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Steven Wilson

The Overview

Une odyssée progressive au bord de l’infini…

Steven Wilson n’est pas un musicien qui se repose sur ses lauriers. À 57 ans, le maître britannique de la musique progressive, cerveau de Porcupine Tree et architecte sonore hors normes, livre ici son huitième album solo, et peut-être son opus le plus audacieux à ce jour. Sorti ce 14 mars 2025 sur Fiction Records, cet album de quarante-deux minutes, partagé en deux longues pièces, n’est pas une simple addition à sa discographie prolifique : c’est une somme, un manifeste rétrofuturiste qui explose les frontières du genre qu’il a contribué à réinventer depuis trois décennies.

Une genèse introspective et cosmique

Écrit, produit et mixé dans son home-studio entre décembre 2023 et août 2024, "The Overview" s’inspire de ‘l’effet de vue d’ensemble’ (‘the overview effect’), ce vertige existentiel ressenti par les astronautes face à la Terre vue de l’espace.

Dans un ‘Questions-Réponses’ réservé aux fans, Wilson a commenté la genèse de “The Overview” : ‘L'année dernière, j'ai vu un très bon ami à moi, Alex Milas, qui dirige une organisation appelée Space Rocks, et je lui ai parlé de la possibilité de faire une sorte de collaboration. Son organisation a pour objectif de réunir le monde de la science et de l'astronomie par le biais de la musique. Je me suis dit que je pourrais peut-être créer une bande-son pour un de ses événements. Et il a commencé à me parler du ‘Overview Effect’. C'est le phénomène que vivent les astronautes lorsqu'ils vont, pour la première fois, dans l'espace et qu'ils regardent la Terre depuis l'espace. Ils ont cette prise de conscience où ils comprennent à quel point la Terre est insignifiante et donc, par extension, à quel point les êtres humains sont insignifiants par rapport au cosmos. Il m'a expliqué que certaines personnes ont une réaction positive à cela, mais que d'autres ont une réaction très négative. J'ai immédiatement imaginé, dans ma tête, la possibilité d’enregistrer un album conceptuel sur ce thème. J'ai en quelque sorte entendu tout le disque dans ma tête, en tant qu'ébauche. J'ai su, à ce moment-là, qu'il fallait que ce soit quelque chose de long. Que ce soit un seul morceau de musique ininterrompu. Je suis donc rentré chez moi et en six à huit semaines, j'ai esquissé les compositions et élaboré la plupart des morceaux de base que l'on entend sur l'album final. Donc, oui, ça s'est mis en place facilement. J'aimerais que ce soit toujours aussi simple.’

Wilson, habitué à explorer les tréfonds de l’âme humaine, traduit cette sensation en deux pistes : "Objects Outlive Us" (23:17) et "The Overview" (18:27). Ces titres ne sont pas de simples chansons, mais des suites fragmentées en mouvements (huit pour la première, six pour la seconde), qui oscillent entre méditation philosophique et voyage interstellaire.

Accompagné de musiciens exceptionnels, Craig Blundell à la batterie, Adam Holzman aux claviers, Randy McStine aux guitares, Wilson s’entoure aussi d’une plume prestigieuse : Andy Partridge de XTC, qui signe les paroles de “Objects : Meanwhile”. Ce clin d’œil adressé à l’un de ses héros personnels ajoute une couche d’élégance pop à une œuvre par ailleurs dense et ambitieuse.

Une anthologie sonore rétrofuturiste

Dès les premières notes de "Objects Outlive Us", on reconnaît la patte de Wilson : un classicisme progressif à la "Dark Side of the Moon", construit autour de guitares stratosphériques et de claviers évoquant les grandes heures de Porcupine Tree ("In Absentia", "Fear of a Blank Planet"). Le ‘riff’ de base aux claviers comporte 19 notes qui se déroulent sur une signature rythmique asynchrone rappelant le style hypnotique de Happy The Man (“Carousel”).

Wilson explique : ‘Sur la première face, presque tout le matériel musical est dérivé de la même mélodie de 19 notes, qui est accompagnée d'une ligne de basse. Et même si vous n'en êtes pas conscient lorsque vous écoutez le morceau, tout émane de cet unique thème. J'ai décidé de regarder ce motif thématique depuis différentes perspectives, différentes signatures rythmiques et différentes tonalités. C'est ce qu'“Objects Outlive Us” est devenu : un morceau de 23 minutes, essentiellement dérivé d'une seule idée musicale. Même si j'espère que cela ne donne pas cette impression lorsque vous l'écoutez.’

Mais là où certains pourraient se contenter de recycler les recettes de la musique ‘prog’, Wilson les développe. “No Monkey’s Paw” ouvre sur une texture ambient digne de Brian Eno, avant que “The Cicerones” n’introduise des dissonances électroniques rappelant Aphex Twin. Cette fusion entre ‘prog’ et expérimentation moderne n’est pas nouvelle chez lui ("The Future Bites" en témoignait déjà), mais elle atteint ici une cohérence rare.

La seconde pièce, "The Overview", est plus contemplative. “Perspective” démarre comme une lente ascension, articulée autour de synthés éthérés et d'une batterie feutrée, avant que “Borrowed Atoms” ne déploie une mélancolie familière aux fans de "The Raven That Refused to Sing". Le final, “Permanence”, s’achève sur une note suspendue : un fade-out qui semble miroiter dans l’infini, comme si Wilson nous laissait seuls face à l’immensité cosmique qu’il décrit.

Références et réinvention

Ce qui frappe dans "The Overview", c’est sa capacité à condenser les différentes périodes de sa carrière en une encyclopédie sonore. On y décèle des échos de Porcupine Tree dans les crescendos dramatiques (“Cosmic Sons of Toil”), des réminiscences de "The Harmony Codex" au sein des thèmes spatiaux, et même une touche indie-pop (Blackfield, XTC). Pourtant, l’œuvre ne sent jamais le réchauffé. Wilson ne se contente pas de regarder dans le rétroviseur : il projette ces influences dans un futur incertain, où la musique progressive devient un miroir de notre place dans l’univers.

La nécessité d'avancer, au risque de déplaire, est un thème central chez Wilson. Il déclare : ‘Un des principes qu’il faut connaître, c'est que je n'aime pas l'idée de toujours faire la même chose. Certains fans aimeraient que je continue dans la veine de Porcupine Tree ; mais, pour moi, il est important de toujours essayer d’explorer des domaines différents, d'avancer. Je ne sais donc pas vraiment ce que je vais proposer après "The Overview", mais pour l'instant, la priorité, c'est la tournée. J'espère que le show sera aussi époustouflant que l'album et le film qui l'accompagne.’

Revenons à l'album. Les textes, souvent abstraits, renforcent la dimension cosmique de la musique. Andy Partridge apporte une poésie grinçante à “Objects : Meanwhile” (“We’re just borrowed atoms / In a cosmic pawn shop”), tandis que Wilson explore la finitude humaine face à l’éternité (“Heat Death of the Universe”). C’est une réflexion qui rappelle les méditations de “Hand. Cannot. Erase.” sur la solitude, mais portée à une échelle galactique.

Une production au sommet

Côté son, "The Overview" est un régal. Le mixage révèle une précision chirurgicale. N'oublions pas que Wilson est aussi ingénieur du son et producteur. L’album brille par sa clarté et sa spatialité. Les claviers d’Holzman planent comme des nébuleuses, les guitares de McStine oscillent entre délicatesse et fureur contenue, et la batterie de Blundell ponctue chaque mouvement grâce à une dynamique parfaitement contrôlée. Le mix Dolby Atmos, disponible en édition Deluxe, permet une immersion totale.

Un chef-d’œuvre, mais pas pour tous

Alors, chef-d’œuvre ? Oui, si l'on accepte l’exigence de Wilson. "The Overview" n’est pas un album facile. Ses longues plages instrumentales et ses transitions abruptes demandent une écoute attentive. Ici, pas de single accrocheur à la “Lazarus”. Les néophytes pourraient s’y perdre, mais les fans de longue date, habitués aux labyrinthes sonores, y verront une apothéose. C’est une œuvre qui se dévoile au fil du temps.

Le 7 mai prochain, Wilson présentera "The Overview" au Cirque Royal, à Bruxelles. A guichets fermés, preuve que son aura ne faiblit pas. À l’heure où la musique progressive peut parfois sembler tourner en rond, Steven Wilson rappelle pourquoi il reste le “King Wilson” : il ne suit pas les tendances, il les redéfinit.

"The Overview" est disponible ici ou via la page ‘Artistes’.

Pour écouter (et regarder) "Objects Outlive Us : Objects : Meanwhile", c'est .

 

 

Bonnie Prince Billy

Il m'a fallu une vie dans la musique pour comprendre comment devenir meilleur acteur…

Écrit par

Will Oldham a longtemps eu le malin plaisir de changer régulièrement de pseudo (Palace, Palace Brothers, Palace Songs, Palace Music, etc.) ; mais il semble enfin s’être fixé sur celui de Bonnie ‘Prince’ Billy. D’ailleurs, c’est la même signature qu’il a posée sur ses derniers elpees. Artiste imprévisible, il s’entoure souvent de musiciens différents, quand il enregistre un disque, mais il participe aussi régulièrement aux sessions d’autres musicos.

Pour son dernier opus, « The purple bird », il a reçu le concours de ses amis, mais aussi quelques-uns de ses héros. Le long playing a été mis en forme par le producteur de Nashville, David Ferguson, avec qui il s’est lié d’amitié il y a pas mal de temps, lors d’une session consacrée à Johnny Cash. Ferguson a puisé dans son réseau d’amis artistes de Music City, en organisant des jams pour écrire des chansons et en rassemblant une équipe de musiciens de session pour réaliser ce qui allait devenir cet opus.

« The Purple Bird » est impeccablement mis en forme, mais à l’instar d’une compilation, il change constamment de ton, privilégiant le joyeux sur le mélancolique.  

Ainsi la mélodie de « Guns Are For Cowards » est paradoxalement impertinente et optimiste, alors que le thème est tragique.

Cette chanson été ajoutée, car le disque est essentiellement focalisé sur les sept co-écrites. J'y ai inclus quelques compositions personnelles dont « Guns Are For Cowards ». C’est l'une des rares de ma carrière que j'ai écrite en réaction à des événements dont j'ai été témoin ou que l'on m'a rapporté afin d'essayer de comprendre ou de participer plutôt que de me sentir impuissant.

Il y a quelques années, ma femme et moi avions rendez-vous chez le banquier dans le but d'obtenir un prêt. Le rendez-vous a été reporté car il devait se rendre aux funérailles d'un collègue abattu dans une agence du centre-ville de Louisville, dans le Kentucky, par un homme qui est entré et a tiré sur toutes les personnes présentes sur les lieux. Par ailleurs, j'étais censé partager une session avec un ensemble gospel. L’une des formations familiales, les Templeton Singers, a dû reporter la séance parce qu'un de leurs neveux, âgé de 13 ou 14 ans, avait été abattu à un arrêt de bus, alors qu'il se rendait à l'école. Enfin, j'étais censée avoir rendez-vous avec un homme politique local, lequel m'a annoncé qu'un membre de sa famille venait de se faire tirer dessus et qu'il devait le secourir. Je me suis demandé ce qui se passait et ce que je pouvais faire… c'est à dire composer cette chanson. J’ai pensé, je viens du Kentucky, je me rends dans le Tennessee et je vais présenter ce morceau qui remet en question la détention et l'utilisation d'armes à feu, à un groupe d'hommes blancs du Sud, plus âgés. La première personne à qui je l'ai soumise était David Ferguson, producteur de ce disque... le jour de l'enregistrement. Il l'a écouté, s'est tourné vers moi et a dit ‘Will, il n'y a qu'une seule manière de proposer cette chanson, c'est sous forme de polka’. ‘Peu importe ce que tu dis Fergus, pour moi, c'est bien’, ai-je répondu. Ça me convient... parce qu'au départ je ne savais pas ce qu'il allait en penser et où il allait l'emmener. 

« Is My Living in Vain ? » est d'une délicatesse et d'une vulnérabilité qui symbolise votre art.

(Il rit) Oui, je suis d'accord. Et c'est la seule reprise du disque !  Une chanson que j'interprétais seul chez moi ; et j'ai voulu l'intégrer pour équilibrer le disque face à tous les auteurs-compositeurs qui y participent.  Je suis le plus jeune musicien et compositeur de l’album, à l'exception de Brit Taylor et Adam Casey, qui se sont chargés harmonies vocales y compris de celles des choristes. Mais tous les autres sont les hommes blancs plus âgés et du Sud : « Am I Living in vain » a été écrit, à l'époque, par une jeune femme noire qui s’appelait Twinkie Clarke. Elle faisait partie des Clark Sisters de Detroit. Un succès dans le monde du gospel en 1980. Je me suis dit : ‘Eh bien, je ne peux pas faire grand-chose en tant qu’homme judéo-chrétien blanc américain, mais je peux chanter la chanson de quelqu'un d'autre pour essayer de donner un portrait plus complet de ce que j'essaie simplement d'accomplir dans le cadre de mes projets musicaux’.

Vous définissez cet opus comme un disque de ‘Nashville’...

Il s'agit d'un album de ‘Nashville’, à part entière, dans le même processus d'écriture au cours duquel ces personnes s'asseyaient intentionnellement à 10 heures, le mercredi matin, et composaient une chanson en plus de deux heures et demie. Cette façon de procéder est une institution à Nashville que je n'avais jamais expérimenté auparavant. Toute cette ville et ses infrastructures sont imaginées en fonction de ces musiciens de session qui sont comparables à des athlètes olympiques, dans la mesure où en deux jours de travail vous enregistrez en leur compagnie presque tous les éléments de 12 chansons. Comme un athlète olympique, un sprinteur qui en quelques secondes réalise le geste et la course parfaite. J'adore cela car chaque jour, j'avais l'impression d'essayer de rester en forme et de me préparer physiquement et mentalement à faire face à ce genre de défis afin d'être pleinement présent, réactif et à la hauteur de la situation.

Mais tous ces grands chanteurs country célèbres en Amérique et présents sur les albums, sont peu connus de ce côté-ci de l'Atlantique. Ce qui pose également la question de votre popularité aux Etats-Unis et en Europe...

En termes de chiffres, je pense que la taille de l'audience de Bonnie Prince Billy aux États-Unis est similaire à celle de l'Europe. Mais en Amérique, elle est vraiment beaucoup plus marginale et underground. Même si, numériquement, les concerts ont la même taille et la même notoriété, les labels auxquels je suis associé aux États-Unis ne sont pas très notoires, la promotion y est moindre et les spectacles se déroulent dans des petits clubs.

Avez-vous déjà pensé enregistrer un long playing en compagnie de Robert Plant et Alison Krauss, par exemple ?

Fergus est plutôt un bon ami d'Alison Krauss. Et à l'époque où Albini a produit le Page/Plant, il y a une vingtaine d'années, c'était la première fois que j'ai vraiment commencé à penser à Robert Plant, à la fois en tant qu'être humain et merveilleux chanteur. Il chantait très bien sur tous les disques de Zeppelin et par mal sur ceux en solo. Mais sur ce disque, je me suis dit : ‘Waouh, cette personne a vraiment une relation incroyable avec sa voix’. Et je pense que c'était un des talents propres à Steve Albini de faire ressortir l'essence de la voix d'un chanteur, d'en tirer le maximum. Si l'occasion se présentait, je ne la laisserais pas passer. Je pourrais en tant que pair, collaborer avec eux et même essayer, à l'instar d'Albini, de les pousser à réaliser des choses différentes qui conviennent à leurs énormes talents et capacités et les faire sortir leur zone de confort en se convertissant en artistes explorateurs. Mais Robert Plant est un artiste expérimental. La force de Plant et Page dans Led zeppelin était telle qu'ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient, mais faisaient ce qu'ils pensaient devoir être fait. Et grâce à l'incroyable synergie et à l'éclat de leur énergie collective dans Led Zep, c'est devenu quelque chose qui n'existait pas auparavant.

Aux yeux et aux oreilles des d'Européens, la musique country est une sorte de nid ‘trumpiste’

C'est un peu réducteur. 

Je suis conscient que la musique country a le potentiel de résonner et de plaire à une très grande partie de l'humanité parce qu'elle est chantée en anglais. En fait, on accorde davantage d'attention aux paroles que dans toute autre forme de musique populaire.

L'amitié définit-elle votre carrière ?

Oui. La force motrice de mon engagement dans la musique est d'établir des liens plus larges avec les auditeurs, mais de me connecter plus spécifiquement et profondément avec les personnes que j'aimerais côtoyer. Appeler mon ami pour explorer l'interconnectivité et les relations humaines directes à travers… pas seulement des paroles, mais aussi une collaboration active, y compris en compagnie des artistes visuels. Comme Lori Damiano, qui a réalisé la pochette de ce disque. Et c'est une copie du dessin d'enfance de David Ferguson représentant l'Oiseau violet. Ce sont mes amis et je suis aussi leur fan. L'amitié est quelque chose qui a été mystérieuse pour moi, toute ma vie. J'ai beaucoup déménagé quand j'étais enfant, et j'ai toujours expérimenté l'amitié à distance. Et donc c'est une donnée que j'ai presque fétichisé au détriment des relations amoureuses. C'est un processus continu pour essayer de bien comprendre ce qu'est l'amitié et, le fait de savoir si j’en suis capable, parce que c'est ce que je souhaite le plus au monde.

Votre pseudo se réfère à Billy the Kid. Seriez-vous le dernier cow-boy ?

(Il rit) bien sûr. Nous comprenons progressivement et collectivement que l'idée d'un cow-boy est de la foutaise. C’est de la mythologie et une construction. Ainsi, j'ai l'impression d'adhérer à l'idée d'incarner, d'habiter ou de représenter une construction. Comme si elle appartenait à ce qu'est Bonnie Prince Billy...  Nous sommes tous d'accord pour dire que rien n'existe vraiment. C'est pourquoi nous créons des fictions sur lesquelles nous basons notre perception de la réalité juste pour essayer de donner du sens.

Le fait d'être acteur vous a-t-il aidé à devenir chanteur ?

Absolument ! Ce que j'ai finalement ressenti en poursuivant mes études d'acteur, puis ce qui m'a finalement déçu ou insatisfait, c'est qu'il y avait très peu d'acteurs qui utilisaient toute la diversité et les capacités de leur instrument principal : leur voix. Ils peuvent crier et être en colère, mais qu'en est-il de la mélodie et du rythme ? Et souvent, même les dramaturges ne se concentrent pas assez sur le rythme.

J'ai rencontré davantage d'épanouissement dans l'expérience musicale. Et pourtant, il s'agit toujours d'interpréter un texte, de communiquer une expérience humaine à autrui, puis d'utiliser l'expérience humaine de l'autre personne comme caisse de résonance.

A l'inverse, être chanteur vous aide-t-il à être acteur ?

J'aborde l'interprétation d'une chanson, à chaque fois, comme si elle était neuve. J’ai l'impression d'être un nouvel interprète, de me servir des paroles comme d'une simple feuille de route.

Par ailleurs, récemment, interprétant une scène avec Tom Hardy, phénoménal exemple d'un acteur qui explore les confins de ce qu'il accomplit, ce sont les deux heures de jeu les plus enrichissantes que j'aie jamais connue en tant qu'acteur ; comme si absolument tout pouvait arriver. Et à l’issue du tournage, Tom Hardy m'a dit : ‘Je ne sais pas qui tu es, mais j'ai vraiment aimé travailler avec toi’. L'un des plus beaux compliments que je n’ai jamais reçus. La musique me permet d'aborder quelque chose de nouveau à chaque fois avec fraicheur et spontanéité, de faire confiance à l'écriture, d’être prêt pour le travail et de vivre le moment présent. Il m'a fallu une vie dans la musique pour comprendre comment devenir meilleur acteur.

« The purple bird » : 31/01/2025 (Domino / V2)

 

Silverstein

Un quart de siècle au compteur…

Écrit par

Pour Silverstein, un quintet de post-hardcore canadien, tout a débuté en 2000, dans une salle de répétition poussiéreuse de Burlington, en Ontario. À l'époque, personne n’imaginait que, 25 ans plus tard, il serait toujours en tournée dans le monde entier, et compterait à son actif des albums classiques tels que « Discovering The Waterfront », « A Shipwreck In The Sand », « This Is How the Wind Shifts » et « When Broken Is Easily Fixed ». Le band est venu présenter son douzième et dernier opus studio, « Antibloom », paru ce 21 février. Et il annonce un second volume, « Pink Moon », prévu plus tard dans l’année.

La tournée est baptisée ‘25 Years Of Noise’. Dans ses bagages, il a emmené trois groupes :  Thursday, The Callous Daoboys et Bloom. Ce qui est intéressant chez chacune de ces formations programmées ce soir, c’est la présence d’au moins deux guitaristes et parfois trois, au sein des line up.

Bloom entame les hostilités à 18h30. Australien, cet autre quintet réunit le chanteur/guitariste Jarod McLaren, le second sixcordiste Oliver Butler, le bassiste Andrew Martin et enfin du batteur Jack Van Vliet. Cette formation déborde d’une rare énergie. Elle pratique un metalcore qu’elle mêle à un hardcore assez mélodique. Pour son premier concert en Belgique, elle souhaite faire grosse impression en nous proposant de larges extraits de son nouvel long playing, « Maybe In Another Life ».

Le set s’ouvre par « The Service », un extrait de l’elpee live, « The Passion », paru en 2021. La dynamique vocale constitue un énorme point fort tout au long de « Bound to Your Whispers », notamment au niveau des voix claires. Bien ancrées dans les morceaux, elles restent adaptées aux paroles. Les voix hurlées, en particulier, sont également parfaitement maîtrisées. Bloom a durci son style, prenant une direction plus metalcore qu'auparavant et délaissant davantage les aspects hardcore mélodique de ses débuts. Mais qui dit metalcore dit aussi refrains insupportables en voix claires... Bah, pas grave, une belle découverte quand même (page ‘Artistes ici) !

Setlist : « The Service », « Bound To Your Whispers », « Cold », « You & I », « The Works Of You », « Maybe In Another Life », « Siren Song ».

The Callous Daoboys est un combo américain originaire d’Atlanta, en Géorgie, qui mélange mathcore et emo. Son patronyme est une contrefaçon de celui de l'équipe de football des Dallas Cowboys. Une des sixcordes est remplacée par un violon joué par Amber ‘The Mind’ Christman. Elle se sert d’un instrument contemporain et électrique. Le reste de la formation implique la bassiste, Jackie ‘Clancy’ Buckalew, le guitariste, Daniel ‘Dip’ Hodsdon et le batteur du Matthew ‘Marty’ Hague. Le groupe puise ses influences chez The Dillinger Escape Plan, Botch, Korn, Slipknot et Linkin Park : que du bon ! Il est venu défendre son dernier opus, « Two-Headed Trout, The Demon of Unreality Limping Like a Dog », paru il y a peu.

Le concert commence par le single et titre maître du nouvel LP, « The Demon of Unreality Limping Like a Dog ».  

Alimenté par une agressivité impressionnante, le démoniaque The Callous Daoboys dispense une solution sonore à indice d'octane élevé et rapide, à la fois émotionnel et multiforme. Ne s'appuyant pas sur une approche ou un style unique et linéaire, il s’inspire des créateurs de tendances et des OG du mathcore, apportant sa propre variation de riffs et de signatures rythmiques à évolution rapide, mêlant grognements, synthés et instruments, et offrant une expérience live unique que l'on ne trouve que chez ce combo.

Cependant, c’est Amber qui focalise l’attention. Non seulement elle assure le show tout comme Jackie, en short de cuir et bas nylon noirs, mais c’est elle qui communique une touche singulière à la musique, au cœur de la discorde, lorsque c’est nécessaire (page ‘Artistes' ).

Setlist : « The Demon Of Unreality Limping Like a Dog », « TwoHeaded Trout », « Pushing the Pink Envelope », « Star Baby », « Violent Astrology », « Waco Jesus », « A Brief Article Regarding Time Loops ».

C'est toujours un plaisir de revoir Thursday. Une autre raison pour laquelle cette soirée est si spéciale : musicien de tournée, Wade McNeil d'Alexisonfire remplace Norm Brannon à la guitare. Ce band étasunien (New Jersey) est un véritable vétéran du post-hardcore ; et c’est la toute première fois qu’il tourne en compagnie de Silverstein.

Dès les premières notes de « The Other Side Of The Crash/Over And Out (Of Control) », le groupe s’approprie l’espace scénique. Dynamisées par la section rythmique, les lignes de guitare sonnent comme un assaut tranchant. La voix de Ricky est brisante d’émotion. Mélodique, la solution sonore s’élève à un très haut niveau. La foule est enthousiaste et les pogos éclatent. Faut dire que la setlist est constituée d’une majorité d’anciens titres. Pendant « Cross Out the Eyes », la température dans la salle grimpe encore de quelques degrés. Manifestant sa nervosité caractéristique et sa passion inébranlable, Ricky comble les silences entre les chansons, en profitant pour émettre une critique sociale acerbe et bien ciblée de l’état du monde. Ce qui a mis une couche supplémentaire à la performance, tout en rappelant que le post-hardcore a toujours été un pont entre la colère et l’idéalisme (page ‘Artistes’ ici).

Setlist : « The Other Side Of The Crash/Over And Out (Of Control) », « Cross Out The Eyes », « Signals Over The Air », « Jet Black New Year », « This Song Brought To You By A Falling Bomb », « Fast To The End », « White Bikes », « Paris In Flames », « Understanding In A Car Crash », « War All The Time ».

Alors que les musiciens de Silverstein sont sur le point de grimper sur le podium et que l’excitation est palpable dans la foule, une courte vidéo racontant l'histoire de Silverstein et détaillant le quart de siècle de carrière de la formation est projetée. Emouvante, elle tient l’auditoire en haleine tout en appréhendant le spectacle sous un angle différent.

Le combo va nous réserver un titre de chacun de ses 12 albums. Un défi qu’il va relever mais en les interprétant dans l’ordre chronologique inverse, après avoir entamé et clôturé le concert par des extraits du dernier, « Antibloom », paru le 21 février, et notamment « Skin & Bones » et « Confession », des morceaux taillés pour le live.

Toute la soirée, les trois guitares tourmentent délicatement les tympans sans les agresser. Tout en technique, elles libèrent de longs riffs hyper mélodieux. Ce qui n’empêche pas les aficionados de mettre le souk dans la fosse.

Le post-hardcore est bien exploré. Efficace, la section rythmique peut compter sur la frappe à la fois sauvage et métronomique du drummer.

En rappel, après avoir accordé une version acoustique de « My Heroine », Silverstein nous a réservé deux plages issues de son nouveau long playing, « Bleeds No More » et « Smashed Into Pieces ».

Une belle soirée qui s’est figée dans la nostalgie pour ce groupe canadien.

Setlist : « Skin & Bones », « Confession », « The Altar », « Infinite », « Bad Habits », « The Afterglow », « Aquamarine », « A Midwestern State Of Emergency », « Massachusetts », « Toronto (Abridged) », « One Last Dance », « Sacrifice », « Vices », « The End », « My Disaster », « Your Sword Versus My Dagger », « Call It Karma », « Smile in Your Sleep ».

Rappel : « My Heroine » (Acoustique), « Smashed Into Pieces », « Bleeds No More »

(Organisation : Live nation et Ancienne Belgique)

Biohazard + Life of Agony + LYLVC

Hardcore never dies…

Écrit par

La salle de La Madeleine, située en plein centre de Bruxelles, entre la grand-place et la gare centrale, est plutôt habituée à programmer des concerts de chanson française ou destinés au jeune public. Ce samedi soir, elle est fréquentée par des fans de metal, en majorité des quadras et quinquas, et est pleine à craquer. La double affiche (sold-out) de Life of Agony et Biohazard attire la toute grande foule. Si le premier cité tourne de manière quasi-ininterrompue, le second s’était fait plus rare, en live, au cours de ces dix dernières années. Compte-rendu en détails.

Le moins qu’on puisse écrire c’est que Life of Agony a lutté contre vents et marées pour rester à flots. D’agonie il n’a finalement jamais été question, l’amitié liant le bassiste Alan Robert aux cousins Joey Z. et Mina/Keith Caputo semble avoir triomphé des tumultes de leur vie. Et du turn-over des batteurs aussi (NDR : il n’y pas assez des doigts d’une main pour compter ceux qui se sont succédé). Le cas le plus notable reste, cependant, celui du chanteur Keith. Il a changé de genre pour s’appeler Mina. Et visiblement, ce soir, il a réussi son retour vers le genre masculin… Son enfance a vu ses parents, accros à la drogue, disparaître très tôt dans son existence. Aussi, s’il a été élevé par son grand-père, il a également été victime d’abus. Heureusement son voisin et cousin, Joey Zampella, lui a communiqué la passion de la musique et l’a indirectement décidé à fonder son groupe actuel.

Les haut-parleurs diffusent le « Jump around » de House of Pain en intro. Bonne idée ! Puis, fort d’une longue intro à la batterie et à la guitare « River runs red » entame les hostilités. Keith est vêtu d’un sweat surmonté d’une capuche orange à l’effigie de Biohazard et déménage d’un côté à l’autre du podium. Cheveux courts (en brosse), sa poitrine (siliconée) disparue, et la voix à nouveau rauque, sa (re-)transformation s’est bien opérée. Caractérisé par son crescendo, « This time » incite la foule à bondir dans son dernier quart temps. « Weeds » et « I regret » s’enchaînent à merveille. La reprise du « We Gotta Know » de Cro-Mags est plutôt réussie, même si le physique et la voix de Keith voguent à mille lieux du charismatique de Harley Flanagan. Et la boucle est bouclée lors du final, « Underground » (NDR : un titre issu du premier elpee, « River Runs Reds », paru en 1993 ; opus qui avait fait l’effet d’une météorite dans le ciel déjà bien chargé de métal).

A l’issue de ce morceau et surtout de sa prestation, il est difficile de coller une étiquette à Life of Agony. La plus fréquente qui lui est attribuée est cependant évocatrice : ‘alternative metal’ (lien page ‘Artistes’ ici et photos Romain Ballez ).

On vous le signalait dans le chapeau, le parcours de Biohazard a connu quelques interruptions, notamment depuis 2015 (NDR : son dernier concert, cette année-là, avait été accordé dans le cadre de l’Ieperfeest). La tournée prévue en 2016 avait été annulée à la suite d’une nouvelle démission au sein du line up ; en l’occurrence celle de Scott Roberts. Il a donc fallu attendre 2023, pour qu’il refasse surface. Et en particulier, dans le cadre des festivals Lokerse feesten (NDR : la journée consacrée au metal) et l’Alcatraz, en Belgique. En 2024 il se produisait au Graspop meeting ; et c’est donc une belle opportunité de le revoir, dans une petite salle, ce soir.

A 21h30 précises, les lumières se tamisent d’un bleu profond. Après un court prélude d’une chanson de Blondie, l’auditoire s’agite. Pas de doute « Urban discipline » (NDR : le titre éponyme de ce long playing ; sans doute la meilleure compo du band, à ce jour) va entamer le set. Cette sirène et le drumming musclé le confirment.

Enfin, la ligne de basse et les chœurs du charismatique Evan Seinfeld, la voix de Billy Grazadei, ses riffs de sixcordes, ainsi que ceux, enflammés, qui virent souvent aux exercices en solo, au beau milieu des morceaux, de Bobby Hambel : la musique de Biohazard semble ne pas avoir pris une ride en plus de 38 ans d’existence. « Shades of grey », « Tales From the Hard Side » et en fin de parcours l’inévitable « Punishment » ainsi que l’épilogue, « Hold mye own », constituent autant d’occasions pour déclencher des circule pits, wall of death, crowdsurfings et autres pogos endiablés tout au long de la soirée. Et avant de quitter définitivement les planches, la formation prend encore le temps de saluer les premiers rangs ou d’accepter de poser pour quelques selfies. Après le show, certains musicos sont même venus papoter avec des fans, à l’extérieur de la salle… (photos Romain Ballez ici et page 'Artistes' )

Pour être exhaustif, sachez que LYLVC (NDR : prononcez Lylac) complétait l’affiche. Programmé à 19 heures, il n’a été possible, pour votre serviteur, que de voir et écouter la fin de sa prestation limitée à 30 minutes. 

Quoique demeuré poli, le public ne semblait guère s’enthousiasmer. Une explication ? Les voix des deux vocalistes paraissent antagonistes. Métissé, le chanteur balance une sorte de rap hardcore, alors que la voix de sa comparse, plutôt charmante, est capable de grimper dans les aigus, suivant la plus pure tradition des chanteuses de metal mélodique. Enfin, il faut reconnaître que l’expression sonore du sextuor naviguait à des années-lumière des deux têtes d’affiche…

Néanmoins sympathiques, aussi bien sur les planches que dans la salle, les deux vocalistes se sont baladés dans la foule ou se sont postés à proximité du stand de marchandising pour discuter avec les aficionados, tout au long de la soirée… (lien page ‘Artistes’ et photos Romain Ballez ici).

(Organisation : Live Nation + Biebob)

Les Nuits: le festival du Bota fait peau neuve

Le Directeur du Botanique, Fred Maréchal a présenté les Nuits 2025 lors d'une conférence de presse. Beaucoup de changements sont prévus pour cette 32e édition. Après avoir fait le test pendant une journée l'année passée, le Centre Culturel bruxellois adopte complètement le système “All Access” classique des festivals. Un seul ticket par jour, qui donnera accès à tous les concerts.

Changement également au niveau des espaces: seules les salles de l'Orangerie et du Musée seront occupées, cette dernière profitant d'une jauge plus grande grâce à l'aménagement du balcon. A l'extérieur, le chapiteau fera place à une nouvelle structure éphémère à ciel ouvert, pouvant accueillir 2000 festivaliers. C'est l'asbl ROTOR qui a reçu la mission de dessiner ce nouvel espace en veillant à l'intégrer de façon optimale dans l'écrin du parc.

Au volet Programmation, Olivier Vanhalst et Thomas Konings ont sélectionné 130 groupes ou artistes en respectant l'ADN du Botanique, qui privilégie les projets locaux, la diversité des styles et les créations exclusives. Les grosses têtes d'affiches sont donc assez peu nombreuses, laissant la place aux artistes émergents à découvrir.

Jeudi 15 mai: coup d'envoi orienté “métal” avec un nouveau concept de concerts: “Obsidian Dust”. A l'affiche: Zeal & Ardor, Elder, Liturgy, Wiegedood, etc.

Vendredi 16 mai: journée plus garage/punk, construite autour des OSEES (auparavant The Oh Sees).

Samedi 17 mai: une progra folk / rock / postpunk, avec Michelle Gurevich, Jay-Jay Johanson, Efterklang, etc.

Dimanche 18 mai: le grand retour de The Jesus Lizard, le groupe légendaire de rock alternatif des années 90, qui côtoiera McLusky, The Ex et les Belges The K et Marcel.

Mardi 20 mai: concert unique d'Azealia Banks, la chanteuse-rappeuse américaine.

Mercredi 21 mai: journée aux accents de pop acidulée avec, entre autres, Adèle Castillon et Vendredi Sur Mer.

Jeudi 22 mai: focus sur le rap francophone autour de Dali et Theodora (déjà quasi sold-out!).

Vendredi 23 mai: plein feu sur les découvertes et la veine alternative avec, notamment, Jenny Hval et son avant-pop performative, suivie par une “Bota By Night” aux accents pop-latino (Orangerie) ou techno (Musée).

Samedi 24 mai: journée 'belge' mettant en scène des artistes locaux avec, par exemple, Greentea Peng & Krisy.

Dimanche 25 mai: prestation événement de Stereolab, le groupe culte d'art-rock des années 90, précédé par des projets gravitant dans la même sphère musicale.

Comme chaque année, le festival proposera des créations exclusives, conçues en collaboration avec la SABAM: Billy Bultheel (14/5), Vica Pacheco (23/5), Esinam & Sibusile Xaba (23 mai) et Dorian Dumont (25/5).

A l'issue de la conférence presse, deux showcases ont été proposés en live:

  • Chaton Laveur : duo liégeois de dream-pop / kraut. Juliet et Pierre font penser à Beach House, Beak, Stereolab ou Low. Le tout chanté en Français.

  • Julie Rains: duo bruxellois composé de Julie Rens et Rowan Van Hoef; une voix féminine protéiforme (Blonde Redhead) évoluant au-dessus d'éléments organiques et électroniques aux frontières de l'ambient, du jazz et de l'electronica.

Pour plus d'infos et pour commander les tickets, c'est ici

DITZ

DITZ trans-cende !

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Ce dimanche soir a beau être frisquet, la grande foule s’est donné rendez-vous à la Rotonde du Botanique, pour le très attendu concert de DITZ. La preuve, il affiche complet depuis belle lurette. Et ses derniers passages dans notre plat pays ont déjà fait forte impression. Un an plus tôt, il se produisait en supporting act d’Idles à la Lotto Arena, mais il avait également participé aux festivals Micro de Liège et Sonic City de Courtrai.

Brighton regorge de talents musicaux. Auprès des anciens Kooks, Royal Blood et autre Fujiya & Miyagi, une nouvelle scène émerge depuis quelques années. On y recense, notamment Squid, mais aussi DITZ.

Ce soir c’est avec un peu d’avance sur l’horaire, et sur une intro des Canadiens de Big Brave, « I felt a funeral », que le quintet débarque sur les planches. Et directement le chanteur Callum Francis (dit Cal) focalise l’attention. D’abord, à cause de son look. Son accoutrement (il a enfilé une robe de couleur bleue) et sa coupe de cheveux de travesti contrastent avec sa voix rauque et son physique masculin. Mais aussi de son attitude. On dirait qu’il est possédé. Il (NDR : faut-il écrire iel ?) s’avance en front de podium, ne regardant pas le public, mais examinant les hauteurs et contours de la salle (NDR : on comprendra vite pourquoi).

Dès le titre d’ouverture, « V70 », il invite la foule de se séparer en deux, préparant un Wall of death. Enfin, un muret, vu l’exiguïté de la Rotonde. Une trentaine de fans exécutent une charge médiévale, amorçant des pogos qui seront quasi-permanents. « Taxi man » et « Four » sont soutenus par les solides interventions du batteur, rapidement torse nu. Il faut dire que la température ambiante a rapidement augmenté de quelques degrés, conférant même des allures de sauna à l’hémicycle. Et il n’y a pas que la température qui grimpe, puisque pendant un autre titre phare, « Hehe », le leader traverse rapidement la foule, alors que les spectateurs l’aident à dérouler le fil de son micro. Il escalade ensuite l’arrière de la salle et atteint les palissades plusieurs mètres au-dessus de nos têtes. Le chaos est donc autant musical (les guitares se lancent dans riffs noisy tonitruants) que visuel. Le tout pendant que Cal chante d’une voix rauque sur une musique aux relents post-punk. Évocateurs et propices au déchaînement, les titres parlent d’eux-mêmes : « I am Kate Moss » ou encore « Smell like something died here » (NDR : dont le refrain est repris par une fan à droite de l’estrade, qui semble avoir accompli le voyage depuis Brighton). « Summer of the shark », « Seeking arrangement » et l’explosif « No thanks, I’m full », évoquant le final de Gilla Band, viennent clôturer un set tout en intensité et surprises.

La bande son d’outro « I’m glad » de Captain Beefheart tombe d’ailleurs à pic pour calmer les esprits, et faire retomber la température en douceur, alors que la foule s’empresse de rejoindre le bar ou se rafraîchir sur la terrasse extérieure.

Pour celles et ceux qui ont manqué le show, DITZ revient à deux pas de la frontière belge, à l’Aéronef de Lille ce vendredi 8 mars. Malheureusement, à l’instar de nombreuses autres dates de la tournée, ce concert est également sold out.

Photos Dieter Boone ici

(Organisation : Botanique)

David Kushner

Une voix en or…

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David Alan Kushner est un auteur-compositeur-interprète américain de 23 ans. Élevé dans la banlieue de Chicago, dans l'Illinois, il a déménagé à Los Angeles, en Californie, et a commencé à publier de la musique. Ce jeune prodige s’est principalement fait connaître via Tik Tok en y postant ses chansons dont les plus célèbres, « Miserable Man » et « Mr. Forgettable », des plages issues de son premier Ep, « Footprints I Found » (2022), ont déjà dépassé le milliard de streams, en à peine un an. Son single « Daylight », paru en 2023, a également connu un succès fulgurant, devenant disque de platine quelques mois seulement après sa sortie. Ce 25 février, il a gravé un nouvel Ep 7 titres, « 20 Years From Now » et « In My Bones », un single, pour lequel il a reçu la collaboration du Belge, Lost Frequencies. David est en tournée pour défendre son dernier opus, « The Dichotomy », paru en août de l’an dernier. Il devait déjà se produire, la veille, au même endroit. Malade, il a dû déclarer forfait. Heureusement, aujourd’hui, le spectacle a été maintenu. Et le concert est, bien entendu, sold out.

Le supporting act est assuré par Jenna Raine. Née le 17 février 2004 à Westlake, au Texas, elle est actrice et s’est initialement illustrée comme membre du groupe pop exclusivement féminin L2M. Elle y a milité pendant quatre ans, avant de se lancer en solo. Elle a publié son premier single, « Us » en 2018, suivi de deux Eps baptisés « Nen » et « Be Like You », en 2019. Elle est surtout connue pour sa chanson « See you later (ten years) ».

Très jolie, elle est accompagnée d’un claviériste/guitariste/bassiste. Elle ouvre son set par « Cruise Control » et embraie par « Crickets ». Son dernier single, « 21 », est un morceau très familier que ses nombreux fans présents dans la foule semblent définitivement adorer. Après la troisième chanson, Raine remercie Kushner de l'avoir invitée à cette tournée et dédié la suivante à leur amitié. Raine siège derrière son clavier pour interpréter « Nights Like These ». A l’issue du tube accrocheur « It Is What It Is », elle invite la foule à participer à un petit concours de chant, divisant le public en deux parties pour déterminer si le côté gauche ou droit pouvait chanter ces paroles plus fort. Un petit moment court mais agréable avant d’attaquer, à la guitare, l’inédit, « Donnie's World », alors que l’auditoire éclaire toute la pièce avec les lampes de poche de leurs smartphones. Cette compo raconte la rencontre d'un sans-abri dans les rues de Londres, qui l’a marquée.

Très interactive, elle plaisante et rit fréquemment, interrompant et recommençant souvent sa chanson. Une prestation accordée à la manière d’une certaine Anne Marie (page ‘Artistes ici).

Setlist : « Cruise Control », « Crickets », « 21 », « Nights Like These », « It Is What It Is », « Donnie's World », « see you later (ten years) », « Roses ».

Le décor est sobre, sans artifices, hormis des lumières puissantes (stroboscopes, gros spots Leds et bas de l’estrade illuminé par une rampe -également constituée de lampes de même type- qui s’étend sur toute la longueur de celle-ci), six grands paravents presque transparents installés sur le pourtour et un à l’arrière d’une estrade où vont s’installer un claviériste, un guitariste/bassiste un drummer.

Enthousiaste, les spectateurs sautillent, balancent les bras en l’air de droite à gauche, en empoignant leur téléphone, la lampe allumée vers un Kushner impérial qui déboule sur le podium.

Le light show inonde la scène et la foule dans toutes les directions. Soutenu par des claviers et des beats dévastateurs et enivrants, le puissant « Darkerside » ouvre le set.

Sur les planches, David Kushner possède une présence scénique imposante. Il envoûte et capture l’attention de chacun. Il se dégage une certaine douceur de sa voix caverneuse qui flotte au-dessus de la musique, enveloppant la salle même lorsque les fans tentent de la couvrir de leurs acclamations. Il exécute ses chansons en te tenant la tête avec les mains tel un prédicateur dans une chorale.

Onze titres de la setlist seront extraits de son dernier long playing.

Mais il régale ses fans en n’oubliant pas « Mr. Forgettable », « Love Worth Saving », « Cigarettes », « Miserable Man » et « Burn », issus de ses précédents elpees.  Avant d’aborder « Burn », Kushner signale que la chanson parle d’une relation toxique qui a mal tourné et la dédie à tous ceux qui ont vécu une telle mésaventure. Cette compo met vraiment en valeur la profondeur de sa voix. Elle commence doucement et se transforme lentement en un refrain au rythme plus soutenu. Les paroles répétitives accentuent l'émotion du morceau.

Quant à « Cigarettes », malgré ses nombreux changements de rythme, ses refrains profonds dégagent une atmosphère apaisante, cool.

De temps en temps, il empoigne une gratte semi-acoustique ou électrique pour accompagner sa voix… en or.

Dommage qu’il n’ait abordé aucune plage de son dernier Ep, « 20 Years From Now ».

« Miserable Man » clôt une superbe prestation d’à peine 60 minutes. Un moment magnifique. La mer de voix se rassemble presque comme une seule entité, interprétant ‘All We Wanted Was A Place To Feel Like Home ‘, les paroles correspondant parfaitement à la mélodie.

Bien sûr il y a le rappel. Le public attend le hit intemporel « Daylight », qui a consolidé le succès de David. Déchaîné, l’’auditoire scande une dernière fois le refrain, de plus en plus fort, jusqu'à ce que Kushner réapparaisse. Dès qu'il commence à chanter, l'énergie devient électrique. Tout le public reprend le refrain avec lui, mot pour mot…

Setlist : « Darkerside », « Humankind », « Poison », « Sweet Oblivion », « Mr. Forgettable », « Dead Man », « No High », « Burn », « Heaven Sees », « Love Worth Saving », « Cigarettes », « Skin And Bones », « Buried At Sea », « You And Me », « Miserable Man ».

Rappel : « Daylight ».

(Organisation : Live Nation et Ancienne Belgique)

Louise Attaque

Amours

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Après avoir publié un premier LP, sobrement éponyme (1997), Louise Attaque récolte un succès fulgurant. Totalement inconnue du grand public, la bande à Roussel finit par envahir toutes les ondes radio. Elle lui aura toutefois fallu du temps pour trouver sa place dans l’univers musical, mais l’album finit par s’écouler à 2,5 millions d’exemplaires, promu par une tournée nationale de deux ans.

En 2001, le quatuor se sépare une première fois pour laisser la place à deux projets parallèles : Tarmac, réunissant Gaëtan Roussel et Arnaud Samuel ainsi qu’Ali Dragon, impliquant Robin Feix et Alexandre Margraff. Pour se reformer en 2005 en gravant un troisième elpee, et de splitter à nouveau en 2007, ouvrant ainsi la voie à la carrière solo de Roussel.

En 2015, le combo remet le couvert et décide d’enregistrer « Anomalie », son quatrième elpee, sous la houlette d’Oliver Som.

Arborant fièrement les 25 ans de son premier elpee, la formation décide de marquer le coup à travers une captation live dans l’enceinte du Accor Hotels Arena.

« Amours » et ses paraboles universelles constituent ainsi le synoptique parfait d’une ribambelle de titres qui tourne dans la tête des auditeurs depuis maintenant ¼ de siècle.

Un opus sans réelles surprises, mais d’une qualité indéniable. De « Les Nuits Parisiennes », en passant par « Léa » ou encore « Ton invitation », les chansons rappellent, s’il en est, l’étendue du talent d’un combo qui aura marqué toute une génération. Sans oublier, la voix remarquable et éraillée de son leader qui procure une richesse absolue dans la recherche d’émotion.

Au-delà de la signature vocale, il y a la plume également : unique, incisive, touchante, légère et accrocheuse. Autant de qualificatifs qui procurent à l’ensemble des compos une beauté simple, mais tellement sincère.

Archet à l’épaule, Arnaud Samuel apporte un vent de fraîcheur aux compositions, comme sur cette longue intro « Cracher nos souhaits » rappelant ainsi que l’instrument à cordes occupe une place de choix dans l’identité du band.

La basse de Robin Feix vient, quant à elle, envelopper les compositions de sons graves et francs. Si cette dernière se révèle, la plupart du temps, plutôt discrète, elle prend une dimension toute particulière sur « Si l’on marchait jusqu’à demain ».

L’album est enregistré comme si l’auditeur devenait spectateur. On découvre ainsi un Roussel particulièrement communicatif et amuseur lorsque, accompagné de ses musiciens, il joue en boucle une même suite d’accords jusqu’à ce que l’impulsion du public soit suffisante pour passer à l’accord suivant (« Fatigante »).

Influencé par la musique anglo-saxonne, c’est dans la langue de Voltaire que GR dispense ses incantations jubilatoires. Et comme frontman, il raconte perspicacement le quotidien, ses joies et ses travers.

Le long playing est un condensé de 18 titres d’une carrière jubilatoire, dont un duo inédit avec Matthieu Chedid pour une reprise électrique et vraiment percutante du « Encore et Encore » de Francis Cabrel.

Mais ce que l’on retiendra le plus, c’est la nuance, la subtilité et l’intensité du format. Sans en faire des tonnes, l’artiste aux multiples facettes et son team parviennent (encore) à fédérer.

Aucun doute, avec « Amours », Louise … contre-attaque !

Adé

Inside Out Mvmt

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Dès l’âge de 17 ans, Adélaïde Chabannes de Balsac, aka Adé, se forge un nom dans la chanson par l’entremise de son groupe, Therapie Taxi, drivé par Raphaël Faget-Zaoui. Le duo sera vite rejoint par Félix Gros et Renaud Bizart.

Placé sous les feux des projecteurs par le provocateur « Salop(e) » en 2016, le groupe connaitra un joli succès avant de se dissoudre en 2021, notamment en raison de la pandémie de la Covid-19. Mais pas seulement, les uns et les autres ayant une soif de liberté artistique.

Adé traverse alors une période plus calme, limitée à quelques collaborations musicales. Mais le goût de la musique remonte à la surface. Elle s’exile au Etats-Unis pour y enregistrer un premier album, dont le single « Tout savoir » récoltera en quelques mois, le seuil des 2,5 millions de vues sur la plate-forme Youtube.

Alors que son premier essai « Et Alors ??? », sorti en 2022, lorgnait vers une pop-country gentillette, voire virginale, « Inside Out Mvmt » prend un virage à 180 degrés et propose un son nettement plus franc et incisif, en prenant la forme d’un rock chargé de testostérone qui navigue parfois à la limite du du punk-rock (« Toujours + ». De quoi désarçonner les fans de la première heure.

Grâce aux guitares cinglantes, parfois à la limite de la saturation, « More Love » se révèle plus brut, mais homogène, le contenu rappelle la décennie 90/2 000 ; ce qui devrait ravir les amateurs du genre.

Un opus au sein duquel l’artiste s’épanche avec introspection et conviction sur l’intimiste « Forts », où elle dévoile ses émotions, tout en revendiquant les injonctions de son métier (« Ca va aller »).

Tout au long de « Inside Out Mvmt », la demoiselle endosse à merveille un rôle qui n’est pas sans rappeler le côté ténébreux qui caractérisait Thérapie Taxi pour le fond ou encore Dolly, pour la forme, sans oublier ces soupçons d’électro qui surprennent, à l’instar de « Open Up » et « La Nuit » ou encore ces jolies ballades qui apaisent, comme ce puissant « Play Pause ».

Finalement, Adé est une jeune femme capable de nous réserver plein de surprises et qui, loin de rester dans sa zone de confort, réussit à nos offrir une œuvre sincère, spontanée, et d’une authenticité redoutable.

Enfin, un disque qui fait du bien !

Oscar & The Wolf

Taste

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Max Colombie, à la ville, est une figure de proue de la musique noir-jaune-rouge. Et il le prouve une fois de plus sur son quatrième album, succédant ainsi à « Entity » (2014), « Infinity » (2017), et « The Shimmer » (2021).

Si dans le passé, il usait de métaphores pour se cacher, « Taste », apparaît comme une mise à nu, l’artiste ayant pris le pli de s’exprimer librement, presque de manière autobiographique, sur des sujets aussi sensibles que dangereux : sa dépendance à la drogue et à l’alcool, sa dépression et une rupture. Une constante dans ce milieu, à l’instar de Stromae ou Billie Eilish.

Colombie narre, ici, lucidement, une facette introspective de sa personnalité partagée entre ombre et lumière, notamment lorsqu’il évoque la naïveté dont il a fait preuve, à travers la plage titulaire « Pretty Little Thing ».

« Taste » s’ouvre vers de nouveaux cieux, tout en reniant pas le passé de son auteur. Une manière pour l’artiste de livrer sa propre vision de la rédemption, dont on remarquera la progression dramaturgique à travers son point d’orgue, « Oh Boy ».

Si le disque se veut pop et parfaitement taillé pour les dancefloors, il n’en est pour autant léger, se distinguant par ses influences avant-gardistes qui constituent le fer de lance du Belge comme sur « My Rainbows » ou encore « Spill My Liquor ».

Et lorsqu’il utilise l'AlterBoy (sorte de vocoder), sa voix possède une octave de plus et ressemble alors à celle d'une très jeune fille, ce qui lui confère quelquefois un caractère virginal.

Presque autobiographique donc, la direction artistique de « Taste » se veut pourtant parfaitement joyeuse et festive, Colombie réussissant le coup de génie de proposer un format diablement lumineux et durablement sublime, marquant ainsi un tournant décisif dans sa jeune carrière.

Si Max Colombie étant jusqu’alors le loup, Oscar and the Wolf se transforme peu à peu en agneau avec en toile fond cette juste superposition d’éléments comme le rythme, le son, et la couleur d’un album dont on ne retiendra que le meilleur.

« Taste » constitue le mariage parfait entre perfection, précision et exaltation.

 

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