoique lors de l'enregistrement de leur dernier album, « Ships », la palette d'invités s'est considérablement agrandie. Une bonne vingtaine de collaborateurs ont ainsi participé à la confection de cet opus, et notamment des membres de Deerhof ainsi que Sufjan Stevens. Un disque remarquable mais trop peu médiatisé pour s'extraire de la zone crépusculaire de l'underground. Le septième de Daniel, si on tient compte de celui de Br. Danielson. Un opus solo ! Tout un concept qui méritait quand même des explications. Surtout lorsqu'on sait que l'intéressé ne cache pas ses convictions religieuses, sans pour autant, a contrario de David Eugene Edwards, chercher à convertir son prochain à sa doctrine personnelle. Les nouveaux sympathisants n'ont donc pas dû se farcir des cours de catéchisme…

« Je ne me considère pas comme un guide spirituel. Ma foi est plutôt le reflet d'un examen de conscience individuel. Je compte autant d'amis croyants que de personnes ne partageant pas nécessairement mes convictions religieuses. Ce n'est pas un problème. Sais-tu que l'essence même des relations est une vérité spirituelle ? C'est ce qui fait tourner le monde. Qui permet aux êtres humains de vivre ensemble sur cette terre… » Donc à l'avenir, il faudra s'attendre à la reconduction de la formule élargie du groupe. Daniel s'explique : « Pour pouvoir écrire un album consacré aux relations humaines, il n'y a rien de tel que d'inviter de nouveaux amis. Et donc, c'est une nouvelle manière de se situer au sein d'un groupe. De partager des idées différentes. D'emprunter une nouvelle direction. D'essayer de concocter un disque qui tient la route. Ce n'est pas une idée révolutionnaire, cependant. Car ce n'est pas la première fois que j'adopte cette formule. Dès le début, je l'ai appliquée. J'écris des chansons et puis j'invite du monde pour participer à leur interprétation (NDR : vieux pote, Sufjan Stevens a ainsi coopéré à l'enregistrement de ' Ships'. Mais il est vrai que, de son côté, Daniel a joué de la basse et produit un album de Stevens). On va essayer de poursuivre dans cette voie ; et qui sait si lors du prochain album, nous ne compterons pas 35 invités. Réunir les frères, les sœurs, les anciens et les nouveaux amis : c'est cela le concept Danielson… » Dont le cœur demeure néanmoins la famille. Mais n'est-il pas plus difficile de travailler en compagnie de ses proches ? Même s'ils sont différents, des problèmes doivent également surgir ? Comment les résoudre lorsqu'un de ses membres ne partage pas le même avis ? La réponse fuse : « Je prends les choses en main. Et je lui demande de se calmer… (rires) C'est une bonne question ! Mes parents ont eu 5 enfants. Aucun d'entre eux n'a jamais envisagé entreprendre une carrière musicale. Moi bien. Ils jouent quand ça les arrange. Pour l'instant David tourne avec nous. Aucun d'entre eux ne compose sa propre musique. Une des mes deux sœurs est styliste dans l'univers de la mode. Elle y fait carrière. En fait, chacun a un job et personne ne vit de la musique. Je suis moi-même charpentier. Mais, il est vrai que ce n'est pas toujours facile. J'écris les chansons. Je joue de la guitare et chante. Je leur enseigne ces chansons et ils amènent leur touche personnelle. Mais il leur arrive de ne pas apprécier ce que je leur soumets. C'est humain. Ils sont là pour m'aider. On ne doit plus se battre ensemble comme lorsque nous étions gosses. Nous avons eu notre dose. Et aujourd'hui tu peux leur dire ce que tu penses. C'est un gain de temps. Alors que pour tes nouveaux amis, tu dois bien souvent ravaler ta salive… »

Un film vient d'être tourné au sujet de la famille Danielson. Intitulé "Danielson: a Family Movie (or, Make a Joyful Noise Here)", il traite de la créativité au sein d'une communauté partagée entre amis et famille. Daniel s'explique : « C'est un documentaire réalisé par JL Aronson. Il nous a approchés il y a plus ou moins 7 ans. Il travaillait dans un club à New York où on jouait beaucoup. Il était fasciné par notre groupe, et en particulier parce que étions une famille. Parce que nous abordions des sujets spirituels. Parce que nous jouions une musique étrange. A cette époque la scène indie était occupée de reprendre du poil de la bête. En outre, les parents et les enfants venaient assister à nos spectacles. Et il lorsqu'il m'a exposé son projet, j'ai tout d'abord refusé, car j'estimais que notre aventure était privée. Après en avoir longuement discuté, il a fini par nous convaincre. Même si à l'origine, nous lui faisions confiance du bout des lèvres. Au début l'expérience était même angoissante. Puis au fil du temps et des années, il est devenu un ami. Il a travaillé dur pour terminer son œuvre ; et finalement, c'est un honneur d'y avoir participé. Ce n'est d'ailleurs pas seulement un film au sujet de la musique, mais aussi de la créativité dans la famille. C'est un documentaire qui est susceptible d'intéresser les gens qui cherchent à comprendre ce qu'il y a derrière la musique. »

Daniel est un grand admirateur de Bob Dylan. Mais qu'est-ce qu'il aime chez le Zim ? « Tout d'abord ses textes. Puis l'individu. Personne n'est jamais parvenu à le classer dans un genre musical précis. Même au cours des années 60, lorsqu'il véhiculait des messages politiques. Ses compos ont toujours été personnelles, originales. Je respecte ce qu'il fait, ce qu'il a toujours fait, même si j'aime moins certains de ses disques. En fait, c'est la culture pop qui s'est alignée sur lui, et pas l'inverse. C'est un narrateur, un poète, un caractère fascinant. Chez la plupart des artistes, il est rarement difficile de discerner leurs pensées. Par contre, Dylan, je me demande toujours ce qu'il a derrière la tête. Il est devenu célèbre alors qu'il était encore très jeune. On peut dès lors facilement imaginer ce que ce statut a pu lui imposer comme contraintes… » Smith admire aussi beaucoup Daniel Johnston, auquel il a rendu hommage lors d'un 'tribute' intitulé 'I Killed the Monster'. Et si Johnston l'appelle pour bosser avec lui, il le rejoint sans l'ombre d'une hésitation… Smith puise ses influences majeures dans les seventies et la fin des sixties. Et il a l'honnêteté de le reconnaître. « Marc Bolan (NDR : la voix !), Syd Barrett, Can, Bowie, Roxy Music, Brian Eno, Soft Machine et surtout Robert Wyatt. J'apprécie tout particulièrement le concept du voyage (NDR : spirituel ?) dans la musique. Cette perspective d'écrire lorsque l'inspiration survient. Car si tu ne la concrétises pas de suite, tu risques fort de perdre le fil de tes idées… J'aime expérimenter la structure d'une chanson. Combiner des instruments qui ne se côtoient pas habituellement. C'est précisément ce qui m'intéresse… »  

Les références religieuses et bibliques, on y arrive ! Déjà que 'Ships' constitue le septième album (NDR : 'Ship' se traduit par bateau). Une allusion à peine voilée à l'arche de Noé. C'est également la troisième partie de la trilogie consacrée au navire Danielson. Les studios de Danielson s'appellent Jerusalem. En 'live', les musiciens du groupe se déguisent parfois en docteurs et les filles (souvent) en infirmières (NDR : on suppose que c'est pour soigner nos âmes). Et puis, les lyrics sont truffés de références bibliques. A croire ( ?!?!?) que ce sont ses seules sources d'inspiration. Celles de la famille également. Mais comment réagiront-ils le jour où ils hériteront d'un fils prodigue ? (NDR : la question déclenche un énorme éclat de rires.) « La Bible est riche en imageries diverses ; mais surtout est une source de vérité, d'émerveillement, de mystère ainsi que de beauté. Bob Dylan est, par exemple très influencé par la Bible. C'est la nourriture de la vie. Les paroles émanent des moments du quotidien. Mon intérêt dans la passion est de regarder constamment les petits événements de l'existence ; et ce bref regard en arrière me permet de déceler le surnaturel dans ces moments privilégiés. Vous passez parfois à côté de certaines petites choses. Je ne suis pas doué pour les reconnaître au moment-même. Mais je tente de m'améliorer. En tentant de les déceler. Et ensuite je m'inspire de ces instants pour écrire des chansons. Ces petites choses, ces petits instants, sont la manifestation de la présence de Dieu. Tu ne les a pas vus, mais pourtant, ils existent. C'est ma quête spirituelle. C'est vivant, parfois dangereux, mais il faut continuer dans cette direction. Je ne cherche pas nécessairement de l'imagerie publique, mais j'exprime ce que je ressens au travers de ces moments, de ces expériences, avec le regard de la Bible. Un exemple : j'éteins la TV ou la radio qui diffuse les nouvelles pour lire ces Ecritures. En fait, les actualités ne m'intéressent que de très loin… » Coïncidence, mais le jour de l'interview, Danielson partageait l'affiche avec Wovenhand, dont le leader, David Eugene Edwards, est réputé pour son intransigeance en matière de philosophie religieuse. Mais manifestement les deux personnages s'apprécient. « David, c'est comme un frère spirituel. C'est un excellent ami (NDR : encore !) Un artiste fabuleux. On aime se retrouver ensemble. Le fait de tourner en Europe, à la même époque, est un hasard heureux. Il est sur mon propre label, aux States (NDR : New Jerusalem). Il utilise des images fortes pour comparer nos philosophies : les ténèbres et la lumière, le sucré et le salé… » 

Daniel clame qu'il n'est pas un artiste solo. Qu'il a besoin des autres. Ce qui ne l'a pas empêché d'enregistrer un disque en solitaire et puis de se produire, lors de son dernier périple sur le Vieux Continent, seul sur scène. Où il s'était même déguisé en arbre. « L'arbre est parti à la retraite. C'est du passé ! Aujourd'hui nous en sommes au thème de la communauté, de la couleur bleue, des arômes. Cette mise en scène nécessitait beaucoup de travail. Maintenant, il n'est pas exclu que le thème revienne dans le futur… Même lorsque je suis en solo, ma femme est au moins présente. Elle chante aussi. C'est vrai : pas lorsque je suis venu en Europe, la dernière fois. En fait, au fond de moi-même il y a une part flemmarde qui ne souhaite pas la présence des autres. Et puis l'autre, que je considère comme une élévation de l'âme, parce que tu la vis en compagnie d'autres personnes. C'est une situation que je dois admettre (rires)… »

Merci à Vincent Devos.

mardi, 25 avril 2006 05:00

Fans des sixties...

Une formation française qui chante en anglais, ce n'est pas fréquent. Mais en plus, qui pratique une musique directement inspirée par les sixties, relève tout à fait de l'insolite. C'est pourtant le style au sein duquel évoluent les Hush Puppies, un quintet établi à Paris dont les 4/5 du line up sont originaires de Perpignan. Faut dire que leur aventure a commencé dans la capitale du Roussillon sous la forme des Likyds. Elle se serait terminée fin des eighties, début des nineties. Au sein d'une scène dite 'garage'. C'est le boulot qui les a séparés. Puis les a réunis en Ile de France. A l'issue de leur set accordé lors du festival d'Hiver Rock, à Tournai, le combo au grand complet (Olivier, Guillaume, Franck, Wilfried et Cyrille) nous a accordé cette interview dans un climat fort sympathique, même si parfois à la limite de la cacophonie ; tout le monde ayant un peu son avis personnel sur les différentes questions. Ambiance!

La scène 'garage' de Perpignan! Vous en aviez déjà entendu parler? Outre-quiévrain, les scènes pop/rock qui sont parvenues a faire parler d'elles provenaient de la face Atlantique : Bordeaux, Nantes, Rennes ou Angers, en particulier. Et pas du côté de la Méditerranée. Inévitablement il y a de la réaction : « C'est peut-être l'image qui est donnée de l'extérieur, mais ce n'est pas vrai. Des villes comme Montpellier, Nice, Toulouse, Marseille et bien sûr Perpignan ont connu des scènes très actives. Metal Urbain vient de Montpellier! Les Kryptons de Marseille. Les Playboys de Nice. Chez nous, nous privilégions davantage l'aspect british de la musique. Côté Atlantique, c'était plutôt le metal ou le rock typiquement français. Bien sûr Perpignan ne comptait pas 25 groupes, mais peut-être 5 ou 6. 10 au maximum. Et il pratiquait du garage sixties ou du r&b. Ou encore du british beat. Il est exact qu'aucun d'entre eux n'a acquis de notoriété internationale. Mais nous bénéficions d'infrastructures et d'associations qui organisaient des concerts forts intéressants. Des artistes ou des groupes comme les Prisonners ou James Taylor se sont ainsi produits chez nous. Et pourtant, ils n'étaient connus qu'en Angleterre. Et dans les milieux mod… » Ce qui justifie finalement, pourquoi ils chantent en anglais. Mais les formations françaises qui chantent dans la langue de Shakespeare font rarement recette dans l'Hexagone. Par contre un groupe comme Tahiti s'exporte plutôt bien. Les Hush Puppies ne risquent-ils pas d'être confrontés à un dilemme, dans un avenir plus ou moins proche : soit marcher sur les traces des Thugs, de Dominic Sonic ou autre Little Bob Story, et devenir une des valeurs sûres de l'underground chez eux. Ou alors, à l'instar de la bande à Xavier Boyer, viser spécifiquement le marché étranger, tout en risquant de se voir snober dans son pays natal. Le groupe est dans l'expectative : « Si on peut réaliser les deux challenges, ce serait l'idéal. Avoir le beurre, l'argent du beurre et la crémière. On a envie de dépasser le stade de l'underground. Même si je sais qu'en France, ce choix est quasi impossible à réaliser. C'est la raison pour laquelle on essaie de s'exporter. Qu'on vient en Belgique. On rêve aussi de se rendre au Japon. Ce serait parfait si on pouvait avoir le même parcours que Tahiti 80. Mais nous ne sommes pas fermés à la France… »

On pourrait parler des sixties en compagnie des membres des Hush Puppies jusqu'au bout de la nuit. Mais sont-ils davantage influencés par ce qu'ils aiment ou par ce qu'ils écoutent ? « Les deux. C'est vrai qu'on est surtout influencés par ce qu'on aime. Mais pas seulement. On est quand même forcés de se taper ce que les autres écoutent. Dans le camion par exemple. Et puis, on est curieux de découvrir ce qui existe aujourd'hui. Et d'en faire notre propre évaluation. On n'est pas vraiment fermé à un style musical en particulier, même si on est davantage branchés sur des groupes basiques comme ceux nés au cours des sixties. Mais à partir de cette racine, on développe quelque chose de neuf, d'intéressant, de manière à faire sonner différemment ce qu'on entendait à cette époque là. C'est ce qui est le plus difficile… » Et lorsque le groupe entre en studio, emporte-t-il ses disques des Seeds, de Countfive, de Chocolate Watchband, des Flamin' Groovies, des Small Faces, des Doors ou encore les premiers elpees du Who ; question de les écouter, bien sûr, mais surtout de se plonger dans une certaine ambiance ? « Dans notre ipod, en fait, parce que les disques prendraient trop de place. Les albums de référence de ces groupes, on les connaît par cœur. Donc on évite de les emporter en studio, parce qu’on n’a pas envie de faire du copier/coller. Ce n'est pas notre objectif. » Question rituelle : comment ont-ils découverts ces groupes d'une autre époque ? En fait l'un avait un ami plus âgé qui leur a révélé l'existence des Seeds. Puis l'a incité à acheter les compiles des Peebles. Ce sera le déclic. Les parents d'un autre écoutaient les Beatles et les Rolling Stones à la maison. Il trouvait leurs goûts géniaux, mais a commencé à vouloir aller au-delà de ces classiques. Ce sera le début de véritables découvertes. Enfin un troisième avait un frère qui était déjà branché sur la musique sixties. Inutile donc de s'étonner de cet engouement pour la même musique. Au fil du temps, leur culture musicale est donc devenue collective. Un aveu : « Aujourd'hui on n'écoute plus tellement de musique issue des sixties. Plutôt des artistes britanniques contemporains. Dont les Dandy Warhols. » Par contre, la scène house mancunienne de la fin des eighties, et en particulier des groupes comme les Stone Roses, les Charlatans ou les Happy Mondays, n'est pas trop la tasse de thé de nos interlocuteurs. « On préfère largement ce qui existait avant. Joy Division, les Buzzcocks. Ce mouvement était excessif. Il y a bien eu l'une ou l'autre aventure plus marquante, mais il est très difficile d'en faire le tri. Par contre cette période ne nous a guère influencés. Et même pas du tout. Les sixties et à la limite le début des seventies nous ont davantage imprégnés que la musique des années 80… » Parmi les artistes français, Gainsbourg est un personnage qui a toujours fasciné les membres des Hush Puppies. Pour certains, c'est toute sa carrière musicale. Pour d'autres, leur passion s'est estompée lorsqu'il s'est mis au reggae. Un sujet qui a créé un véritable débat interne. Une conclusion ? « Une grande perte. A l'instar de Nino Ferrer ou de Polnareff ; mais lui n'est pas encore mort, ce sont de tous grands compositeurs… »

Maintenant, il faut bien penser que depuis leur exode, le soleil doit leur manquer. La réponse fuse. « T'as vu la peau qu'on a ? (NDR : l'un d'entre eux exhibe ses bras en retroussant ses manches). Regarde ! Je suis blanc comme un cachet d'aspirine (rires). Evidemment que ça nous manque. Le problème c'est qu'on ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre. Même la crémière, puisqu'elle vit à Paris ! » (rires) Oui, mais leurs fans de la première heure, et en particulier ceux des Lykids ? Sont-ils devenus forcément des aficionados des Hush Puppies ? C'est confirmé : « Bien sûr ! Les fans et les femmes aussi. Même si ce n'est plus tout à fait le même groupe et les mêmes personnes. Enfin, nous sommes encore quatre sur cinq. Mais on a repris notre cheminement, à peu près à l'endroit où nous nous étions arrêtés chez les Lykids. Nous avions commencé à développer un projet à partir de ce qu'on aimait. Nous avions même commencé à tâter de l'électro. Et puis tout s'est arrêté. Mais quand on a recommencé, on avait vachement l'envie de développer à nouveau ces idées. Tout en mélangeant différents courants musicaux. » La musique des Hush Pupies serait à connotation sexuelle. Réaction : « Tu as écouté les paroles de la chanson 'Pale Blue Eyes' ? De toute façon on est des mecs. On joue pour les filles. Tu as vu combien il y en avait ce soir ? Le rock'n roll a toujours une connotation sensuelle, sexuelle. Pourquoi s'habille-t-on de cuir, à ton avis ? »

Le groupe a déclaré récemment que dans le futur, il donnerait une dimension davantage électro à sa musique. La signature chez Diamond Traxx n'y est-elle pas pour quelque chose ? La réponse fuse : « Non, pas du tout. Ce n'est pas parce qu'on apprécie également la musique électronique, qu'on est fermé à d'autres styles. Nous sommes cinq personnes qui partageons différentes influences. Diamond Traxx est étranger à cette histoire. En fait, la signature sur ce label est un pur hasard. Et puis, quoique fondamentalement électro, ce label commence à s'ouvrir à d'autres horizons. Après nous, Benjamin Diamond a signé Nelson, un nouveau groupe qui joue du rock. En fait, cet ensemble jouait à l'origine de l'électro, mais son denier album est pop. Et le prochain sera également de la même veine… »

Les Hush Puppies ont bâti leur réputation sur les planches. En jouant notamment dans la plupart des clubs branchés de Paris : La Scène, Glaz'Art, La Guingette, Le House Of Live ; et puis en faisant un véritable tabac lors des Transmusicales de Rennes. Une chose est sûre, le 'live' les transcende. (NDR : un vacarme infernal gronde dans le sous-sol. La porte de la loge s'ouvre brusquement et un homme du feu vocifère qu'il est interdit de fumer. Apparemment les détecteurs d'incendie se sont déclenchés…) Retour à un calme très relatif : « Pour nous, il est important de se retrouver ensemble. D'accorder des concerts. De toutes manières c'est le but de la musique. C'est aussi notre vie. Ces concerts nous ont permis de dénicher un manager, de signer auprès d'un label. D'arriver là où on est… On a d'abord commencé par jouer en public. Au bar du coin. Puis dans un plus grand bar. Puis on s'est mis à répéter. Donc notre philosophie a toujours été dictée par le concept 'live'. C'est la raison pour laquelle la scène est devenue notre terrain de prédilection… Un vrai groupe de rock'n roll se crée en direct. Rarement en studio. Le phénomène inverse existe, mais ceux qui choisissent ce chemin alternatif éprouvent les pires difficultés pour s'en sortir. » Lorsqu'on parle de groupe de scène, je ne peux m'empêcher de penser aux Fleshtones, le summum dans cet exercice. Chez les Hush Puppies, la réaction est plutôt mitigée. Olivier ne les connaît qu'à travers des notes bombardées dans son agenda scolaire par un pote. Un autre les apprécie, sans plus. Mais pas trop sur disque. Un troisième les considère comme une légende qui a marqué les nineties de son empreinte. A mon avis, ils n'ont jamais eu l'occasion d'assister à un de leurs sets live…

vendredi, 16 juin 2006 05:00

Etre comparés, c'est être reconnus...

Kaiser Chiefs est à l'affiche du prochain festival Rock Werchter. Une fameuse reconnaissance pour une formation qui, à ses débuts, a éprouvé toutes les peines du monde pour décrocher un contrat auprès d'un label.  Depuis, le quintet de Leeds cumule les distinctions. Et pas seulement à cause de leur tube « I predict a riot » ; mais surtout, parce qu'en février dernier, il a été primé en recevant 3 récompenses aux Brit Awards. Mais revenons à leurs débuts. Qui remontent à 2003 (NDR : le groupe existait déjà depuis 1997, mais sous le patronyme de Parva). Il leur a fallu une bonne année avant qu'ils ne signent chez le label indépendant B-Unique en Angleterre, puis décrochent un contrat chez Universal pour le reste du monde. Lors de son dernier passage à l'Aéronef de Lille, Nick 'Peanut' Baines, le claviériste, nous a parlé de ces moments difficiles au cours desquels le groupe n'a jamais baissé les bras…

« Malgré cette épreuve, nous avons toujours eu confiance en nous. Nous n'avons jamais eu l'idée de tout arrêter. Nous étions déterminés. D'autant plus que notre entente a toujours été idéale. Parce que cela prend déjà du temps de monter un groupe. Il est vrai, qu'il est très dur de se sentir ignoré par les maisons de disques et de ne pas bénéficier d'un contrat. Mais finalement, cette épreuve a renforcé notre caractère. Tu sais notre parcours a connu des hauts et des bas ; on apprécie d'autant plus aujourd'hui, là où on est arrivé. »

Pour mettre en forme leur premier album, 'Employment', le groupe a fait appel à deux producteurs. Ce qui méritait une explication. « Ce disque a été enregistré en 2004. Au mois d'octobre et de novembre. Nous avions travaillé en compagnie de Steve Harris pour la confection de quelques B-sides, dans le passé. Et nous avions l'intention de retravailler avec lui. Mais son emploi du temps était beaucoup trop chargé et il lui était matériellement impossible de bosser pour tout un album. Il a quand même accepté de se charger de 6 chansons. Il a sa façon bien à lui de traiter le son ; et on peut immédiatement le déceler à première écoute. Stephen Street embrasse une approche différente. Il s'est occupé des autres titres. Mais l'essentiel est que l'ensemble soit en harmonie. Et finalement le résultat est à la hauteur de nos espérances… »

Sur ce disque on retrouve l'inévitable hit ‘I predict a riot’, une compo dont les lyrics sont assez inhabituels dans le chef ( !?!?) de Kaiser Chiefs, puisqu'elle recèle un commentaire à caractère social. Nick s'explique : « Effectivement. Le texte parle des sorties du vendredi et du samedi soir. En fait les gens travaillent du lundi au vendredi. Tu vois le topo : métro-boulot-dodo. Et le week-end, ils boivent démesurément. C'est Nick, le drummer, qui a écrit ce texte. Autrefois, il bossait comme DJ dans un club indé. Et lorsqu'il rentrait chez lui, il croisait des tas de gens bourrés au milieu de la route. Des filles qui marchaient sur la route en tenant leurs chaussures à la main. Pas un très beau tableau ! Et il voyait le même cinéma chaque semaine. Il a donc eu l'idée d'en écrire une chanson en parlant de cette population portée sur la boisson et qui se comporte de manière irresponsable et puérile. Ce n'est pas vraiment un commentaire social, mais le fruit d'une observation quotidienne. Nous abordons d'autres thèmes dans nos chansons. Celui de la télévision, par exemple… » Nick est en effet le principal compositeur. Mais aussi le drummer. Concilier ces deux fonctions semble quand même difficile. Ce qui méritait une explication. « Ce n'est pas un problème. Car en plus de la batterie, il joue de la guitare et du piano. En outre, il chante très bien. Lorsque nous avons travaillé sur les compos de l'album, il débarquait quotidiennement avec une idée, un refrain ou des lyrics. On ne concrétisait pas systématiquement ses idées, mais elles servaient le plus souvent de base à la confection d'une chanson. De son côté, le bassiste amenait également ses idées. Et puis on en discutait tous ensemble pour les ramener à un projet de groupe, pas individuel. Mais le plus souvent, Nick esquissait le squelette de la chanson ; et nous on y mettait la peau… » Deux compos de cet opus, ‘Born to be a dancer’ et ‘Everyday I love you less and less’ parlent de leurs ex girlfriends. A croire que les musiciens écrivent une chanson chaque fois qu'une de leurs relations amoureuses s'achève… « Je pense qu'alors nous pourrions sortir au moins dix albums en deux temps trois mouvements (rires). Plus sérieusement ce sont des histoires que nous racontons. Seules ces deux plages traitent de rupture. Maintenant, il est possible que nous écrivions d'autres chansons sur le sujet. Finalement, il est assez sympa que certaines personnes puissent deviner qu'elles concernent nos ex-copines. Tout le monde rencontre, un jour ou l'autre, des  difficultés avec son ou sa partenaire. Et il est assez facile d'écrire quelque chose à partir de son vécu… »

Certains médias on taxé la musique pratiquée par Kaiser Chiefs de britpop. Nick s'en défend : « La britpop, c'était il y a dix ans. Et aujourd'hui cette réflexion a une définition péjorative. Celle de donner l'impression d'imiter quelqu'un ou quelque chose. En fait, notre musique est britannique. Nuance ! Bien sûr il existe quelque chose de commun  à cette musique ; et en particulier cet esprit de narration et puis le fait que l'on ne se prenne pas trop au sérieux. Des groupes ou des artistes tels que les Kinks, les Beatles, Dexy's Midnight Runnners, Bowie, Blur ou Pulp symbolisent parfaitement cet état d'esprit. Mais aujourd'hui, la musique a évolué… » Blur est d'ailleurs un groupe que les musiciens de Kaiser Chiefs apprécient tout particulièrement. Leur ex-guitariste, Graham Coxon, a même participé à  l'enregistrement de leur album. Pas à la gratte, mais sur une moto. Pour y donner quelques coups de gaz. « Nous sommes effectivement de grands admirateurs de Blur. En fait, lors de sessions d'enregistrement, nous n'avions pas rencontré grand monde. Et surtout pas de grosses pointures. Stephen Street qui a produit un elpee solo de Graham – nous a confessé que Coxon était alors en studio. On a donc pensé lui demander de jouer de la guitare ou de chanter sur une de nos chansons. Puis, on a opté pour le son produit par le démarreur d'une voiture. Mais le résultat n'était guère concluant. Enfin, on s'est décidé de mettre sur bande le bruit d'une moto qui se met en marche. Pas trop difficile puisque c'est le mode de déplacement de Coxon dans Londres. Nous avons d'abord essayé de recueillir le son à travers un GSM. Sans davantage de résultat probant. Puis, nous sommes finalement sortis du studio avec un long câble d'enregistrement. C'est l'aspect amusant des sessions d'enregistrement. Mais cette rencontre nous a permis d'opérer une tournée au Royaume-Uni en première partie de Coxon. En avril 2005. »

Les membres de Kaiser Chiefs apprécient tout particulièrement les Specials et Madness. Pourtant, on ne peut pas dire que leur musique soit fondamentalement marquée par le ska. « C'est parce qu'il y a de l'énergie dans leur musique. Lorsqu'on écoute leurs chansons, on ne peut s'empêcher de battre le rythme, de danser. Et puis, nous apprécions leur manière de s'habiller. Sur scène, ils sont toujours en costard/cravate. J'aime également être bien habillé quand je monte sur les planches. Leur son est très british. Je ne connais aucun autre groupe en Europe ou aux States capable de sonner comme eux. Leurs lyrics son très narratifs. Un peu comme nous. Ils traitent de filles ou de sujets aussi futiles que la perte d'une chaussure. Des sujets simples mis au service d'une musique entraînante. Sur scène, ils prennent leur pied. Et comme eux, nous sommes heureux lorsque le public bouge. C'est ce qui nous rapproche de Madness… » Les refrains des chansons de Kaiser Chiefs peuvent parfois évoquer les Bay City Rollers. C'est en tout cas ce qu'une bonne partie de la presse insulaire rapporte… « Possible, mais ce n'est pas intentionnel. C'est le fruit du hasard. Même si beaucoup de monde nous le rappelle. A une certaine époque, on  nous comparait à XTC. Tous les avis sont dans la nature. En fait, nous pratiquons notre propre musique, mais ces parallèles ne nous dérangent pas. En fait, c'est même une forme de reconnaissance. C'est la seule chose qu'on pourrait retirer de cette situation. Pas pour le reste. Si on considère que la reconnaissance doit passer par la comparaison, c'est qu'on a de l'estime pour nous… »

Merci à Vincent Devos

 

mardi, 15 août 2006 05:00

La meilleure énergie...

Responsable d'un premier et chouette album en début d'année (« Inside in/Inside out »), les Kooks ont le vent en poupe ! Non seulement ils appartiennent, tout comme The Subways et The Arctic Monkeys, à la nouvelle vague du rock britannique juvénile et insouciant, mais ils manifestent, sur les planches, une maturité assez étonnante pour des musiciens aussi jeunes (NDR : ils n'ont pas 20 ans !). La veille d'accorder des interviews, et réduite sous la forme d'un trio (NDR : Max, le bassiste, n'avait pas fait le déplacement), la formation avait accordé un showcase particulièrement convainquant à bord du Ric's Boat, Quai des Péniches à Bruxelles. Bien sûr, on y a rien vu ; mais on a tout entendu… Pour cet entretien, pas de Luke (le chanteur), mais bien Paul (le drummer) et Hugh (le guitariste). Pas un problème en soi, puisque les quatre membres du band se partagent aussi bien les compos de la musique que des lyrics. Mais, sa participation aurait sans doute permis de développer certaines questions que nos deux gaillards ont parfois laissées à l'état embryonnaire voire sans réponse. Ce qui ne les empêche pas d'être éminemment sympathiques…

Ainsi, le groupe a déclaré que les journaux et magazines étaient sous contrôle. Que lorsqu'ils lisaient des interviews, ils se demandaient si ce qui était relaté était vrai ou pas. Et pourquoi ce sujet ne pourrait pas faire l'objet d'une chanson ? Hugh répond : « Je pense qu'on a déformé nos propos. Nos griefs ne s'adressent pas aux journalistes, mais aux rédacteurs en chef (NDR : merci !) qui envoient leurs collaborateurs sur le terrain pour écrire des articles qui les arrangent bien. Les journalistes ne sont que des instruments (NDR : merci pour eux !) Et on coupe tellement dans leurs articles que le contenu finit par être totalement déformé. Ainsi il devient parfois impossible de se faire une opinion exacte de ce que l'interlocuteur a raconté. C'est une honte ! » Paul ajoute : « Les Stereophonics ont déjà écrit une chanson qui relate ce sujet 'Mr winter' ». A croire qu'ils sont paranos ! Ce qu'ils admettent. Et qu'ils traduisent à travers leurs lyrics. Dommage qu'ils ne se soient pas davantage épanchés sur le sujet… Ce qui nous aurait permis de savoir pourquoi ils pensent que pour une bonne info écrite à leur sujet, 10 sont erronées…

Pour enregistrer leur premier album (' Inside in/Inside out'), les Kooks ont bénéficié du concours de Tony Hoffer à la production. Un personnage dont la carte de visite mentionne la mise en forme d'albums de Supergrass et de Belle & Sebastian. Pourtant, à l'origine, c'était Paul Stacey qui avait été approché pour faire ce job. Paul a joué chez Oasis à leurs débuts (NDR : tout comme son frère d'ailleurs) et milite aujourd'hui au sein du super groupe The Syn (NDR : au sein duquel on retrouve les ex-Yes Chris Squire et Alan White). Mais finalement, la piste Stacey a été abandonnée. Hugh explique : « Nous avons enregistré une démo et un single sous sa houlette. Mais le résultat n'était pas concluant » Paul ajoute : « On peut même dire qu'il était totalement foireux. Les autres étaient démoralisés. Il n'y avait plus que le tour-manager (NDR : il s'appelle aussi Tony !) et moi-même pour y croire encore. Ils étaient presque prêts à tout abandonner. Mais nous sommes parvenus à les convaincre de nous tourner vers Hoffer. » Et il faut reconnaître que le résultat est allé au-delà de toutes les espérances. Hugh confirme : « Il  nous a énormément aidé. Il a joué un rôle fédérateur, parce qu'on partait tous azimuts. Il est parvenu à insuffler un sentiment d'unité à notre disque. Et puis à tirer le meilleur de nous-mêmes. D'ailleurs, pour le prochain album, nous comptons bien renouveler l'expérience… » L'opus a été concocté au sein des studios Konks de Ray Davies. Etonnant que l'ex leader des Kinks ne se soit pas manifesté pour donner de la voix sur l'une ou l'autre compo. Paul clarifie : « En fait, on lui avait demandé de venir faire les backing vocals sur ‘Jackie big tits’ ; mais on a pris trop de retard lors des sessions. Et le jour où il aurait dû nous rejoindre, il était parti en tournée… »

Tony (le tour-manager) a apparemment une influence positive sur le quatuor. Et il ne manque pas d'idées. Il envisage ainsi de faire tourner le groupe, dans le futur, en compagnie de vieux musiciens de blues. Un peu comme Jon Spencer a fait dans le passé. Et ce n'est pas un bobard. Mais Hugh remet les pendules à l'heure : « C'est un projet. Qui pourrait se matérialiser ultérieurement. Mais pour l'instant, priorité à notre tournée. C'est une bonne idée, parce que ce dans genre de démarche, tu n'es pas là pour entrer en compétition avec un groupe ou un artiste, mais pour opérer une fusion. Et puis, si on le fait, ce sera pour le fun… »

Le groupe a choisi pour patronyme le nom d'une chanson de Bowie, issue de l'album 'Hunky dory'. Un disque qui est sorti en 1971. Vu leur âge, les musiciens des Kooks ont dû fouiller dans les vinyles de leurs parents et écouter leurs conseils. Paul confesse : « C'est mon père qui m'a fait découvrir ce disque ! » Hugh embraie : « Luke m'en a fait une copie. Et c'est ainsi que je l'ai découvert. Et manifestement, il est génial. Le mixing est stupéfiant. La production est parfaite. C'est ce qu'on a voulu reproduire sur notre album. Capturer une atmosphère. Immortaliser 4 gars dans le rythme. Etreindre sans user de violence. Avec juste le chant, deux guitares, une basse, des drums et des backing vocaux. » Paul commente : « On ne doit quand même pas être les premiers à reproduire cette ambiance. A s'enregistrer 'live' en studio. A capturer la meilleure énergie ! Certains groupes ou artistes se concentrent uniquement sur le travail en studio. Ils respectent une structure. On pose la basse et la batterie. Puis on y ajoute la guitare, puis le chant. Parfois dans un ordre différent. Où est la passion ? Les morceaux sont joués, mais il n'y a pas d'esprit d'ensemble. Chacun joue sa partition sans se soucier de celle des autres. En général, ces gens-là, on ne les voit jamais en tournée. Ce n'est pas notre philosophie… » Hugh insiste : « Aujourd'hui, la tendance est de retourner aux sources. De faire comme on fait… »

Les musiciens du groupe avouent une multitude d'influences : depuis la pop au punk, en passant par le jazz, le blues, le reggae, la soul, le ska, le funk et j'en passe. Des noms ? Bowie, bien sûr. Et puis dans le désordre Police, les Beatles, le Clash, Dylan, le Velvet Underground, The Smiths, les Stones, les Doors, Manson et j'en passe. Paul est, en outre, un grand fan de reggae. Bob Marley et Peter Tosh en tête. Et de soul. Des classiques aussi : Stevie Wonder, Otis Redding et Marvin Gaye. Ironisant : « Pas pour rien qu'aujourd'hui, les standards de la soul sont utilisés pour servir de bande sonore aux spots publicitaires de la TV. » Ce qui explique sans doute pourquoi, lors de leur showcase accordé la veille, ils ont interprété ‘You make me crazy’ de Sammy Hagar, popularisé par le duo Gnarls/Barkley. Paul raconte : « En fait, nous l'avons jouée pour la première fois en direct sur Radio 1. Elle était alors n°1 dans les charts, et on nous a demandé d'interpréter une chanson de quelqu'un d'autre. C'était un peu la folie en studio… » Les Kooks n'en sont d'ailleurs pas à leur première cover. A leurs débuts, ils on ainsi joué le ‘Reptilia’ des Strokes. Paul précise : « En fait, nous ne l'avons reprise qu'une seule fois. C'est une bonne chanson d'un groupe qu'on apprécie tout particulièrement. Ce n'est pas une raison pour passer tout leur répertoire en revue. D'ailleurs aujourd'hui, nous avons suffisamment de compos personnelles pour commencer à jouer celles des autres. Mais bon, dans certaines circonstances, ça peut arriver… » Par contre il leur arrive de composer un morceau se référant à la chanson d'un autre artiste. A l'instar de ‘Eddie's gun’. Dont les lyrics font allusion d'une manière très humoristique aux pannes érectiles (NDR : ou d'éjaculation précoce) rencontrées par le jeunes de leur âge. Paul s'explique : « Cette compo parle du canon d'un fusil et on a choisi le nom Eddie à cause de la chanson de Cochran » (NDR : il imite le riff de guitare du célèbre 'C'mon everybody' de la voix).

Pour votre information sachez que le quatuor est établi à Brighton. Que Luke est originaire de Londres. Qu'ils ont tous un accent à couper au couteau (merci encore à Vincent et à mon enregistreur portable !). Que leur album sera disponible aux States en octobre. Et qu'ils se produiront le 7 novembre à l'Ancienne Belgique. Pas la peine d'essayer de vous procurer des places, le concert est déjà sold out. Pas de panique, les Kooks figurent à l'affiche du festival des Inrocks de cet automne. Ils joueront notamment à l'Aéronef de Lille, le 9 novembre prochain. En outre, vu le succès récolté par le groupe, d'autres dates devraient être programmées. Et puis vous pouvez toujours vous consoler avec l'acquisition de leur opus. Vous ne le regretterez pas ! 

Merci à Vincent Devos.

 

  

mardi, 19 septembre 2006 05:00

Une voix insaisissable...

En mai 2004, les Veils s'étaient produits à Bruxelles dans le cadre des Nuits du Botanique. Un excellent concert accordé dans le cadre de la sortie d'un tout premier album. Apparemment le leader, Finn Andrews, n'était pas trop satisfait de ses musiciens, puisque dans les semaines qui ont suivi, il les a tous virés. Ce qui lui a valu une image de type difficile, acariâtre et à la limite inabordable. Août dernier, la formation se produisait au Pukkelpop. Sous un tout nouveau line up. Et puis pour y présenter les nouvelles chansons de son second opus, « Nux Vomica ». L'occasion idéale pour un entretien à bâtons rompus. Encore qu'avant de le rencontrer, une certaine appréhension m'avait envahi : cet artiste serait introverti, peu bavard et fort peu intéressant à converser. Comme quoi les clichés ont la dent dure. Parce que Finn est un type fort intéressant. Un peu timide, mais d'une grande gentillesse, extrêmement sensible et surtout profond. Le tout, c'était simplement de poser les bonnes questions…

Le Strychnos nux-vomica est un arbre sempervirent originaire de l'Asie du sud-est. Il pousse dans des habitats ouverts et atteint habituellement la taille d'environ 25 mètres. Son écorce recèle des composés toxiques, dont la brucine. Mais les semences enserrées à l'intérieur des fruits de l'arbre produisent de la strychnine, un alcaloïde extrêmement toxique, dont on se sert en médecine. En homéopathie, ce remède est le plus prescrit de tous, le plus fréquent en raison de la masse de ses symptômes, et surtout parce que les affections qu'il guérit correspondent aux troubles fonctionnels les plus souvent rencontrés en médecine. En particulier, les troubles digestifs et la tension nerveuse. C'est une des médications les plus adaptées aux conditions de vie moderne, stressante et rapide. Avant de commencer notre entretien, je lui montre un tube de granulées de Nux Vomica 5CH. Finn a l'air un peu embarrassé : « En fait, je ne connais pas bien l'homéopathie. Je n'en ai qu'une vague idée. J'ai des amis qui se soignent par cette médecine. Je sais qu'il existe des choses qui marchent. Mais pour moi cela reste un mystère… » Alors pourquoi avoir choisi un tel nom pour son album ? Finn se justifie : « Au départ, c'était le titre d'une chanson. Mais elle collait bien au thème général du disque. Parce que cet arbre symbolise la contradiction : il est à la fois toxique et curatif… » Serions nous donc en présence d'un concept album ? Finn clarifie : « Mon premier album ('The Runnaway Found') était plus conceptuel. Enfin, son écriture. C'est-à-dire que je compose au cours d'une période assez brève. Mais il est vrai que lorsque je m'arrête, l'intervalle de pause est parfois très long. Aussi, on peut attribuer la notion de concept, à la phase assez courte au cours de laquelle j'écris. Même si elle est assez féconde. Maintenant, le terme concept n'est peut être pas le plus judicieux. Il est un peu trop prog à mon goût… » Finn passe autant de temps en Nouvelle-Zélande qu'en Angleterre. A croire qu'il compte deux esprits et deux domiciles. Finn raconte : « Il y a un peu des deux. En fait jusqu'à présent j'ai vécu autant de temps en Angleterre qu'en Nouvelle-Zélande. Et je ne me sens pas plus néo-zélandais qu'anglais. Mais cette situation provoque inévitablement un trouble. Qui s'estompe au fil du temps. Je n'ai pas pour autant une double personnalité… » Mais doit-il fuir aux Antipodes pour écrire ? La réponse fuse : « Pas forcément. Honnêtement, cela pourrait être n'importe où. Mais il est vrai qu'il existe moins de pression de l'autre côté du globe qu'en Grande-Bretagne où rien n'a changé depuis quatre ans. La pression est toujours la même. Evidemment on peut imaginer qu'à cause de cette pression on perd un peu de la qualité esthétique d'un album. Notamment lorsqu'on doit sortir des singles. Mais j'aime ce type de pression. Par contre, il est vrai que lorsque je me trouve en Nouvelle-Zélande, je ne dois pas trop me soucier de l'environnement ni du management. Il y est plus facile de s'isoler… »

‘Nux Vomica’ a été mis en forme par Nick Launey, un producteur notoire dont la carte de visite mentionne des collaborations aussi prestigieuses que Queen, le Jam, XTC, David Byrne, INXS, Silverchair, PIL, Talking Heads, Gang of Four ou Nick Cave. Ce qui méritait quelques explications, vu la carte de visite du personnage : « En fait, lorsque j'étais gosse, je jouais en compagnie de ses enfants. C'est un ami proche de mes parents. Et puis on s'est perdu de vue pendant une bonne dizaine d'années. A l'origine, je n'avais aucune connaissance du monde des studios. C'était très confus en moi-même. A un certain moment, je me suis rendu compte que ce job était trop compliqué pour moi ; et c'est Nick qui m'a mis en contact avec le label Rough Trade. C'est un type fantastique. Il a immédiatement perçu les problèmes que je rencontrais et les solutions qu'il fallait envisager. Son timing est parfait. Sa lecture musicale est extraordinaire. Il a une patience d'ange. Il a développé une véritable philosophie de travail. Ce qui explique pourquoi il est aussi apprécié par les artistes. La vie d'un groupe est faite de hauts et de bas. Certains groupes sont éphémères. Travailler sous sa houlette est sécurisant. Pourtant, il utilise très peu d'overdubs. Privilégie les prises 'live'. L'approche de son travail est à la fois vivante et organique. Il plus intéressé par la performance que par le travail sur un ordinateur. C'est un ingénieur du son incroyable ! »

Finn possède une voix assez particulière. Lors de ses chansons les plus blues, elle épouse parfois le timbre de feus Jeff voire Tim Buckley, son père. On a parfois l'impression qu'elle est hantée par un esprit vaudou. Peut-être celui de la Nouvelle-Orléans… Finn confesse : « Je vis un conflit intérieur avec ma voix. J'e l'ai travaillée pendant trois longues années dans ma chambre avant de la faire écouter à quelqu'un. Elle est très difficile à maîtriser. C'est une préoccupation constante. Une source d'inquiétude. Parfois cette situation me persécute. J'ai toujours peur qu'elle m'abuse. J'essaie de la comprendre et de la maîtriser. Mais elle et toujours imprévisible. Parfois je ne la reconnais même pas moi-même. J'ai toujours aimé les chanteurs qui ont de superbes organes. Des artistes comme Bing Crosby ou George Michael ont une belle voix naturelle, lisse. Ce n'est pas mon cas. Mais je me suis rendu compte que j'avais plutôt intérêt à tirer le meilleur parti de mes capacités plutôt que de me soucier de la sonorité de mes cordes vocales. J'apprécie tout particulièrement des chanteurs comme Van Morrison, Tom Waits, Dylan, Léonard Cohen. Mais ils n'ont pas nécessairement de jolies voix. Van Morrison peut-être davantage aujourd'hui. J'ai mis longtemps pour accepter mon propre timbre… »

Deux chansons du nouvel album parlent des difficultés rencontrées par Finn à l'école, en Angleterre. 'Jesus for the jugular', tout d'abord. « Au cours de mon adolescence, j'ai fréquenté une école chrétienne qui imposait des règles très strictes. Or à la maison, toute la famille - il y avait quatre enfants - baignait au sein d'un univers artistique. A cause de mes parents (NDR : Finn est le fils de Barry Andrews, claviériste d'XTC). Je n'ai pas du tout bien vécu cette expérience. Je pose un regard amer sur cette période et ne la porte pas du tout dans mon cœur… » 'Advice for young mother be', ensuite. A premier abord un clin d'œil aux Shirelles. Ensuite le single qui a bénéficié d'un clip vidéo assez amusant. Mais finalement une remise en cause du système d'éducation. Finn confirme : « Elle est complémentaire à la précédente. Le monde est bien moins malintentionné qu'on veut nous faire croire. Si vous appliquez tout ce que les profs vous racontent à l'école, vous foutez votre vie en l'air. En fait, c'est une chanson légère qui raconte des choses sérieuses… » A ce propos, qu'est ce qui est le plus important pour notre interlocuteur : le succès ou l'intemporalité de ses chansons ? Question difficile… « La première chose, c'est de poursuivre son chemin. Et dans un premier temps récolter du succès. Je ne crache pas dessus. C'est normal. Et puis tu vises le second objectif. Question difficile, en effet. Si vous pensez trop à ce type de question, vous oubliez d'écrire. Le rock compte plus de 60 ans d'existence. Avant de devenir intemporelle, une chanson a peut-être besoin d'un siècle. McCartney n'a toujours pas cessé de chanter. Et à mon avis, il n'est pas prêt de s'arrêter. C'est sa vie… »

En bref, les musiciens des Delays et des Veils sont des amis. Ils ont accompli de longues tournées ensemble, en bus. Il leur arrive de jammer, mais dans le car. Pas de projet à court terme de collaboration. Enfin, pas dans l'immédiat. Peut-être un peu plus tard. Une chose est sûre, ils s'apprécient beaucoup. Signé Elvis Costello, ‘Shipbuilding’ est une des compos préférées de Finn. La version interprétée par Robert Wyatt. Toujours à cause de la voix. Finn a un jour déclaré que la démocratie était faite pour les idiots. Pas de panique, c'était une blague. Il respecte le consensus démocratique ; mais en tant que leader il a le devoir de prendre les décisions finales. Parce qu'il discerne le déroulement des événements. Il a aussi tâté de la peinture. Mais faute de temps, il a abandonné. Ajoutant : « Le résultat n'était pas probant. Et puis j'ai commencé à m'intéresser à la musique dès l'âge de 13 ans. Et à en jouer… » Enfin, Finn envisage-t-il un jour de travailler en compagnie de son père ? Question délicate. « J'ai un peu bossé avec mon paternel. En fait, j'écoute surtout ses conseils. Si nous voulions collaborer ensemble, le projet exigerait une coordination très importante. Et puis non, je crois qu'on n'en a pas trop envie. On se côtoie ; mais on travaille séparément… » 

Merci à Vincent Devos 


mardi, 10 octobre 2006 05:00

L'âge adulte...

Lorsqu'on évoque Lloyd Cole, on pense immédiatement à ses Commotions. Une formation responsable en 1984, d'un remarquable album intitulé « Rattlesnakes ». Un disque qui ne recèle que des classiques ! La suite de sa carrière ne rencontrera malheureusement plus jamais le même succès, nonobstant la sortie de l'un ou l'autre single d'excellente facture tels que « Brand new friend », « Lost weekend », « No blue skies », « Downtown », « She's a girl and I'm a man » ou encore « Sentimental fool ». Une carrière qu'il va poursuivre essentiellement en solitaire, nonobstant une nouvelle aventure - mais de brève durée - vécue en compagnie des Negatives. Ce qui ne l'empêchera pas de continuer à sortir des disques. Comme cet « Antidepressant », qui vient juste de paraître… Une bonne occasion de rencontrer ce chanteur littéraire à l'humour raffiné…

Lorsque la cote de popularité d'un artiste chute au fil du temps, il a le droit de se poser des questions. Le journaliste aussi. Le tout, c'est d'aborder le chapitre de la manière la plus élégante qui soit. Par exemple, pour Lloyd, en lui demandant si son tout premier album (NDR : « Rattlesnakes ») n'était pas trop parfait… « Trop parfait ? C'est comme si tu me disais que parce qu'une fille est trop belle, je n'ose l'aborder. Ni lui parler. De peur de me voir ramasser une veste. Non franchement, on a eu la chance d'enregistrer une œuvre de cette envergure. Et malgré le recul, je n'y changerai rien. Tu as déjà vu un album qui te rejette ? » En 2004, lors du vingtième anniversaire de l'enregistrement de ce fameux « Rattlesnakes », Lloyd et ses potes s'étaient réunis pour accomplir une tournée en Grande-Bretagne et en Irlande. L'idée d'une reformation ne lui trotterait pas dans la tête ? Et puis surtout celle de l'enregistrement d'un elpee, en leur compagnie ? Lloyd répond : « A cette époque, nous sommes entrés en studio pour immortaliser quelques sessions. Peut-être sortiront-elles un jour. En fait chacun d'entre eux exercent leurs propres activités. Donegan vient de remonter un groupe et il est occupé d'enregistrer. (NDR : c'est un scoop !) Neil et Blair collaborent régulièrement à l'enregistrement de mes chansons. Stephen (NDR : Irwin) n'est plus un musicien full time. Cette réunion était un événement sympa. Mais on n'avait vraiment pas envie de prolonger l'aventure. Merci. » La transition était donc belle pour demander des renseignements complémentaires relatifs à la confection de 'Anti-depressant', son nouvel opus. Ni l'advance cd, ni la bio ne fournissant la moindre indication à ce sujet. « En fait, toutes les infos figureront sur le livret de la pochette officielle. Les sessions d'enregistrement ont commencé en 2000 et se sont achevées mi 2006. La grande majorité a été accomplie dans mon studio en Angleterre. Seul. Les arrangements vocaux ont été ajoutés en fin de parcours. A Bath en Angleterre. Et dans les studios de Mick Glossop, sis au nord de Londres. A Shepherd Bush. De tous nouveaux locaux. Parmi les collaborateurs figurent Neil Clark des Commotions. Il joue de la guitare sur quelques chansons. C'est le personnage le plus notoire qui a participé à la confection de mon disque. Les arrangements de cordes ont été réalisés par un type qui habite à Londres, dans un magasin d'instruments de musique, près de chez moi. Il a fait un super boulot. C'est un certain Peter Boldon qui s'est chargé des parties de basse. Il milite au sein de son propre groupe. Je lui ai proposé de rejoindre ma formation, mais il termine pour l'instant un 3ème cycle d'études à l'université. Et il n'est pas disponible. Dave Derby et Jill Souboule, impliqués il y a encore peu de temps chez les Negatives, assurent les backing vocaux. Et la plupart de ces collaborations se sont opérées par e-mail… » L'enregistrement implique également des éléments électroniques. Une expérimentation que Lloyd avait développée sur un disque d'ambient instrumental, quelques années plus tôt, 'Plastic Wood'. Cette aventure lui aurait donc donné des idées… Lloyd clarifie : « Oui, probablement. J'ai dû m'inspirer quelque peu de ces expérimentations. Mais pas uniquement celles qui figurent sur cet album. Egalement celles qui m'ont permis d'établir une connexion entre musique acoustique et électronique. Exercices que j'avais déjà tentés auparavant… »

Lloyd a intitulé son album 'Anti-depressant'. C'est également le titre d'une des chansons de l'elpee. Se poserait-il des questions sur ce type de médication ? A la fois thérapeutique et addictive. D'autant plus que dans les lyrics, il clame 'Avec cette médecine, je me sens bien…' « En fait, dans cette chanson, je ne parle pas vraiment de dépendance. Elle raconte l'histoire d'un type qui se croit invisible parce que personne ne remarque sa présence. Et cette situation, au départ privilégiée, finit par devenir angoissante… » 'The young idealists' ouvre l'album. Cette compo aurait-elle une signification autobiographique ? D'autant plus qu'un jour, l'artiste a déclaré qu'il aimait l'idée de devenir, un jour, une pop star. Et à une autre occasion que sa motivation était, rétrospectivement, de devenir célèbre. Lloyd réagit : « Ma motivation était de devenir une pop star célèbre et pas seulement de devenir uniquement célèbre. Je voulais me produire sur scène. Enregistrer des disques. Des disques qui seraient appréciés. Pas nécessairement des disques qui récoltent du succès. Appréciés non pas pour l'attrait populaire de mes chansons. Mais je ne voulais pas composer des chansons que les gens n'entendent pas. Ma réponse vous semble étrange ? Le but était de trouver dans la célébrité la motivation d'écrire de meilleures chansons. Mais ce raisonnement n'est pas sain pour un jeune artiste. Aujourd'hui la motivation est différente. Parce que je suis passé à travers des périodes de succès et d'échecs. J'essaie simplement de réussir. Je ne fais pas de corrélation immédiate entre un bon album et un album à succès. Il y a de bons albums qui récoltent du succès et d'autres qui n'en ont pas… » Qui sont ces jeunes idéalistes alors ? « Tu sais, je n'écris pas seulement des chansons pour qu'on y trouve un sens. J'écris des chansons dont les caractéristiques principales reposent sur l'esthétisme. Je dispose parfois de beaucoup d'idées différentes à injecter dans mes chansons. Mais je dois aussi laisser une place pour l'instrumentation. Et c'est l'harmonisation entre les textes et la sonorité des instruments que je recherche. Et pas nécessairement un message. Je cherche à opérer un bon équilibre entre les mots et les sons. Entre le fond et la forme. Pour qu'ils soient agréables à l'oreille. C'est une forme de quête à l'esthétisme. Vous savez, que dans une même chanson des personnes différentes peuvent y trouver des significations différentes. Et c'est ce qui fait la beauté de la musique. J'essaie de concocter une chanson comme on fait une blague. Et il n'est pas étonnant que certaines personnes y perçoivent davantage que ce que je veux exprimer au départ… Vous me parlez d'idéalisme. Mais vous pouvez l'être à 15 ans comme à 75. Ce n'est pas spécifique à la jeunesse. Je l'espère. Je le pense. Le plus bel exemple procède des activistes. Lors des manifestations pacifiques, il y a plus de personnes adultes que de jeunes… » Dans le même ordre d'idées, Lloyd avait également déclaré, dans le passé, qu'il n'avait jamais été un rebelle. Qu'il était simplement un fan des rebelles. Partage-t-il encore la même philosophie aujourd'hui. « J'ai fait cette déclaration ? Alors, il y a bien longtemps. Dans la carrière que je mène, je réalise les albums que j'ai envie de faire. Pour un indépendant comme moi, je ne vois rien de rebelle là-dedans. Même si certains rebelles peuvent réaliser des projets intéressants. Mais la rébellion pour la rébellion, incarnée par un type comme Pete Doherty, est très juvénile. Stupide même. Finalement tu perds ton temps… »

Certaines chansons de « Anti-depressant » rappellent la période postcard d'Aztec Camera. Et je pense tout particulièrement à « Rolodex indicent » et « New York sunshine ». A cause de la sensibilité manifestée par les cordes de la guitare semi-acoustique, jouée en picking. Lloyd a l'air surpris : « Vraiment ? Non, non, pas du tout. Sincèrement je ne vois pas. A l'époque des Commotions, j'étais très branché par ce style de musique. Mais ne me dites pas que cette sensibilité resurgit. Là je suis pris par surprise. C'est une coïncidence…» Deux titres émargent à la country : 'Every song' et 'Travelling night'. Surtout la deuxième. Un peu dans le style de feu Johnny Cash. Lloyd acquiesce : « J'aurais aimé effectivement qu'il la chante. Le tempo est semblable, mais les arrangements sont différents. Et en plus il y a du synthé. Mais absolument. C'est même un compliment. » Plus délicat, 'How wrong can you be ?' me fait plutôt penser à Al Stewart, un folk singer qui avait récolté un certain succès au début des seventies. Lloyd ne semble pas surpris : « En fait, tu n'es pas la première personne qui me fait cette réflexion. Oui, c'est plausible. Non, cette réflexion ne m'embarrasse pas du tout. » Début de cette année Camera Obscura, une formation écossaise à enregistré la chanson 'Lloyd, I'm ready to be heartbroken', en réponse à son hit commis en 1984, 'Are you ready to be heartbroken'. Un hommage ? « Oui, oui, absolument. C'est une bonne chanson. Elle m'enchante. Tout à fait charmant. Il est sympa de se retrouver dans la chanson de quelqu'un d'autre. Ou même de voir l'une de tes compos reprise. L'important, c'est l'intention… » Deux mythes de la musique psychédélique sont décédés cette année : Syd Barrett et Arthur Lee. Quels sentiments éprouve-t-il face à la disparition de ces deux excentriques ? « Je possède des albums de Pink Floyd et de Syd Barrett ; mais je ne les écoute plus guère. Non, Barrett n'est pas une référence pour moi. Arthur Lee, davantage. J'ai même évoqué sa personne dans mes lyrics. Il a composé beaucoup de chansons d'amour. Je n'ai pas grand-chose à ajouter sur le sujet. » Et écoute-t-il encore T Rex et Television aujourd'hui, formations qui lui ont donné l'envie d'embrasser une carrière musicale ? « Lorsque je suis d'humeur, pourquoi pas ? Je m'étais procuré un enregistrement en public de Television, 'Live at the old Waldorf', il y a deux ans. Je viens seulement de l'écouter. Un enregistrement assez amusant. Au début le son n'est pas exceptionnel. Mais au fur et à mesure, il s'améliore et le set finit par devenir excellent. T Rex ? Occasionnellement. Pour l'instant je le fais découvrir à mon fils. » A ses débuts, Lloyd était largement influencé par la littérature, en particulier Norman Mailer et Truman Capote ; ainsi que le cinéma. Qu'en est-il aujourd'hui ? « Je demeure toujours émerveillé par ces écrivains qui rédigent des bouquins. Et je leur voue une grande admiration. Depuis que j'ai eu mes enfants, j'ai beaucoup moins de temps à consacrer au cinéma. En fait, je les accompagne voir des films de leur âge. Du style 'Les pirates des Caraïbes'. Plus de films adultes… »

Lloyd est né en Angleterre. A Buxton, très exactement. En 1961. A l'âge de 20 ans il s'est établi à Glasgow. En 1989, il s'est exilé au nord de New York. Il y a vécu quelques années avant de revenir vivre à Londres avec sa famille. L'interview se déroulant le 12 septembre, soit le lendemain du 5ème anniversaire de la destruction des tours jumelles, je n'ai pu m'empêcher de lui poser la question relative au sentiment éprouvé par les Américains depuis qu'ils ont vécu ce drame : « J'ai observé la réaction de ce peuple en tant que non Américain. Il est divisé sur la question. Il pense que l'Amérique domine le monde d'un point de vue militaire. Et chaque fois utilise son droit de veto en faveur d'Israël. Il faut savoir qu'aux States, la moitié de la population pense le contraire. C'est comme si on vivait dans deux pays différents. A cause de la fracture de la pensée. Malheureusement, je ne vois pas de développement positif là-bas, actuellement. Le problème est qu'il n'y a plus de gauche aux Etats-Unis. Il n'y a plus que la droite et l'extrême droite… »

Merci à Vincent Devos.

Robin Proper-Sheppard est un type hyper sympa, fort intéressant, mais particulièrement torturé. Pas toujours très sûr de lui, non plus. Ce qui peut paraître paradoxal, lorsqu'on connaît l'œuvre de feu God Machine, de Sophia et puis la qualité des prestations 'live' que son groupe est capable d'accorder. Après avoir terminé l'enregistrement de son nouvel album, 'Technology won't save us', il craignait la réaction du public et même de la presse. A un tel point que trois semaines avant la sortie officielle du disque, il n'avait toujours rien organisé : ni promo, ni planning de tournée. En fait, c'est à travers les interviews que Robin parvient à dissiper ses doutes et ses incertitudes. Et pourtant, son nouvel opus est tout à fait remarquable. Robin confirme le profil inattendu de sa personnalité…

« Oui, c'est exact. Après avoir sorti cet album, j'étais dans l'incertitude la plus totale. Encore plus que pour les autres. J'étais envahi par le stress et l'anxiété. Et le fait d'en parler avec la presse me rassure. Un ami journaliste m'a un jour confié que dans mes lyrics je m'exprimais beaucoup en noir ou en blanc. Pourtant, rien n'est jamais tout noir ou tout blanc. Je n'avais jamais pensé à ça. En acquérant de la maturité, j'accepte que les choses soient bien plus nuancées… » Encore que dans la chanson 'Pace', il déclare 'Nous ne pouvons changer le monde'. Robin s'explique : « J'ignore si c'est une bonne ou une mauvaise chose. Si on ne peut le changer, il faut l'accepter. A partir du moment où tu acceptes les choses telles qu'elles sont, tu dois t'y faire. Ou alors, il y a moyen d'améliorer les choses. Pourquoi accepter ce qui est perfectible ? Tu vois ce que je veux dire ? En général, je ne suis pas quelqu'un de très positif, mais cette chanson l'est… » Alors, finalement, ce 'Technology won't save us' est un vivier de messages ? Rien que le titre de l'opus y fait penser. Robin réagit : « Je n'en sais trop rien. Beaucoup de gens me le disent. Fondamentalement non. Je ne pense pas que ce que je fais aujourd'hui soit tellement différent. Même si c'est à la fois différent et pas différent (NDR :?!?!?) D'abord, je n'étais pas convaincu encore être capable d'enregistrer un nouvel album. » Oui mais pourquoi la technologie ne peut pas nous sauver ? Robin répond : « Tu connais le récit de cette chanson ? C'est un faits-divers authentique. Un père et un fils travaillaient sur la plage. Puis soudain, le temps a changé. Le vent s'est levé, le brouillard est tombé et la marée est montée. Résultat, ils ne retrouvaient plus leur chemin. Le père disposait d'un portable et a contacté les services de secours qui se trouvaient à une centaine de mètres. Ces derniers entendaient le bruit de la mer dans le récepteur, ils étaient tout proches, mais ils ne parvenaient pas à les localiser. Le gamin était même grimpé sur les épaules de son père. Mais malheureusement, ils se sont noyés. Donc la technologie n'a pas permis de les sauver. Maintenant, il faut comprendre cet événement au sens spirituel. On sait que la technologie épargne, prolonge des vies. Simplifie les procédures. Enfin on l'imagine, car cette forme de simplification les rend aussi plus compliquées. Je veux dire que l'excès de technologie rend les gens plus dépendants, moins intelligents, incapables de réfléchir voire de réagir… »

Cette compo est instrumentale, construite sous la forme d'un crescendo. Comme lors d'une symphonie moderne au cours de laquelle Robin se muerait, en quelque sorte, en chef d'orchestre. En 2001, il avait d'ailleurs réalisé ce type de projet lors des 'Nachten'. Robin précise : « Avec un quatuor à cordes. En fait, il aurait fallu beaucoup plus de musiciens : au moins huit pour les cordes et quatre aux cuivres. Et une tournée plus conséquente. Mais cette expérience était formidable. Je me souviens même que le public avait souhaité un 'happy birthday' à ma fille. Le fait de réaliser un projet et d'être surpris du résultat suscite un sentiment très fort au fond de toi-même. De très positif. Mais je ne sais pas si je serai encore capable d'accomplir un projet pareil dans le futur. Je me vois d'ailleurs difficilement le reproduire. C'est unique en son genre. Un mélange entre l'œuvre, l'auditeur et le compositeur. Trois éléments en même temps. En symbiose… Je rêve vraiment d'incarner un personnage créé de toutes pièces. J'apprécie tout particulièrement m'asseoir et contempler mon œuvre, plutôt que de communiquer en empoignant une guitare et en commençant à chanter. Sortir de moi-même et me regarder. C'est une forme d'autosatisfaction qui me permet d'atteindre l'extase. C'est la musique qui m'aide à transcender mes émotions. Et à cet instant, j'en suis le témoin… Je ne connais pas assez la musique pour jouer au chef d'orchestre ; et d'ailleurs je ne m'habille pas en queue de pie et ne porte pas de nœud papillon. Et pour moi, la baguette, ce serait plutôt le drumkit. Mais cette chanson m'a tellement pris de temps. Et en particulier pour les arrangements de cordes et de cuivres. C'est un processus d'écriture par essai et erreur au cours duquel je me dis, ça c'est trop joyeux, ça c'est trop triste. Il est très long. Mais je voudrais le voir exécuter sur scène. Certaines personnes me demandent si je ne vais pas concocter un disque symphonique ou exclusivement instrumental. Mais mon écriture vient de manière naturelle. Sans forcer. Enfin, je veux dire les mots. Le gros boulot est venu de la phase instrumentale. Or, les mots viennent de la musique et pas l'inverse. C'est la musique qui engendre le texte. Une chanson comme 'Lost' est née tout naturellement. Je n'ai même pas dû me forcer pour l'écrire. Idem pour 'Big city rot'. Mais c'est parfois tellement difficile d'expliquer d'où la muse vient. Et je dois accepter cette situation… »

'Birds' est probablement la chanson la plus sophistiquée du nouvel album. Les arrangements me font même parfois penser à ceux utilisés par Neil Hannon chez Divine Comedy. Robin réagit : « Je ne connais pas The Divine Comedy. Je me souviens du travail nécessité pour les cuivres, lors des sessions d'enregistrements de l'album. Il y avait un type d'harmonie que je souhaitais développer en leur compagnie. Et on s'est parfaitement compris pour le réaliser. Maintenant, j'estime que mon style de songwriting est très simple. Et je ne cherche jamais à en remettre une couche. Cela ne sert à rien. Par rapport aux albums précédents, j'ai eu un mal fou à me remettre à bosser. Je traversais une crise de confiance. Je ne savais pas du tout où j'allais. Mais dès que je suis passé à travers, c'est un peu comme si la nature avait repris ses droits. J'ai fait appel au même type d'instrumentation que lors de l'album précédent. Mais, il est vrai que la genèse de ce disque est assez étrange. Et dans cette étrangeté, je n'étais pas sûr que le public allait s'y retrouver. Je sais que ma réaction peut paraître étonnante lorsqu'on sait que je suis dans le métier depuis une quinzaine d'années. De nombreuses personnes m'ont déclaré que c'était le meilleur album de Sophia, à ce jour. Je le pense. Enfin, je l'espère. C'est vraiment étrange… »

Deux autres plage, 'P1/P2' et 'Lost (she believed in angels)' réverbèrent des sonorités de guitare rappelant les Chameleons et House of Love. Serait-ce une coïncidence ? Robin admet : « Tout à fait d'accord. Mais ce qui est amusant à ce propos, c'est qu'à l'écoute de ces chansons j'étais anxieux parce que je pensais qu'elles semblaient un peu trop destinées au 'stadiums rock'. A cause des grosses guitares. Et j'ai posé la question à mes amis. Ils m'ont rassuré en m'expliquant que ce type de chanson relevait de ma créativité et puis collait bien au groupe. Mais franchement, j'ai beaucoup hésité avant de les inclure sur le disque. » Le dernier de l'opus, 'Theme for the Mary Queen' est encore plus noisy. Depuis God Machine, Robin ne s'était plus autant lâché. Enfin chez Sophia. Car, il a également monté un groupe parallèle : The Ma(r)y Queens (NDR : cherchez l'erreur !) Une formation qui ne lésine pas sur l'électricité. Robin confesse : « A début de cette année, j'ai accompli une tournée acoustique. Et le groupe Vito m'accompagnait pour assurer le supporting act. A la fin du set, on interprétait quelques chansons ensemble. Simplement pour prendre notre pied. Ce type de musique fait partie de mon univers. Elle me sert en quelque sorte de soupape. Quand il y a trop de pression. Et finalement, je me suis dit pourquoi je ne reproduirai pas cela avec Sophia ? Je n'allais quand même pas me renier. Et puis merde après tout, j'ai aussi le droit de prendre mon pied. De faire ce que j'ai envie de faire…» D'ailleurs, Robin écoute toujours du punk issu des sixties. Et en particulier les Electric Prunes ou encore les 13th Floor Elevators. Celui des eighties aussi. Ajoutant : « Il est incroyable que cette musique se régénère tous les 20 ans et refait surface… »

Puisqu'il nous parle de Vito, formation qui a rejoint son label The Flower Shop Recordings, il était intéressant de savoir quels sont les artistes qui figurent aujourd'hui dans son écurie : « Vito, un groupe de Cardiff. Copenhagen. Ils vont faire un break maintenant. En fait, ils doivent récupérer, car il y a deux jours on s'est réuni et ils ont un peu trop carburé (rires). Gamine. Il y a aussi des artistes qui travaillent encore avec moi, mais il n'est pas sûr qu'ils continuent. Mais il y en a d'autres. Dont je tairai les noms. Des trucs épatants. Tu comprends mieux pourquoi, la confection d'un nouvel album de Sophia nécessite autant de temps, maintenant… »

'Twilight at the hotel Moskow' est un autre instrumental. Une assez jolie compo qui n'évoque pas le souvenir d'un voyage en Russie, mais en Serbie. A Belgrade, très exactement. Au cours duquel il avait logé à l'hôtel Moskow. « J'y ai accompli une croisière sur le Danube. C'est une chanson étrange traversée de différents courants : bohème, country, jazz, etc. Mais aussi un mélange d'émotions. Une chanson vraiment représentative d'une manière étrangement abstraite du concept Sophia. »

Merci à Vincent Devos.

 

vendredi, 16 juin 2006 05:00

Le Robin des Bois de la pop...

On ne peut pas dire que Green Gartside soit un artiste prolifique. En près de trente ans de carrière, il n'a commis qu'un petite vingtaine de singles, quelques Eps et 5 albums  Soit un elpee tous les cinq ou six ans. Son précédent opus, "Anomie & Bonhomie", remonte d'ailleurs à 1999. Il y a bien  eu la sortie d'"Early" l'an dernier, mais il s'agissait d'un compile consacrée aux premiers singles de Scritti Politti. Faut dire que Green connaît des petits problèmes de santé depuis 1980. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles il ne se produisait plus sur scène. Mais apparemment, il a retrouvé la forme, puisqu'il a enregistré un nouvel album (« White bread Black beer), vient de jouer six concerts en Angleterre et a pratiquement bouclé toutes les dates de sa prochaine tournée. En outre, après 24 ans d'infidélité, il a décidé de retourner chez Rough Trade. Une multitude de sujets qui alimenteront cette longue conversation…

Tout d'abord le come-back chez Rough Trade, qu'on pourrait assimiler à un retour aux sources. Green confirme : « Oui, c'est comme rentrer à la maison. J'ai quitté le Pays de Galles. Je suis parti aux States en 1983. Et j'ai signé pour une major qui m'a demandé de faire des talk shows. Le label payait pour passer mes disques à la radio. Mais dans mon contrat, il m'était interdit de jouer en 'live'. C'était une situation bizarre, mais surtout frustrante. Et elle finit par détruire ton âme. Tu comprends mieux pourquoi aujourd'hui je hais toute cette industrie du disque. C'est de la merde… surtout aux Etats-Unis. Et je suis donc revenu chez Rough Trade, un label dont j'ai retrouvé le même esprit qu'en 1978. Ils ont un tout petit bureau et comptent une quarantaine d'artistes dans leur catalogue. C'est fabuleux de travailler pour une telle équipe ! » Pour partir en tournée, Green a décidé d'engager des musiciens qui n'avaient jamais joué de manière professionnelle dans le passé. Ce qui méritait une explication. « C'est un choix. Je ne souhaitais pas me produire en compagnie de musiciens professionnels. J'ai enregistré mon disque seul. Je suis la seule personne à jouer dessus. Je ne suis pas un bon musicien. Pourtant, il aurait été plus facile pour moi de faire appel à des virtuoses issus de Los Angeles. Mais si j'avais embrassé cette optique, je n'aurais pas été en phase avec le choix de vie pour lequel j'ai opté aujourd'hui. Je vis à l'Est de Londres. Dans une communauté. En fait tous les gens que j'ai recrutés pour mon groupe sont issus du même pub que je fréquente. Le drummer vient d'avoir 21 ans. La bassiste est la tenancière du bar. Dans le passé elle avait un peu joué sur la guitare de son frère, mais elle n'avait jamais sévi au sein d'un véritable groupe. J'ai un jour invité toute cette équipe chez moi, et je leur ai proposé le challenge. Ils ont accepté. Le musicien le plus expérimenté est le claviériste. Il a 30 ans. Et il se débrouille plutôt bien. Il est aussi le plus efficace. C'est en quelque sorte un retour à cette mentalité entretenue par Rough Trade où les musiciens sont copains. Et s'ils ne sont pas des instrumentistes extraordinaires, leur esprit est fantastique. C'est ce que je voulais… » Mais est-il possible de prôner le DIY, lorsqu'on est perfectionniste comme Gartside ? « Tu touches là aux deux aspects de ma personnalité. D'un côté le perfectionniste et de l'autre l'autocritique. En fait, je n'ai pas beaucoup d'estime de moi-même. Je ne suis pas à l'aise dans ce que j'entreprends. J'essaie toujours d'améliorer ce que je réalise. Et je ne suis jamais totalement satisfait. Lorsque j'étais aux States, je voulais en imposer parce que j'avais un complexe d'infériorité par rapport à ces musiciens que je côtoyais. Et je n'ai pas du tout envie de mettre la pression sur les gens, aujourd'hui. Tu peux avoir l'impression que le son de mon disque soit rudimentaire, DIY. Et ce n'est pas étonnant que ces traces soient encore présentes. Il n'existe pas de problème interne pour décider de faire telle ou telle chose. Donc oui, c'est très DIY… »

'White bread Brown beer' est donc le titre du nouvel album de Scritti Politti. Traduisez du pain blanc et de la bière brune. Le message est-il symbolique ? Green confesse : « En fait, ce titre est inspiré de mon régime. Je suis devenu accro au pain blanc et à la bière brune. Là où j'habite, dans l'East End de Londres, je me rends tous les jours à la même boulangerie pour acheter mon pain blanc. Et tous les jours je me dis que je vais manger des fruits au petit déjeuner et me mettre à boire de l'eau. Mais au bout du compte, je commence toujours par manger du pain blanc le matin et finit ma journée au pub à boire de la Guinness. Et entre le pain blanc et la bière brune, j'ai enregistré ce disque. D'un autre côté, le pain blanc est également une réflexion péjorative utilisée par les musiciens noirs. Aux States, quand je proposais une idée, ils la repoussaient ; parce qu'ils ne voulaient pas de ce pain blanc qui les ramenaient à la culture anglo-saxonne. A la white pop music ! » Les chansons du dernier album sont plus lentes, plus climatiques que dans le passé. Pourquoi une telle approche atmosphérique de sa musique? "En fait, j'ai enregistré deux fois plus de chansons qu'il n'y a sur l'album. Et dans le lot, il y avait également des compos uptempo. Jeff, le boss de Rough Trade est une des rares personnes dont je respecte les conseils. J'adore les soli de guitare. Il y en avait. Mais Jeff a orienté les choix du tracklisting. Chaque fois qu'il entendait la guitare, il faisait la moue. Et les compos les plus dynamiques impliquaient de la guitare. Par conséquent… Mais cette sélection ne m'a pas dérangé… »

Green Gartside possède des goûts très éclectiques, depuis la prog au punk, en passant par le hip, hop, le trip hop, le r&b, le jazz, le reggae, l'électronique, la soul, le folk, le disco, la pop, le funk  et j'en passe. Et il apprécie aussi bien Robert Wyatt, Gang Of Four, Public Enemy, Simon & Gardfunkel, Sly Stone, Miles Davies, Kraftwerk, Michael Jackson, The Beatles, Quincy Jones ou encore Elvis Costello. Il a d'ailleurs un jour déclaré que les frontières entre les différents types de musiques étaient totalement artificielles. Explications : « Oui, je confirme mon point de vue. Toutes ces catégories sont conventionnelles. Elles ne m'intéressent pas. La création est bien plus importante que la forme. Je ne nie pas les différences stylistiques ou mélodiques, mais tous ces genres évoluent dans un même espace pop/rock. J'adore le hip hop, même si on ne le ressent pas tellement dans ma musique. J'ai chanté sur toutes les chansons du premier album de RUN-D.M.C. N'est-ce pas la plus belle preuve, non ? Le jour où je mettrais un terme à mes activités musicales, j'irais m'installer dans mon cottage au Pays de Galles. Et il ne serait pas étonnant que je m'y fasse livrer des disques en import. Dont certains de hip hop… » Gartside apprécie l'improvisation dans la musique. Il faut croire qu'il s'agit d'un héritage issu d'une période au cours de laquelle il était encore fasciné par des artistes comme Wyatt, Hatfield & The North ou encore Henry Cow. « A une certaine époque, l'improvisation avait beaucoup d'importance dans mes prestations 'live'. C'était avant que je ne rencontre des problèmes de santé. Je tournais alors en compagnie de Gang of Four, Joy Division, Echo & The Bunnymen. J'ai eu une attaque sur scène et j'ai été hospitalisé. Depuis, c'est un exercice que j'ai quelque peu délaissé. En ce qui concerne la prog, c'est une veine que je dois encore explorer. J'espère y parvenir un jour. Même à l'âge de 80 ans. En pleine déferlante punk, j'étais aux études. Et je faisais de la promo pour Henry Cow. J'avais même hébergé le groupe. Le drummer m'avait alors déclaré que le punk, c'était de la merde. Et puis, j'ai enregistré mes premiers disques. Qui étaient plutôt punk. C'était une période fantastique. On lisait énormément. On prenait des trucs… On a alors investi une centaine de £ pour sortir notre premier album. Et on avait mentionné nos coordonnées sur la pochette afin que le public puisse nous communiquer ses impressions. Il y a des gens qui sont venus jusque chez nous. Certains venaient même de France ! » Green est également très sensible au jazz. Et son approche de cette musique est tout à fait déconcertante. « Pour ma part le jazz vient d'un autre monde. Je l'ai toujours ressenti comme une musique pleine d'âme et de profondeur. A contrario la musique pop est plus futile. Ce qui ne m'empêche pas de mettre les deux styles sur le même pied. Il n'existe aucune raison valable de dire que l'un ou l'autre soit meilleur que l'autre... »

Sur le nouvel opus de Scritti Politti, quelques titres demandent quelques éclaircissements. Tout d'abord 'Snow in the sun', dont les chœurs rappellent manifestement Queen. Serait-ce un clin d'œil à l'histoire de ce groupe britannique ? « A première vue j'ai pas trop remarqué… Ah oui, effectivement ! En fait j'adore construire des harmonies vocales à partir d'un multi-pistes. Tout gosse j'adorais les Beach Boys. Et quand tu disposes d'un studio à la maison, c'est un jeu d'enfant… » Ben oui, les Beach Boys constituent une référence majeure pour Green. Suffit d'écouter les harmonies a cappella de 'Mrs. Hugues' pour s'en convaincre. « La BBC m'a consacré un reportage et m'a demandé de me rendre où je voulais. On est donc parti à New York. Je leur ai montré les clubs hip hop de 78. On a rencontré les rappers en compagnie desquels j'avais travaillé. As-tu lu 'Heroes and Vilains' ? La véritable histoire des Beach Boys. Je te conseille vivement de le lire… Dans le premier chapitre, l'auteur nous parle de la mort de Dennis Wilson. La fin de sa vie fut pour lui un véritable calvaire. Il était rongé par l'alcool et la drogue. Il habitait dans un bar à Malibu. Le type qui l'hébergeait – un certain Jay – lui offrait à boire et à manger… J'ai donc amené l'équipe qui réalisait ce film dans ce bar… Maintenant, on a beau être fan des Beach Boys, ce n'est pas une raison pour tomber dans le pastiche… » La sonorité de la guitare rencontrée tout au long de la composition 'Dr Abernathy' évoque le 'Sgt Peppers' des Beatles. Un disque considéré par Green comme un album culte ! Pas difficile d'imaginer que cette chanson adresse délibérément un clin d'œil aux Fab Four. « De toute évidence. A 7 ou 8 ans, j'étais déjà abonné au magazine 'The Enemy'. J'ai grandi au sein d'un environnement pop. Et j'étais âgé de 16 ans lorsque j'ai entendu 'Sgt Pepper's' pour la première fois. A cette époque, je vivais dans une banlieue ouvrière. De ma fenêtre, le paysage se résumait aux charbonnages et aux usines. Et j'avais apposé la pochette de cet album à la fenêtre de ma chambre pour qu'on la remarque. Dans l'espoir que quelqu'un frappe à ma porte pour me dire que lui aussi était tombé sous le charme des quatre de Liverpool ; et en particulier de ce disque… » La dernière chanson qui figure sur l'album 'White bread black beer' est également la plus contagieuse. Une compo qui pourrait être traduite en single. Mais qu'en pense notre interlocuteur ? « C'est une bonne petite chanson ; mais je ne pense pas qu'elle pourrait sortir en single. En fait, cette compo recèle des lyrics assez utopiques. Je m'explique. J'ai grandi au sein d'un environnement de gauche. Et si la maxime est passée de mode, cette chanson fait allusion à Robin des Bois. Un personnage légendaire qui pourrait un jour remplacer le Roi dans un royaume où tout serait partagé. La compo évoque la recherche de la vérité et de la justice pour tous ; même si d'un point de vue intellectuel, les idées sont passées de mode. En fait je parle ici de relativisme. Ce qui est vrai ici ne l'est pas nécessairement ailleurs. La vérité est donc contextuelle. Et s'il n'existe pas de vérité, il n'y a pas de justice. C'est quelque chose qui m'interpelle. La société d'aujourd'hui ne prône plus que l'hyper individualisme. Le concept de Robin des Bois consiste à prendre les richesses à les redistribuer. Partager les richesses du monde. Il y a un concept héroïque, derrière cette vision utopique… » Green s'inspire beaucoup des bouquins qu'il lit et des idées philosophiques qu'il défend. Il a lu Marx et Gramsci. Pas pour rien que Robert Wyatt figure parmi ses amis. Maintenant, il faut imaginer que chaque fois qu'ils se rencontrent, leurs discussions vont au bout de la nuit. « Oh oui ; et même au-delà. C'est encore un pur. Sa vision du communisme n'a jamais été altérée. Dernièrement je lui ai encore prêté deux bouquins qui traitent des ambitions du marxisme. Et lors de notre prochaine rencontre, il y aura matière à discussion… »

Paradoxal, mais Green Gartside n'écoute jamais sa propre musique. Ou très rarement. « C'est exact. Dernièrement, j'ai accordé une interview à Amsterdam. J'ai joué quatre titres de mon album en studio. Et c'est la première fois que je les entendais. Et c'est aussi une première de devoir les réécouter, car je suis forcé de les enseigner aux musiciens du nouveau groupe que je viens de monter. Mais en général, je n'écoute pas mes propres chansons… » Green possède un falsetto très particulier, qui ne correspond pas à sa personnalité. Un peu comme s'il était hanté par un autre personnage. « Ma voix est éthérée, aérienne, un peu irréelle. On me répète souvent que je ne chante pas comme je parle. Qu'on dirait que ce n'est pas ma voix. C'est peut-être aussi parce que je n'aime pas qui je suis. J'ai une perception imaginaire de mon moi… »

Merci à Vincent Devos