Dean Wareham fait partie de ces artistes qui n'ont jamais cherché à se mettre en avant. Il aura donc fallu attendre qu'il passe le cap de la cinquantaine et des 25 ans de carrière pour se lancer enfin dans la réalisation d'un album solo. Mais l’attente valait la peine, car l'Américain né en Nouvelle-Zélande livre ici un remarquable LP.
Si ce nom ne vous dit rien, les groupes au sein desquels il a évolué sont pourtant des icônes pour bon nombre de fans de rock indépendant. En effet, il a tour à tour milité chez les fantastiques Galaxie 500 (dont les deux autres membres formeront ensuite Damon & Naomi), Luna (en compagnie de Stanley Demeski des Feelies et Justin Harwood des Chills), et enfin Dean & Britta, soit auprès de son épouse.
Une épouse dont il est à présent séparé mais qui hante les thèmes de la plupart des chansons puisque celles-ci évoquent, souvent avec humour, toujours avec honnêteté, les tensions et aléas qui surviennent inexorablement dans toute relation amoureuse de longue durée.
Après avoir publié un excellent premier maxi en 2013 ("Emancipated Hearts") qui lorgnait vers les contrées peuplées de reverb de Galaxie 500, le nouvel elpee jouit d'une production moins axée sur les effets. Rarement dans sa carrière, la voix de Wareham a été captée telle quelle, sans aucun fard. Elle n'en est que plus émouvante et se rapproche parfois étrangement de celle de Vic Chesnutt voire même de Dan Treacy (Television Personalities). "Heartless People" ou "Happy & Free" auraient d'ailleurs pu avoir été composés par ces deux génies de la chanson poignante. Précisons tout de même que votre serviteur voue un culte à ces trois artistes et que les réunir est peut-être très personnel.
Soit, l'émotion est là et la production dépouillée et assez classique finalement de Jim James y est sans doute pour quelque chose. Une collaboration qui coulait de source puisque Dean est un fan inconditionnel de My Morning Jacket depuis la parution de leur premier opus.
L'album reste tout de même du pur Wareham et réjouira les aficionados. Le spectre du Velvet n'est jamais loin ("My Eyes Are Blue") et les sonorités étirées et éthérées des soli de guitare demeurent la marque de fabrique ("I Can Only Give My All", "Holding Patterns"). On épinglera enfin l'introspectif et délicat "Love Is Not A Roof Against The Rain" où Dean se demande ce qu'il a fait de sa vie dans une atmosphères très sixties.
"Dean Wareham" est un disque de chevet, intemporel. L'œuvre, à la fois romantique et sarcastique, d’un artiste qui n'a plus rien à prouver et livre son coeur à ceux qui veulent bien l'entendre. Rien n'est calculé. Une leçon de sincérité.