OK Panda s’intéresse à la psychiatrie…

Après avoir publié un premier Ep intitulé "Perspectives", fin 2022, qui lui avait permis de fouler des salles comme le Cirque Royal, le Bota ou encore le Belvédère, le quintet bruxellois Ok Panda a sorti son second, "Chasing home", ce 20 février 2024. Dès la…

logo_musiczine

Une lune de nacre éclaire And Also The Trees…

« Mother-of-pearl moon », le nouvel elpee d’And Also The Trees, paraîtra ce 23 février 2024. Nés d'une série d'improvisations à la guitare électrique, de Justin Jones avant et après l'aube, pendant un mois de solitude en 2020, les morceaux se sont ensuite…

Trouver des articles

Suivez-nous !

Facebook Instagram Myspace Myspace

Fil de navigation

concours_200

Se connecter

Nos partenaires

Nos partenaires

Dernier concert - festival

mass_hysteria_ab_12
Manu Chao - Bau-huis

Ozric Tentacles

Les accidents utiles…

Écrit par

Des néo baba cools qui jouent une musique atmosphérique préparée à base de rock, de jazz, de new age, de reggae, de techno, de world et de psychédélisme. Ils aiment le Floyd, Spacemen 3, Yes, Gong et The Orb et accordent une grande importance à l'improvisation. Ils ont multiplié les concerts depuis 1982 ; si bien qu'aujourd'hui, leurs prestations ‘live’ sont absolument stupéfiantes, comme celle accordée au festival de Dour en juillet dernier.

Rencontre avec Ed Wynne, le guitariste, John Egan, le flûtiste, et Joie Hinton, le claviériste, deux heures avant leur set mémorable...

Combien de concerts avez-vous joué depuis ‘Stonehage’, en 1983? (rires)

Ed : Approximativement, une bonne centaine. Peut-être plus!
Joie : Si notre mémoire est bonne!

Est-ce que jouer ‘live’ est un peu votre vie ?

Joie : J'y consacre un tiers de ma vie. La seconde est réservée au studio. Et la troisième à ne pas jouer de la musique. La vie familiale revêt également une certaine importance pour chacun d'entre nous. Même si une partie de mon habitation a été transformée en studio. Un amour de studio d'enregistrement ! Mais nous ne jouons pas 365 jours par an. Voilà la description de mon emploi du temps.

Le clan Ozric Tentacles vit-il en communauté ? Partagez-vous les idées de la génération hippie des seventies ?

Joie : Non, nous ne vivons pas ensemble et ne souhaitons pas fonder une communauté. Nous avons chacun notre chez soi.
Ed : Nous ne partageons pas les idées des hippies et n'essayons pas davantage de les propager auprès de notre public.

Pensez-vous qu'Ozric Tentacles appartient à un monde où le punk n'était rien d'autre qu'un mauvais voyage à l'acide ?

Joie : Effectivement. Pourtant, notre drummer, Merv, a sévi au sein d'un ensemble punk. Mais il avait les cheveux trop longs pour y végéter. Sans quoi je partage totalement ce point de vue.

Zia est impliqué chez Union, alors que Joie et Merv participent aux expérimentations d'Eat Static. Quel est l'intérêt de cette dispersion?

Joie : Le plaisir, l'amusement. Découvrir de nouvelles perspectives sonores.

Est-il exact qu'en public, lorsqu'un musicien commet une erreur, le groupe la répète quatre fois, de manière à marquer un nouveau point de départ pour la suite des événements? Quelle est la part d'improvisation dans votre musique? Vos compositions arrivent-elles par accident?

Joie : Oui, de nombreuses compositions arrivent par accident. Et nous commettons de nombreuses erreurs (rires). Il est exact que lorsque quelqu'un d'entre nous se fourvoie, nous reproduisons quatre fois son erreur pour indiquer une nouvelle orientation musicale à suivre. Une justification pour multiplier les erreurs (rires). Elles sont très utiles, je les affectionne...
Ed : Près de cinquante pour cent de notre musique est improvisé. Nous structurons une base à nos compositions qui se retrouve sur disque. Mais elle doit être susceptible d'être retravaillée. Ce qui nous permet de nous rendre où bon nous semble... Deux à trois titres interprétés ce soir iront certainement dans ce sens...

Les parties vocales sont pratiquement inexistantes dans la musique d'Ozric Tentacles. Pensez-vous que le chant soit un mauvais instrument ? Et pourquoi ?

Ed : Non, pas du tout. La voix est un merveilleux instrument. Mais nous avons opté pour une musique essentiellement instrumentale, parce qu'elle permet de communiquer davantage de feelings. J'aime la voix humaine. Cependant chez la plupart des groupes, je suis incapable de comprendre ce qu'elle exprime. Evidemment, des paroles permettent de soulever des questions sur la vie politique ou les problèmes rencontrés par notre société. Mais ces questions, je préfère me les poser, voire en discuter. Pas m'en servir comme message idéologique. Jon chante un peu sur l'une ou l'autre chanson.
Jon : Oui, quelques mots. Mais ils restent très vagues. Ils servent à la texture musicale, et l'auditeur est libre d'en faire sa propre interprétation.

Ozric Tentacles prône-t-il les vertus du psychédélisme spatial comme le Floyd, Spacemen 3, Gong et Hawkwind ?

Joie : Nous partageons des perspectives similaires. Notamment l'évasion dans l'infini spatial comme chez Pink Floyd, Spacemen 3 et Yes.

Gong n'a-t-il pas exercé une influence majeure sur le groupe ?

Ed : Oui, mais lorsqu'il était au sommet de son art. C'est-à dire lorsque Daevid Allen et Steve Hillage l'administraient. Nous avons surtout absorbé son feeling. Et puis la sonorité très cosmique des guitares.

Qu'est-ce que le psychédélisme pour Ozric Tentacles ? (long silence)

Joie : Quelle est la question?
Ed : Euh! Euh! Euh ! Qu'est ce que le psychédélisme ? Euh! Euh! Euh !...

Une musique pour l'esprit ?

Ed : Oui, pour l'esprit et le corps !

Source d'inspiration ?

Ed : Susceptible de l'être ! Je n'ai jamais abordé ce sujet en profondeur. Personne ne sait réellement ce que le terme psychédélisme veut dire. Si tu le traduis littéralement, tu obtiens ‘couleur de l'esprit’. Une explication comme une autre. Personne n'est jamais parvenu à m'en donner une signification exacte. Certaines formes de drogues sont psychédéliques... Je ne sais pas vraiment... Une forme de musique destinée à pénétrer dans le labyrinthe du subconscient, sans doute.

Oui, mais n'est-ce pas trop dangereux de s'y aventurer ? La folie ne guette-t-elle pas au bout du périple?

Ed : Dangereux ? Peut-être ! C'est fascinant en tous cas. Mais si tu entraînes l'auditeur dans ce voyage étrange, tu dois être sûr qu’il soit confortable. Et choisir le secteur précis à explorer. Ce que nous proposons de lui faire découvrir n'est pas dangereux. Nous ne voulons pas le conduire à la folie, mais simplement l'inviter à ressentir une bonne vibration, le rendre heureux...
Joie : De très étranges questions!

Kevin Ayers estime que la musique psychédélique est devenue pornographique parce qu'elle s'est prostituée au graphisme. Il cite le cas de The Orb, en exemple. Qu'en pensez-vous?

Ed : J'aime beaucoup The Orb. De la musique porno ? Qu'est-ce qu'il sous-entend ? Ce n'est pas mon avis. Nous ne sommes pas du tout sur la même longueur d'ondes. Sensuelle oui, mais certainement pas porno !

La musique d'Ozric Tentacles, c'est une bonne potion pour élaborer les bandes sonores cinématographiques ?

Joie : A une certaine époque, j'ai composé des ‘soundtracks’ pour la télévision. Mais je n'ai jamais eu l'occasion d'en adapter pour le cinéma. J'aimerais vivre cette aventure. Ce serait formidable!

Bernard Dagnies.

Article paru dans le n° 26 du magazine Mofo de septembre 94

 

Oasis

Definitely Maybe

Oasis est occupé de gagner la faveur de toute la jeunesse insulaire. Ils sont jeunes, beaux, ambitieux, impertinents. Et ont déjà hérité du pseudonyme Sex Beatles. Pourtant, dans leur musique, pas question de samplings, de sequencers ou de boîte à rythmes; mais une solution électrique conçue dans la plus pure tradition britannique. Nous vous avions annoncé la couleur lors de la sortie du single "Love Forever". "Definitely Maybe" répond tout à fait à notre attente. Onze hits potentiels qui scellent idéalement le point de rencontre entre la pop et le rock. Onze mélodies contagieuses, amphétaminées par la voix ‘rottenesque’, gémissante de Liam Gallagher et transcendées par les cordes de guitares crépitantes, acérées, soniques de son frère Noël. Onze chansons qui réverbèrent les échos les plus vulnérables des Fab Four, des Stones, Pistols, Smiths, T Rex, Mondays, Crazy Horse et puis surtout des Stone Roses, auxquels ils n'auront guère de difficultés à se substituer depuis que cet autre ensemble mancunien brille par son silence. Et n'imaginez surtout pas qu'Oasis risque de souffrir du même syndrome, puisque apparemment Liam compose comme il respire. Epatant!

 

The Ramones

Pourquoi voudrais-tu qu’on change?

Écrit par

Il y a vingt ans que les Ramones nous la ramènent courte, fun, joviale et bruyante. Vingt ans que ces faux frères nous donnent une leçon de punk-rock à la fois minimaliste et absolu. Vingt ans qu'ils nous font comprendre qu'avec peu on peut faire beaucoup, qu'avec juste de l'énergie à revendre on peut bâtir un rock monumental. C'est vrai, le statut des Ramones, aujourd'hui, n'est plus, paradoxalement, celui de l'époque "End Of The Century". Mais il est clair que ce groupe restera ‘quelque part’, une formation essentielle. Johnny Ramone, en tout cas, n’imagine pas le rock sans eux…

On est vraiment un prototype de groupe rock. Tu nous mets sur une scène avec nos guitares, une batterie et Joey, et on te donne une définition du vrai rock. Sniff. Cela, le public le comprendra toujours. Merde, si ce groupe est là depuis deux décennies, c'est pas pour nos beaux yeux uniquement! Je regrette mais toute cette musique ‘fusion’, c'est pas du rock’n'roll. Le rock c'est de l'excitation, pas des trucs tellement tortueux que tu es même incapable de suivre la mélodie.

En vingt ans d'existence, vous n'avez que fort peu modifié vos batteries et...

Pour quoi faire? Que veux-tu changer quand tu fais vraiment ce que tu aimes? Pourquoi tout remettre en question quand tu joues la musique que tu ressens et que le plaisir pris est partagé par le public? Faut pas se compliquer la vie, mec, nous on est vachement heureux ainsi. Sniff.

Pourquoi Dee Dee a-t-il quitté le groupe et joue-t-il désormais en solo?

Je n’ai pas encore compris. Les autres non plus d'ailleurs. Dee De a complètement bouleversé sa vie. Il a quitté sa femme et on peut dire que dans la foulée il a quitté le groupe. Il avait des tas de problèmes ; note, Dee Dee, s'il se met à boire ou à fumer, il devient vraiment dur à suivre. Normalement, il est clean maintenant.

Son apport au niveau du travail d'écriture des morceaux était important. Comment comptez-vous vous y prendre, sans lui?

Dee Dee va toujours écrire des chansons pour les Ramones. Sniff. Qu'est-ce que tu veux? Il sait bien qu'il gagnera toujours plus d'argent en écrivant pour nous que pour lui tout seul.

Tu es un type riche, toi?

Je pourrais en tout cas sans problème terminer aujourd'hui ma carrière au sein du groupe et vivre de mes rentes, sur le même ton, jusqu'à la fin de ma vie, auprès de ma famille. Mais bon, je n'ai pas des goûts de luxe, non plus. J'ai juste une âme de collectionneur. Je collectionne des tas de trucs, notamment des trucs Disney, j'adore ça!

Il y a quelques mois, vous avez publié "Acid Eaters", un CD sur lequel vous avez commis des reprises de classiques de groupes comme les Who, les Troggs, les Beach Boys, les Stones... Pourquoi ce projet?

C'est parti un peu par hasard. Sniff. Durant l’été de l’année dernière, on a enregistré trois de ces reprises destinées uniquement à un Ep. Le résultat était tellement bon qu'on nous a demandé d'en faire d'autres pour sortir un CD complet. L’expérience nous a amusés et on l'a réalisée.

Comment avez-vous choisi les chansons que vous alliez adapter? Selon quels critères?

Au départ, on imaginait qu'on allait surtout reprendre des titres sortis originellement entre 66 et 68 parce qu'on estimait que c'était une époque formidable pour la musique. Puis, c'est vrai, on a un peu débordé mais on a juste choisi au feeling. Si on avait envie, on prenait et on a retenu le meilleur de ce qu'on a interprété. Sniff. Il fallait aussi que les chansons se prêtent à notre manière de les jouer, bien évidemment.

Kiss a lui-même organisé une série de reprises de ses chansons par d'autres et un CD basé sur ce schéma vient de sortir ("Kiss My Ass"). Tu imaginerais faire la même chose avec des compositions des Ramones?

Un album est sorti aux States. Il s'intitule "The Gabba Gabba Hey" et réunit une vingtaine de formations qui ont joué nos compos ; mais nous n'avions pas organisé ça nous-mêmes. Il s'agissait d'un truc un peu ‘low budget’ impliquant des groupes pas trop connus, tu vois? Le projet de Kiss est différent. Mais tu imagines, toi, une version funk-pop de "Sheena is A Punk Rocker"?

Pas vraiment, non. J'ai entendu dire que vous aviez demandé à Ted Nugent d'enregistrer avec vous?

Ouais, mais son label n'a pas arrêté de tout faire pour que ça ne marche pas! C'est nul. On aimerait bien aussi recevoir le concours d’un mec comme Pete Townsend sur un de nos albums. C'est gens-là sont aussi vrais que nous. Sniff.

Si demain les Ramones se séparent, que fais-tu ?

Rien

Comment ça ‘rien’?

Oui. Je reste chez moi, je vis dans ma famille et auprès de mes potes, mais je ne monte pas un autre groupe et je ne rentre pas au sein d’une autre formation. Je serais incapable de faire ça. J'ai pris un trop grand pied au sein de cette aventure –et ça continue– pour pouvoir assumer autre chose. Je jouerais des trucs pour moi.

(Article paru dans le n°25 du magazine Mofo de juillet 1994)

 

Beastie Boys

Des garnements, pas des malades…

Écrit par

Il ne vous est jamais arrivé, quand vous étiez gosses, d'avoir envie d'enquiquiner votre vieille voisine? De lui improviser un petit concerto pour cymbales à l’aide de deux couvercles de casseroles piqués à maman? Eh bien, les Beastie Boys, c'est un peu ça! Trois freluquets insolents auprès desquels ‘on’ a eu le malheur de laisser traîner des instruments de musique... Résultat, "Ill Communication", leur dernier album en date, décline une fois de plus le mot ‘boucan’ à toutes les sauces.

Causez-leur de rap, de hip-hop, voire de hardcore, soit. Mais surtout ne vous laissez pas aller à évoquer ce que ce genre de musique pourrait véhiculer comme message à caractère social. Le premier qui prétend être resté sérieux en compagnie des Beastie Bovs plus de cinq minutes, on l’enferme avec le dernier 2 Uillimited en bruit de fond. D’accord, ils ne repeignent plus aussi souvent que dans le passé, leurs chambres d’hôtels avec la confiture du petit déj’. Mais au naturel, les Boys sont restés de vrais garnements. Répondant à côté des questions qu’on leur pose quand ils ne vous lâchent pas un ‘you see what I mean’ laconique. Vous regardant droit dans les yeux lorsqu’ils vous accordent une réponse supposée philosophique, histoire de voir après combien de temps vous aller tenir avant de succomber au fou-rire. Bref, rencontrer ces trois zozos-là, c’est comme esquinter du pain frais avec du beurre même pas frigotartinable ! On en veut pour preuve les réflexions de Mike D, alias Michael Diamond, balancées entre deux dégustations de pralines ! Des chocolats, quoi… Affublé d’un sweat et d’un pantalon vert dans lequel on aurait pu tenir à l’aise à trois, notre homme venait de se prêter à une petite sessions-photos, sous l’objectif attentif d’une mignonne photographe. Visiblement, il en aurait fallu plus pour faire un ange d’un Beastie Boys, en tournée de promotion !

C'est con, un violon?

Vous n'avez pas dû trop insister pour qu'on vende votre nouvel album en y appliquant l'autocollant ‘Parental Advisory’.

Ce n’est pas la première fois que cette aventure nous arrive! Tous nos disques ont été rangés ‘Parental Advisory’, sauf "Licence To Ill", qui est sorti avant qu'on ne développe cette merveilleuse pratique. Tout ca, c'est très con. Et en plus, chez vous, l'autocollant est presque aussi grand que le CD. Aux States au moins, il est de petite taille !

Pourtant, vous vous y permettez quelques prouesses artistiques, comme de jolis instrumentaux ou l'utilisation d'un violon...

Sur "Eugene's Lament", juste! Bah, c'est surtout parce qu'Eugene aime bien emporter son violon en studio. A force de l'entendre, on l'a autorisé à en jouer sur un morceau. C'est fun, d'insérer des trucs qui ne collent pas vraiment à notre image. Mais ne va surtout pas t'imaginer que c'est pour faire comprendre aux gens qu'on sait aussi utiliser de vrais instruments de musique.

Idem pour la flûte sur "Flute Loop"?

Si tu veux... Sauf que là, c'est samplé d'un truc qui s'appelle "Flute Thing", d'Al Kooper.

Il vous est déjà arrivé de respecter un artiste au point de vous jurer de ne jamais le sampler?

C'est intéressant, cette question à propos du sampling. Il y a toujours eu deux écoles... Ceux qui associent sampling et pillage. Et puis, les autres. Nous, peut-être… A l’aide d’un bon sampling, tu peux réaliser un bon morceau. Même si le disque dont tu le tires est très nul, tu vois? Le sampling, c'est quelque chose que tu peux utiliser à l'infini; rien que sur un titre, tu peux faire des tonnes de repiquages. Nous, on trouve cette méthode très créative.

Premier album: "Licensed To Ill; dernier album en date: "Ill Communication". La maladie, c'est quelque chose qui vous branche?

Allons bon, la maladie, vingtième édition! Mais non, pas plus qu'autre chose. Je ne crois pas qu'il faille voir un rapport entre ces deux titres. "Licence To ill", c'était juste un disque de mecs un peu sauvages qui avaient envie de se défouler. "Ill Communication", c'est surtout parce qu'on a l'impression que la plupart des titres de ce disque sont exécutés par des types bizarres. Malades? Je ne sais pas, peut-être juste de mauvais poil…

Mon chien vit à L.A.

Justement, "Ill Communication" commence sur un mode plutôt rageur; ça vous arrive d'avoir la rage?

Oh tu sais... Nous faisons pas mal de bruit, nous créons du bruit même, et on n'essaye pas toujours de le maîtriser. Le volume à fond, du fun avant tout! Ce n'est pas très revendicatif, pas vraiment enragé.

Dans de précédentes interviews, vous répétiez que vos textes, finalement, importaient peu...

C'est vrai, et je ne reviendrai pas sur le sujet. Je crois que les textes ne sont pas tellement importants. Nos albums et nos concerts, c'est plutôt une question de sentiments. Tiens, t'as envie de décrire un micro? Et paf, on y va, on improvise. C'est notre recette.

Irions-nous jusqu'à dire que pour des rappeurs comme vous, la ‘rue’, ce n'est pas capital?

La rue, en général, ce n'est pas vraiment notre monde. Nous sommes plus souvent en studio, entouré d’une bande de potes. Et puis, on partage notre temps entre New York et Los Angeles. Si tu veux tout savoir, personnellement, j'ai 28 ans et je crois que je suis marié. Je vis à New York, mais j'ai un appart' à Silverlake, L.A. Et mon chien vit à L.A. ; donc je suis peut-être un peu plus souvent là-bas, même si je retourne souvent à New York... En fait, c’est à New York que tout se  passe, ce qui nous inspire forcément beaucoup plus. Los Angeles est devenue une ville terriblement chiante.

C'est quoi les Beastie Boys en studio? Un bordel monstre, une salle d'études?

Comme tout le reste: fun! Mais mesuré! Je me rends de plus en plus compte que nous avons beaucoup de chance de disposer d’un studio dans les collines d'Hollywood. Je veux qu'on en profite et surtout qu'on nous évite de courir partout à la recherche d’un autre à louer, là où tu dois respecter des horaires et tout et tout. En plus, tu en connais beaucoup des studios où tu peux également jouer au basket et pratiquer le skate? Dans le nôtre, on peut ! Au fait, tu sais qu'au milieu de tous tes papiers, là, t'as vraiment l'air d’un architecte emmêlé dans ses plans? Perso, si je n'avais pas fait de la musique, c'est un job que j’aurais voulu exercer, architecte. Tu me vois, occupé dessiner de superbes immeubles ? A Bruxelles, vous êtes gâtés, c'est une ville superbe, vraiment!

Vous avez désormais votre propre label ainsi que ce studio, et vous avez tout baptisé du nom de ‘Grand Royal’. Dans le but de lui attribuer de multiples significations?

Oui, oui! Grand Royal, c'est aussi un fanzine qui parle de tout ce à quoi nous nous intéressons. Et puis aussi de tout ce à quoi s'intéressent les gens qui nous entourent. Des rubriques fringues jusqu'aux critiques de disques. Nous expliquons par exemple quels disques il faut écouter, et ceux qu'il vaut mieux virer à la poubelle. On parle éventuellement de ceux qui ont une belle pochette, mais si le contenu est nul; tu penses, on n'hésite pas à le dire. Qu'est-ce qu'il y a d'autre dans ‘Grand Royal’? Ah oui, des articles de fond, de billets d'humeur, et même des recettes de cuisine !

Pieds nus, avec du velours!

Quand vous n'êtes pas derrière les fourneaux, vous vous battez toujours pour avoir le droit de faire la fête?

Pour faire la fête? On ne demande la permission à personne! Disons qu'on se battrait plutôt pour enregistrer des disques.

Au fait, qu’est-ce qu’une fête réussie chez les Beastie Boys?

Aaah (l'œil droit se transforme en clignoteur)! D'abord, une bonne sono, avec un système qui te rend bien les basses, tu vois. Quelque chose qui pulse. Après, un excellent DJ, qui t'envoie des disques sans blanc entre les morceaux. L'endroit aussi, c'est hyper important. Je rêve d'un truc à la japonaise, où on laisserait ses chaussures à l'entrée, comme dans les restos. A l'intérieur, rien que des décors doux pour l'œil, genre du velours ou quelque chose du style. Une ventilation efficace, c'est capital! En général, dans toutes les boîtes, ça déconne ou alors, il n'y en a pas. Et en sortant, tu pues la clope, c'est dégueulasse! Ce qu'il faut aussi, c'est une ‘chill out room’, tu vois, un endroit où la musique est plus cool où tu peux aller te relaxer. Voilà, quand t'as tout ça sous la main, la fête peut commencer…

La fête en question, c’était le 15 juin dernier, à la Luna, qu’elle s’est déroulée. Sold out! Assistés d'un Dj, d'un percussionniste et d'un claviériste, nos trois chérubins s'en sont donnés à cœur joie. Braillards à souhait, fous furieux derrière leurs instruments, l'heure et demie de Mike, MCA et Ad Rock a débouché sur un délire le plus complet. Leur rap hardcore incendiaire a fait valser le public par vagues entières, du frontstage jusqu'au bar. Et si les stagedivers sont restés étrangement calmes, on a assisté certainement à un des meilleurs concerts pour couvercles de casseroles entendu depuis bien longtemps. Peut-être juste un poil moins fort que le nouvel album sur lequel les plages s'enfilent sans temps mort; sur scène, des blancs, il y en a eu deux ou trois, à chaque fois que le trio passait de la formule ‘avec instruments’ à celle ‘juste les platines’. Le set aurait donc pu être encore plus dense. Rien que d'y penser, on frissonne! Mais pour bien faire piger au public qu'en fin de compte, les enquiquineurs, ce sont eux, ils ont quand même gardé "Fight For Your Right" pour une autre fois. Bande de petits salopiauds!

Article paru dans le n°25 de juillet 94 du Magazine Mofo

 

Saint Etienne

Etaler sa tête sur une pochette, c’est ridicule…

Écrit par

Expérience pour le moins inhabituelle, l'interview de Saint Etienne s'est déroulée pendant le soundcheck. En effet, ni Pete Wiggs qui répondait à nos questions, ni Bob Stanley n'y participaient. Pour ce dernier, c'est normal, il n'est même pas sur scène pendant le concert auquel il assiste en tant que spectateur. Donc, sur fond de musique de Saint Etienne (la voix de Sarah Cracknell est quand même présente), on parle du dernier album, "Tiger Bay".

Sur cet album, contrairement aux précédents, les titres s'enchaînent sans transition ‘parlée’. Pourquoi?

Pete: On aimait cette formule, car elle possède un petit côté ‘soundtrack’ qui liait les morceaux entre eux et donnait une certaine unité à l'album. Elle contribuait à former des images dans la tête de celui qui écoute le disque. On n’y a pas eu recours, cette fois, parce qu'on cherchait quelque chose de différent, mais aussi parce que ça coûte affreusement cher en ‘royalties’. Pour la circonstance, on a utilisé un grand orchestre et il nous a coûté moins cher.

Sur ''Tiger Bay", figurent des chansons plus soul, assez mélancoliques...

C'est un album plus diversifié que les précédents. C'est une volonté qui était présente dès l'écriture. On ne voulait plus seulement balancer des mélodies répétitives sur des beats dance. Les textes sont devenus plus désenchantés. Des histoires d'amour tristes (rires). Quand j’écris des textes, je deviens curieusement d’humeur mélancolique...

Il y a eu peu de temps entre la sortie de ''Tiger Bay" et celle de "So Tough". Explication?

Oui, mais on a quand même enregistré des singles inédits et une chanson de Noël en compagnie de Tim Burgess des Charlatans. Il faut dire qu'on aime beaucoup notre studio. Son confort nous manque assez vite. On devient malades (rires). C'est un petit local dans lequel on travaille toujours ; il est aussi grand qu'une chambre à coucher. Et on bosse constamment sous la houlette du même ingénieur. Enfin, on n'aime pas de trop longs temps morts entre les sorties.

Le studio, c'est votre labo?

En quelque sorte. On aime essayer d'écrire la chanson pop parfaite qui sera numéro 1. Mais quand on travaille dessus, elle se transforme tellement. C'est la raison pour laquelle, je pense, qu'on n'a jamais décroché de gros hit, alors que certaines chansons pourraient l'être, si elles étaient enregistrées différemment. En définitive, on finit toujours par faire ce qu'on aurait envie d'entendre plutôt que ce qui permettrait de vendre. Dans les chansons les plus commerciales, à priori, il existe toujours un élément qui les empêche de l'être vraiment (rires).

J'aime bien Kylie

Il y a toujours le risque de devenir vulgaire, de sonner comme Kylie Minogue, non?

J'aime bien Kylie Minogue. Vraiment (rires). Quand on l’avoue, les gens ne parviennent jamais à savoir si on est sérieux. Mais on est toujours sérieux quand il s'agit de musique. Et si on a une occasion de travailler avec elle, on la saisit. Parce que c'est marrant. On ne pense pas aux conséquences.

"Pale Movie", de ce point de vue, est très ‘limite’.

Oui (rires). Cette chanson a été un enfer à mixer. Ces guitares flamencos... En plus, elle change constamment de mesure.

Que penses-tu des Pet Shop Boys ?

Je les aime beaucoup. "Behaviour" est un grand album. Nous sommes souvent comparés à cause de la dimension ironique. Pourtant, on n’enregistre jamais de disques avec ironie! Aussi parce que Bob, comme Neil Tennant, a été journaliste ; ce qui nous rend suspects. On nous reproche de trop bien connaître le milieu... Et je ne suis même pas sûr que les Pet Shop Boys soient ironiques. Une chanson comme "Being Boring" ne peut pas l'être, elle est trop forte pour ça. Et je crois qu'ils ont été terriblement déçus qu’elle n’ait pas récolté beaucoup de succès, car elle était très personnelle.

Et Pulp?

Ils sont très bons. Ils commencent à vraiment marcher, non? C'est fou de penser qu'ils sont arrivés à ce stade. Jarvis est quelqu'un qui pourrait tomber dans le ridicule s'il n'était si ‘cool’, si drôle.

New Order?

J'ai été très fan, aux débuts. Et de Joy Division. C'est extraordinaire la manière dont ils ont évolué. Depuis le groupe aux guitares un peu sinistres jusqu'à cette pop. Et puis, leurs pochettes sont fantastiques. Celles de Factory nous ont sûrement beaucoup influencés. On prend des illustrations qui nous plaisent sans qu'elles aient besoin de se raccrocher au contenu du disque. Pour celui de Noël, on avait choisi d’illustrer la pochette par l’image d’une vache. Aucun rapport avec Noël (rires). C’est ridicule d'étaler nos têtes sur les pochettes. Quel intérêt? En France, c’est souvent le cas. Egalement aux Etats-Unis. Là-bas, nos singles paraissent généralement avec nos tronches dessus. Même chose pour "Tiger Bay". C’est terrible! (rires)

Vous vous faites remixer en même temps que vous remixez d'autres artistes...

Ce qui est amusant quand on remixe les autres, c'est qu’il y a également un travail d'écriture, d'une certaine manière, puisqu'on peut atteindre un résultat très différent de l'original Tu as une vision très générale de la chanson et tu en donnes ton interprétation personnelle. On écoute quelquefois le morceau et on sélectionne un extrait dont on trouve qu'il conviendrait comme sample. Pour "Rodney King" des Boo Radleys, on a samplé le passage qu'on voulait et on en a fait une boucle. Et au fur et à mesure qu'on y travaille, on déniche d'autres idées pour emmener la chanson encore plus loin que l’originelle. Au final, ce n'est plus vraiment les Boo Radleys mais ce n'est pas Saint Etienne non plus. C’est assez étrange. Se faire remixer est très excitant aussi. Et puis surtout entendre ce que d'autres vont faire de ta chanson! !

Article paru dans le n°25 de juillet 94 du Magazine Mofo

Violent Femmes

Faire partie de l’histoire du rock n’ roll.

Le trio de Milwaukee (Wisconsin) est de retour, après de longs palabres contractuels qui ont failli tuer le groupe. Les Violent Femmes, dont Moe Tucker n'a pas hésité à dire qu'ils étaient les Velvet Underground d'aujourd'hui, ont perdu leur batteur original. Le nouveau chapitre commence par un "New Times" étonnamment bien titré...

- Nouveau batteur, nouveau label, nouvel album qui s'appelle "New Times": ça fait beaucoup de nouveautés, non?

Gordon Gano : C’est surtout notre nouveau contrat qui est important à nos yeux ; le nouveau batteur représente un nouveau tiers dans le groupe, mais ce remaniement s’est opéré le plus naturellement du monde. "New times" fait évidemment référence à tous ces changements ; mais bon, le titre est très sobre, très simple, en deux syllabes, pas d’hésitation. Dans le passé nous avions parfois choisi des titres compliqués comme "The Blind leading the naked" ou "Why do birds sing ? ". C'était plus coloré, mais était-ce nécessairement meilleur ?

- Slash, votre ancien label, ne voulait plus de vous?

GG : C’est plus compliqué que tu ne penses ! Non seulement, ils ne nous aimaient plus, mais ils nous empêchaient de sortir des disques ailleurs. Donc, il y a un moment où c'est devenu d'interminables discussions d'avocats… Ce qui a mis forcément notre carrière entre parenthèses. En fait, je crois que chez Slash, ils n’ont jamais vraiment apprécié notre musique. La preuve: ils nous demandaient constamment des reprises ; ils voulaient toujours que nous sonnions comme un autre groupe. Ils ont toujours voulu que nous imitions les artistes les plus populaires. Dans les derniers moments, ils voulaient faire de nous des clones de REM...

- Les Violents Femmes ne vendaient pas assez à leurs yeux?

GG : En fait, nous vendions trop pour qu’ils se débarrassent de nous sans autre forme de procès ; mais pas assez pour qu'ils soient contents ! Très étrange. Nos rapports ont, de toute façon, toujours été conflictuels. Aujourd'hui, nous avons signé un bien meilleur contrat chez Elektra. La situation est claire: on leur donne un produit fini, c'est inscrit noir sur blanc.

- C'est pour mettre un terme à votre collaboration qu’est sortie cette compilation, « Add it up (1981-1993) » ?

GG : Une très bonne chose pour nous. Nous étions absents (pour les raisons contractuelles expliquées plus haut) depuis un bon moment quand elle est sortie, et on nous a laissé choisir le programme… Nous avons notamment inclus ce message sur le répondeur téléphonique que j’avais laissé à Brian et Victor. C’était juste avant l'enregistrement de notre première démo: mes parents m'avaient enfermé chez moi! Mais c'était par mégarde, il n'y avait, chez eux, aucune intention méchante... Enfin bon, elle est chouette cette compilation ; et elle a mis un terme à la première époque du groupe, celle avec Victor Di Lorenzo, comme batteur.

- La question est inévitable: pourquoi le départ de Victor?

GG : Il voulait se consacrer à autre chose. Les Femmes, c'était devenu ennuyeux pour lui. Au sein de la formation, on a toujours été libres. Chacun d'entre nous a eu la possibilité de réaliser un ou plusieurs albums solo ; mais la préoccupation majeure devait rester le groupe! Depuis un certain temps, notre projet commun lui pesait visiblement. Pas grand-chose à dire d'autre : il n'y a pas une explication rationnelle à ce départ. Aujourd'hui, nous parlons d'une séparation amicale ; mais il y a eu, je ne le cache pas, beaucoup de problèmes avec Victor, à la fin : des problèmes personnels, professionnels et musicaux. Il est parti ; mais je ne dis pas non plus que nous ne l'avons pas aussi un peu poussé dehors.

- Le nouveau, Guy Hoffman, comment l'avez-vous recruté ?

GG : On le connaît depuis bien longtemps. Depuis 1979, peut-être ? Bien avant que les Violent Femmes se forment en tous cas. A l'époque, Guy était dans le band le plus populaire de Milwaukee: les Oyal Tasters. Raison principale pour laquelle il n'a pas été notre batteur... Si les événements avaient été un peu différents, il aurait pu l'être dès le début! Je me souviens que Brian et moi, on s'était dit: ‘Comme batteur, ce sera Victor ou Guy’. Il n'y avait que ces deux-là pour jouer notre genre de musique.

- Comment lui avez-vous demandé de vous rejoindre ?

GG : C'est Brian qui s'en est chargé. A Milwaukee, on est des petites stars locales ; ce n'est que là qu'on nous voit à la une des journaux, à côté du président (rires)... Donc, on ne voulait pas passer une petite annonce. On a simplement demandé à Guy de faire un essai, sans parler à qui que ce soit de cette démarche. Nous voulions que tout soit réglé légalement avec Victor. Pour qu'on n’ait pas d'emmerdes après ; parce qu'on avait déjà eu notre compte avec Slash. Tout de suite, ça a collé. Guy fait partie de la même génération. On a grandi à la même époque. On a fait partie de la même scène, celle née directement après le punk. On a aussi un peu le même trajet. Bref, un tas de points communs... Et puis, il connaît l'histoire des Violents Femmes et nos anciennes chansons ; sans oublier qu’il avait déjà joué avec nous à plusieurs reprises. On ne se perd pas en explications pendant les répétitions, quoi !

- Vous teniez absolument à continuer en trio

GG : On a expérimenté une formule à quatre, juste avant d’enregistrer "Why do birds sing?". On avait recruté un percussionniste. C'était intéressant ! Mais plutôt que d'apporter un plus, on avait l'impression de perdre quelque chose en chemin…

- Quand ils parlent de vous, les journalistes font continuellement référence à votre premier opus, sorti en 1982. Pourquoi?

GG : Beaucoup s’y réfèrent, c'est vrai. Notre premier album a connu un succès phénoménal, incroyable. C’est un classique, une sorte de "Dark Side of the moon" alternatif! Le disque de Pink Floyd a été classé dans les charts pendant des années, c'est peut-être encore le cas maintenant. Notre premier album n'y est jamais entré ! Pourtant, il s'est vendu avec une régularité fantastique: on en a écoulé près de deux millions de copies ! A ce titre, c'est le tout premier de l'histoire à devenir ‘disque de platine’ avant d'entrer dans le Top 200 du Billboard. Sans précédent, et à l'encontre de toutes les lois du business.

- Cet elpee est, dit-on, l'‘expression ultime de l'adolescence’... Penses-tu qu'en quelque sorte, il passera à la postérité?

GG : Personnellement, je pense que c'est un classique, mais tout le monde n'est pas de mon avis. Le Rolling Stones Magazine ne l'a pas classé parmi les 100 albums les plus importants des années 80. Je crois que c’est une erreur. Malheureusement, rien ne dit que ce n'est pas moi qui me fous le doigt dans l'œil... Alors, si tu pouvais continuer à l'utiliser comme référence dans tes articles, ce serait chouette (rires). Les Violent Femmes veulent faire partie de l'histoire du rock'n'roll. Aucune discussion.

(Article paru dans le n° 25 de juillet 94 du Magazine Mofo.)

The Fleshtones

Nous préférons être un groupe-culte que rien du tout...

Écrit par

Les Fleshtones, c’est l’archétype du garage band. Inspiré à l’origine par le rock des Yardbirds, Count Five, Sam the Sham & the Pharaohs, Question Mark & The Mysterians, Suicide et par le rhythm’n blues coloration ‘stax’, les Fleshtones voient le jour en 1976, et vont s’imposer comme un des meilleurs groupes de scène, réputation qui leur vaut aujourd’hui un véritable culte. Et si leur 8ème album (« Forever Fleshtones ») se révèle moins crade et moins speedé, leurs qualités scéniques sont demeurées intactes. Le quatuor au grand complet avait voulu participer à cette interview. Ambiance…

Le fait que vous avez décidé de former le groupe parce que vous estimiez que la musique diffusée aux ‘parties’ n’était pas à votre goût, c’est une légende ?

Peter Zaremba : C’est exact ! Il n’y avait pas assez de bons vieux disques comme ceux de Lightnin’ Slim ou d’Iggy Pop. Alors on a pensé que ce serait bien de combler cette lacune. C’était avant que les Ramones ne commencent leur carrière…

Vous auriez voulu vivre les ‘sixties’ ?

P.Z. : Pour nous, il n’est pas important de retourner en arrière. Nous apprécions cette musique. Elle est excellente, excitante, mais bon, ça ne justifie pas d’avoir des regrets de ce type.

A ses débuts, les Fleshtones étaient comparés aux Barracudas. Vous connaissiez ce groupe ?

Bill Milhizer : Oui, mais les Barracudas n’existaient pas (rires). Au début, les Barracudas étaient comparés aux Fleshtones… Mais c’était quand même un bon groupe.

Huit albums sur cinq labels différents : les Fleshtones cherchent à concurrencer les Cramps ?

B.M. : Les Cramps n’ont pas les mêmes objectifs que nous. Ce qui nous est arrivé est accidentel. Aujourd’hui, nous sommes stabilisés. Nous venons d’enregistrer notre deuxième album pour Danceteria. Et c’est un record pour les Fleshtones ! Nous ne voulons plus vivre dans l’incertitude. Adopter le régime des Cramps doit être terrible. Pourquoi parles-tu des Cramps ?

Parce qu’il y a chez les deux groupes la même exploration des genres musicaux, le même esprit des adaptations, et le respect d’un style bien défini, pas une mode.

Keith Streng : C’est heureux que les Cramps existent. Un grand groupe ! Mais entre nous, il n’y a jamais eu de compétition. Nous avons même appartenu au même label.

P.Z. : Les Cramps sont nos amis depuis très longtemps. Nous avons travaillé ensemble pour la ‘Copeland Family’. Depuis cette époque, nous nous sommes liés d’amitié. Mais c’est vrai, et amusant aussi, qu’à l’origine, nous avions les mêmes sources d’inspiration.

K.S. : Alan Vega a également été important pour nous. N’oublie pas de le mentionner. Parce que Suicide fait partie de nos racines musicales…

Ne pensez-vous pas que « Roman God », enregistré en 81, reste à ce jour, le meilleur album des Fleshtones ?

K.S. : Non, ce n’est pas le meilleur. Mais probablement le plus important : il nous a permis de sortir de notre coquille. En Europe, et en particulièrement en France, il a coïncidé avec notre première tournée.

En devenant un groupe-culte, n’avez-vous pas l’impression, quelque part d’avoir un peu vieilli ?

Ken Fox : La vie, c’est la vie. Je en crois pas qu’un groupe-culte vieillisse plus qu’un autre. Nous préférons, de toutes manières, être un groupe-culte que rien du tout.

B.M. : C’est très bien un culte !

K.F. : Je ne suis pas fâché lorsqu’on nous dit qu’on vieillit, mais bien que notre culte vieillisse !

Dans le domaine du rythm’n blues et du garage, ne partagiez-vous pas, à l’origine, les mêmes idées que les Stranglers ?

P.Z. : Je n’ai jamais très bien compris les idées des Stranglers ; et encore moins leurs idéaux. Une véritable énigme. C’est le groupe le plus étrange qui ait existé. Un groupe mystérieux, obscur, qui n’a jamais exploré que son propre univers. Je les respecte. Ils sont apparus à la même époque que les Cramps et les Fleshtones. Et je pense que nous nous ressemblons tous dans nos différences. Chaque groupe est difficile à catégoriser. Ceux qui pensent pouvoir y parvenir, n’ont rien compris.

Etes-vous des collectionneurs de compilations ‘Peebles’ ou de vieux 45 tours ‘Stax’ ?

P.Z. : Non, je possède un bel éventail de disques et de 45 tours originaux, mais je ne suis pas un collectionneur.

K.F. : Lorsque tu es impliqué dans la musique jusqu’au cou, il est très difficile de te constituer une collection. Tu n’as pas suffisamment de temps pour fréquenter les boutiques de disques. Myriam Lennox des Cramps y parvenait, mais avec d’énormes difficultés.

« Forever Flesthones » a été produit par Peter Buck. Peter et Mike (NDR : Mills) jouent également sur le disque. Inévitablement, on ressent le feeling soft pop de REM dans les compositions. Ca ne vous a pas trop gênés ?

K.S. : Si !

P.Z. : Non (rires). Tu sais, nous avons élaboré le corps de la musique avant de rentrer en studio. Et à l’origine, il était plus doux !

K.F. : C’était inévitable ! Au sein d’une communauté aussi restreinte, si tu veux ajouter un peu de claviers, tu appelles Mike, et il rapplique sur-le-champ.

P.Z. : Le studio, c’est un peu sa vie.

B.M. : Peter Buck est un producteur formidable. Le meilleur que nous ayons eu depuis David Faulkner !

P.Z. : Mais son style est plus direct, alors que chez David, il est plus hermétique. David fait également très bien son job, mais il est plus strict. Peter est un type plus instantané. Il est du Sud. Très relax. L’album transpire cette tranquillité. Peter s’est investi à fond. Nous lui sommes très reconnaissants du fruit de son travail.

Vous êtes allés à Athens pour l’enregistrer ?

En chœur : De très, très, très nombreuses fois.

K.F. : Cet endroit était devenu notre seconde résidence.

P.Z. : il y avait même au bar, une banderole à notre attention : ‘Bienvenue aux Fleshtones à Athens !’ (rires)

Vous vivez toujours à New York ?

P.Z. : Absolument ! Mais pour l’enregistrement de « Forever Fleshtones », nous avons plus vécu à Athens qu’à New York…

Maganapop est également de cette région.

P.Z. : Peter, Mike et tous leurs amis ne jurent plus que par Magnapop. Nous on veut bien, mais à la fin, ça devenait vraiment de l’intox…

K.S. : S’il te plaît, ne nous cause plus de Magnapop aujourd’hui. (rires)

Vous êtes de grands fanas de musique australienne, paraît-il ?

P.Z. : Absolument !

K.F. : Hoodoo Gurus, Saints, Birthday Party, etc.

Died Pretty?

PZ. : Oui, mais ne mentionne pas notre nom si tu les rencontres. Lors d’une tournée en Australie, à Sydney, Ron Peno était tellement bourré qu’il a commencé à nous chercher misère. On s’est énervés, et puis on s’est tapé sur la gueule…

K.F. : Notre formation préférée est sans doute les Hoodoo Gurus. C’est le groupe le plus ‘groovy’ de la terre, etc., etc.

La wold cup aux States, ça vous intéresse ?

B.M. : (probablement distrait, il se lance dans une longue tirade sur l’organisation du festival anniversaire de Woodstock qui se déroulera en août prochain)

P.Z. : Hey Bill, c’est de la world cup de foot qu’on parle, pas de Woodstock ! (fou rire général)

B.M. : Ah… lorsqu’il y a une rencontre aux States, les gens semblent intéressés. Mais le lendemain, plus personne n’en parle. Ils reprochent au football de ne pas être suffisamment spectaculaire. Moi je préfère le base-ball.

P.Z. : La vérité est que les médias n’accordent pas l’importance voulue à ce sport. Pourtant, le soccer a aujourd’hui des structures qui n’existaient pas il y a dix ou vingt ans. On le pratique aujourd’hui dans le secondaire et les universités. Il existe un championnat. Et je pense qu’après la coupe du monde, les médias vont se rendre compte qu’il y a de l’argent à gagner en le popularisant. Ce sera le véritable déclic…

 
Interview parue dans le n°25 (juillet 94) du magazine Mofo.

 

Pulp

His´ N´ Hers

Fondé au tout début des eighties, Pulp ne s'est jamais tellement montré prolifique. A ce jour, il n'a toujours gravé qu'une poignée de singles et quatre elpees y compris "His' n' Hers". En fait, le groupe insulaire (Sheffield) n'a pris son véritable envol qu'en 1991. Soit après avoir recruté la claviériste Candida Doyle. Le quintet enregistre alors, dans la foulée, trois singles puis un opus qui ne sortira cependant qu'en juin 92. Mais libéré du joug velvetien, ces disques vont enfin permettre à la formation de sortir de l'anonymat. Aujourd'hui, Pulp nous revient avec un nouvel album, "His'N'Hers", une œuvre qui devrait bénéficier de l'engouement provoqué par la vague néo pop qui déferle aux Iles Britanniques (Frank & Walters, Radiohead, Blur, Dentists, etc...). Parce que son style rafraîchissant, fruité, raffiné, à la trame instrumentale riche, au lyrisme profond, ironique, parodique, et ses vertus mélodiques –les singles "Lipglass", "Babies" et Do you remember the first time" en sont les plus belles illustrations– cueillies dans les jardins de Soft Cell, Doctors Of Madness, Sparks, Saints, Orange Juice et Saint Etienne nous ont purement et simplement envoûtés...

 

Stone Temple Pilots

Purple

Soundgarden, Smashing Pumpkins, Pearl Jam et Stone Temple Pilots semblent, à ce jour, être les rares formations à avoir le mieux négocié l'après grunge. Et dans des registres différents, il faut le souligner. Auteur d'un premier elpee épatant en 92, sur lequel figurait le formidable hit "Plush", le quartet de San Diego pourrait, bien qu'il s'en défende, prendre la place dans le cœur des aficionados du défunt Nirvana. Viscéral dans le bon terme, "Purple" combine la quintessence du métal avec la sensibilité et la spontanéité des grands groupes traditionnels des sixties et des seventies (Small Faces, Led Zeppelin, Blue Cher, Montrose). Tout comme "Core", il a bénéficié de la production de Brendan O'Brien (Red Hot, Black Crowes). Ce qui explique sans doute pourquoi le son des Pilots n'a subi aucune altération. Les onze titres de cet opus sont toujours taillés dans la mélodie sombre, rageuse, menaçante, le rythme imprimé sur un tempo implacable, les cordes de guitares croustillantes, gémissantes, chaudement texturées alors que le baryton profond, venimeux de Weiland jaillit avec une force cinglante et un charisme indélébile. Superbe !

 

Manowar

Défendre le ‘vrai’ heavy-metal...

Écrit par

Ne parlez surtout pas de metal fusion, de crossover aux mecs de Manowar. Ils vous dévisseraient la tête! Non, sans rire, à une époque où on met le hard rock ou le heavy metal à toutes les sauces, eux, ils veulent, envers et contre tout, défendre une approche du heavy rock (ainsi tout le monde est content ?) en manifestant un maximum de conviction et de simplicité. Selon leur point de vue, tous les Nirvana, Alice ln Chains et autres Pearl Jam qui font joujou avec leurs petites guitares n'ont rien à voir avec le heavy metal.

Pas de la gnognote

Qu’ils viennent seulement nous voir en concert et ils verront de quel bois on se chauffe. Le heavy metal, c'est du sérieux, c'est pas de la gnognote. Quand je pense qu'aux States on assimile ces groupes grunge au mouvement heavy, j’en suis malade…

En quelques mots, Eric Adams, chanteur de Manowar, vient de résumer toute la philosophie du band. Une philosophie qui nous reporte assez loin, il y a près de 20 ans déjà, lorsqu'un type nommé Ted Nugent pratiquait le même genre de discours, assénant des vérités telles que ‘if it's too loud you're too old’ (‘si c'est trop fort, c'est que vous êtes trop vieux !’), Nugent –qui se faisait alors surnommer ‘Guitarzan’ (rigolo, pas vrai ?)– a sans doute eu plus qu'une influence sur Manowar. Un Manowar qui vient récemment, de signer chez Geffen (le label de Nirvana...), et dont les deuxième et troisième albums ("Into Glory Ride" et "Hail to England", originellement sortis en 83 et 84) ont été réédités en cd (un peu contre le gré du groupe, un ‘best: of’, intitulé "The Hell Of Steel", vient aussi d’être remis sur le marché par son précédent label, Atlantic/Warner).

J’ai appris la sortie de ce cd en regardant ‘Headbangers ball’ sur MTV, raconte Eric Adams. Je ne savais même pas qu'Atlantic en avait eu l’idée. Après avoir regardé cette émission, j'ai appelé Joey (NDR : DeMaio, le bassiste.et cofondateur du groupe) et on a vérifié le contrat. En fait, il y est mentionné qu'Atlantic a le droit de sortir deux ‘best of’ du groupe quand ils le souhaitent. On ne peut donc rien faire. Ils ont profité lâchement de notre départ en tournée pour publier ce disque. Bon, il est bien présenté, les chansons sont bien les nôtres, mais cette situation nous fait quand même un peu chier. Enfin, c'est le genre de trucs auxquels les musicos sont fréquemment confrontés.

Quand prévoyez-vous de graver un prochain vrai cd ?

Bah, pas tout de suite en tout cas. On va d’abord achever ce circuit et puis on s'y mettra. On a besoin de décompresser un peu et puis vraiment d’être dans le truc pour bosser, pour écrire des chansons. Chez nous, c'est pas vraiment automatique, tu vois : on a besoin d'être dans le mouvement".

10 albums ‘live’ par mois

Vous qui êtes des spécialistes de la prestation ‘live’, pourquoi ne pas publier un album enregistré en public?           

T'en fais pas, après chaque concert qu'on donne, on sort dix albums ‘live’ dans le mois qui suit! Sans blague, on doit être le groupe le plus piraté au monde. Ce qui doit aussi être un record (retenez le terme record, on y reviendra). Mais c'est vrai qu'on pense à sortir un véritable ‘live’, un officiel celui-là. Histoire d'au moins proposer un bon disque à tous ceux qui veulent y retrouver l'incroyable dose d'énergie proposée en concert. Ce sera sans doute pour après notre prochain cd studio.

Il y a quelques mois, vous comptiez fermement battre votre record (nous y voilà!) homologué par le Guinness Book du groupe qui joue le plus fort au monde...

On l'a fait ! En Allemagne. On l’a battu et on y tient beaucoup. Et je n'imagine pas qu'un groupe autre que Manowar puisse jouer plus fort encore. Même nous, sur scène, on portait des protections aux oreilles, mais c'était génial. On en est très fiers.

Que réponds-tu aux médias qui prétendent que Manowar est incapable de faire autre chose que du bruit et d'évoluer?

Qu'ils aillent se faire foutre! On ne joue pas pour les médias. Nous, on se décarcasse pour les mecs qui achètent nos disques qui paient leur ticket de concert, qui nous permettent d'être là, de plus en plus forts, depuis 13 ans. C'est pour eux qu'on fait tout ça. Avec notre public, on forme une grande famille, unie. On amène des kids sur scène pour bien leur faire faire comprendre. On maintient les contacts avec nos fans, on lit les lettres, on les appelle au téléphone. On a bâti Manowar en se produisant beaucoup, à peu près partout. On a donc convaincu notre public petit à petit. Il y a maintenant une fidélité réciproque. Le reste, on s'en tape…

(Article paru dans le n° 23 du magazine Mofo de mai 1994)