On en est déjà au troisième jour du Cactus, un festival dont l’apothéose a été confiée à dEUS qui va donc réinterpréter « Th ideal crash », l’album-phare paru en 1999. Pour votre serviteur, les concerts de Mono, Parquet Courts et Trixie Whitley ne sont surtout pas à manquer. Compte-rendu…
Il revenait à Boy Azooga d’ouvrir le festival en ce samedi 7 juillet. Une formation galloise responsable d’un rock british sauvage et bien électrique. Les compostions les plus âpres pourraient figurer au répertoire de Wallace Vanborn, alors que les plus allègres et chargées de feeling se révèlent particulièrement mélodiques. Parfois, la voix de Davey Newingtonle éprouve certaines difficultés à monter d’une octave ; ce qui ne nuit cependant pas à l’ensemble du set. Et finalement, le quatuor nous a réservé un set aussi excitant que frais…
Hanna Harding, aka Aldous Harding, est une auteure/compositrice/interprète néo-zélandiase. Bien soutenue par son backing group, elle chante d’une voix veloutée des chansons à la fois fragiles et intrigantes. Des morceaux accrocheurs, qu’elle interprète avec une désinvolture naturelle. D’ailleurs l’auditoire ne s’y trompe pas en écoutant religieusement ce concert…
Mono est issu de Tokyo, une formation de post rock qui entame son set par "God Bless", la plage d’ouverture de son dernier opus, "Nowhere Now Here", paru l’an dernier. Elle va d’ailleurs nous proposer de larges extraits dont "Sorrow", un morceau au départ calme et mélodieux mais qui au fil du parcours monte en crescendo avant d’atteindre son point culminant en intensité. La setlist a cependant également inclus des plages plus anciennes comme "Ashes In The Snow" ("Hymn To The Immortal Wind") et "Surrender" ("Rays Of Darkness"), publiés respectivement en 2009 et 2014. Excellent !
La dernière fois que votre serviteur a assisté à un concert de Parquet Courts, qui se fait aussi parfois appeler Parquet Quartz, c’était en 2004, dans le cadre du Festival des Inrocks, au Grand Mix de Tourcoing. Depuis, il faut reconnaître que si son garage/rock est toujours aussi expérimental, il est devenu plus allègre. La faute à Austin Brown, le guitariste/claviériste qui apporte une touche théâtrale aux prestations ‘live’. Vêtu d’une veste et d’un pantalon en jeans, lunettes rondes et cheveux longs, il a le même look que John Lennon, lorsqu’il était jeune. Si l’énergie punk est bien présente, certaines compos sont davantage élaborées, dans l’esprit de Sonic Youth. Pas étonnant que le groupe ait régulièrement tourné en compagnie de Thurston Moore. Le set s’ouvre par « Master of my craft » et va nous réserver plusieurs compos du dernier album, « Wide awake », paru l’an dernier dont le ‘sydbarretien ‘mais légèrement dub « Almost Had to Start a Fight / In and Out of Patience » et « Freebird ». Mais encore un « Violence » hanté par Beck, le titre maître et surtout « Total football », deux compos au cours desquelles Brown va se servir d’un sifflet pour rythmer la compo, la première baignant dans une ambiance latino funk, lorgnant carrément vers Radio 4 et la seconde, plus funk/psyché, chaloupée, également latino, au cours de laquelle, il va se servir d’une guitare à 12 cordes. Le set va bien sûr nous réserver quelques titres bien percutants et punks, mais au sein d’un ensemble bien équilibré.
Neneh Cherry a certainement ramené du peuple, ce dimanche au Minnewaterpark. Sur les planches, on remarque à ses pieds un trépied recouvert de fleurs. Elle est soutenue par une harpiste/claviériste/percussionniste, un bassiste bidouilleur, deux préposés aux machines et synthés, dont son mari Cameron McVey, et une percussionniste (Rosie Bergonzi) à la chevelure bouclée, qui jongle entre xylophone, marimba et djembés. Au cours de son set, la Suédoise va bien sûr nous réserver les hits « 7 seconds » (NDR : sans Youssou N’Dour, of course), « Manchild », « Woman » et bien sûr « Buffalo stance », un show au cours duquel la musique a oscillé entre trip hop (parfois dubby), funk, jazz, rap et r&b. Un bel éclectisme, mais pas vraiment convaincant. Il faut cependant préciser que sa prestation a rencontré quelques problèmes techniques… Pourtant, c’est en fin de parcours, lorsqu’elle est rejointe par deux percussionnistes londoniens (une fille et un garçon) pour y jouer de la mangrove et régaler nos oreilles de sonorités antillaises que le concert va prendre une autre dimension. On lui concèdera cependant qu’elle est particulièrement interactive ; ainsi lorsqu’un spectateur lui offre un paquet de cerises, elle le remercie, avant d’en redistribuer à ses musiciens ainsi qu’à quelques personnes agglutinées aux premiers rangs. Mais bon, il faut avouer que ce style musical n’est pas trop la tasse de thé de votre serviteur…
Place ensuite à Band of Horses. En 2017, Tyler Ramsey et Bill Reynolds avaient quitté le groupe, remplacés respectivement par le guitariste Richard Fitzpatrick, et le bassiste Matt Gentling, qui opérait son come-back. Ce dernier, secouant constamment ses cheveux longs, aurait pu figurer au sein d’un groupe de grunge du début des nineties. En outre, il tire des sonorités hyper-puissantes de son instrument. Le quintet implique également un claviériste, un drummer et le chanteur Ben Bridwell, dont la voix est aussi écorchée que celle de Daniel Johnson (Centro-Matic). Parfois, elle est noyée sous le volume sonore. D’ailleurs si le décor, en arrière-plan, est représenté par une forêt américaine typique, la musique dépote. En ouverture, Ben joue de la pedal steel, en pinçant ses cordes, avant de se focaliser sur la guitare, dont il va en changer quasiment entre chaque morceau. Si certaines ballades évoquent le Barclay James Harvest, grâce aux harmonies vocales, les plus country/rock lorgnent carrément vers Poco. Mais en règle générale, le groupe a privilégié des compos bien pêchues, même si les musicos semblaient fatigués de leur longue tournée...
Trixie Whitley, c’est la fille de feu Chris Whitley, décédé à l’âge de 45 ans. Un chanteur et gratteur (guitare, banjo, steel) qui s’était forgé une fameuse notoriété aussi bien dans le blues, le rock que le folk. Belgo-américaine, Trixie sait donc bien de qui tenir. Curieusement, son dernier elpee, « Lacuna », est davantage électro, mais sur les planches, elle propose un set davantage organique et minimaliste. Le plus souvent à la guitare, parfois aux claviers voire aux drums, elle est soutenue par le drummer Chris Vatalaro. Elle possède une voix remarquable, sorte d’hybride entre Janis Joplin et Annie Lennox. Sa technique sur sa gratte est largement au-dessus de la moyenne, même lors de ses envolées les plus sauvages. Dans ce cas de figure, elle rappelle PJ Harvey, à ses débuts. Vêtue d’un ensemble de sport, bleu-indigo noir et portant des boucles d’oreille aux mêmes coloris, elle communique cependant très peu. Elle y pense quand même en fin de parcours, mais surtout laisse de longues secondes s’écouler entre les morceaux, cassant littéralement l’ambiance qui finit par se figer. Guère interactive, elle garde le silence quand elle casse une corde, alors qu’elle pourrait manifester de l’autodérision, afin de détendre une atmosphère qui au fil du set va devenir de plus en plus lourde…
dEUS a donc décidé de partir en tournée pour y interpréter l’intégralité de son opus, « Ideal crash », gravé il y a 20 ans. Une œuvre dont le thème central est le chagrin d’amour et la guérison. Il a rôdé son spectacle, et notamment lors de 8 dates à l’AB. Donc, ce soir la machine est bien huilée. Le quintet monte sur l’estrade. Toujours aussi charismatique, Tom Barman est vêtu d’une jupe. En arrière-plan, le light show est composé d’une multitude de rectangles aux coloris flous. Le combo attaque « Put the freaks up front ». Aussitôt, habillée de noir, une troupe de 8 danseurs (4 garçons et 4 filles) débarque. Ils se contorsionnent en synchro dans un style digne de Béjart et boostent le morceau. Il faut croire que la troupe a bien répété, car ce soir, sa prestation est impeccable. Elle va d’ailleurs revenir à plusieurs reprises, au cours du show. Tom rappelle que c’est la quatrième fois qu’il se produit au Cactus. Les versions de « The ideal crash » défilent et on sent la différence entre Mauro Palowski et le nouveau guitariste soliste, Bruno de Groot. Si le premier osait l’impro, le second est davantage sur les rails. Ce qui explique pourquoi le set est davantage dans la maîtrise que dans l’audace. Ce qui ne va pas empêcher de superbes envolées, à l’instar de « Dream sequence #1 », qui ponctue le set de superbe manière, en tirant également parti d’une boîte à rythmes ou encore de « Everybody's Weird », un morceau mid tempo qui monte en crescendo. Mais le plus intéressant procède de l’apport des différents musicos, que ce soit le bassiste, dans ses interventions jazzyfiantes, Klaas Janssens (NDR : déjà au sein du line up à l’époque), le violoniste, responsable de montées en intensité, de la basse bien chaloupée et des harmonies vocales impeccables, sans oublier la voix de Barman irréprochable, pour tresser des titres complexes, bien électriques, mais diablement mélodiques. Le band va accorder un rappel, et lors du premier titre, « Quatre mains » Tom brandit sa guitare d’une main, alors que les danseurs reviennent, les hommes alors torses-nus… Et le spectacle de s’achever par l’inévitable « Roses », que chantaient deux filles à vélo, en quittant le Minnewaterpark…
Setlist : 1. ‘Put the Freaks Up Front’, 2. ‘Sister Dew’, 3. ‘One Advice, Space’, 4. ‘The Magic Hour’, 5. ‘The Ideal Crash’, 6. ‘Instant Street’, 7. ‘Magdalena’, 8. ‘Everybody's Weird’, 9. ‘Let's See Who Goes Down First’, 10. ‘Dream Sequence #1’, Encore : 11. ‘Quatre Mains’, 12. ‘Fell Off the Floor, Man’, 13. ‘Roses’
(Organisation : Cactus, Bruges)
Boy Azzoga + Aldous Harding + Mono + Parquet Courts + Neneh Cherry + Band of Horses + Trixie Whitley + dEUS
(Voir aussi notre section photos ici)