Le chanteur/harmoniciste Mark Hummel a fondé un espace de rencontre entre souffleurs de renom. En 1991. Baptisé "Harmonica Blowouts", il devient, d'année en année, de plus en plus populaire et s'exporte bien au-delà des limites de la baie de San Francisco. Au fil du temps, Mark a ainsi provoqué la confrontation des meilleurs sur scène. Des pionniers à la peau noire comme Snooky Pryor, Sam Myers, James Cotton et Billy Boy Arnold, ainsi que la crème des musiciens blancs, dont Rod Piazza, Charlie Musselwhite, Rick Estrin, Kim Wilson, James Harman, Paul deLay, Gary Primich, etc. Le label Mountain Top Productions avait déjà sorti les Volumes 1 et 2 de ces collections ainsi que "Rolling Fork Revisited", en compagnie de Johnny Dyer. Pour ce troisième tome, le rendez-vous s’est limité aux musiciens noirs ; et en particulier Carey Bell, Lazy Lester, Willie Smith et Phil Wiggins. Ce double elpee a été immortalisé ‘live’ au Moe's Alley de Santa Cruz, en Californie. En janvier 2004.
La première plaque s’ouvre par la performance de Mark Hummel et de ses Blues Survivors ; c'est-à-dire les mêmes musiciens qui ont participé à la confection de l'album "Ain't easy no more". Tout d’abord le superbe slow blues "City livin" ; une compo qui met en exergue le talent du guitariste Charlie Wheal. Deux reprises de Little Walter, ensuite. "My kind of baby" et l'instrumental "Rollercoaster", au cours duquel Hummel se révèle époustouflant. Le guitariste Steve Freund se joint ensuite aux musiciens. Il a longtemps sévi au sein du backing band du pianiste Sunnyland Slim. Steve est un gratteur affûté, mais également un chanteur inspiré. Il adapte de Slim, son ancien patron, "Done you wrong". Un blues lent, bien dans la tradition du Chicago Blues. Bob Welsh siège derrière le piano et Hummel se charge des chorus d'harmonica. Son intervention nous flanque le frisson. Willie "Big Eyes" Smith a été le batteur de Muddy Waters pendant près de vingt ans. La musique à bouche avait été son premier instrument. Pour la circonstance, il chante et souffle à nouveau lors de la cover du "Hoodoo man blues" de Junior Wells. Six minutes de bonheur rehaussées par la présence d’un Steve Freund insatiable aux cordes! Changement radical de style pour terminer ce premier cd : John Cephas et Phil Wiggins sont réunis lors d’un duo acoustique découpé dans le country blues. L’épisode débute par "Piedmont blues jam" et embraie par des reprises de Willie Dixon, Fred McDowell et Sleepy John Estes. On en retiendra surtout une extraordinaire intervention de Wiggins sur le traditionnel "Walkin' blues". Une bien belle parenthèse.
Le second opus nous présente d'abord le vieil harmoniciste noir Carey Bell. Il a longtemps milité au sein des formations de Muddy Waters et de Willie Dixon. Willie Smith s'est installé derrière les drums. Steve Freund partage les cordes en compagnie de Charlie Wheal. A menu : huit titres de Chicago Southside blues, dont de bonnes reprises du célèbre "I'm ready" et It ain't right" de Little Walter ainsi qu’un splendide slow blues, "Too bad too bad". Ce blues a du vécu. Il reflète le mal vivre de l'artiste. La prestation s’achève par un frétillant "One day". C'est à une légende louisianaise qu'il revient de clôturer cette présentation de souffleurs : Lazy Lester. Dès les années 50, il a enregistré à Baton Rouge sous la houlette de Jay Miller. Son swamp blues paresseux nous va droit au cœur. Le style est ici de toute évidence totalement différent de ce qui précédait. Lazy a déjà mieux chanté que ce soir-là mais ses performances à l'harmonica sont de classe. Et il le démontre tout au long de son interprétation de blues indolents. Tout d’abord "Bloodstains on the wall" et "Rainin' in my heart" de Slim Harpo. Et enfin sa plage la plus connue, "Sugar coated love", un morceau au cours duquel il parvient à faire sonner son harmo comme un accordéon. Plus de deux heures d'excellent blues !