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Le venin de Judith Hill...

Chanteuse, compositrice et multi-instrumentiste, Juidith Hill, sortira son nouvel opus, « Letters From A Black Widow » le 12 avril 2024. Un album taillé en 12 pièces qui présente une histoire fascinante oscillant de la douleur privée à la transcendance…

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Zara Larsson 25-02-2024
Shaka Ponk - 14/03/2024

D'Hiver Rock 2006 : samedi 25 février / Experimental Tropic Blues Band nous en mis plein les oreilles, Punish Yourself plein la vue...

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La deuxième journée du festival débutait à 16 h20. Une journée bien chargée attendait votre serviteur ; d'autant plus que quatre groupes de métal étaient programmés dans une troisième salle, à partir de 19h20. Dont Vandal X. Une prestation à laquelle je n'ai malheureusement pu assister, puisqu'au même moment se produisait Experimental Tropic Blues Band. Et de cette scène, je n'ai pu assister qu'à quelques minutes du set dévastateur de Morning Red. Une certitude, plus de monde dans les salles qu'au bar lors de cette deuxième journée, même si le jus de houblon semble encore avoir coulé à flots…  

Issu de Lille, Glory Pop est le lauréat de l'Open Stage de Mouscron, édition 2006. Un quatuor qui remet au goût du jour le style théâtral, parodique et humoristique de Bonzo Dog Band. Encore que parfois, leur humour décalé évoque les Monthy Python. Pas étonnant d'ailleurs que la formation adore les déguisements. Entrant sur scène vêtus d'une bure blanche, semblable à celle des adeptes du Ku Klux Klan, les membres du band terminent en string, après avoir transité par les accoutrements les plus farfelus possibles et imaginables (plumes, scaphandre et j'en passe). A un tel point qu'on finit par en oublier la musique qui tire un peu dans tous les azimuts. On y recèle même du rap et du glam (NDR : évidemment). N'empêche le chanteur est capable de passer du clavier au violon avec un certain talent. Et une chose est sûre : on s'amuse tout au long de leur prestation…

Peu réceptif au hip hop, je me suis quand même risqué à assister au set de Prise de Son soutenu par les Choco Pops. Collectif particulièrement jeune, Prise de Son rape comme mille et un autre groupe du style dans l'Hexagone. A leur avantage, des textes engagés et surtout intelligents, en phase avec les problèmes des banlieues en France. La présence des Choco Pops donne cependant une toute autre coloration à l'expression sonore. Le trio guitare/basse/batterie a des planches, et notamment le drummer. Balèze (au propre comme au figuré), il donne une amplitude phénoménale à la musique proposée. D'ailleurs, livré à lui-même au beau milieu du set, le collectif lasse très rapidement. Et il faudra le retour du backing group pour que la prestation retrouve des couleurs. N'empêche pour une première, cette collaboration méritait d'être vécue et demande même une suite…

Skeil est un quintet lillois qui pratique une sorte de funk/acid/jazz directement inspiré par Jamiroquai voire Steely Dan. C'est également le nom du chanteur/claviériste et leader de cette formation. Un chanteur qui possède un falsetto d'une grande limpidité. En outre son backing group n'est pas constitué de manchots ; et en particulier le saxophoniste. Malheureusement, leur solution sonore manque paradoxalement de groove. Mortel pour un combo qui revendique un tel style musical…

Ensemble courtraisien, Rencontrez l'Amour baigne dans le surf jusqu'au cou. Pas de chanteur, mais une musique instrumentale instituée, il y a près d'un quart de siècle par les Shadows, et perpétuée encore aujourd'hui par Dick Dale. Au début, c'est sympa, mais au bout de 20 minutes, on atteint le stade de saturation. Et on retourne au bar.

Sarah Markewich est américaine. New-yorkaise, très exactement. Elle vit cependant aujourd'hui à Courtrai. Depuis 9 ans. Vocaliste chez Greyn elle possède une superbe voix qui rappelle tantôt Nathalie Merchant des 10.000 Maniacs, tantôt Ani DiFranco. Le quintet pratique une sorte de pop/rock semi-acoustique particulièrement soigné. Mais aussi très ennuyeux. Et le groupe a beau se réclamer des Violent Femmes, dont il interprète d'ailleurs une cover, on se demande s'il ne devrait pas privilégier les bars nightclubbiens.

Apparemment, la pub de Morning Red a fait recette. Après avoir distribué moult tracts pendant deux jours, ils sont parvenus à attirer la foule dans la salle réservée aux groupes de métal. Disposant de deux chanteurs, le sextuor pratique une musique féroce, turbulente, fruit d'un cocktail improbable entre Mass Hysteria, Colcut, Soulfly et Incubus. Et le public averti réagit instantanément à cette flambée de fureur. Un set dévastateur auquel je me suis soustrait après dix minutes, histoire de sauver ma peau… et mes tympans…

Raspoutitsa n'est pas le nom d'un ancien agent du KGB, mais le patronyme d'une formation issue de la région tournaisienne responsable d'une style musical particulièrement original qui oscille entre chanson française et prog, en passant par l'électro et la pop. Mais la force du groupe procède des lyrics de Mathieu. Des textes lourds de sens et de pertinence. Il joue également de la guitare. Et chante. Pourtant, son timbre n'a rien d'exceptionnel ; mais ce soir, ses inflexions ont fait la différence. D'ailleurs, à ces débuts, Cantat avait-il une belle voix ? Après trois années d'absence, le groupe a décidé de sortir un maxi (NDR : dont le digipack est absolument superbe !) et de repartir en tournée. Franchement, on est ici en présence d'un talent à l'état brut. Qui mérite d'être poli. Peut-être pas toujours facile d'accès, il faut le reconnaître… Et quoi, Ferré était-il facile d'accès ?

Fondé en été 2000, Two Star Hotel a été signé par le label allemand Sounds Of Subterrania, une écurie qui compte en ses rangs King Kahn, Dirtbombs, Melt Banana, El Guapo Stuntteam et The Monsters. La formation liégeoise a d'ailleurs sorti son premier opus en 2005. Et à l'écoute de cette plaque, cette signature se justifie. En fait, TSH pratique un cocktail de boogie, de funk et de punk qu'ils appellent avec dérision du 'plastic-avant-rock' (NDR : si on veut bien !). Sur scène le groupe se présente vêtus en rouge et noir, un foulard noué autour du cou. Deux guitaristes (qui disposent d'un rack de grattes assez impressionnant, dont une transparente !) alimentent leur solution sonore aride, énergique, convulsive, qui transpire le sexe et le rock'n roll. D'ailleurs, dès les premiers accords, vous avez une envie irrésistible de taper du pied. Et leur nouveau chanteur semble s'être facilement moulé dans l'ensemble. Pantalon de cuir noir, poses lascives, il se déhanche, harangue la foule, et termine même son set au milieu du public.  

PPZ30 n'est pas né de la dernière pluie, puisque le combo existe depuis 1992. Malheureusement, leur funk métal semble avoir pris un sérieux coup de vieux. Pas que l'énergie soit absente ; au contraire ! Mais elle est le fruit d'une accumulation de clichés qui finissent par devenir agaçants. Et leur dernier album, « Duck my sick » en est la plus belle illustration. Heureusement, sur les planches, la formation est toujours aussi intéressante. Et puis rien que la présence de Bruce, le chanteur/showman, est un véritable régal. Bénéficiant du concours d'une section de cuivres le combo n'a donc pas failli à sa réputation. Enthousiasmant même ceux qui ne les avaient jamais vus…

Experimental Tropic Blues Band ! Nous ne sommes plus dans la même division… Les héritiers naturels des Cramps et de Jon Spencer Blues Explosion ont encore frappé… Psycho Tiger et Boogie Snake étaient au sommet de leur forme, même si en final, ils ne savaient plus trop où ils étaient. Et le public leur a rappelé en leur accordant une formidable acclamation. Qui a débouché par un rappel ! Une chose est sûre leur psycho boogie (NDR ou si vous préférez leur rock'n roll blues & roots) est unique en leur genre. Toujours pas de bassiste, mais deux râpes qui se conjuguent à merveille, déchirent l'espace sonore ou l'enflamment pour mieux le rendre dansant et sulfureux, pendant que Devil d'Inferno martèle tribalement ses fûts. Et les voix des deux solistes (une plus claire, l'autre caverneuse) se complètent parfaitement. Bref, même si le public ne faisait pas la danse du scalp, il pogotait ferme. Et difficile de ne pas avoir des fourmis dans les jambes à l'écoute de leur musique. Assurément le moment le plus fort de ce samedi. Le groupe est actuellement en studio pour enregistrer son tout premier long playing…

Encensé par la presse traditionnelle pour son premier album « Skyline society » (NDR : impossible d'en dire quoique ce soit, puisque aucun exemplaire promo n'est parvenu à Musiczine), Major Deluxe s'était déjà produit lors de l'édition 2002 du D'Hiver Rock, pour un set dont le souvenir ne restera pas impérissable. Depuis, la formation de Sébastien Carbonnelle a effectué d'énormes progrès. Leur musique easy listening, orchestrale, perfectionniste est irréprochable, mais franchement soporifique. En fermant les yeux, on avait l'impression d'être dans son salon, bien calé dans un sofa soyeux, prêt à tomber dans les bras de Morphée. Manquait plus que le casque sur les oreilles. Mais je n'étais pas dans mon salon…

Alors là, j'ai été surpris. Pas que la musique soit sensationnelle, mais le look de Punish Yourself est impressionnant. Les corps des musiciens et d'une danseuse aux seins nus, peints aux couleurs fluo donnent vraiment un effet visuel qui ne peut laisser indifférent. Côté musique, Punish Yourself pratique une sorte de métal indus qui ne lésine ni sur l'électronique, ni sur les pulsions primaires. En vrac, leur attitude implique le sado-masochisme, le sang, la dope, la fascination pour la mort et j'en passe. Fallait voir les fans du style accoutrés comme des punks de la fin des 70's ou maquillés à la manière de Marylin Mansun, se bousculer devant la scène. On a même eu droit à l'irruption d'un exhibitionniste sur le podium, que le service d'ordre a éjecté manu militari... Episodiquement, la danseuse actionnait une disqueuse pour en laisser cracher des étincelles semblables à des flammes. Sex, drugs & Cyberpunk ? Euh… Plutôt plein la vue…

Et pour terminer la journée, rien de tel qu'un moment de franche rigolade. Que nous a accordé Colonel Bastard, en l'occurrence Jérémy, le chanteur d'Experimental Tropic Blues Band. Avec pour seul accompagnement un micro et un lecteur CD pourrave, il a réalisé une performance à la fois délirante, décalée et sans complexe (NDR : c'est dans le dossier de presse !), qu'il termine par un strip-tease improvisé (NDR : ce n'est pas dans le dossier de presse). Bref, un bon moment de bonne humeur pour clore cette deuxième journée…

Les Anges

Rock’n’roll et paradis sur terre

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Faut-il croire aux préceptes de la réincarnation ? Si cette question nous laisse habituellement dubitatif, on tend ici à revoir notre position. En cause, une rencontre avec Les Anges, tout de noir vêtus et descendus du ciel pour souffler sur les cendres de ce bon vieux Hulk. Pour mieux s’émanciper de leur redingote déchiquetée et d’un vilain teint verdâtre, les (ex-)musiciens de Hulk se sont jetés dans les bras de la douce – mais sauvage – Sandra Hagenaar (ex-Fifty Foot Combo). Pieds au plancher, guitare au poing, Les Anges se font les messagers d’une culture rock intègre, préférant tourner le dos aux concessions pour mieux embraser la tension. Deux Anges (sur quatre) nous font face : Sandra et Renaud. Au cœur du débat, « A deep grave as a shelter », un premier album produit par l’infatigable Christine Verschorren (Ghinzu, Montevideo, Das Pop, dEUS, etc.). Du rock pour pousser les portes du paradis ?

Avant d’aborder Les Anges, reparlons de Hulk. Pourquoi avoir changé de nom ? Le groupe est-il définitivement enterré ?

Renaud : Oui, c’est terminé. Un jour peut-être, on reviendra pour quelques dates. Mais ce n’est pas à l’ordre du jour. Le changement de nom, c’est un tout : de nouveaux morceaux, une atmosphère, l’arrivé de Sandra. Toutes ces choses impliquaient l’émergence d’une nouvelle identité.

Sandra : Tout comme Hulk, Fifty Foot Combo est mort. Les Anges, c’est donc un nouveau groupe. Au final, notre musique n’a strictement rien à voir avec celle de nos anciennes formations. Certes, on peut y retrouver quelques éléments. Mais on a pris soin d’y ajouter des instrumentations différentes et quelques clins d’œil aux films d’horreur !

Vous abandonnez donc vos principales influences pour repartir à zéro ? Terminés les déboulés plombés à la Kyuss, Masters of Reality, etc. ?

R. : Non, non ! On ne va pas s’en éloigner... On aime vraiment ces groupes. En fait, par le passé, nous n’avons jamais eu la chance de bénéficier d’une production digne de ce nom. Chez Hulk, les chansons étaient là. Mais la production de nos enregistrements nous rapprochait quasi automatiquement des formations de rock stoner et des groupes de metal. Le rôle de la production est donc primordial...

Comment expliquez-vous l’engouement suscité par la sortie de votre album ? Auparavant, les médias n’étaient pas toujours à vos côtés. Aujourd’hui, avant même la sortie du disque, la presse s’emballe. Ne trouvez-vous pas ce phénomène étrange ? 

R. : Franchement, je ne comprends pas non plus... Impossible d’expliquer ce qui nous arrive... Je ne sais pas. Nous sommes signés chez Bang ! et je pense que, pour nous, c’est une bonne chose. Les Anges apportent encore un peu plus de diversité dans un catalogue qui était essentiellement composé de formations pop-rock.

S. : Actuellement, nous sommes le seul groupe du label à jouer une musique ‘arrachée’. Pour nous, c’est aussi une façon de sortir du lot, de se faire entendre. Rentrer dans une structure ouverte à plein d’autres styles ne peut être que bénéfique pour Les Anges...

Sur l’album, deux chansons se suivent et présentent des titres comparables : « Be a man » et « Illustrated man ». S’agit-il du même homme ? Est-ce une histoire en deux volets ?

R. : Ces deux titres s’enchaînent par hasard. C’est peut-être un peu moche au niveau de la titraille... Mais ces deux textes n’entretiennent aucun rapport entre eux. « Be a man » évoque l’histoire d’un type étrange qui veut en découdre avec la terre entière. Par contre, « Illustrated man » tire son origine d’un recueil de nouvelles de Ray Bradbury intitulé « Illustrated man ». Ce bouquin m’a toujours interpellé. Il raconte les aventures d’un gars qui s’est fait tatouer par une sorcière. Un jour, les tatouages prennent vie. Et, quand les gens s’en approchent, ils peuvent lire leur destin à travers les dessins. Malheureusement, les destins sont toujours tragiques... Evidemment, le mec tatoué le vit plutôt mal...

Et le morceau « 50 euros », c’est un clin d’œil à 50 Cents ?

R. : « 50 euros », c’est le prix d’un gramme de coke. Il s’agit d’un univers qu’on connaît, de près ou de loin. Ce morceau est dédié à mon frère. Il est décédé à cause de ces conneries. Il ne s’agit pas d’une apologie de la drogue. Il ne faut pas, non plus, concevoir ce titre comme une critique acerbe. Simplement, on voulait attirer l’attention du public sur l’existence de ces substances. Elles sont là, elles existent. Ici, on ne se positionne pas comme des consommateurs mais comme des observateurs d’un fait social trop souvent minimisé. Ouvrez les yeux : la drogue fait partie du quotidien, comme les histoires d’amour et le chômage ! Sur le long terme, la drogue ne présente que des aspects négatifs. Nous voulions écrire un morceau sur ce thème : c’est « 50 euros ».

Votre premier single s’intitule « Boys boys boys ». Comment s’est opéré ce choix ?

S. : Quand on écoute attentivement l’album, on se dit qu’on aurait facilement pu faire des singles de six ou sept morceaux... La recherche sur le son dans « Boys boys boys » est plus fouillée et méticuleuse que dans d’autres morceaux. En ce sens, c’est un très bon choix. On est vraiment content...

Votre album est produit par Christine Verschorren (Ghinzu, Montevideo, Das Pop, dEUS, etc.). Comment l’avez-vous rencontrée ?

R. : Notre manager est à l’origine de cette collaboration. Pour ma part, je connaissais le dernier album de Ghinzu. Il nous a également fait écouter Das Pop et Montevideo. A chaque fois, la production est impeccable. On retrouve un côté acide, chimique dans son travail. Il s’agit de sons artificiels que j’apprécie tout particulièrement.

Quels sont les groupes belges avec lesquels vous entretenez une certaine affinité ?

R. : J’adore Ghinzu, même si leur musique reste très différente de la nôtre. The Experimental Tropic Blues Band est également une des meilleures formations du pays. Sur scène, ils sont implacables. Je pense aussi à Kube. Ils possèdent de très bonnes compositions et viennent de sortir un bon album...

Et quels sont les groupes qui influencent Les Anges ?

S. : On peut parler de Messer Chups, un duo russe un peu fou. Comme chez Les Anges, on retrouve un côté féminin, des allusions à l’univers cinématographique, certaines sonorités. Là, je pense surtout à l’usage du thérémin. Et, d’une certaine façon, la manière dont Renaud écrit les chansons est assez proche du hard-rock... Là, je ne parle pas de Black Sabbath...

R. : Ah oui ! Plutôt d’AC/DC alors... (rires) En fait, dans le groupe, nous sommes très attachés à certaines valeurs artistiques, des influences communes.

En concert :

Le 13 juillet, Dour Festival

Le 21 juillet, Power Festival (La Louvière)

 

Jean-Patrick Capdevielle

Jean-Patrick l'hérétique...

Écrit par
Quinze longues années qu’il n’avait plus sorti d’album de chansons. Bien sûr Jean-Patrick n’a pas chômé au cours de cette longue période, puisque dès 1993, il décide de fréquenter l'université californienne du cinéma de l'UCLA en Californie, compose la pièce classique ‘Carmine Meo’ pour la soprano Emma Shapplin (1998) et un opéra néoclassique, ‘Atylantos’, inspiré de la légende de l'Atlantide (2001) ; sans oublier son implication pour la peinture. Bref, hormis la parution d’une compile (‘Politiquement correct’) éditée en 1993, pas grand-chose à se mettre dans le creux de l’oreille pour les aficionados de ce natif de Levallois-Perret, en France. Mais enfin, il vient de sortir un nouvel album : ‘Hérétique’. Un come-back à 62 balais qui méritait quand même quelques explications…

‘Hérétique’. Définition du Larousse : qui tient de l’hérétique. Qui professe, soutient une hérésie. ‘Hérésie’. Définition du Larousse : doctrine contraire à la foi catholique et condamnée par l’Eglise. Par extension : opinion en contradiction avec les opinions admises. On entre directement dans le vif du sujet. Pourquoi avoir choisi un tel titre pour son album ? Et surtout, Capdevielle se considère-t-il comme hérétique parce que sa doctrine est contraire à la foi catholique, donc condamnable par l’Eglise ou simplement parce que ses opinions sont en contradiction avec les opinions admises. La réponse est claire : « Les deux ! Je suis opposé aux dogmes, et en particulier ceux qu’entretiennent les religions monothéistes. La religion ne représente pour moi qu’une idéologie au même titre que le communisme, le nazisme ou le fascisme. Je ne parviens toujours pas à comprendre qu’on puisse encore aujourd’hui traîner un péché originel qu’un gardien de chèvre a bien voulu rappeler à notre souvenir, il y a plus de 2 000 ans… » Quel sens donne-t-il alors à l’existence ? «  Je crois que l’esprit humain est vaniteux d’imaginer ce que serait le créateur. Le monde a-t-il été créé ou est-il le reste de quelque chose ? Ce qu’on appelle aujourd’hui univers. En fait, cette idée de création est le reflet de la prétention manifestée par la race humaine. Une prétention qui lui autorise tous les excès. De croire avoir tous les droits sur la terre. Comment expliquer l’existence de ces camps de concentration ? Et pas seulement ceux du passé, comme les plus célèbres demeurent ceux des nazis ? Parce qu’il en existe bien d’autres ailleurs encore aujourd’hui. Comment expliquer les mauvais traitements infligés aux animaux, et pas seulement pour se nourrir ? Or ils appartiennent tout autant que nous au patrimoine de la terre. Ce scandale est le fait de l’homme, le prédateur ultime… Je suis aussi un hérétique, parce qu’en temps que professionnel je refuse de souscrire aux diktats des multinationales ; et en particulier ceux qui régissent le monde de la musique… »

Jean-Patrick Capdevielle ne croit pas à la démocratie. Une opinion corroborée par sa chanson ‘Miss démocratie’. « Même si 100 000 personnes ont voté pour une personne, comment veux-tu que cette personne puisse faire la synthèse des idées de tous ces électeurs qui souvent ne comprennent rien au pouvoir. Et encore faudrait-il qu’elle le veuille. En fait, notre système actuel appartient davantage à la démagogie qu’à la démocratie. Il permet surtout à un certain niveau de pouvoir d’exercer son hégémonie sur le monde. Sur leur mode de vie. Et aux politiciens d’essayer de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Tous les hommes politiques sont fatalement des démagogues. Je ne crois pas à la démocratie représentative. C’est un gilet pare-balles. Je voudrais qu’elle soit plus en phase directe avec les individus. Je suis partisan de soumettre les grandes questions par voie de référendum. Que ce soit au niveau national ou européen. Une méthode qui se rapproche davantage du petit peuple. Un peu comme si on exposait ces problèmes sur la place publique. Et des techniciens appliqueront les décisions du peuple. Des experts en économie, en politique, en matière de santé. Des techniciens dont les opinions sont neutres. Des gens compétents susceptibles d’émettre des suggestions sensées. Est-ce une utopie ? Je l’ignore, mais c’est mon opinion sur le sujet. A quoi assiste-t-on aujourd’hui ? A une course effrénée vers la croissance économique au détriment de l’humain. Je m’insurge face à cette démocratie à l’américaine. Je crains qu’on aille droit dans le mur… »

Pour enregistrer « Hérétic », Capdevielle a reçu le concours de quelques collaborateurs notoires et tout d’abord, le guitariste des Wampas, Philippe Almosnino. « Au fil du temps nous nous sommes liés d’amitié. Philippe est également impliqué chez Tarmac. On a également reçu les encouragements d’Arnaud Samuel, violoniste chez cette formation et puis aussi et surtout de Louise Attaque. Sinon, David Halliday s’est également beaucoup impliqué lors des sessions d’enregistrement. Il joue ainsi des drums pour 6 titres. Et comme j’avais composé 32 chansons, je lui ai refilé 6 compos pour son prochain album. Je partage également les parties vocales avec Jennifer Jordan pour « Mal de chien ». Tous les gens avec lesquels je travaille ou j’ai travaillé deviennent des amis. Je privilégie toujours les rapports humains dans ma démarche. C’est pareil pour mon site internet. Tous ceux qui y travaillent font partie de la famille. Il en est de même pour les rapports avec nos fans… » ‘Mona Lisa Jones’ est une plus ancienne chanson. Elle date d’au moins 15 ans. Alors pourquoi l’avoir reprise pour cet elpee ? « En fait, c’est une chanson que j’aimais beaucoup, mais je n’étais toujours pas parvenu à l’intégrer sur un album à l’époque. Et puis comme tu sais, je n’ai plus rien enregistré du style par la suite… » Et il en en explique la raison : « A cette époque, mon fils a été victime d’un accident de la route. Il a failli y rester. Finalement, il s’en est sorti, mais est demeuré paraplégique. C’est alors qu’il y a eu comme quelque chose qui s’est cassé dans le processus d’écriture… Et puis, il y a quelques mois, une amie enceinte m’a demandé de venir lui rendre visite et de lui chanter quelque chose, parce qu’elle pensait que ce récital rendrait son enfant mélomane. Il s’est produit un déclic au fond de moi-même. Une autre naissance allait se produire. Et tout s’est débloqué. Je me suis remis à composer, travaillant 10 heures par jour. Et en un week-end, j’étais à la tête de toute une série de nouvelles chansons composées à la guitare, chose que je n’avais plus faite depuis belle lurette. Puis je me suis demandé ce que j’allais faire avec ce stock. J’ai finalement conclu qu’il fallait que je ressorte un album… » Mais Jean-Patrick écoute-t-il encore ses anciennes compos ? Ou alors y est-il allergique, dès qu’elles sont reproduites sur disque ? « Au début, je les écoute beaucoup. Au moins trois fois par jour. Mais au bout d’un certain temps j’éprouve une véritable révulsion à les réentendre. Non, je n’écoute pas mes anciennes chansons. Ou alors par accident. Par contre, elles ont fait l’objet de réarrangements pour la tournée en compagnie du groupe. Ce sont de nouvelles versions. Et finalement, les fans préfèrent de loin ces nouvelles adaptations. C’est inespéré… »

Capdevielle est compositeur, chanteur, acteur de cinéma et peintre. A-t-il une autre corde cachée à son arc ? « Pour l’instant, je m’occupe beaucoup du rédactionnel sur le site pour lequel je rédige un édito chaque semaine et j’entretiens un forum. Mais dans ma tête, j’ai encore un autre projet : écrire un roman. J’ai la structure dans ma tête. J’éprouve beaucoup de plaisir à écrire. Mes proches m’encouragent à m’y lancer. Mais ma manière de rédiger est assez proche de la langue parlée. Donc c’est uniquement dans ce style que je pourrai m’investir. Mais il faut que je puisse me laisser porter. Quand je sentirai que je pourrai m’y consacrer, ce sera OK… Ou alors, j’abandonnerai le projet avant de l’avoir commencé. Vivre la vie que je mène est déjà un privilège. J’ai accompli des études artistiques. J’étais un enfant gâté. Un fils unique. Mais je ne suis pas blasé. Je ne supporte pas de rester dans le flou et j’ai toujours peur de m’ennuyer. J’ai besoin de m’occuper l’esprit et de faire quelque chose, même quand je prends trois semaines de repos… C’est dans ma nature… » Dans l’univers du cinéma, Capdevielle a travaillé pour la société cinématographique de Paco Rabanne. Alors, Rabanne, modèle, maître, gourou ou excellent marqueteur ? La réponse fuse : « Excellent marqueteur ! Sais-tu que le QG de campagne électorale de Sarkozy était installé dans les anciens locaux de Rabanne à Paris. J’ai tourné pour sa boîte de production ‘L’énigme des sables’ en compagnie de Marie Christine Barrrault. C’était en 1988. A cette époque, il s’est chargé de la promo d’un de mes disques en Allemagne. On en a vendu 200 000. S’il devait se charger d’‘Hérétic’, on en vendrait 1 000 000 ! Sans quoi, j’ai un jour participé à une des ses assemblées générales. Il parlait déjà de lumière blanche et de fin du monde. Je devais éclater de rire, mais je me cachais pour ne rien montrer. Sa maison de couture a été rachetée par le groupe Puig. Mais après les déclarations sur la fin du monde, les administrateurs n’étaient pas très contents et lui ont demandé d’arrêter de raconter des bêtises, car elles influaient négativement sur les ventes… »

 

Band Of Susans

Politiquement engagés…

Écrit par

Plus qu'une seule Susan chez ce quintette newyorkais dont la principale caractéristique procède de la présence de trois guitaristes. Et plus que deux membres fondateurs. Soit Susan Stenger et Robert Poss, respectivement bassiste-chanteuse et guitariste-producteur. Nous avons recueilli pour vous leurs impressions lucides, engagées, mais non dénuées d'humour, sur la politique, la société américaine, MTV, le féminisme et la conscience musicale d'un groupe très électrique...

Quelle est la signification du titre de votre dernier album? Y a-t-il une corrélation avec Simone Veil?

Robert : Non, mais la théorie est plutôt intéressante...

Susan : En fait le choix du nom est lié à la structure de notre musique. Aux différentes couches de son qui la composent. Aux liens informels, mystérieux qu'elle suscite...

R. : Au plus tu écoutes notre musique, au plus tu souhaites en capter toutes les facettes. Veil exprime cette soif de découvrir ce qu'il y a derrière le mur de bruit...

Est-il exact que les New York Dolls incarnent une sorte de mythe pour Band Of Susans? Avez-vous assisté à un de leurs concerts?

R. : Oui. En 1973. Les Dolls opéraient une tournée en compagnie de Mott The Hoople et d'Aerosmith. Pour Aerosmith, c'était d'ailleurs son premier périple. Nous étions très jeunes et bénéficions de ‘backstages’. Un souvenir inoubliable. Tout baignait dans l'atmosphère intense et dangereuse du glitter. Des musiciens fascinants et redoutables, un peu comme les Sex Pistols...

Est-il possible de développer des perspectives musicales sombres lorsqu'on apprécie à la fois les Beach Boys et les Jesus & Mary Chain?

R. : Susan aime les Beach Boys. Je préfère les Mary Chain et les Ramones. La bande aux frères Reid découpe ses mélodies de la même manière que le mythe californien, mais en adopte une interprétation sombre. Nous ne sommes pourtant pas aussi pessimistes que les Mary Chain. Notre conception musicale est différente parce qu'elle est susceptible d'apporter de l'espoir et même du bien-être. Il est cependant exact que certaines de nos chansons sont très réalistes...

S. : A contrario, les Beach Boys peuvent se révéler effrayants...

R. : Beaucoup plus effrayants que Nick Cave, Alice Cooper, Lou Reed ou le Velvet, par exemple...

En 1993, les Ramones, c'est pas un peu démodé?

R. : Les Ramones appartiennent à l'histoire de la musique américaine. Tout comme le blues ou la musique du XVIème ou du XVIIème siècle. Leur création n'a jamais tellement évolué. Mais elle a toujours été excitante. Lorsque je me procure un disque des Ramones, je ne cherche pas une surprise, mais à prendre mon pied. J'admets quand même que le mythe commence à tomber en désuétude. D'ailleurs, si au départ, nous nous en sommes quelque peu inspirés, aujourd'hui, nous n'avons plus grand chose à voir avec eux...

Band Of Susans est-il aussi engagé politiquement qu'il le prétend?

S. : Absolument! Mais ce n'est pas une raison pour croire que nous allons changer le monde. Nous n'avons jamais eu la prétention de colporter une semblable idéologie. Mais certaines de nos chansons ont une portée politique. D'autres sont plus personnelles ou traitent de problèmes de société comme celui du viol ou du stress, par exemple.

R. : Nos textes impliquent toujours des développements politiques, même lorsque nous parlons d'amour, d'espoir ou de rêve. Nous analysons et examinons ces thèmes en fonction de ce qui se passe autour de nous. Nous tentons ainsi d'aborder les multiples problèmes rencontrés par la société contemporaine...

Comme celui de la religion?

S. : Seulement ses excès. Son fanatisme. Parce que d'une certaine manière nous sommes aussi des fanatiques de notre musique. Nous lui vouons un culte. Nous cherchons à en libérer le mysticisme...

Un peu comme une secte quoi?...

R. : Si tu veux...

BOS ne menait-il pas à l'origine, comme Babes in Toyland et L7, un combat féministe?

R. : Ces deux formations sont totalement différentes. L7 joue du heavy metal on ne peut plus classique. Son attitude féministe se conjuguerait plutôt comme un machisme au féminin...

S. : Les femmes qui cherchent à défendre des idées aussi arrêtées, comme Polley Harvey et Juliana Hatfield, se trompent de cible. Elles se retranchent derrière des principes pour pouvoir exprimer leur exaspération. Elles pensent qu'en se retirant dans un ghetto, elles pourront pigeonner les mâles. Je ne pense pas que ce soit la bonne solution pour donner à la femme la place qu'elle mérite. Que ce soit dans le rock ou dans la société. Un groupe comme L7 a néanmoins son rôle à jouer dans le monde de la musique. Notamment, parce qu'elles organisent des concerts, dont les bénéfices servent à financer la lutte pour la dépénalisation de l'avortement. Et je pense que cet engagement est tout à fait louable.

R. : La société a besoin de tels groupes. Extreme en est un autre exemple. Mais au masculin.

S. : Le problème procède d'une fâcheuse tendance à penser que tous les ensembles féminins de rock mènent un combat extrémiste. Ce qui ne m'empêche pas de militer pour la présence d'un plus grand nombre de femmes dans le rock'n roll, d'amener le public à attacher plus d'importance aux compétences musicales qu'à l'aspect physique, même si elles sont jolies (rires...). Je veux jouer dans une formation partagée entre genre masculin et féminin. Dépasser ces principes du sexe pour me concentrer sur la musique.

R. : Le public a toujours assimilé le rôle de guitariste à celui du mâle, et apparemment le contraire semble déranger, même encore de nos jours...

S. : Les gens pensent qu'une femme est incapable de jouer d'un instrument et ne servent qu'à coucher avec les mecs. A ce sujet, je passe le chapelet de réactions déplacées dont j'ai déjà fait l'objet, avant de monter sur scène. J'ai quand même une anecdote à raconter à ce sujet. Nous partagions dernièrement l'affiche d'un concert avec un autre groupe, à Chicago. Les musiciens de l'autre formation m'ont ignorée toute la période qui a précédé le concert. A l'issue du spectacle, ils m'ont enfin adressé la parole en flattant mes compétences de bassiste. Ajoutant m'avoir croisée en ‘backstage’, en pensant que j'étais la petite amie de quelqu'un. A quoi donc est réduit le rôle d'une femme? Je ne pouvais donc prétendre à un statut de musicien dans un groupe? C'est à la fois ridicule et discriminatoire...

Pourquoi n'êtes-vous jamais diffusé sur MTV?

R. : C'est une très bonne question! (rires)

S. : En fait nous venons seulement de tourner notre premier clip. Ne me demande pas s'il sera un jour programmé sur MTV. Je n'en sais strictement rien!

R. : Nous ne sommes pas obsédés par l'idée de passer ou de ne pas passer  sur MTV. Cette chaîne est tellement conservatrice aux States... Elle diffuse essentiellement des artistes qui relèvent des majors. Pour les petits labels, il est difficile d'obtenir une tranche d'antenne, aussi minime soit-elle. Pour y parvenir, soit vous déboursez des millions de dollars, soit vous vendez père et mère, couchez avec tout le monde (rires) ou acceptez d'être esclave pour dix ans. Alors, peut-être, consentira-t-on à passer votre vidéo. A moins de s'appeler Nirvana... J'aimerais ouvrir une parenthèse au sujet du grunge. Tu vois ce vêtement de flanelle (NDR: il sort la chemise de son pantalon). Je le porte depuis 1960. J'étais alors âgé de quatre ans (rires). C'est cela que j'appelle grunge...

S. : Notre conception de la musique ne correspond pas à l'idée qu'MTV veut faire passer chez les jeunes. Nous n'utilisons pas les vocaux de la même manière que la plupart des groupes contemporains. Prend l'exemple de Nirvana dont toute la structure est focalisée sur le timbre vocal du leader. Nous accordons beaucoup plus d'importance aux différentes tonalités des guitares. Elles couvrent même régulièrement le chant. Je ne pense pas qu'MTV ou n'importe quelle radio à caractère commercial soit intéressé par ce type de musique. Ils la jugent trop dense,  nécessitant un trop grand effort de concentration pour pouvoir être assimilée...

R. : Les programmes d'MTV sont élaborés par des chefs d'entreprise qui décident ce qui va marcher et cherchent la meilleure méthode pour vendre leurs produits. Ainsi, ils n'hésitent pas à fabriquer des groupes de toutes pièces pour parvenir à leurs fins. Nous n'accepterons jamais d'être manipulés pour répondre à des soi-disant critères de séduction. Nous voulons concevoir une musique qui plaise à notre public. Et qui nous plaise, bien sûr. L'objectif est sans doute difficile mais il répond à notre aspiration profonde...


Version originale de l’interview parue dans le n° 20 du magazine Mofo de février 94.

Various Artists

Brazil Classics 7: What´s happening in Pernambuco - New sounds of the brazilian northeast

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Explorant le passé, le présent et le futur de la musique populaire brésilienne, la série « Brazil Classics » pose ses valises dans le ‘nordeste’. Elle nous propose de découvrir les descendants du Mangue Beat. Guidé par Chico Science, ce mouvement musical (il a secoué le Brésil dans les années 90) a installé Recife (une des villes les plus pauvres du Brésil) sur la carte musicale. Les treize artistes épinglés ici reprennent à leur compte l’éclectisme de leurs prédécesseurs. Ils empruntent à l’électro, la drum & bass, le funk, le reggae, le rock et mélangent le tout aux rythmes traditionnels du ‘nordeste’. Le résultat capture une étrange musique pop : mélodique et douce mais où l’inquiétude et la mélancolie mènent la danse. Malgré quelques inévitables baisses de régime, la qualité de l’ensemble ne souffre d’aucune discussion. On pointera quand même la performance des Cidadão Instigado. Ces dignes héritiers de Tom Zé (lui aussi originaire du ‘nordeste’) interprètent leur déjanté « O pobre dos dentes de duro ».

Low

Introspection électrique

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Depuis le début des années nonante, un groupe s’obstine à caresser la beauté musicale dans le sens contraire du poil : Low, trois lettres qui modèlent une ascension. De bas en haut. Toujours. Et, une fois encore, la formation d’Alan Sparhawk évite le repos, les lauriers et tout autre considération, préférant se concentrer sur l’essentiel : sa musique. Fouiller les sons, remuer les technologies pour toucher à l’essence d’une vie nouvelle. Voilà, en substance, le programme de « Drums And Guns », le nouvel album des Américains. Profondément marqué par les incivilités d’un gouvernement belliqueux (à ce titre, on se penchera sur les paroles de l’introductif « Party People » : ‘All soldiers they’re all gonna die’), Low dépose armes et guitares. Désormais, la puissance incantatoire du groupe passera par des sonorités électroniques. Mais cela ne change pas la donne : délicate, austère et hypnotique. Ne craignons rien, jetons-nous à Low !

Alan, tu es originaire de Duluth, dans le Minnesota. Bob Dylan est également natif de cette ville. Considères-tu Duluth comme une bourgade propice au développement personnel des grands musiciens ?

Alan Sparhawk : C’est assez difficile à dire... Duluth se situe à la frontière entre les Etats-Unis et le Canada. Il y fait très froid. Nous sommes à quelques pas des Grands Lacs. La vie de ce centre urbain est rythmée par les fermes, les usines métallurgiques, quelques magasins. En fait, en évoquant l’existence de ma ville à voix haute, je me rends compte qu’il s’agit d’un endroit très éclectique. Cependant, Bob Dylan n’a pas vraiment dû rencontrer l’essence même de Duluth. Au contraire, il devait s’y sentir aliéné dans sa jeunesse car, dès qu’il en a eu l’occasion, il a filé : à Minneapolis, d’abord et à New York, ensuite, où il est devenu célèbre. Il existe pourtant une atmosphère particulière qui se dégage de cet endroit. De là à dire que Duluth guide toute notre création artistique, il y a un pas que je ne franchirais pas. Mais il est indéniable que le froid, le vent, l’absence de soleil ont un impact sur notre vision des choses et de notre musique. Nous aimons vraiment cette ville.       

Tu es marié avec Mimi Parker, actrice phare de votre formation. Ton épouse t’accompagne donc sur la route. Est-ce difficile d’associer vos vies professionnelles et privées ? La musique fait-elle surgir des tensions au sein de votre couple ?

A.S. : Evidement. Déjà, à la base, faire partie d’un groupe de musiciens n’est pas une chose facile à gérer. Dans un même ordre d’idée, le mariage ne constitue pas qu’une partie de plaisir. Le fait de travailler ensemble sur un projet artistique peut entraîner quelques tensions. En même temps, travailler ensemble et partager ces instants nous procurent une indescriptible satisfaction. C’est une chance que de vieillir proche l’un de l’autre, d’avancer ensemble sur un projet, de le voir grandir. Mon mariage est une bénédiction, j’ai la chance d’avoir une femme formidable et une famille compréhensive. Il est vrai que certaines tensions peuvent surgir mais elles sont toujours bénéfiques. Nous n’avons pas cherché à établir une frontière délimitée entre notre vie professionnelle et privée. Ce serait bien trop difficile. Il faut laisser les choses se dérouler naturellement. Parfois, à la maison, nous sommes en train de jouer de la guitare et les enfants débarquent dans la pièce pour jouer. Généralement, on ne se pose pas de questions : nous allons jouer avec les enfants. A la maison, on ne s’impose aucune contrainte. On se contente de vivre les choses comme elles viennent. Il ne faut pas rendre la vie trop compliquée : elle l’est déjà pas mal comme ça !

En Europe, votre précédent album (« The Great Destroyer ») était signé sur le label anglais ‘Rough Trade’. Cette fois, on vous retrouve sous l’égide du célèbre label « Sub Pop ». Comment s’explique ce changement de crémerie ?

A.S. : En fait, aux Etats-Unis, nous sommes signés sur le label Sub Pop depuis des années. Le patron du label est fan de notre musique. En Europe, « The Great Distroyer » était distribué par le label anglais Rough Trade. Je n’ai rien contre Rough Trade. Pas de ressentiment en vue, donc. Simplement, il était temps de partir. Les gens qui avaient travaillé pour nous chez Rough Trade ont emprunté d’autres chemins. On les adorait vraiment. Dès lors, on ne se sentait plus comme à la maison. Ce n’était plus les mêmes personnes. Et, chez Low, nous accordons beaucoup d’importance à la notion de stabilité dans le travail. C’est la principale raison pour laquelle nous sommes passés chez Sub Pop pour la gestion internationale de notre album.

Lors de votre dernière tournée, vous aviez déjà joué quelques morceaux de “Drums and Guns”. Quand avez-vous composé les chansons de ce nouvel opus ? 

A.S. : Certaines chansons du nouveau cd ont été écrites à l’époque de « The Great Distroyer ». Nous avons pris le temps de retravailler ces morceaux, de les reconsidérer. Quand nous sommes entrés en studio pour le précédent, nous disposions d’un stock d’une vingtaine de chansons. Cependant, certaines d’entre elles présentaient un côté inachevé. Il fallait donc les laisser mûrir. Elles possédaient un indéniable potentiel. Mais il fallait pouvoir l’utiliser à bon escient. D’ailleurs, musicalement parlant, il existe une distinction entre « The Great Destroyer » et « Drums and Guns ». Pour le précédent, nous avons tout enregistré comme si nous étions en concert. C’était très brut, très élémentaire : guitare, basse, batterie. Cette fois, nous recherchions de nouvelles sonorités. Nous avons donc abandonné la tradition pour mieux explorer les sons. Pour « Drums and Guns », la première étape s’est concentrée sur l’élaboration des morceaux. Les voix sont ensuite venues s’ajouter. C’est la première fois que nous expérimentons à ce point. Certaines personnes trouveront que ce disque est trop électronique. Mais, en fait, « Drums and Guns » est peut-être notre œuvre la plus artisanale ! On ne s’est jamais imposé le biais des musiques électroniques. Ces sonorités se sont imposées lors du travail sur les morceaux. Rien n’était prémédité ! J’espère simplement qu’en écoutant ce nouvel album, les gens percevront l’évolution sonore recherchée ces deux dernières années.

Vous avez confié la production à Dave Fridmann. Dans quelle mesure sa personnalité ressort-elle de « Drums and Guns » ?

A.S. : Lors des sessions d’enregistrement, Dave a été notre plus proche confident. Parfois, on se disait : Oh lala, c’est une véritable catastrophe !  Et Dave nous soutenait le contraire. Il a vraiment essayé d’explorer nos idées les plus folles. Nous étions un peu comme des enfants découvrant de nouveaux jouets. Il n’a pas arrêté de nous encourager. Parfois, on ne comprenait plus rien et lui, dans un élan magistral, il survenait : On va prendre ces deux sons-là et cette voix : voilà la chanson !  Pour mener à bien ce nouveau projet, nous avions besoin d’une personne talentueuse, calme, capable de reconstituer des fragments sonores pour en délivrer une chanson. Dave était parfait dans ce rôle. Il était un peu comme un professeur à notre égard.

Kim Salmon

Un poisson très électrique

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Ancien membre des Scientists et des Beast of Bourbons, Kim Salmon continue d’alimenter la veine rock garage et rebelle, mais en compagnie d’un nouveau groupe : les Surrealists. Et dans un style plus roots que chez Nick Cave, apparu lui aussi voici une quinzaine d’années. Cet ex-émigré à Londres, est retourné vivre aujourd’hui chez lui, en Australie. Rencontre.

Vous n’habitez plus Londres?

Non. En fait, lorsque j’y habitais, on m’a offert beaucoup d’argent pour que je vide les lieux et quitte le pays. C’est la raison pour laquelle j’ai ensuite vécu trois ans à Perth, pour finalement m’établir à Melbourne, où je vis à l’heure actuelle.

Conway Savage joue du piano sur votre dernier album. As-tu entendu l’album que Mick Harvey, musicien aussi chez Nick Cave, a consacré à Serge Gainsbourg ?

Oui, cet album de reprises est une excellente idée. Gainsbourg n’est tout de même pas célèbre dans le monde entier. C’est donc une bonne façon de le faire connaître, surtout que certaines versions que Mick a enregistrées sont vraiment très réussies. Même que je préfère sa version de « Bonnie & Clyde » à l’original, pourtant déjà d’excellente facture.

Puisque nous en sommes à parler des Bad Seeds, je ne vois pas comment on pourrait éviter d’évoquer la personne de Nick Cave. Faites-vous partie de son petit cercle d’amis?

Je la voyais venir celle-là... En fait, à Melbourne, on te juge selon ton degré de proximité avec Nick Cave. Il y a comme un phénomène de hiérarchie. Ni moi, ni mon groupe n’ont envie de faire partie de ce petit jeu. Finalement, on ne le connaît qu’assez peu. Peu importe après tout.

Pourquoi reprenez-vous « Holocaust » d'Alex Chilton ?

Parce que c’est une chanson que j’aime beaucoup. Je n’ai en tout cas pas cherché un titre susceptible de véhiculer un message politique. Et pas davantage pensé à attirer l’attention du monde sut la montée du racisme et des nationalismes. Non, le thème de l’holocauste est abordé dans son sens le plus large. Il s’avère que dans l’Histoire, l’holocauste a pris une signification très spécifique que le mot n’avait pas au départ. Ce terme existait bien avant. « Holocaust » signifiait ‘une grande catastrophe’. Maintenant, si cette chanson peut faire réfléchir les gens sur ces questions, tant mieux ; mais j’avais davantage un concept poétique qu’une motivation politique lorsque j’ai choisi de l’interpréter…

Quelle place occupe l’épisode des Beast of Bourbons dans ta carrière musicale ?

On m’a souvent conseillé de me consacrer davantage à ce groupe. Personnellement, j’avais l’impression que l’énergie que j’y déployais était dépensée au détriment des Surrealists, de mon œuvre personnelle. La maison de disques me promettait que Beasts of Bourbon ferait un bon tremplin pour les Surrealists. Finalement, je me suis donné à fond pour l’album « Bloody Tom » des Beasts en consommant toute l’énergie que j’aurais pu consacrer aux Surrelalists.

Gardes-tu des contacts avec James Baker et Dave Faulkner?

Bien entendu, ce sont de vieux amis. Je rencontre assez régulièrement James dans un pub où nous buvons quelques bières ensemble. A cause de son emploi du temps très chargé, je vois Dave moins souvent. Nous avons depuis longtemps le projet de participer tous les trois à la bande originale d’un film, mais jusqu’ici, rien n’a jamais pu se concrétiser.

Les Fleshtones, Alan Vega et les Cramps apprécient tout particulièrement la scène garage australienne. Ces groupes ou artistes représentent-ils quelque chose pour Kim Salmon?

Pas du tout. Je n’ai rien à foutre de ces types.

On connaît ton admiration pour Iggy pop. Alors, la reformation des Stooges, c’est une bonne idée ?

Dis donc, c’est loin d’être fait tout de même ! J’en ai parlé à Ron Asheton, il y a deux ou trois ans et il avait l’air de s’en foutre royalement. Mais sinon, ça me plairait. J’aurais enfin l’occasion de les voir à l’œuvre, au risque d’être déçu évidemment. Je pense en tout cas que ce serait une reformation, plus honorable que celle des Sex Pistols, qui se mettent en contradiction avec ce qu’ils proclamaient à la grande époque du punk. Les Stooges n’ont jamais tenu des propos aussi durs sur la vieillesse, etc.

Dernière question. Vous avez vécu à Perth. Connaissez-vous Ed Kuepper?

Il est de Brisbane, pas de Perth ! Je l’ai rencontré une ou deux fois. Je faisais la première partie d’une de ses tournées australiennes quand je jouais en solo, il y a quatre ans. Il est venu un jour et il m’a invité.

Vous aimez sa musique?

Il y a certains trucs bien. J’apprécie certaines de ses chansons. Il a de bonnes idées. Certaines fonctionnent, d’autre pas. Je n’aime pas sa façon de chanter, mais bien son jeu de guitare. Son attitude est très respectable : elle exclut les compromis…


Version originale de l’interview parue dans le n° 45 du magazine Mofo (juillet/août 1995)

Sean Lennon

Sean d'antan et Sean d'aujourd'hui

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Le ticket punaisé depuis des semaines sur le mur tapissé de liège semblait me narguer. Il était le sésame qui offrirait, selon mes espoirs, une soirée inoubliable. Et ce sera le cas ; ce carré de papier présageant bien au-delà de mes espérances, un moment privilégié vécu à l'Orangerie du Botanique. Un moment qui se rapprochait à grand pas, lorsque le premier mars à 19h30, je réalisais qu'il ne me restait que 30 minutes pour traverser la ville et atteindre la 'grotte', lieu où l'intimité moite ravirait mes sens. Le casse-tête pour trouver une place de parking achevé, une bière consommée et un cachet énorme estampillé  sur la main, me voilà armé, prêt à savourer ce moment tant attendu.

Le supporting act nous est venu d'Italie : les Joujoux d'Antan. Et manifestement, son patronyme n'indique pas son origine. En 45 minutes, le quintet a enchaîné mélodies douces et déstructurées comme supports à la voix bucolique du chanteur. On sent que les membres du groupe prennent plaisir à jouer sur les planches. Et il est toujours très agréable de commencer une soirée sur ce genre de note. Même si le style plus rock de cette première partie n'est pas dans le registre de l'homme de la soirée, on imagine qu'eux aussi vivent au sein d'un monde à part, très riche et généreux. Parfois, ils me font penser à Blonde Redhead. Ils ont même l'audace et pour nous la joie, d'inviter Sean himself à les rejoindre, sur le podium, pour chanter une chanson en italien, la dernière de leur répertoire pour ce soir. L'artiste hirsute et barbu ne semble néanmoins pas trop à l'aise lors de cet exercice. Il salue le public en lui donnant rendez-vous quelques instants plus tard.

Démontage du matos pour le premier groupe, montage de celui du second : les roadies s'attèlent à transformer le terrain de jeu en plaine calme et apaisante. 21h10. Entrée en scène de l'autre quintet. A sa tête, le fils de l'autre, l'heureux créateur de « Friendly Fire », son dernier né. Sean Lenon se présente amicalement et humblement en s'exprimant dans un français parfait. Il porte une cravate et une veste bien taillée. C'est dans la liesse générale que la formation ouvre le « Spectacle »…, puis embraie par « Dead Meat », « Parachute », « Wait for Me »… Un petit mot dans la langue de Molière entre chaque chanson accentue la confidence échangée entre le combo et l'auditoire. A un tel point que des questions aussi idiotes que déplacées commencent à fuser du public : 'Sean, où as-tu appris le français ?' Questions auxquelles il répondra très sympathiquement : 'Je ne suis pas là pour une interview, je suis là pour la musique' ; mais en souriant du coin des lèvres, il finira par avouer une réponse toute en harmonie avec son album : 'C'est une femme qui m'a appris le français, ce sont toujours les femmes'. Notre joie s'intensifie encore lorsque nous devenons l'auditeur et le spectateur d'un morceau encore inconnu : « Smoke & Mirrors », mise en bouche, sans doute, d'un nouvel opus en préparation. Les musiciens prennent leur pied. Leur attitude bien sage perd en crédibilité. Les traits d'humour fleurissent. L'ambiance est plus que détendue. Le reste de l'album est interprété très posément et tout en finesse par la troupe. « Friendly Fire », « Headlights », « Would I Be The One ». Cette dernière sonne la pause et incite le public à réclamer un rappel. Il lui sera accordé… « Tomorrow » étanche cette soif d''encore' et crée un climat de plus en plus 'cosy'. Le concert s'achève cependant par le retour sur scène des Joujoux d'Antan. Histoire de leur rendre la politesse. Cette invitation débouche sur un grand bazar bien sympa, à 10 sur scène. 'Le groupe s'appelle Sean d'Antan' plaisante l'hôte, et rigole à l'avance du résultat.

Cette fin symbolise bien le climat entretenu tout au long du spectacle : qualité, humour, ouverture d'esprit et générosité. 22h35, les lumières sont rallumées, on se presse vers la sortie et le bar. On est même surpris de croiser le guitariste perdu dans les couloirs, signant des autographes. Vraiment une agréable soirée qui restera longtemps dans les mémoires. Celle où j'ai fait la rencontre d'un homme propriétaire d'un lourd héritage familial, mais qui n'influence en rien sa véritable qualité artistique. 

Wolfmother

Le rock de demain parfumé au patchouli.

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Après avoir annulé leur concert prévu au Vooruit de Gand pour cause de cérémonie des Grammy Awards (au cours de laquelle ils ont été nominés dans la catégorie ‘Best Hard Rock Performance’)  les Australiens de Wolfmother ont investi une AB pleine à craquer. Une AB où se croisent des jeunes filles de 16 ans, pantalons pat d’ef et t-shirts à l’effigie de la tête d’affiche, des métal heads chevelus et cloutés, ainsi que des nostalgiques des années psychédéliques dont on se demande parfois s’ils ne sont pas les grands-parents des groupies agglutinées sur le devant de la scène. Nous préférons nous désaltérer durant la prestation catastrophique de Brant Bjork and the Bros dont le stoner monotone et totalement dépourvu d’inspiration lasse un public qui scande déjà le nom des héros du soir.

 Comme pour accentuer son attachement à la fin des sixties et aux années 70, le combo se produit sur la scène la plus minimaliste qui soit ! Pas de backdrop, pas de décor, d’effets pyrotechniques ou de lights sophistiqués. Une batterie, une guitare, une basse, un orgue Hammond, des amplis et quelques projecteurs… Les Aussies semblent apprécier l’esprit club et on les imagine aisément sur la scène du Spirit of 66, qu’ils ne risquent pas de fouler de sitôt. Il est un peu plus de 21h lorsque le trio entame un set court mais d’une rare intensité. Inattendu et imprévisible il va faire des dégâts et tout balayer sur son passage ! Débordant d’énergie à l’image de leurs compatriotes et idoles AC/DC, Wolfmother égrène toutes les chansons de sa première galette éponyme. Le riff saccadé et violent de « Dimension » évoque Led Zeppelin. « Woman » est sans doute le titre le plus connu, mais il cartonne à chaque fois, tandis qu’ « Apple Tree » constitue un autre morceau versatile. Le son, l’attitude, les compos, l’atmosphère… le concert est une succession d’allusions et d’hommages à l’histoire du rockToutes ces références au passé sont là comme des balises, mais les trois de Sydney ont suffisamment de personnalité pour rester crédibles. Ils respectent le public et le public lui rend bien. C’est une authentique ovation qui est faite à « Mind’s Eye », alternant douceur et vigueur, selon la méthode appliquée par Thin Lizzy à l’époque de « Black Rose ». La version live de « Joker and the Thiefs » gagne encore en efficacité.

 Andrew Stockdale, à la bouille sympathique, lance un cordial ‘merci d’être venu ! A la prochaine’. Après une telle leçon, il peut être sûr que nous reviendrons.

 Les plus résistants se sont dirigés ensuite vers l’AB club pour un ‘late night show’ en compagnie de l’excellent groupe stoner flamand El Guapo Stuntteam, mais après une telle secousse tellurique, nous avons préféré prendre le chemin du retour, complètement rassasiés de hard rock n’roll. Un futur grand est né !

 Wolfmother + Brant Bjork and the Bros + El Guapo Stunteam

 

Jethro Tull

La flûte vedette de la soirée

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C’est le ‘petit’ Forest National qui accueille ce soir le mythique Jethro Tull. La salle est bien remplie, mais pas sold out. C’est dire que l’évènement rassemble trois à quatre mille personnes. Score honorable pour un groupe certes emblématique, mais sans actualité et aux performances scéniques en dents de scie. Le public est mélangé : quinquas et quadras, majoritaires, se mêlent à de plus jeunes, dont certains visiblement encore aux études-leurs enfants ? Le groupe, il est vrai, n’est pas bien loin des quarante ans de carrière. Me concernant, j’ai assisté à mon premier concert de Jethro Tull ici même, en 79.

 Premier constat : le père Anderson-chanteur rencontre de vrais problèmes. Son chant est poussif, manque de puissance et ne s’aventure plus du tout ni dans les attaques dures, ni dans les aigus (et ce qui n’arrange rien, c’est qu’il est parfois sous-mixé). L’artiste en est parfaitement conscient et gère clairement son show de façon à s’économiser. Par contre, Anderson flûtiste a bonifié au fil du temps. La flûte est d’ailleurs la vraie vedette de la soirée, tant elle ne quitte plus que rarement les mains du maître, pour le plus grand bonheur des fans. Fidèle à la tradition, l’homme en jouera sur une seule jambe à plusieurs reprises. C’est pourtant à l’harmonica qu’il inaugure son concert, interprétant un vieux blues, seulement accompagné de son vieux complice Martin Barre. Lequel se révèle toujours aussi redoutable à la guitare.

 Jethro Tull pourrait se contenter d’un show très classique et satisfaire facilement son public en alignant ses morceaux les plus connus dans des versions convenues. Mais Anderson a ce très grand mérite de toujours chercher à s’amuser sur scène. C’est pourquoi il propose souvent des versions revisitées de ses standards. Ainsi, ‘Aqualung’ patiente derrière une longue intro décoiffante, ‘Jack in the Green’ ne reconnaît plus son ventre, et même une relique aussi vénérable que « Bourée » n’échappe pas au dépoussiérage. « Thick as a Brick », dans sa version contractée et dynamisée, s’avère quant à lui un des points forts du concert, au même titre que « My God ».

 En bref, Jethro Tull a fourni une prestation tout à fait honorable, énergique et enthousiaste, teintée d’humour british (les claviers sont dissimulés dans un… piano à queue) et d’autodérision. Et après un seul rappel (« Locomotive Breath »), le band a pris congé d’un public ravi !

(Organisation : Live Nation)