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Cali

Un show épuré, mais d’une intensité rare…

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Entre folklore et fêtes, Mons est une ville historiquement et culturellement riche. Elle s’est d’ailleurs vu octroyer le titre de Capitale Européenne de la Culture, en 2015.

Elle accueillait, en son sublime théâtre, un lieu hautement symbolique au style néo-classique, ce samedi 24 février 2024, un artiste de choix, Cali.

À mi-chemin entre chanson française et rock, Bruno Caliciuri, à l’état-civil, revendique depuis toujours une position d'artiste concerné par les problèmes de société et du monde, sans hésiter à s’investir publiquement.

Véritable touche-à-tout, Cali multiplie ses engagements, tant dans l’univers du théâtre, de la poésie, de la littérature que, bien sûr, de la musique.

Ce soir, il est accompagné de Steve Nieve, brillant musicien, mais surtout claviériste d'Elvis Costello, qui a aussi travaillé et joué pour Morrissey, Paul McCartney, Mick Jagger, David Bowie, Vanessa Paradis, Alain Bashung ainsi que Daniel Darc ; et est resté un grand ami, jusqu’à la fin, de Lou Reed et Laurie Anderson.

Steve et Cali se connaissent bien. Le premier a participé à l’enregistrement de plusieurs albums du second, dont l’hommage à Léo Ferré, « Cali chante Léo Ferré », publié en 2018…

D’une capacité d’environ 500 personnes, la salle est bondée. Ce théâtre ‘à l’italienne’, avec ses balcons et ses murs drapés de velours grenat, est le parfait endroit pour des spectacles intimistes.

C’est sans doute pourquoi il a choisi cet endroit afin de fêter les 20 ans de « L'Amour parfait », son premier opus paru en 2003, mais suivant la formule piano/voix, alors qu’en général, il se produit en compagnie d’un groupe.

Alors qu’il est un peu plus de 20 heures, l’homme de petite taille et son comparse bardé d’un bandonéon, grimpent sur le podium en chantant « Roberta », une compo issue de l’elpee « Menteur ». La toute première claque d’une série puisque plein d’autres déferleront comme un rocher qui déboule sur une route à toute vitesse et que l’on ne peut éviter.

Très inspiré et inspirant, Cali possède en lui de grandes valeurs humaines. Il a ce besoin du contact avec le public. Ni une, ni deux, il prend la main d’une petite fille au premier rang et l’invite à monter sur scène pendant « Sweetie » ou encore s’approche de cette femme enchantée de porter un pull du même coloris que celui du troubadour tout en s’amusant sur « La fin du monde pour dans 10 minutes ». Et si la vie ne tenait qu’en quelques secondes d’une poésie fine ?

Les doigts du pianiste glissent sur les ivoires dans un exercice de style virtuose, nous réservant d’impressionnantes descentes fracassantes de plusieurs gammes. Un concert où il fait aussi bon d’entendre que de voir.

Alors que jusque-là, il était resté très intimiste, il adopte tout à coup un ton plus pêchu, tantôt grâce à l'utilisation d’une boîte à rythmes sur « Menteur » ou encore sautillant de siège en siège en clamant ‘mon amour’...

Puisque l’enjeu est de rendre un hommage à ses débuts, Bruno embraie par « C’est quand le bonheur », avec en toile de fond, un écran géant reproduisant son image et celle de son chat, ravivant l’illustration de la pochette de cet LP.

Un des titres majeurs dans sa carrière qui lui a permis de se faire connaître auprès du grand public.

Une compo miroir, car malgré la reconnaissance, le succès, les rencontres, les critiques positives et le rendu du public, tout reste relatif. La seule, vraie et unique question serait ‘C’est quoi le bonheur’ ? Il ne lui reste plus qu’à affronter les méandres de la vie et à arracher le précieux sésame.

Un bonheur prétendu partagé en tout cas par les quelques centaines de personnes présentes ce soir.

Cali est on ne peut plus heureux de célébrer cet anniversaire avec le public belge qui le lui rend bien depuis le début de sa carrière.

Entre amour désordonné, hasards de l’existence et affres du temps passé, l’artiste se livre joyeusement tout au long de « Elle m’a dit », une compo empreinte de nostalgie, écrite seul dans une petite chambre, lors d’une rupture fracassante. Il n’hésite pas à clamer qu’il ‘s’est fait jeter comme une merde’. De quoi raviver chez certains de vieux souvenirs que l’on pensait définitivement enterrés.

Cet inconditionnel de U2, Simple Minds, The Waterboys ou encore Hubert-Félix Thiéfaine, sait se montrer humble et empathique. Il raconte avoir reçu la demande d’un fan dans sa loge au cours de l’après-midi. Sa mère n’a d’yeux que pour lui et fête son anniversaire ce soir. Quoi de mieux, dès lors, que l’icône de la chanson française lui offre un bouquet de fleurs…

Sans hésitation, Caliciuri s’exécute sur l’éblouissant « Pensons à l’avenir », tandis que Nieve, dans un français approximatif, se charge des vocalises avec une jubilatoire colère qui masque mal l’infinie tristesse et le désespoir de ne pas injurier cet avenir qui semble à nouveau prometteur.

Un moment inoubliable pour les artistes et cette dame dont la joie irradiait sur son visage et le public. Les yeux, d’abord embués, ont ensuite laissé place à des larmes qui se sont mises à couler, inévitablement, sur les joues.

Lorsqu’il ne caresse pas les ivoires, Steve, multi instrumentiste dans l’âme, se consacre au mélodica (un instrument de musique à vent, plus précisément à anches libres) ou encore au xylophone dont il joue en intro sur « Tes désirs font désordre », un morceau aux accents dramaturgiques. Et il est à l’aise sur tous ces instruments.

Bruno fixe tendrement sa propre image projetée en filigrane, contemple le temps passé et revit les moments intenses à travers le rétroviseur de sa vie. Il remercie l’ange qui lui a porté la main sur l’épaule lorsqu’il était petit tout en fixant le ciel, le regard vide, s’interrogeant d’une part sur cette double décennie passée et d’autre part sur la fierté de ses parents maintenant disparus.

Et puis, il passe au « Grand Jour est Arrivé », une comptine fébrile et immensément positive où il est question de prendre le temps de savourer sa séparation sur fond d’humanité et l’auto-flagellation, le tout posé sur drap d’humour léger.

Après ses nombreuses ‘turpitudes’ et voltefaces, le Perpignanais se pose au côté de son musicien et entame paisiblement un « Fais de moi ce que tu veux ». Le public s’émerveille devant la complicité qui s’opère entre les deux compères.

Cali prend ensuite place derrière le piano et, en véritable mélomane, s’approprie instinctivement l’instrument. Steve quant à lui, quitte l’estrade, plonge dans la fosse, armé de son mélodica pour un « Différent », qui ne laisse personne indifférent…

Interprété en mode piano/voix, « Tout va bien » constitue un des moments forts du concert. Un morceau au cours duquel on discerne un peu mieux la face obscure des textes de l’enfant perdu et les cicatrices du temps passé.

Un show épuré, mais d’une intensité rare ! Tout y est parfait. Le spectacle, Cali, son musicien, sa complicité avec le public, le choix des chansons, la richesse des émotions et « L’Amour parfait », chanté tantôt en français, tantôt en anglais, prouvant une fois de plus qu’une amitié sincère et durable lie les deux personnages.

Sous une expression toujours aussi théâtrale, en mode piano/voix, Cali est parvenu à imposer son style en revisitant les chansons d’un album devenu culte et à transformer des épreuves difficiles en épisodes énergiques grâce aux variations ludiques et aux mots d’une force puissante dont seul l’artiste a le secret.

Les uns et les autres s’éclipsent derrière les rideaux, le public haletant d’impatience reste sur sa faim. Il en veut encore et encore…

Les faisceaux des projecteurs déclinent, comme pour faire durer la douleur des spectateurs… lorsque soudain les notes de « Quoi » de Jane Birkin retentissent, comme pour rendre un bel hommage à la femme qui nous a quittés en juillet 2023. Une belle personne aux multiples talents, à la fois actrice et chanteuse. Un moment suspendu et un Cali tout en retenue, mais aux anges.

Il y a plus de deux heures que l’artiste se livre et pourtant il a encore de belles surprises à offrir. A commencer par cette version ultra vitaminée de « 1000 cœurs debout » où, accompagné par Baptiste Lalieu, aka Saule, il va mettre littéralement le feu. Ils se connaissent très bien, et se sont déjà produits ensemble pour « Avant qu’il ne soit trop tard », qui figure sur le dernier album de Saule, « Dare-Dare ».

Des dizaines de fans n’y tenant plus finissent sur la scène afin d’y fêter la joie, le bonheur, l’extase et un onirisme sans fin. Les sourires deviennent rires, les yeux s’écarquillent et alors que l’amour entre les générations s’invite, les différences culturelles et sociales s’estompent également.

Afin de taquiner son ami de toujours, Bruno lance pour défi à son acolyte de chanter du Led Zeppelin. En l’occurrence « Whole lotta love ». Challenge parfaitement relevé sous les cris hilares d’un public qui ne s’attendait pas à pareille surprise, il faut bien l’avouer.

Enfin, Caliciuri, à l’instar de « Pas la guerre », rappelle aux aficionados que derrière le conflit, se cache, au milieu, les enfants.

Concerné par la vie et les problèmes du monde et la bêtise des hommes, le concert de ce soir sera dédié au charismatique militant anticorruption et ennemi numéro un de Vladimir Poutine, Alexeï Navalny, assassiné honteusement alors qu’il n’avait que 47 ans.

Cali retourne définitivement en coulisses, alors que Steve s’enfonce dans la foule pour reprendre « Your Late Night Evening Prostitute » dans sa langue natale avec pour seule arme, son instrument de prédilection, le mélodica.

Cette fantaisie façon ‘Cali 2.0’ aura duré en tout et pour tout pratiquement deux heures trente. L’homme dont la réputation est de mettre le feu partout où il passe n’a pas failli à la règle. Une fois de plus, mais certainement pas une fois de trop.

 

 

 

 

 

Califone

Villagers

Écrit par

25 ans de carrière déjà pour Califone, la protéiforme formation emmenée par l’ex-Red Red Meat, Tim Rutili. Son rock expérimental rayonne depuis plus de 2 décennies, de Chicago à Los Angeles, et revêt des habits particulièrement accessibles sur cette nouvelle œuvre mêlant habilement power-pop (« McMansions »), folk (« Villagers », « Skuknkish ») ou r’n’b mutant à la Lambchop (« Eyelash »). Un mix charmant et mélancolique, d’apparence simple mais d’une réelle complexité sonore, bercée par la voix chaude de Rutili. Une belle porte d’entrée dans un univers unique qui pourrait s’ouvrir à un large public…

Califone

Le village de Califone

Écrit par

Le nouvel elpee de Califone, « Villagers », sortira ce 19 mai 2023. Pour cet opus, Rutili s’est concentré sur l'endroit où l'émerveillement et le bonheur s'entremêlent alors même que les choses se désagrègent…

Enregistrées dans quatre villes et renforcées par un groupe de collaborateurs comprenant des collègues de longue date comme Brian Deck, Michael Krassner, Rachel Blumberg et Ben Massarella, les neuf compositions de l'album oscillent entre grooves tendus et explorations brutes en studio, mélangeant sans heurt des éléments de l'or AM classique, des expérimentations électroniques, des harmonies de Laurel Canyon et de la musique concrète dans une géographie sonore sans horizon.

Ce caractère illimité est omniprésent dans "The habsburg jaw", qui arrive en avant-première de l'album, accompagné d'une vidéo hallucinatoire et désarmante réalisée par Rutili lui-même. Et elle est disponible

 

 

Cali

La vie n'est pas une caisse d'épargne !

Écrit par

À mi-chemin entre chanson française et rock, Cali revendique depuis toujours une position d'artiste concerné par les problèmes de la société et du monde et n'hésite pas à s’investir publiquement.

Véritable touche-à-tout, Cali multiplie ses engagements, tant dans l’univers du théâtre, de la poésie, de la littérature que, bien sûr, de la musique.

« Ces jours qu’on a presque oubliés », son nouvel opus, paraît ce 14 octobre 2022 ».

Tout au long de ce nouvel elpee, le troubadour de la chanson française s’expose encore un peu plus en opérant une véritable mise à nu.

Humaniste, mais surtout profondément humain, Cali se confesse avec une sincérité désarmante tout en affichant un bel élan d’empathie.

Il cause finalement de ce qu’il connaît au fond le mieux : lui-même.

Sur ce disque, tu relates des moments forts vécus en compagnie d’êtres chers ; des femmes essentiellement, parties, quittées, envolées. Signaler leur disparition est-il le meilleur moyen de les garder auprès de soi ?

Mon prochain album parle de la disparition des femmes ? Ah bon, je ne sais pas trop... (rires). Elles ne peuvent pas partir ! Tu sais, j'ai perdu ma maman à l'âge de six ans. Pourtant, je lui parle tous les jours. Je lui raconte ce qu'elle n'a pas vécu. Elle est avec moi tout le temps. Même chose en ce qui concerne mon papa. Plus on avance dans l'âge et plus les proches disparaissent. J’ai l'impression que ce sont des anges. Ils sont toujours là, autour de nous, même si nous n'en avons pas conscience. Je ressens le besoin de l’extérioriser, que ce soit dans les bouquins ou dans les chansons.

Mais pour avancer, ne vaut-il pas mieux déchirer la page que de la tourner ?

Non, c'est une erreur ! Les enfants sont toujours là ! Ce sont eux qui tirent le chariot. Il ne faut jamais oublier ce que ces personnes ont laissé. Jamais, je n'oublierai le profond respect qu'avait mon père pour les êtres humains. Je me souviens que lorsqu'il dessinait des maisons derrière son bureau, des gens venaient le voir parce qu'ils étaient dans l’incapacité d’écrire. Il lui arrivait parfois de rédiger des lettres d'amour. Il voulait les protéger tout simplement. Je considère, quelque part, que c'est lui qui m'a montré le chemin. Je reste persuadé que le plus intéressant et le plus important, c'est de tenir la main des êtres humains et d'avancer tous ensemble. Je n'ai pas beaucoup connu ma maman. Mais je sais juste, en regardant sa photo, que c'est elle qui me donne l'envie de sourire aux autres. Tu sais, plus le temps passe et plus j'y pense. Quand on plonge dans l'enfance ou l’adolescence, on se remémore ces moments d'une intensité rare où la vie était devant nous auprès de ces femmes et de ces hommes dont la mission consistait à nous protéger. Lorsque je me réfugie dans ces souvenirs, je me sens préservé. Aujourd'hui, le monde est devenu tellement difficile à cause de ces sacs de chagrin et toutes ces guerres. Quand on était innocent, le cœur disait ses vérités. J'essaie parfois d'aller les chercher. Je ne veux rien effacer

En amour, lorsqu’on se quitte, la plupart des ex sont persuadés avoir perdu du temps en compagnie de cette personne. Et si l’on partait plutôt du principe, qu’au contraire, c’est gagner du temps sur la vie parce que chaque rupture permet d’avoir une angulaire précise et d’affiner ses postulats ?

Purée, j'aime cette réflexion ! Oui, je partage totalement ton point de vue ! Parfois, quand ça va trop bien, j'ai la fâcheuse tendance à me tirer des balles dans le pied. Les blessures permettent aussi de se poser. Je crois que c’est en tout cas la position à adopter en ces circonstances.

Il y chez toi cette volonté de ne jamais abdiquer et de s’enivrer par et dans l’amour et ce malgré ces années qui passent. L’amour est-il le seul intérêt de la vie ?

Oui, bien sûr ! Inconsciemment, j'écris des chansons qui plaisent aux gens. Elles me permettent aussi de tourner. Mais composer, c’est égoïstement prendre du temps pour soi et soigner ses propres blessures. Ce n'est que de l'amour. Que l’on aime ou que l’on soit aimé, il existe cette petite étincelle. Le mal du siècle, c'est la solitude. Quand personne ne t'aime, tu deviens un fantôme qui ne sert à rien. Tu sais, on vit, on meurt. On s'en fout. La vie n'est pas une caisse d'épargne !

L'amour se consomme et se consume aussi...

Oui, tu as raison, l'amour se consomme et se consume. L'amour, c'est comme un cheval, il traverse notre destin, sans savoir où l'on va. Mais, un jour ou l’autre, il faut lui donner à boire. L'amour, c'est pareil, il faut le nourrir. Vivre cette vie magnifique appartient à mes contradictions et mes difficultés. Je ne peux pas être à mille pour cent ni avec l'être aimé, ni les êtres aimés. J’en déduis que l'amour s'en va, mais lorsque je reviens, il revient. Mais quand je ne suis pas là, il n'est pas là non plus.

Les individus heureux en amour perçoivent-ils le sens de tes chansons ?

Je n'en sais trop rien ! Je crois qu’ils comprennent mes chansons, car il ne s'agit pas de philosophie. J'aime l'idée d'attraper des mots qui m'arrachent le ventre. Ces mots ne sont pas les plus compliqués. Me font-ils du mal ou du bien ? Je pense qu’ils peuvent faire du mal ou du bien aux personnes qui sont à mes côtés. Et puis surtout ce que je vis, d’autres le vivent tous les jours en rencontrant des situations différentes. Certains me témoignent d’événements incroyables et vont percevoir dans mes chansons un contenu que je n’aborde même pas moi-même.

J'ai eu la chance de pouvoir écouter ton dernier opus et j’ai l’impression que l’acoustique permet de s’approprier et d’exprimer au mieux cette intimité...

Je partage entièrement ton avis ! Je me suis réveillé un matin, chez moi, avec un tas de chansons. Je suis un très mauvais technicien, alors je dépose mon téléphone, j'allume le dictaphone, je joue du piano et de la guitare et j'y pose ma voix. J'enregistre en compagnie de Julien Lebart, un ami de longue date et un pianiste hors pair, qui a réalisé le disque avec moi. J'adore ce gars, il m'accompagne depuis le début. Il n'est pas présent aujourd'hui. Je n'ai pas envie d’accepter la musique que l'on me propose si elle ne me ressemble pas. Ce matin, j'ai écouté Johnny Cash, Bruce Springsteen (« Nebraska ») ou encore Bob Dylan. J'aimerais que le prochain Cali ressemble à ça. Pour ce disque, j'ai placé le micro à 1m50, j'ai pris l'harmonica et ma guitare. On a fait une prise. Steve Wickham des Waterboys (NDLR : en 2006, Cali était monté sur scène lors du rappel accordé par la bande à Mike Scott, à l’Ancienne Belgique – à lire ou à relire ) est venu y ajouter son violon magique. Un autre ami, de la guitare flamenco. Parfois, il y a de la contrebasse aussi. Le résultat oscille entre des chansons guitare-voix et violon-guitare-voix. Ce que je souhaitais exprimer à travers ce disque, je le murmure encore un peu plus ici. Nous allons bientôt fêter les 20 ans de la sortie de mon premier album, « L'amour parfait ». A côté de cette tournée, une autre s'intitule ‘Ne faites jamais confiance à un cowboy’. Je suis seul sur scène avec ma guitare. Dommage que ce soir, mon groupe et moi n'ayons pas le temps, sinon nous aurions interprété quelques compos. Mes amis sont très rock. Ils ont arrangé les morceaux différemment pour pouvoir être interprétées sur un banc à l’aide d’une guitare.

Tu as enregistré ces chansons en prise unique. Cette méthode te permet-elle d’accentuer le volet authentique ?

J'ose espérer que ceux qui empilent les choses le font de manière authentique ! Quand tu as des mots et une mélodie, deux choses l’une : soit tu habilles le tout pour aller au bal ou tu préfères la nuisette pour aller au lit. La différence se situe à ce niveau ! Perso, je préfère la petite robe de mariée en lin, avec la couronne sur la tête, dans la forêt en Irlande. C'est ce que j'ai fait de mes chansons (rires).

J’ai l’impression d’être en présence un homme différent de celui que j'écoute, plein de nostalgie et d’amertume, et de celui qui prend un malin plaisir en s’appropriant la scène.

Je ne suis pas d’accord avec toi en ce qui concerne l’amertume. Je n’en veux à personne et je ne suis pas aigri ! Vraiment, je ne me reconnais pas dans cette description ! Tu sais, dans la vraie vie, je suis quelqu'un de pétillant. On ne le voit pas forcément ici parce que je viens juste de me réveiller (rires). Mais, crois-moi, habituellement, je suis un gros déconneur. J’aime faire le pitre. D’ailleurs, je me suis blessé tout récemment au niveau du ligament. Heureusement, ce n’était pas sur scène. Lorsque je me produis en live, j'aime garder le côté sauvage tout en absorbant cet amour du public. J’en profite un maximum. C’est un moment récréatif, je suis avec mes potes.

Justement, pourrais-tu nous parler des musiciens qui t’accompagnent sur cette tournée ?

En réalité, je n’étais pas certain de pouvoir tourner cet été. Finalement, nous avons décroché une vingtaine de festivals. Je suis accompagné du guitariste de Mylène Farmer, du bassiste de Peter Doherty, du claviériste de Paul Personne et du batteur de Louis Bertignac. Ce sont des amis qui font du rock ou du blues. Je leur ai dit qu'on était là pour s'amuser. Dans le bus on s’éclate. Tout comme dans la vie d’ailleurs...

Un des titres qui a permis au public de te faire connaître est « C’est quand le bonheur ». Malgré la reconnaissance, le succès, les rencontres, les critiques positives et le rendu du public, tout est relatif. Je crois que la seule est vraie question à se poser serait ‘C’est quoi le bonheur’ ?

Tu sais, la vie d’artiste est faite de hauts et de bas. J’aime dévorer les biographies et les autobiographies. Est-ce que tu as lu celle de Springsteen intitulée ‘Born to Run’ ? Je te la conseille vivement ! Ce type est un extraterrestre ! Il ne faut pas nécessairement aimer l’homme pour lire cet ouvrage. C’est quelqu’un qui connaît l’être humain. Celle de Charlélie Couture décrit également des périodes de son existence très hautes et très basses. Pareil pour des gars comme Hubert-Félix Thiéfaine ou Bernard Lavilliers. Ce sont des totems, ils sont toujours là ! Le monde musical côtoie beaucoup de fake et de faux ! Heureusement que parfois tu croises des gens vrais dans un instant de grâce…

Lors d’une interview accordée à Muziczine, il y a quelques années, tu déclarais : ‘Pour moi le bonheur, ce n’est ni le passé, ni le futur, mais ces moments où l’on réalise ce qu’on vit sur l’instant’. Alors que dans le passé, tu semblais vivre l’instant présent, aujourd’hui, tu me donnes l’impression de te questionner davantage…

Je me souviens que lorsque j’avais 13 ans, sur la place de mon village, j’avais prédit que lorsque je serai grand, je deviendrai troubadour et que j’aurai plein d’enfants. Je suis devenu troubadour. Pour ce qui est des enfants, là aussi, j’ai accompli mon rêve puisque j’en ai quatre. Je souhaitais aussi vouloir mourir en Irlande. Navam (NDLR : une ville du comté de Meath, en Eire) me plaît beaucoup. J’aimerais effectivement un jour m’y établir. Mes musiciens irlandais y habitent et il m’arrive de leur rendre visite. Perso, le bonheur serait de vivre dans un petit cottage auprès de mes enfants et regarder les moutons et la mer, tout simplement.

Il y a aussi cette notion du temps qui passe. Dans l’une de tes chansons, tu cites : ‘Mes boucles noires ont disparues/Je perds mes cheveux sur le dessus’. Quel est ton rapport au temps et comment l’appréhendes-tu ?

Je suis fasciné par le temps ! J’ai assisté au concert des Rolling Stones, la semaine dernière, à Paris. Malgré ses 79 printemps, Mick Jagger est impressionnant de vitalité. Quand on dit de quelqu’un de cet âge qu’il est en forme, on sous-entend qu’il arrive à marcher, à se nourrir, etc. Jagger sur scène est un gosse. Ses musiciens, pareil. Ils ont ce soir-là saupoudré le public de quelque chose de magique. Je dois dire que ce show m’a communiqué une énorme pêche. En ce qui concerne le rapport au temps à proprement parler, tout va trop vite, comme un élan. Il y a un instant, nous parlions de « C’est quand le bonheur ». L’album dont est issu cette chanson est paru en 2003. Tu imagines, l’année prochaine, je fêterai ses 20 ans ! J’ai l’impression que c’était hier ! Tout le monde vieillit, c’est étourdissant ! Mais attention, ce processus ne me perturbe pas pour autant ! Sans doute, faut-il en profiter davantage, encore plus croquer la vie et faire n’importe quoi pour rigoler.

L’hommage rendu à Alain Souchon est émouvant. Pourtant, il y a plein d’autres artistes qui auraient mérité autant d’égards. Pourquoi lui et pas un autre ?

C’est une histoire particulière ! Il ne me connaissait pas, mais il est parvenu à se procurer mon numéro de téléphone et m’a passé un coup de fil. A l’époque, j’étais à Orly. Il adorait mes chansons. J’estime ce geste tellement touchant. Je l’ai croisé à plusieurs reprises ensuite. Souchon est un homme bourré de talent, d’une gentillesse et d’une tendresse exemplaires. Au fond, aimer, c’est admirer. Et admirer, c’est aimer. Il m’a peut-être influencé. Je crois qu’un jour, je vais consacrer une chanson à chacun de ces personnages. Ce sera une manière de leur dire merci.

Dani mériterait également sa place…

Je viens de perdre effectivement mon amie Dani. Sa disparition me bouleverse totalement. Je me suis saisi de mon stylo et j’ai griffonné quelques lignes en sa mémoire. Est-ce l’ébauche d’une chanson ? Je le pense, oui ! Je vais continuer à lui murmurer plein de choses à l’oreille. Si je réalise une rétrospective de mes chansons, j’y ai déjà cité pas mal de monde. Je viens du bal de village. Je faisais exactement ce que les gens souhaitaient. J’y prenais énormément de plaisir. Les gens adoraient parce qu’on savourait ce qu’on faisait. Même si certaines compos étaient plus obscures, les gens dansaient quand même, uniquement parce qu’on parvenait à les jouer et qu’on les appréciait. Pourquoi d’ailleurs, aurions-nous dû prendre le parti de s’attaquer à des chansons que nous n’aimions pas ? Il m’arrive aussi parfois de m’approprier celles des autres.

Tes long playings sont très différents. Comment se construisent-ils ? Le label impose-t-il une direction ou un genre particulier ? Que se passe-t-il entre la page blanche et l’album ?

Je conseille aux jeunes qui débutent d’engager un réalisateur. Je ne le voulais pas. C’est pourtant une démarche importante parce qu’il va amener un regard extérieur primordial, tout en y apportant des conseils judicieux. Daniel Presley a apporté sa collaboration lors du premier album. Il avait été conçu à l’origine en guitare/voix. Presley a pu y apporter sa patte sur les arrangements. J’ai pu bénéficier, au cours de ma carrière, du concours de Mathias Malzieu (NDLR : le chanteur/compositeur de Dionysos), Scott Colburn qui a bossé avec Arcade Fire ou encore Geoffrey Burton, guitariste belge. Puisqu’il existe un contrat qui te lie à ces personnes, ils possèdent un droit de regard sur ce que tu fais. Effectivement, il faut prévoir des chansons pour la radio, c’est une question inévitable. Tu sais, il semble que je commence à me faire vieux pour y passer. Je crois qu’il va falloir sans doute attendre encore un peu avant d’y être à nouveau programmé… dans la catégorie des vieux (rires). Nous sommes quelques-uns dans cette situation. Personnellement, je m’en fiche. Pour ce dernier disque, je suis en licence. Par conséquent, je suis responsable du produit fini. Julien (Lebart) et moi, nous ne nous sommes posé aucune question. Quand on crée de la musique, c’est pour être libre. Malheureusement, souvent, ce n’est pas le cas. Il s’agit d’un commerce, il faut vendre. Aucun patron ne me dirige et je ne suis pas le patron non plus. Ceux qui m’entourent sont davantage des conseillers. Jamais ils ne me donneront des directives contraignantes. En y réfléchissant, c’est quand même un luxe (rires).

A t’entendre, l’industrie du disque est une machine qui pourrait bouffer de l’intérieur les artistes…

J’ai écrit mon troisième roman ‘Voilà les anges’ sur cette thématique. Je débute cette histoire par un chanteur aigri. Mon dernier spectacle s’ouvre par ce même type de personnage. L’histoire d’un clochard, qui après s’être endormi avec sa guitare sur un banc, s’éveille face au public. Je raconte aux spectateurs qu’avant j’étais chanteur. Je leur demande s’ils s’en rappellent pour enchaîner par « C’est quand le bonheur » et une kyrielle de belles chansons. J’explique au public que je ne pouvais plus écrire parce que j’étais en quelque sorte empoisonné et que c’était malhonnête. Aujourd’hui, j’écris des chansons pour les jeunes qui passent et me regardent. C’est un peu le thème du spectacle.

Arno, un artiste belge, nous a quittés tout récemment. Sa seule limite était l’imagination. Touche à tout, tour à tout acteur de théâtre, écrivain, et chansonnier, je crois que vous avez ce point commun. Est-ce que je me trompe ?

Je me réfugie souvent derrière cette phrase ! Tantôt, on parlait de gentillesse, lui était un gentil. Certains l’ont connu plus que moi, mais nous avons eu l’occasion de partager quelques nuits ensemble. Arno était un protecteur. Un jour, en compagnie de ma famille, nous l’avons croisé à Bruxelles. Je lui exprime mon envie de manger des moules frites. Il se gratte la tête d’un air interrogatif. Une vieille dame s’approche et lui explique qu’il ne s’agit pas de la saison des moules tout en lui tapant la tête avec un parapluie. A cet instant, il y avait tout de la Belgique. Quand on regarde dans le rétroviseur de sa vie, il a creusé cinquante millions de choses. Sa mort provoque aujourd’hui de la souffrance, du chagrin et du désespoir, mais à côté de cette compassion, il y a une petite lumière qui s’appelle la vie, il faut s’y accrocher.

J’aimerais revenir sur une de tes collaborations avec James The Prophet lors d’une émission de ‘Taratata’. Vous vous étiez réapproprié magnifiquement un titre de Prince, « Purple Rain ». Chacune de tes collaborations sonne comme une évidence. Pourrais-tu imaginer un jour réaliser un album centré sur celles-ci ?

J’ai eu la chance de croiser Augustin Charnet. Nous bossions sur le projet de Léo Ferré. Ensuite, nous avons réalisé l’album « Cavale ». C’est un ami. Il n’est pas présent aujourd’hui car il s’est cassé deux doigts cet été. Cet homme m’a permis de découvrir une jeune génération, mais aussi de nouveaux sons. Je me suis beaucoup amusé lors de cette émission de ‘Taratata’. Cette jeune génération détient les clés en s’ouvrant davantage sur le monde. Il n’y a plus de limite, on chante dans la langue que l’on veut. On doit prendre exemple sur ces jeunes artistes. J’ai été subjugué par le travail de James. Ma fille, Coco, est violoncelliste et pianiste. Elle baigne dans le classique. Elle me fait écouter des musiques étonnantes qui me touchent énormément alors qu’elle n’a que 17 ans. Elle a vu le film retraçant la vie d’Elvis dont elle ne connaissait rien. Elle l’a trouvé exceptionnel. Je lui avais conseillé de regarder le ‘biopic’ pour découvrir l’homme parce qu’il est à la source de tout. Je suis très fière de ma fille. Elle vient de rentrer au Conservatoire de Paris et a obtenu 20/20 au bac de français…

 

 

Cali

Cavale

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Véritable touche-à-tout, Cali multiplie ses engagements, tant dans l’univers du théâtre, de la poésie, de la littérature que, bien sûr, de la musique. 

Pour concocter ce neuvième opus, le troubadour de la chanson française s’expose encore un peu plus en opérant un virage à 180 degrés. Surprenant quand même !

Transgressant ses propres codes musicaux, il apparaît aujourd’hui à travers un prisme électro-pop à mille lieues des pas de Léo Ferré, dans lesquels il marchait, en reprenant ses textes, dès 2018.

Bruno Caliciuri à l’état-civil, propose donc un disque à quatre mains découpé en onze chapitres qui s’inscrivent dans l’optique d’un véritable renouveau.

Bénéficiant du concours d’Augustin Charnet, réalisateur, compositeur et pianiste âgé de vingt-trois ans, il livre ici plus qu’un album, puisque « Cavale » constitue le troisième volet d’un triptyque au sein duquel figurent un livre (NDR : paru l’an dernier ‘Cavale ça veut dire s’échapper’ constitue par ailleurs la   dernière réplique de la pièce de théâtre Cowboy Mouse de Patti Smith, dans laquelle il a joué en 2014), mais aussi un court-métrage.

Les instruments organiques s’invitent tout au long de cet opus, soutenus par la voix singulière d’un Cali dont la verve est on ne peut plus prolifique et intimiste.

L’artiste traite de sujets qui lui sont chers : la quête de l’amour (« Une séparation »), l’obsession de la vie (« Je voudrais vivre heureux ») ou encore l’absence du père (« Mon fils, ma vie »).

Des thématiques qui viennent souligner une expression sonore où les guitares foisonnent, les nappes de synthés se lâchent et le drumming cogne, dans l’esprit de la pop anglo-saxonne.

Lumineuses, les plages de cet LP sont humanistes, mais surtout profondément humaines. Particulièrement introspectif, nostalgique même, Cali confesse avec une sincérité désarmante tout en affichant un bel élan d’empathie, ce qu’il connaît au fond le mieux : lui-même ; tout en regardant dans le rétroviseur les 15 dernières années de sa vie…

Cali

Les choses sont toujours bien défendues…

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Ce dimanche de Pentecôte, la ‘Caravane des solidarités’ faisait une étape dans la ville d’Ath, la cité des géants, à deux pas de la grand-place, sur le site de l’Esplanade. Une soirée toute en couleurs est programmée dans Le Magic Mirrors, un chapiteau dont l’art déco des années 20 se distingue par son parquet en chêne, ses miroirs incorporés dans de magnifiques bois sculptés, ses velours rouges et ses lustres de cristal. En outre, incomparable, l’acoustique est digne d’un studio d’enregistrement. A l’affiche, ce soir, un duo entre Cali et Steeve Nieve.

Les portes s’ouvrent à 20 heures. Un public nombreux et multigénérationnel s’est déplacé pour assister au spectacle. Il y a même une octogénaire, sa fille et sa petite-fille, ainsi que de jeunes adolescent(e)s et des aficionados venus spécialement de l’Hexagone…

Steve Nieve (NDR : il a accompagné Elvis Costello, pendant près de 20 ans, mais également et notamment bossé pour Robert Wyatt, Daniel Darc, Morrissey et David Bowie) ouvre le bal, derrière son piano. Et nous réserve un instrumental de toute beauté.

Cali débarque lors du deuxième morceau, sous un tonnerre d’applaudissements. Il va alors proposer de larges extraits de son dernier elpee, « Les Choses défendues ». Son expression est toujours aussi théâtrale, se servant de l’énergie des mots à travers ses chansons qu’il interprète avec une sincérité et une générosité notoires. Et c’est devenu une tradition, en cours de show, il se laisse porter à bout de bras par la foule… avant que des fleurs ne lui soient offertes. Steve Nieve est à nouveau sous le feu des projecteurs, en chantant un titre, derrière les ivoires. Et il y démontre encore tout son talent sur son instrument. Cali revient ensuite accompagné de deux ados, Guillaume et Alexandre ; et ces derniers vont fredonner quelques réponses aux paroles du Perpignanais… Un grand moment d’émotion ! A deux reprises, il veut mettre un terme au concert ; mais en liesse, le public réclame des prolongations… Elles seront accordées à travers une remarquable reprise du « Perfect day » de Lou Reed, qui pour rappel, était un ami de Steve… Une superbe soirée que Cali a eu le bon goût de proposer sous la forme d’un nouveau projet…

(Organisation : Solidarités)

Cali

Partager ‘ces choses défendues’… les font revivre…

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Cali, c’est ce chanteur français au bel accent ensoleillé qui dépense une énergie folle, en ‘live’. Mais cette tournée des « Choses défendues » dévoile une autre facette de cet artiste jamais à court de ressources. Quelques jours avant d’accorder son concert au Palace d’Ath (20 avril), il a consacré quelques minutes à Musiczine, alors qu’il était sur la route, en direction de Mont-de-Marsan.

Lors de ta dernière tournée, tu te dévoiles beaucoup au travers d’anecdotes, de tranches de vie. Pourquoi avoir choisi CE moment de ta carrière pour relater ces histoires ?

Ce n’était pas vraiment prémédité de les raconter maintenant. Et pas seulement par rapport à ma carrière, c’est aussi ma vie. Dont plusieurs événements m’ont poussé à me poser un peu plus. Et puis, il existait toute une série de compos plus douces que j’avais rangées dans des tiroirs, tout au fond, là où tu ne penses jamais aller les rechercher. Et là, c’était le bon moment pour finalement les ressortir et les proposer au public. Dans mes chansons, je raconte un peu mon existence aussi. Elles en décrivent certaines étapes. Parfois, tu n’as pas forcément envie de te remémorer d’anciens souvenirs. Mais là, aujourd’hui, j’avais envie d’y revenir.

Tu supplies les jeunes de croquer dans « Les choses défendues ». Cali devient-il trop vieux pour ces interdits ou au contraire, en profiter pleinement lui confère-t-il une jeunesse éternelle?

J’aime beaucoup l’idée de jeunesse éternelle mais c’est un peu illusoire. Je crois qu’il y a un peu des deux. Le fait de partager ces choses avec les gens les rend encore vivantes. Mais à un certain moment, t’as aussi le corps qui te rappelle un peu à l’ordre.

Quand tu chantes ou lorsque tu es sur scène : c’est « La vie quoi! ». Ton énergie débordante, ta sensibilité, ton partage… Où puises-tu cette intensité?

Je ne pense pas avoir une vie plus intense que la plupart des gens. Mais je profite de ce que la vie offre. Et notamment dans ces moments sur scène, c’est le moment lui-même qui est intense et donc il faut être pleinement dans ce moment et être avec lui dans l’intensité.

On te voit moins sauter un peu partout sur les planches Est-ce que tu prends autant de plaisir pendant cette tournée un peu plus calme ou est-ce que ce fou de Cali te manque?

Non, pour l’instant ce fou de Cali ne me manque pas. Il me manquera quand cette tournée sera finie. J’aurais alors envie de repartir en compagnie du groupe ; mais pour l’instant, je suis bien dans ce format de concert. C’est autre chose, pour moi et pour le public. Ce qui me permet de revisiter et de faire revivre mes propres chansons. C’est important aussi.

Justement, quelle est la réaction du public pour ces ‘one man shows’ ?

Les retours sont très positifs. Certains me disent, par exemple, avoir impression que je chante pour eux, comme s’il n’y avait que nous. J’évoque des moments de ma vie et les gens s’identifient à ces événements.

Tu reviens en Belgique la semaine prochaine. Tu nourris un lien personnel avec notre pays, il me semble.

C’est plus qu’un lien personnel. Je me sens un peu belge. J’adore venir en Belgique. Parfois, c’est là que je m’y sens le mieux. Il y a toujours un accueil particulier pour mes chansons. Et puis, me balader dans les rues de Bruxelles ou d’Ostende, par exemple, fait vibrer en moi une corde sensible.

Tu évoques aussi les gens qui t’ont artistiquement marqué pendant tes concerts. Tu parles notamment de Ferré. Si tu devais choisir une seule oeuvre qui t’a profondément touchée, ce serait laquelle ? Qu’elle soit musicale, littéraire, cinématographique…

Une seule? Wouah, t’es dur là. Parce que je pourrais en citer plein. Mais je choisirai le « David et Goliath » de Le Caravage. Cette toile m’a bouleversée.

C’est aussi un peu la tournée des anecdotes puisque tu en racontes pas mal pendant les concerts. En as-tu déjà l’une ou l’autre récente à révéler ?

Là aussi, il y en a plein. Mais il y a quelques jours, le concert qui s’est déroulé au Temple de Mulhouse était magique. L’un des plus beaux moments de musique de ma vie. Dans ce décor sublime, il y a vraiment eu ces deux heures hors du temps. Et pour en donner une autre, dans une autre salle, quelqu’un s’est manifesté pendant mon récital. En clamant qu’il était venu pour voir un concert pop/rock et pas entendre raconter ma vie. Dans la foulée, la conversation s’engage et on échange quelques mots. Et ensuite, toutes les chansons de mon répertoire, je lui ai destinées. Aussi, le regard des spectateurs se posait constamment vers lui. Finalement, ils l’ont peut-être regardé plus que moi.

On sait que tu est également attentif à l’actualité. Quel regard portes-tu sur les présidentielles françaises qui approchent?

Elles me terrifient. Cette campagne n’est plus qu’un jeu de ‘punchlines’. On ne parle plus ni de programmes, ni des idées. C’est terrifiant !

Cali

Les choses défendues

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Cali travaille toujours plus et plus vite. Un an après avoir publié « L’âge d’or », il propose des « Choses défendues », septième album studio en treize ans seulement. Originaire de Perpignan, le chanteur ne chôme pas et offre une fois encore un disque plein de vie. Parce que c’est une constante chez Cali. Il le chantait sur son précédent opus ; de quoi symboliser son œuvre : c’est « La vie quoi! ». Comme d’habitude, il incite à emprunter les beaux chemins de la douceur tout autant que les sentiers vibrant de folies, de déraison. Et ce subtil mélange est tendre et bon.

Mais on reste malgré tout un peu sur sa faim. La raison principale ? Des paroles un peu moins juteuses dans cette poésie servie par le bel accent du Sud. Si la jolie naïveté du chanteur fait souvent sa force, elle est peut-être un rien trop présente tout au long de ces quatorze plages. « Sweetie » corrobore parfaitement ce point de vue. Sans être désagréables, on sent ces morceaux fragiles.

« Les choses défendues » manquent de surprises derrière ses singles qui mènent la cadence.  « I want you » établit qu’il s’agit bien du Cali, de son style. « Je ne peux pas pleureur plus que ça » est LE titre de cet elpee. Mais derrière il manque une découverte susceptible de nous faire battre le coeur à la première écoute. Alors que lors du précédent LP, c’était le cas sur pratiquement chaque piste. Mais c’est sans doute ce qui fait le plus souffrir ces « Choses défendues » : la comparaison avec le sublime et merveilleux « L’âge d’or ». Cependant, l’émotion est toujours aussi forte. On sent un chanteur qui se livre à son public et s’imprègne du monde au sein duquel il vit. Et sur scène, il défend son répertoire de manière surprenante et grandiose. Bref, un artiste qui fait du bien, qui fait le bien, qui s’offre et donne envie de croquer dans « Les choses défendues ».

Cali

Etre chanteur, c’est devenir égoïste…

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C’est dans le cadre du LaSemo, festival à épingler pour son approche conceptuelle, originale et pragmatique, que se déroule cet entretien. Cali est particulièrement décontracté. Dix petites minutes me sont accordées. Il va falloir sabrer dans les questions, sans quoi on risque allègrement de dépasser le temps imparti.

Merci Bruno pour avoir accepté cette interview destinée à Musiczine. En fait, faut-il t’appeler Bruno ou Cali ?

Comme tu veux ! Ce qui t’arrive dans la bouche le plus facilement.

Le titre de ton dernier opus fait référence à une chanson de Léo Ferré qui date de 1966. Sa poésie était écorchée, souvent ténébreuse. Cette compo est à l’antipode de sa discographie puisqu’elle est même chargée d’espoirs. Pourquoi ce titre plutôt qu’un autre ?

Ce n’était pas prémédité. A vrai dire, elle me hante depuis longtemps. Comme tu le dis très bien, Ferré est quelqu’un qui a écrit de très belles chansons. Pour moi, c’est le plus grand des poètes. Ses textes étaient merveilleux, souvent sombres, déchirants, tout en véhiculant des revendications. Ce morceau en particulier, je souhaitais qu’il figure en dernier, parce que c’était le plus doux. Il est teinté d’optimisme. Il ouvre les bras vers l’avenir. Cette mélodie est destinée aux enfants. Ils doivent comprendre que, dans la vie, tout n’est forcément ni tragique, ni sombre. Les rayons de soleil sont à portée de main. Ils doivent les agripper et leurs vies en seront plus belles… J’ai intitulé ce disque « L’Age d’Or » pour une autre raison. Je me suis aperçu qu’il était mon œuvre la plus lumineuse.

Il y a aussi, chez toi, une sorte de mimétisme. Tu adoptes un phrasé assez proche de Ferré. Etait-ce voulu et assumé ou alors y a-t-il une part d’inconscient ?

Il n’y absolument rien de prémédité. J’écoute tellement Ferré que son esprit doit couler dans mes veines. En même temps, je suis fan de groupes tels que U2, Simple Minds et les Waterboys. Comme une éponge, je m’inspire de ces courants et puise à droite et à gauche. Mais si ça peut ressembler un peu à Ferré, j’en suis très, très fier (rires).

Ton dernier elpee a très bien été accueilli. Tu as parfois, dans le passé, essuyé des critiques virulentes. Y es-tu sensible ? Qu’as-tu envie de dire aux détracteurs aujourd’hui?

Ce métier est fait de hauts et de bas ! Je pense que les critiques sont importantes parce que c’est le premier regard sur notre job. J’ai parfois râlé parce qu’on a colporté des propos vraiment pas sympas à mon égard. Un jour, une journaliste m’a traité de fou, de malade mental. Cela ne se fait pas ! Dans ma famille, il y a des patients qui souffrent de cette pathologie et sont soignés dans des unités spécialisées. Il faut être attentif à ce que l’on dit ! J’essaie d’être le plus honnête possible dans mon travail. Je raconte ma vraie vie et je ne chanterai jamais une chanson dont je ne suis pas fier. J’ai envie de dire aux détracteurs de tout poil : ‘Si vous aimez, tant mieux. Si vous n’aimez pas, tant pis !’ Le dernier album a très bien été accueilli. Ce qui m’a fait du bien parce que j’y parle beaucoup de mes proches.

Tu as écrit une soixantaine de chansons… et il y en a plus que 13 sur ton cd. Vu la quantité de matière, pourquoi ne pas avoir envisagé de publier un double LP ?

J’en ai déjà enregistré de très longs. Mais j’ai l’impression que ce choix doit rester un coup de feu. J’aime bien l’idée que lorsque le disque arrive en bout de course, on ait envie de réappuyer sur la touche ‘play’. Lorsqu’il contient trop de chansons, on peut se sentir pris en otage en quelque sorte. Je m’aperçois que celui que je considère comme ma référence –« This is the Sea des Waterboys »– ne comporte que neuf titres. Neuf perles ! Le mien aurait pu être plus court encore, mais j’ai du mal à choisir ceux que je vais éliminer. En ce qui concerne celles que j’ai écrites, mais qui ne figurent pas sur l’album, ce sont des moments de ma vie. Peut-être que dans deux ans, elles ne voudront plus rien dire ! Elles m’ont fait du bien au moment de l’écriture, mais elles ne verront jamais le jour ! 

On a l’impression qu’à chaque album, tu ressens le besoin d’immortaliser des polaroids de ta vie. « L’Age d’Or » fait référence à une époque révolue. Est-ce une manière de dresser le bilan de ton existence ?

Je ne sais pas si c’est le cas ! Aujourd’hui, j’ai trois gosses. A l’âge de 15 ans, je me souviens avoir déclaré à des amis : ‘Qu’est-ce que l’on va faire plus tard ?’ Perso, j’avais émis le souhait d’être un troubadour et avoir des enfants. Aujourd’hui, j’ai réalisé ce rêve. Ce n’est pas de la nostalgie, ni du regret. Je voulais plutôt exprimer ma gratitude à l’égard de celles et ceux qui ont construit ma vie. L’institutrice de mon village par exemple. Elle m’a donné le goût de la lecture et de l’écriture. Elle a exercé le plus beau métier du monde. Je remercie aussi ceux qui ont suscité chez moi l’envie de pratiquer le rugby. Mes enfants également. Sans oublier, mon premier amour évidemment. J’aborde tous ces thèmes ! Oui, c’est peut être, finalement, une manière déguisée de jeter un regard dans le rétroviseur de mon existence. Se dire qu’elle est faite de belles choses. Mais de terribles évènements aussi. En fait, il n’y a pas un âge d’or, mais plusieurs, selon les différentes étapes de la vie. 

Même si cet opus est parfois plus optimiste, on te sent encore aussi parfois très nostalgique. Cette mélancolie était déjà bien présente sur le disque précédent, « Vernet les Bains », qui se réfère au village où tu as grandi…

Ce disque est plus lumineux par rapport aux autres. Mais le mot ‘nostalgie’ est souvent collé au sentiment de ‘regret’. J’ai plutôt envie de l’associer au terme ‘heureux’. Je ne regrette pas. J’ai juste besoin d’un refuge. On en a tous besoin. J’imagine que toi aussi, il y a un endroit où tu as envie de te retrouver ou une odeur d’enfance dans laquelle tu as envie de plonger. Et j’ai besoin d’en parler ! C’est comme quand on ferme les yeux et qu’on veut s’immerger dans des endroits que nous chérissions parce qu’ils appartiennent à notre passé. Ca nous fait juste du bien ! Si tu écoutes une chanson que tu n’as plus entendue depuis 20 ans, mille souvenirs remontent à la surface.

Est-ce que le processus d’écriture diffère d’un opus à l’autre ?

Je fonctionne à l’instinct. Il est très compliqué de préméditer les événements. Sous peine de dénaturer ta muse. Je ne me dis jamais ‘Allez, il faut écrire maintenant !’ Bien au contraire, chez moi, le processus d’écriture est naturel. J’aligne des mots, qui deviennent des phrases. Elles-mêmes se transforment en humeur. Les chansons découlent de ces états d’âme. Je n’ai pas d’idée préconçue sur la façon dont ce processus va se dérouler. Le premier album était marqué par une rupture. Le second, par la naissance de ma fille qui a 10 ans aujourd’hui. Parfois, des relents politiques se sont manifestés, parce que j’étais engagé (NDR : à gauche). Rien n’a jamais été prémédité ! Je crois que dans le cas présent, je n’ai pas réalisé un disque triste. Ceux qui l’écoutent me disent qu’il leur fait du bien. Je crois aussi qu’il ne faut pas faire ce que les gens attendent. Etre chanteur, c’est devenir égoïste. Mais, c’est ainsi. J’essaie de vivre dans une vie qui peut devenir très compliquée. Le seul moyen que j’ai trouvé aujourd’hui pour m’en sortir, c’est d’écrire des chansons.

Cali, certains artistes préfèrent gommer leur accent pour interpréter leur répertoire. Tu adoptes la tendance inverse. Est-ce une manière consciente de revendiquer tes origines ?

Je suis né à Perpignan. J’habite dans un petit village situé à une encablure. Je suis peut être encore un de ceux dont l’accent est le moins prononcé chez moi (rires). C’est important de revendiquer ses origines. Par exemple, je suis heureux de me rendre à Marseille et d’entendre cette prononciation si particulière. Toi, tu as un accent qui est d’ici. Je suis comme je suis et ne changerai rien.

Dans ce métier, nombreux sont ceux qui souhaitent privilégier au maximum leur vie privée. Tu parles librement de tes origines, de ta famille, … Tu as choisi de t’exposer avec ta fille sur la pochette de l’album. Quel est ton sentiment par rapport à cette notion de ‘vie privée’, sachant que tu es une personnalité médiatique ?

Je pense qu’il y a une manière d’aborder la question. Je ne tombe jamais dans le voyeurisme. Ce sont essentiellement des déclarations d’amour ! Je me réfère à mes filles Coco Grace et Poppée. Je parle aussi de mon couple. On connaît des histoires comme tous les autres. On se jette des assiettes à la tête et on se réconcilie juste après. Je chante la vie de Monsieur et Madame ‘tout le monde’ en quelque sorte. Ce qui apporte un peu de bien-être à certaines personnes. Mais, je ne me pose pas vraiment ce genre de questions à vrai dire. Je pense que mes enfants sont plutôt fiers d’avoir un père qui les raconte sur un disque. Et lorsque je suis en concert, je suis content que ma famille soit auprès de moi.

On connaît Cali, chanteur. Mais, on connaît moins Cali, acteur de théâtre. Tu as joué dans une pièce qui s’appelait « Cowboy Mouth ». Comment as-tu vécu cet épisode ? Etait-ce un ‘one shot’?

J’ai adoré cette expérience. Dans un premier temps, je l’ai abordée comme une épreuve insurmontable. Le metteur en scène m’a mis en confiance. Ensuite, je me suis laissé aller naturellement. Le pitch est amusant. Il raconte l’histoire d’un type enlevé au Chelsea Hotel, en 1971. Une femme voulait le transformer en star de rock’n’roll alors que sa famille l’attendait ailleurs. Ensuite, mon personnage tombe amoureux. C’était une aventure enrichissante. Là, debout devant le public ! Sans micro ! On entendait les réactions des spectateurs : les applaudissements, les pleurs, les reniflements, les toussotements, … Tu vois, ça c’est la vraie vie. Pendant une heure trente, faire l’amour, se battre, jouer comme des enfants avec une actrice, c’était dingue. Je sortais de là remué. Un spectacle qui a duré quatre mois ! Je veux absolument le refaire. Le monde du théâtre m’a beaucoup touché et j’ai un très grand respect pour cette immense famille. Ils sont prêts tous les soirs, sur les planches, à donner le meilleur d’eux-mêmes…

Cali

Vernet-Les-Bains

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Vernet-les-Bains. Reçu par la poste il y a approximativement... 5 minutes ? Je retourne doucement l’enveloppe, pour le plaisir de lire un ‘Exp : F-66820 Vernet-les-Bains’, terre natale de Cali.

En général, ma première réaction est d’ouvrir le boîtier, de piocher le cd, le poser sur mon lecteur et pousser sur la touche ‘play’. Pas aujourd’hui, non. Je préfère triturer la pochette dans tous les sens, la regarder sous toutes les coutures, détailler chaque brin d’herbe. Profiter de la citation de Tom Waits, chanteur blues/rock californien : ‘Ici les rêves ne sont pas brisés, ils boitent…’

Allez, il est temps. Je saisis le cd de la main. Et je regarde l’herbe. Je glisse le disque dans le lecteur. Je fouine un peu sur le web, et j’y lis cette phrase (propos recueillis par Eric Busienne) de Cali, justifiant la phrase de Waits : ‘J'aime les losers mais les losers magnifiques. Le gars qui s'accoude au comptoir pour dire qu'il va quitter sa femme… mais qui va finalement la retrouver, tard dans la nuit. J'aime les poètes rêveurs qui se disputent un os de chien dans une impasse derrière un bar. J'aime tout ça, oui !’ Merde, je connaissais le Cali révolté, le Cali amoureux, le Cali triste, mais ce Cali-là, c’est une nouvelle facette de l’artiste, et surtout de l’homme, que je prends dans la tête.

Le bonhomme sort de « La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon coeur » qui a clairement partagé les critiques, une œuvre suivie d’une tournée (fabuleuse !) piano/voix, en compagnie de Steve Nieve. Il a été le pianiste d’Elvis Costello pendant 20 ans. Excusez du peu ! Il s’offre un retour studio plus intimiste, plus proche des chansons que du chanteur (de son propre aveu d’ailleurs : ‘Ici, je voulais de l'épure totale, que le héros ne soit pas le chanteur mais les chansons’.

Introduction trop longue, probablement. Si elle n’était pas nécessaire pour le lecteur, elle l’était pour votre serviteur. Histoire de bien mettre les choses à plat, telles qu’elles sont, avant de se plonger dans l’écoute de l’album.

Ce type a tout compris. J’avais lancé le cd en me disant ‘Il va me falloir 2-3 morceaux avant de tendre l’oreille’. Erreur. Il murmure plutôt que de crier. Un appel impérieux, un hurlement silencieux. Des propos si durs, si vrais, si intimes. Obligé d’écouter, je pars me caler dans un fauteuil afin d’écouter plus attentivement le disque. Pas d’erreur, c’est d’une beauté effarante.

Beauté parce que cet opus chante ; plus qu’un chanteur, c’est véritablement l’album qui se joue, seul, une vraie pièce. Effarant parce que les paroles, comme d’habitude chez Cali, ne sont pas ‘à la joie’. Il oublie ses vieux démons et se lance dans une entreprise intime, chez lui, en terre connue. « La grotte des amoureux », en haut de Vernet-les-Bains, où les jeunes amants se murmuraient leur amour par exemple. Incorrigible amoureux lui-même, il ne s’empêchera tout de même pas « L’amour est éternel », mais rompt très largement par rapport à ses derniers disques.

« Mes vieux cinglés ». Punaise, mais comment il a fait ? D’accord, il est père. Mais combien d’artistes vont écrire une chanson pour se prémunir eux-mêmes des dommages qu’ils pourraient causer à leurs enfants? ‘Vous étiez mes parents’, ‘Ma petite chambre, ma prison’, ‘Brûlez tout, moi je l’ai déjà fait’, autant de phrases d’un enfant terrifié par ses parents qui se disputent à portée de voix. Heureusement que le Catalan précise en interview qu’il a eu une enfance heureuse, on s’en serait inquiété.

« Une femme se repose », longue traversée intime d’une vieille que l’on imagine se balançant sur sa chaise. Cali fait le tour de Vernet-les-Bains, le tour de son esprit et de celui des gens qui l’entourent.

L’œuvre est magistralement orchestrée par Frédéric Lo (Stéphane Eicher notamment), voix en avant, piano et guitare un peu en retrait. Le tout en douceur, comme pour protéger le mélomane des mots qu’il entend. « Je rêve de voir l’été ». Quand la mort se sublime. Quelle tristesse à dire mais quelle beauté cette chanson. ‘En frimant je dirais que mourir, il y a pire’.

L’album est intime, intime au chanteur, intime au village de Vernet-les-Bains, mais intime à chaque auditeur. Nul doute qu’en le réécoutant dans une vingtaine d’années, une autre vision émanera de ce bijou. Une facette par auditeur, une note par sentiment, un tempo pour chaque coeur. L’album le plus intimement universel qu’il m’ait été donné d’entendre.

« Happy end ». A mon sens, quand un artiste arrive à tourner en dérision ses propres ‘travers’ (et dieu, si les chansons tristes constituent son travers, qu’il continue sur le mauvais chemin) c’est qu’il est grand. Et il l’est.

Le disque est en bout de parcours. Sentiment ? Nostalgie, comme l’album. Impatient de découvrir comment le Perpignanais va le jouer en live. Heureux, heureux de l’avoir écouté. Cali range ses opinions politiques dans un coin de sa tête, oublie le Cali flamboyant et nous présente Bruno Caliciuri, l’homme nu, offert dans les chansons de son opus.

 

Cali

La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur

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Malgré son attitude permanente de rebelle ou son air de ne pas vouloir y toucher, Cali s’est hissé comme l’une des grosses pointures de la scène musicale hexagonale. Variétés ou ‘nouvelle chanson française’ ? Le second choix est sans doute plus gratifiant pour l’artiste. Mais après avoir écouté cet album, on est en droit de se poser la question… On a même l’impression d’avaler une soupe destinée à des bobos qui voudraient juste s’encanailler en compagnie du dernier artiste à la mode ou de se la jouer snob, en dénigrant le dernier elpee d’Indochine ou de Marc Lavoine.

En ouverture, « Je sais ta vie » est pompé sur une rythmique d’Arcade Fire. Tout comme « Ma douleur », d’ailleurs. Mais cuisiné à la sauce française. « L’amour fou » est paru en single. Le refrain est simpliste, mais contagieux. Et au public de bobos à la page, on pourrait y ajouter celui de certains ados ; puisque Cali avait fait appel au Geek Rémi Gaillard, devenu une idole pour les kids pour avoir diffusé des sketches dignes des pires pitreries de Jackass sur le web…

L’elpee recèle quand même des titres plus soignés dans le texte. A l’instar de « Je regarde mes 17 ans » ou l’engagé « Lettre au ministre du saccage… » ; encore que perso, sa prose ne me convainc guère.  

Finalement, seul « Nous serons tous les deux » sort le mélomane de son coma. Les références à Brel ou Brassens sont manifestes, mais pas calquées. En outre, le concours de l’orchestre symphonique de Prague donne une toute autre dimension à la compo.

Maintenant, je ne vais quand même pas cracher continuellement dans cette soupe, car Cali est un artiste généreux et ses prestations un peu folles accordées sur les planches valent la peine d’être vécues. Il a aussi des choses intéressantes à dire (NDR : voir l’interview qu’il avait accordée à Musiczine), mais on aimerait quand même qu’il publie des disques qui tiennent la route. Un peu plus révolutionnaires, si vous préférez. Evidemment, il devrait alors prendre quelques risques. Comme à ses débuts. Pour me consoler, je vais aller réécouter le savoureux album de Familha Artús, également issu d’outre-Quiévrain, dont je vous relaterai la chronique, sous cette même rubrique, la semaine prochaine…

 

The Aces (Californie/USA)

No one rides for free

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Les Aces nous viennent de Santa Rosa, en Californie. Une formation née en 2000. Objectif : restituer le caractère primaire et brut du blues, dans l’esprit des juke joints issus des collines du Nord du Mississippi! Le combo a signé chez El Toro, un label espagnol, barcelonais pour être plus précis. Derek Irving en est le guitariste soliste et le frontman. Planté derrière son micro, Sky O'Banion souffle généreusement dans son harmonica. Mike ‘Junk Johnson’ Gutsch assure les percussions. Pour la circonstance, le trio a reçu le concours de deux guitaristes rythmiques : Bob Welsh et Chris Anderson. Ils assurent les parties de basse, un peu à la manière de Brewer Phillips auprès de Hound Dog Taylor. Les Aces composent leur répertoire. Ne les confondez cependant pas avec les Aces, le groupe de blues légendaire chicagolais, impliquant les frères Dave et Louis Myers ainsi que le batteur Fred Below, un ensemble qui avait accompagné brillamment des stars comme Little Walter et Junior Wells.

A première écoute, une référence évidente saute aux oreilles : les Red Devils de Lester Butler, celle de leurs débuts, il y a près de 20 ans. "You're gonna loose" nous donne immédiatement l’eau à la bouche. Implacable, la rythmique met instantanément le feu, à la manière du Jimmie Vaughan de ses débuts, lorsqu’il était flanqué des T-Birds. Les lignes de basse tracées par les six cordes rythmiques forment une ossature idéale! Sky, un colosse de près de deux mètres a certes le souffle puissant, mais ses interventions sont à la fois efficaces et bouleversantes. "Stole something for me" nous entraîne au sein d’un univers sonore proche des Red Devils. Ici également, la rythmique implacable balise l'ensemble. O'Banyon en profite alors pour chanter et souffler comme un possédé dans sa frêle musique à bouche. Il ne lâche jamais prise et sa voix est émouvante. La section rythmique nous invite à participer à un voyage tout au long de "Shed some light on me", un morceau plus Butler que nature. Sky chante à travers son micro astatique. Il prend son public à la gorge et ne relâche plus son étreinte. "Knee deep in mud" ralentit le tempo. L’harmo réverbère des accents fantomatiques. L’aspect lugubre des swamps louisianais remonte à la surface. Cinq bonnes minutes d’effroi, au cours desquelles, seul l'instrument chromatique parvient à communiquer une chaleur bienveillante. "Drinkin' song" macère au sein d’un climat de torpeur. Un blues lent et dépouillé à l'extrême au cours duquel des notes angoissantes s’échappent de l’harmonica. Sky chante tristement et nonchalamment. Derek en remet une couche à cette sinistrose, à l’aide de sa guitare, qui s’est insensiblement mais sûrement installée. La slide de "Need your lovin" nous transporte dans les climats humides du Delta du Mississippi. Les rythmes foisonnent, bouillonnent et sont projetés sur toute la scène. La slide d'Irving est poisseuse, reflet d'un mal de vivre évident. Toujours plongé au sein d’un même climat, Roy souffle frénétiquement dans les aigus lors d’un "Down in the cave" introduit par des notes orientalisées d’un sitar, dont l’âme a probablement été vendue au diable. "Mr Highway man" restitue l'ambiance des trips accomplis par le géant Howlin' Wolf. Et notamment à cause de ce riff inlassablement remis sur le couvert par Derek! La silhouette imposante de Mr O’Banion se profile derrière le shuffle vivifiant et torride "House on the hill". Et pour cause, il y impose son harmonica. "Kanka Kanka" achève cet elpee de toute bonne facture. La rythmique est implacable. L’harmo embrase un dernier brûlot interminable, pendant que les cordes se libèrent dans la braise. Un excellent opus dont la transposition en ‘live’ devrait faire des ravages…

 

Cali

Ne pas oublier les lo(Cali)tés…

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Lors de la tournée de concerts intimistes, programmée à travers la Wallonie, Cali s’est produit à la Maison de la Culture de Tournai. Une belle occasion pour l’interviewer. Rencontre avec un personnage sincère, réellement sympathique et amoureux de notre Belgique.

Autant l’écrire tout de suite, la plupart des vedettes de la chanson ou de variétés françaises n’accordent (lorsqu’elles vous l’accordent), en général, qu’un temps d’interview très limité. Souvent même minuté. Soit par souhait de l’artiste ou tout simplement par décision de leur management. Et je craignais le pire ce soir, après avoir transité par Live Nation, le label et enfin un attaché de presse… Car finalement, un autre contact m’annonçait vers 16 heures que l’interview prévue à 18 heures serait déplacée à… minuit !

Et pourtant, une fois face à Bruno (alias Cali) et son entourage, tout s’arrête. La générosité dont vient de faire preuve le Français sur scène, ainsi que tout son staff –sa ‘famille’ comme il l’appelle– va se prolonger pendant la bonne demi-heure d’interview. C’est juste à sa sortie de scène que Bruno est attendu. Très affable, il nous demande gentiment de patienter 5 minutes, le temps de prendre sa douche. Mais surprise, une bonne vingtaine de fans féminines ont été autorisées à faire la file devant la loge. Cali est à peine rhabillé que celles-ci se bousculent au portillon pour le rencontrer. Aussi, il me demande toujours aussi poliment d’attendre encore 5 minutes. Et nouveau témoignage de sa générosité, il ne va pas leur consacrer 5, mais 20 minutes, au cours desquelles il va signer des autographes ou se faire mitrailler par les flashes des admiratrices. Son producteur finira quand même par écourter la séance. Juste avant d’entamer l’entretien, je leur demande quand même le temps qu’il me reste pour cette interview. Ils me rassurent tous les deux, en m’invitant à prendre tout le temps nécessaire pour la réaliser. Je n’en croyais pas mes oreilles, et pourtant, c’était la vérité…

Vous vous transcendez toujours sur scène. Où puisez-vous votre énergie ?

Et bien figurez-vous que ces derniers jours j’étais fiévreux. A quelques heures du concert, je me demandais encore comment j’allais me débrouiller pour assurer le spectacle. Mais la scène c’est ma vie. Je me sens plus vieux quand je ne suis pas sur les planches. Et puis il y a ce public. Beaucoup d’artistes commencent d’ailleurs leur tournée par la Belgique pour se mettre en confiance.

Vous prenez également le temps de rencontrer vos fans…

C’est adorable de les rencontrer, et j’en profite. Un concert permet de passer la journée avec ses amis, répéter ; mais aussi, après le spectacle, de consacrer du temps à ses fans.

Après Forest National en 2008, vous avez opté pour la formule de la tournée acoustique et dans des petites salles. Pourquoi ce choix ?

En fait ce n’était pas prévu. Fin octobre 2008 on pensait arrêter après la tournée des grandes salles et des festivals. Et puis j’ai rappelé mes copains. J’avais besoin de rhabiller mes chansons. De les interpréter sous un format plus intimiste. Il est aussi important de se produire un peu partout et pas uniquement dans les grandes villes.

En 2007 vous aviez annoncé vous ménager une trêve. Elle a été de brève durée…

(rires) C’est vrai ! Depuis 2003, je n’ai pas vraiment arrêté. Ma tournée s’achève fin juin et puis je vais m’imposer un gros break. Je vais quand même jouer en compagnie d’un groupe qui s’appellera ‘Les Hyènes’. Seront impliqués le batteur et le bassiste de Noir Désir.

Votre label vous impose-t-il de débattre de votre album ?

Oh non, c’est pas grave, tu es libre de causer de ce que tu veux, tu sais ! Tu peux me poser toutes les questions que tu souhaites...

Merci, mais parlons en quand-même. Un live serait-il en préparation ?

Et oui, je peux même t’avouer que les concerts de Tournai et Mons serviront de ligne de conduite. Mais ce disque sera couplé avec la tournée électrique qui avait visité les grandes salles, en 2008.

Un mot sur notre compatriote Karin Clercq qui vous accompagne en première partie…

Je l’adore. On a partagé des scènes ensemble à nos débuts. Et là je suis content de la retrouver. C’est une artiste qui n’hésite pas à se remettre en question. A changer de formation. Elle m’interpelle beaucoup car elle évolue constamment. Et c’est très important.

Y a-t-il une question que vous aimeriez que l’on vous pose ?

J’aimerais surtout évoquer notre date du 10 mai aux Nuits du Botanique au cours de laquelle nous partagerons l’affiche avec Matthieu Boogaerts. Je suis très content d’y retourner. Je suis déjà passé par toutes les salles du Bota.

Que manque-t-il encore à votre brillante carrière ?

Je suis fier d’avoir chanté en compagnie de Simple Minds et des Waterboys. Mais aussi de Goeffrey Burton, dont le groupe Hong Kong Dong devrait bientôt percer. Mais lors d’une émission du ‘Grand journal’ de Canal +, j’ai eu la chance de croiser les musiciens de U2 et j’ai demandé une dédicace à Bono. Je rêve d’un duo avec lui. J’adorerai aussi partager l’univers d’Anton Corbijn.

Vous avez du succès auprès du public féminin ?

Ce qui me réjouit avant tout, c’est de voir des familles entières se déplacer pour assister à mes concerts. Quand je vois des grands-parents (NDR : et il y en avait dans la salle) et des petits-enfants qui se côtoient, cela me fait chaud au cœur.

Lorsque je me lève pour remercier Cali et clôturer cette sympathique interview, il n’hésite pas à prolonger la discussion.

Tiens je vois à ton T-shirt que tu es fan des Pogues, j’adore aussi, m’avoue-t-il…

Il me questionne sur l’actualité du groupe, sur la photo. Il revient à nouveau sur le Botanique… Bref la discussion se prolonge encore quelque temps. Cependant, je ne tiens pas à abuser, et quitte les lieux, après l’avoir vivement remercié de son accueil. Sans quoi, j’ai vraiment l’impression que nous en avions encore pour toute la nuit, à discuter…

Cali

L’espoir

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Après « L’amour parfait » et « Menteur », Bruno Caliciuri revient avec un « Espoir » fidèle à ses premiers travaux. Entouré de Scott Colburn (responsable du dernier opus d’Arcade Fire) et Mathias Malzieu (Dionysos) à la production, Cali conte une nouvelle fois ses mésaventures amoureuses (« Paola », « Sophie Calle n°108 ») et énumère ses déceptions politiques (« Resistance », « Pas la guerre ») aux travers de textes riches, parfois piquants (« Je me sens belle »), parfois touchants (« Giuseppe et Maria »).

Bien qu’il soit fidèle à ses travaux précédents, Cali perd néanmoins quelque peu de son authenticité, la patte des deux producteurs se révélant extrêmement perceptible sur certains titres. Ainsi, « Je ne te reconnais plus », bidouillé par Mathias Malzieu et fredonné en compagnie d’Olivia Ruiz, première dame de ce dernier, aurait aisément pu être tiré de la discographie de Dionysos. Il en va de même pour « 1 000 cœurs debout », réalisé par Colburn et résonnant comme un artéfact du « Neon Bible » d’Arcade Fire. Hormis ces faux-pas qui n’en sont pas réellement, la formule étant efficiente, « L’espoir » de Cali est, en bref, un exercice certes attendu mais également captivant et sincère.

Mira Calix

Eyes Set Against the Sun

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L’ancienne Djette résidente des clubs londoniens (sponsorisés par Warp) se peaufine dans une complexité sonore éprouvante qu’offre son troisième album « Eyes Set Against the Sun ». Boucles bruitistes, breaks minimalistes et nappes orchestrales, synthétiques ou instrumentales matérialisent une humeur dénudée, cyclique et fusionnelle. Mira Calix (aka Chantal Passamonte), dame de cœur, pique dans le ressenti et dévoile son être sous des compositions sensibles parcourues de chœurs et de cordes (l’archet de Ciaran Mc Cabe). Une musique de phase, contemporaine et expérimentale où l’alliance de l’école classique (Streetwise Opera, Britten-Pears Orchestra, Woodbridge School Junior Chair) et de tonalités électroniques se projette dans une dimension bipolaire. L’apprentie surdouée, élevée à l’electro de Ninja Tune et Warp (Strictly Kev et ses mentors Derrick May, Aphex Twin, Boards of Canada), module les tonalités dans une sphère de performance symbolique pour en libérer des compositions parfaitement abouties.

 

 



Izaline Calister

Kanta Hélele

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Originaire de l’île de Curaçao dans les Caraïbes, la chanteuse Izaline Calister est une star locale depuis la sortie de son premier disque « Krioyo ». Sur « Kanta Hélele » elle revisite quelques traditionnels de son île en y ajoutant sa touche personnelle. Elle compose aussi ses propres morceaux dans un mélange qui doit autant à la salsa moderne un peu clinquante, au zouk qu’à la rumba congolaise. Les atmosphères sont aussi fort versatiles : des chansons pour se trémousser, quelques ballades jazzy carrément mielleuses (« Nada den mi man ») et des plages touchées par la fièvre vaudou (« Karnaval di Zumbi »). Une belle voix, peut-être trop lisse, comme le reste de la production musicale de ce disque ; l’interprétation est irréprochable, mais hésite constamment entre pop et tradition.

 

Cali

Le bordel magnifique

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Après deux albums appris sur le bout des doigts par ton père, ta mère, tes frères et tes sœurs, ho ho, Cali fait le bonheur de ses admirateurs. Et de ses nombreuses admiratrices. Cali, c’est le gars sympa par excellence. Impossible de lui en vouloir. Certes, les plus hargneux pointeront jalousement du doigt son cortège de midinettes en rut. Mais un type qui mouille sa chemise de cette façon, sans peur de trop plaire ou de déplaire, ne peut être soupçonné de cupides intentions. Alors voilà, le succès aidant, le Catalan publie « Le bordel magnifique », concert enregistré au Zénith de Lille le 18 mai dernier. Tous les tubes de Cali s’enchaînent dans le joie et l’allégresse (« Je m’en vais », « Menteur », « Dolorosa », « Elle m’a dit », etc.). La prise de son est impeccable et l’homme se présente à la scène comme un poisson dans l’eau. On regrettera cependant les séquences karaokés balancées ici et là. « C’est quand le bonheur ? ». Ouais, et ‘c’est quand il veut pour chanter’... Le public présent ce soir-là aimait à chanter avant son idole. Tout l’art de la Cal(l)igraphie est ainsi résumé. Pour le reste, les fans adoreront la démarche de leur chouchou. Même ma mère en raffole. D’ailleurs, hier, elle m’a dit : lalala lalala lalalala lala.

Cali

Menteur

Cali est une star. Intitulé « L’Amour Parfait » (et ça n’existe pas), son premier album s’est vendu à plus d’un demi million d’exemplaires chez nos voisins français. Et le type n’a pas arrêté entre-temps de donner des concerts, déversant ses tripes chaque soir comme si sa vie en dépendait. Devant lui, les jeunes (et moins jeunes) filles se pâment en buvant ses paroles, pourtant plutôt caustiques. Elles évoquent l’amour qui part en couilles, et ces hommes qui n’en ont pas vraiment, c’est-à-dire la plupart. La retenue, ce n’est pas son truc, même s’il a piqué pas mal à Brel. « Je sais », triste comptine sur l’être absent, donne ainsi la réplique à la chanson du maître belge, « Voir un ami pleurer », et de fait on verserait bien une larme. Pour le reste, Cali n’a toujours pas repeint sa chambre en rose bonbon, même si son cœur est pris, et qu’au final il n’a pas l’air si terrassé par l’amertume. Autrement dit on barbote toujours en plein désespoir matrimonial, ‘post-coïtal animal triste’, et vas-y que je tombe du balcon en pleine sérénade shakespearienne. Si les textes à l’anglo-saxonne (Brautigan, Fante, Salinger,…) se révèlent ici parfois moins inspirés (le pénible « Roberta »), l’écrin musical, lui, bénéficie des largesses de la maison de disques… Qui mise beaucoup sur Bruno Caliciuri, le phénomène, 500.000 disques, pour rappel. D’où les guitares de M, le duo avec le zombie Daniel Darc, et surtout la présence de Steve Wickham, violoniste chez les Waterboys, le groupe préféré du chanteur. La vie est belle pour Cali, dont beaucoup de gens se soucient malgré le single (« Qui se soucie de moi »), parce que c’est évident : ce type est sympathique. Et peu importe s’il joue de plus en plus au Calimero de la cause masculine : du moment qu’il n’aille pas chez Drucker, l’honneur lui sera sauf.

 

Apocalipstick Now

Apocalipstick Now

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Quel est le résultat de la rencontre entre le guitariste KC/DC et le chanteur et Jackie O. Nasstie ? Après avoir consulté quelques photos sur leur site www.apocalipstick.us, vous serez rapidement fixés : sorte de Gauff au suc belges, Marcel et son orchestre français ou Cramps du pauvre ricains s’ébrouant sur un punk rock potache, Apocalipstick Now évoque le L7 des débuts ou un Butthole Surfers sans le génie. On ne plaisante pas ainsi avec les troupes du Colonel Kurtz. L’horreur, l’horreur...

Cali

L'exorcisme parfait

Depuis la sortie de son premier album, Cali est devenu notre meilleur ami, notre confident, notre défouloir et notre psy. Ses chansons d'amour écrites sans détours ni mensonges accompagnent nos humeurs changeantes et nos doutes quotidiens : dans ses mots qui cinglent nos certitudes on se love jusqu'au dégoût… Cet album, c'est la vie, et ça fait un bien fou. Rencontre avec un amoureux de l'existence, dont la sincérité nous aide à progresser et jouir, vaille que vaille.

Ton album débute par la chanson " C'est quand le bonheur ? " : est-ce qu'aujourd'hui tu te sens heureux ? Ou bien, malgré la reconnaissance, le succès, les rencontres, l'amour du public, tout reste relatif ?

Tu sais, c'est une question très conne, mais je l'assume… Pour moi le bonheur c'est ni le passé ni le futur, mais ces moments où l'on réalise ce qu'on vit sur l'instant. Des fois je me surprends à avoir des bouffées d'extase : ça dure 10-20 secondes, au volant de ma voiture par exemple et je ne sais pas d'où ça vient, mais je suis hyper heureux pendant 10 secondes. Puis ça s'arrête parce qu'on repense à des images du passé ou du futur, et c'est moins le bonheur… Ce que je trouve fort chez " C'est quand le bonheur ? ", c'est que je l'ai écrite en deux ans : les couplets deux ans avant le refrain. Mais dès qu'il est arrivé, le reste a coulé tout de suite : ce titre a été un tremplin idéal pour le reste de l'album.

Le bonheur… Penses-tu que les gens heureux en amour peuvent apprécier ton disque à sa juste valeur ? Comme s'il fallait avoir vécu ce que tu chantes pour vraiment te comprendre…

J'essaie de me persuader que tout le monde peut y trouver son bout de gras à grignoter ! Si tu l'as vécu ou si t'es malheureux, ça peut t'aider à te dire que t'es pas le seul… Un peu comme le journal de 20h, quand tu vois toutes les merdes qui se passent dans le monde, et que tu te dis qu'il y a pire que toi… Et puis les autres peuvent se dire : " Moi je ne vis pas ça, tant mieux ! ". Les deux sentiments peuvent donc être appréhendés, et je trouve ça bien.

C'est quand même bizarre de voir à tes concerts des gens qui chantent en chœur tes sombres textes, en souriant de toutes leurs dents… Ce n'est pourtant pas le Grand Jojo !

C'est le but ! J'aime par exemple l'idée que " C'est quand le bonheur ? " puisse être jouée lors d'un mariage, où tout le monde serait heureux et ferait une farandole… Alors que le texte en lui-même pourrait être lu lors d'un enterrement. J'aime bien cette dualité… " Je chante " de Trenet, par exemple : quand tu lis le texte, c'est terrifiant ! Mais quand tu l'écoutes comme ça en voiture, sans penser au texte, avec le vent dans tes cheveux, t'es heureux, quoi ! J'aime bien ces mariages un peu douteux. C'est comme avec ma violoniste, qui est très classique, alors que mon guitariste, lui, est fan de punk ! J'aime bien ce genre de conflit. C'est ce qui me fait avancer.

Voilà ce qui est intéressant : cette dichotomie entre tes textes, durs et déprimants, et ta musique, gaie et pleine d'allant.

Je crois que c'est plus fort quand tu plombes réellement le texte et que tu l'habilles de musique guillerette. Je me suis souvent essayé à écrire des textes très noirs en les accompagnant de musique très sombre, mais à la fin il ne te reste plus que la corde pour te pendre… C'est pas le but du jeu non plus, quoi !

La redondance n'aurait pas donné à ton disque cette violence… qui en fin de compte se veut salutaire.

Je crois de toute façon que la vie est comme ça. Quand tu discutes avec des amis tu te remontes le moral, tu rigoles, tu bois des coups, mais chacun traîne son boulet derrière lui… C'est ça l'idée, ouais.

Alina Reyes (NDR : grand écrivain qui s'est suicidée) a écrit un jour : " Où est l'amour sinon dans le mal brûlant du désir, de la jalousie, de la séparation ? "… Tu es d'accord ?

C'est peut-être sa vision de l'amour parfait. Pour moi il faut qu'il y ait de la violence. Pas physique, mais dans les pleurs. Ca peut aller très loin : le mal au ventre, les crises de nerfs, on se dit des choses qui vont trop loin et puis juste après il y a le calme plat, on essaie de se rattraper, de se pardonner, puis arrive le câlin, puis la mer se déchaîne à nouveau… L'idée c'est que le couple supporte ça tout le temps. Mais il arrive à un moment donné où la violence des mots, des situations ou même des silences… Quand il ne reste rien. Pour moi, l'amour parfait c'est ça : des très hauts et des très bas.

Un couple doit-il se déchirer pour mieux se retrouver ?

Je ne sais pas s'il doit le faire, mais il doit être capable de le faire.

Et quand on dit que les gens heureux n'ont pas d'histoires à raconter (le fameux " Happy people have no stories ") ?

Je crois que les gens les plus heureux sont ceux qui ne réalisent rien du tout. Quand on a la chance, ou le malheur, de réfléchir un petit peu, c'est là qu'on peut plonger dans le malheur total, oui…

Et quand tu dis que " Mourir d'amour n'est plus de ton âge ", ça veut dire quoi ? A chaque rupture on 'meurt', non ?

C'est une phrase d'un instant : j'ai dû l'écrire quand j'avais 72 ans. Ou 84. Mais quand j'ai à nouveau eu 35 ans ou 19, c'est revenu d'actualité, " mourir d'amour " ! (rires)

Tes textes sont écrits au masculin, avec la femme qui passe pour la méchante de service, et l'homme pour un couard qui n'a rien vu venir, et qui soit implore " quelques miettes de tendresse ", soit fait le gros dur… ou passe d'un état à l'autre en quelques secondes. La vie, quoi…

Je me suis souvent surpris à conjuguer des adjectifs au féminin quand j'écris mes textes, donc je crois que mes chansons peuvent être tournées dans les deux sens. Il suffirait de changer quelques mots pour que mon album puisse être chanté par une fille ! Mais comme je suis un garçon, la méchante de service c'est la fille. Si j'avais été une fille, c'eût été le contraire…

M'enfin c'est bizarre que…

Le panache est important. J'adore ça. C'est-à-dire : une chanson, tu sais qu'elle va être lue ou écoutée, donc tu frimes. Moi je suis un frimeur. Je frime en me faisant soit largué, soit en acceptant de partir… Mais avec le panache. Même si dès que la lumière s'éteint, je me retrouve seul avec mon malheur et ma tristesse, complètement désintégré. J'aime bien cette idée-là aussi : quand la lumière est allumée, on sourit, et puis… J'aime bien cette idée des scènes de théâtre, où des gens vivent des malheurs absolus et sont obligés de jouer. Ca me correspond bien.

Le pire, c'est quand tu crois connaître ton/ta partenaire, et que tu te rends compte que d'une minute à l'autre tout peut basculer : en l'espace d'un instant, elle/il devient une personne totalement étrangère… C'est un sentiment vraiment horrible.

C'est horrible. Horrible. Mais si tu te retournes sur ta vie, il y en a qui disent qu'ils ont perdu du temps, moi je suis plutôt du genre à me dire que j'étais tellement pur et vrai avec elle que j'ai plutôt gagné du temps sur ma vie… Mais c'est terrible, c'est clair. Mais quelque part il faut être honnête et quitter l'autre au moment où tu le veux. Il y a des personnes qui restent ensemble et puis t'arrives à tes vieux jours et tu te dis que t'as gâché ta vie ou celle de l'autre, parce que tu sais qu'elle voulait te quitter depuis toujours mais qu'elle ne l'a pas fait, ou vice versa. Il n'y a rien de plus terrible.

Tu racontes les maux du cœur avec crudité, sans pudeur ni politesse. Est-ce pour toi la manière la plus sincère pour parler de ce genre de choses ?

C'est la plus sincère pour moi. Ce sont les mots que j'emploie tous les jours. J'aime bien cette idée de ne plus mentir. Tu vois, j'ai 35 ans, j'ai vécu au sein d'autres groupes pour lesquels j'écrivais des textes beaucoup plus mystiques, beaucoup plus difficiles à comprendre : le sens était caché derrière les images, était très difficile à discerner. Là aujourd'hui j'éprouve de la jouissance absolue à me retrouver devant des gens et à leur dire tout crûment ce que je pense. Ca me fait vraiment du bien, quoi ! Tu vois les yeux des gens et tu leur dis " je, je, je " avec des phrases très crues… Mon petit challenge c'est de rester dans le format chanson et poésie, avec mes mots. C'est ça qui m'intéresse.

Es-tu fier en un sens de " toutes les ignominies que ta bouche peut déverser " ?

Si tu veux, oui. Mais si tu me vois à 6h du matin complètement saoul ou à 6h du soir complètement clean, je te parlerai pareil. On pourra avoir la même discussion au sujet de l'amour. C'est quelque chose de fort : ne plus mentir, ne plus être un imposteur… Parce que souvent on va à son travail et on est obligé de se cacher derrière son costard. Moi non : mon travail ma permet d'être moi-même 24h/24.

Se dire tout, ne rien se cacher, est-ce selon toi une condition essentielle à l'harmonie dans un couple ?

C'est clair ! Moi par exemple ma copine, je ne la vois pas beaucoup, mais quelque part elle se raccroche au fait qu'elle sait que je suis vrai, et que je sais qu'elle est vraie. Je ne vois pas pourquoi je ferai n'importe quoi en son absence… Tu sais, chaque mensonge est un boulet qu'on traîne derrière soi…

Concernant l'écriture de tes textes : on te sent proche d'une certaine démarche littéraire à l'américaine, basée sur l'oralité.

(surpris et ravi) Tu tapes dans le mille ! Ecoute, moi je suis très fan de Brautigan, de John Fante, de Bukowski, de Salinger… J'ai tout lu, même leurs romans pas traduits. Ce sont des gens qui me touchent vraiment.

" Il y a une question " contient une référence à " L'Attrape cœurs ", non (" NDR : Où vont les canards quand ils ont trop froid ") ?

A fond ! Et " mon chien stupide ", c'est Fante ! Ce sont des petits clins d'œil à mes héros…

Est-ce que le format de la chanson pop te semble la meilleure manière pour mettre en musique tes histoires ?

J'ai la chance que ma maison de disque me laisse faire ce que je veux : si sur l'album la plupart des chansons sont formatées, j'en ai plein en réserve qui ne le sont pas. La chanson pop pour moi, c'est faire monter un couplet jusqu'au refrain, pour le faire exploser. Pour moi le maître en la matière, c'est Arno : il arrive à faire des chansons pop ou punk absolues, et juste après il va te sortir une complainte interminable piano-voix ! Il n'a pas de limites : sa seule limite, c'est son imagination… Et puis il ne perd jamais son identité, parce que sa voix est toujours là. C'est l'exemple que j'essaie de suivre.

Dans ta musique aussi tu passes d'un genre à l'autre : on y entend une fanfare, des arrangements de cordes, des guitares rock… En fin de compte ça résume bien tous les états de la rupture : la colère, la tristesse, la désinvolture,…

Et la beauté. Ca peut être très beau, une rupture. C'est une horreur, certes… Mais une horreur qui peut être très belle. Il y a une descente aux enfers irrémédiable mais ça peut aller chercher en toi des choses insoupçonnables. Tu grattes le fond de toi-même… Donc la rupture, si c'est pas mortel, c'est majestueux.

Et c'est universel ! A cet égard quel rôle doit selon toi jouer l'artiste face à son public ? Comment te positionnes-tu par rapport à tes fans ?

Je me sens très profiteur. Quelque part, je me sers d'eux, de leurs sourires, de leurs yeux qui brillent… J'en profite, c'est pour moi, quoi ! Je suis heureux que ça leur fasse du bien, mais c'est à moi que ça fait du bien - de les voir comme ça ! Les gens c'est mon psy, ouais…

Ca fait parfois du bien de penser d'abord à soi, surtout quand tout va mal…

C'est clair. Moi j'ai une TV et je l'allume plus du tout. Et puis quand ça ne va pas bien je regarde le journal de 20h et, c'est hyper affreux ce que je vais dire, mais je me rassure en me disant que ma petite vie, finalement, n'est pas si mal. Le tremblement de terre il est dans mon cœur, mais je ne suis pas sous les décombres.

L'amour parfait, deuxième ?

C'est quand tu te réveilles et que tu vois ta chérie qui dort à côté de toi, et tu te dis : " C'est avec elle que je veux vivre toute ma vie ". Et quand tu sais que tu ne te mens pas à ce moment-là, c'est encore un moment de gagné sur la vie. C'est du bonheur, ça dure un court instant, mais tu recules le temps de la fin, quoi… C'est ça, pour moi, l'amour parfait.

Cali

L’amour parfait

L'amour parfait n'existe pas, et Cali l'a bien compris. Ses chansons, véritables terrains minés sur lesquels tout couple ‘idéal’ y laisserait son innocence, n'ont que faire des compromis. L'amour est un plat qui se mange froid, et la vaisselle d'être cassée sur les murs de la cuisine comme seul défoulement possible à la tromperie, le mensonge et la routine. " Le bonheur ", certes, " s'agrippe mal aux gens seuls ", mais les " lamentables démissions du cœur " valent parfois mieux qu'une vie d'habitudes sans plus d'étincelles dans le bas ventre. Ce qui choque chez Cali, c'est donc ce verbe cru et cette sincérité à toute épreuve, comme chez Miossec il y a quelques années, voire chez Dominique A… Mais le pire, nous vient de la musique : au lieu de nous conter ses histoires de trahison sur un mode mineur, en demi-teinte, le Français nous fait le (sale) coup de la valse à mille temps (" Le Grand Jour "), du piano sautillant (" Il y a une question ") et du cabaret-fanfare (" J'ai besoin d'amour "). L'auditeur, tiraillé entre les textes d'un désespoir à fleur de peau et la musique guillerette, ne sait sur quel pied danser : faut-il s'apitoyer ou taper du pied, pleurer ou danser ? Les deux à la fois : voilà la grandeur (décadente) de ce disque torturé, d'une honnêteté terrifiante. Cali a décidé que " mourir d'amour n'était plus de son âge ", et il a bien raison : le dire en chansons vaut mieux que tous les supplices, surtout si la femme d'en face ou d'à côté affiche son bonheur d'ailleurs avec une satisfaction et une indifférence écœurantes. En plus de sa répartie, notre homme a du goût, en littérature (la référence à Salinger dans " Il y a une question ") et en musique (voir plus haut). Ses expériences de couple n'ont peut-être pas été à la hauteur de sa verve discographique, toujours est-il qu'il sauvera bien des hommes (et des femmes, tant qu'à faire) du suicide/crime passionnel. " Quand on a que l'amour ", chantait l'autre : dans le cas contraire, il y a toujours " L'amour parfait ".