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Kim Deal - De Roma
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Stéphane Reignier

Stéphane Reignier

jeudi, 14 août 2025 18:16

Technopolice vindicatif ?

À Marseille, une nouvelle scène s’agite – plus nerveuse, plus aventureuse, plus électrifiée. Technopolice, quatuor rapide et désaxé, y prend feu en 2024 après quelques concerts marquants en tant que simples spectateurs au QG local : L’Intermédiaire.

Une poignée de shows suffisent à déclencher l’étincelle. Des groupes australiens, allemands ou espagnols comme RMFC, Ghoulies, Billiam, Autobahns ou Seggs Tape débarquent à Marseille, bousculant les repères et redéfinissant l’attitude scénique. Ce n’est plus du punk comme avant : c’est rapide, bizarre, joyeusement foutraque. C’est là que Technopolice trouve sa voie. Quelques mois plus tard, les morceaux sont là. Écrits, arrangés à l’instinct et répétés jusqu’à trouver une tension juste.

« Chien De La Casse », son premier album, est à la fois furieux et joueur. Les guitares s’effacent parfois pour laisser place à des synthés aux sonorités 16-bits, évoquant autant Gee Tee que la bande-son de Mario Kart. Les morceaux alternent entre déflagrations punk ultra rapides et séquences ralenties à la limite de la no wave. Les textes, souvent en français, naviguent entre absurdité urbaine, ironie sociale et énergie crue.

L’enregistrement a lieu à la campagne, coupé du monde, entouré seulement de micros, d’instruments et de câbles. Pas de clic, pas de triche : tout est joué ensemble, en direct, pour garder l’énergie brute du groupe. À la manœuvre, l’équipe de Pollen Session, dont plusieurs membres font aussi partie du groupe Crache. Une alliance naturelle, dictée par une esthétique commune : son crade, attitude franche, zéro artifice. Le résultat est direct, vivant, imprévisible.

« Chien De La Casse » ne sonne ni comme un revival, ni comme un collage. Il témoigne d’un moment précis – celui où un groupe capte ce qui se passe ailleurs et décide d’en faire quelque chose de nouveau ici.

À Marseille, en 2025, Technopolice hurle dans la casse, et ça résonne loin.

Le clip de sortir le soir… » est à voir et écouter 

 

jeudi, 14 août 2025 18:14

Feu ! Chatterton circonspect

Quelques jours après avoir annoncé la sortie de son nouvel album « Labyrinthe », Feu ! Chatterton dévoile le clip du premier single « Allons Voir ».

« Allons Voir » est un appel à la joie, au jeu, au plaisir de la découverte de ce qui se cache juste là, derrière la porte. C’est une invitation à célébrer la vie et à réenchanter le présent. Le clip a été réalisé par Jean-Charles Charavin.

« Allons Voir » est le premier extrait de « Labyrinthe », quatrième opus du groupe qui paraîtra le 12 septembre 2025.

Le clip est à voir et écouter ici

 

 

dimanche, 27 juillet 2025 18:30

Les Gens d’Ere 2025 : dimanche 27 juillet

Il s’agit déjà de la dernière journée de festival. Celle-ci risque d’être compliquée sur le plan météorologique, car des averses orageuses sont annoncées.

Pourtant, les festivaliers risquent d’être nombreux. Et pour cause, Pascal Obispo constitue la tête d’affiche.

Lorsque votre serviteur foule la plaine, Fredz se produit déjà sous le chapiteau. Son accent ne laisse planer aucun doute, il vient du Canada, du Québec très exactement.

Il justifie le choix de son pseudo car sur scène, il n’est pas totalement Frédéric. Le ‘z’ complète son côté artiste. C’est un jeunot, il n’a que 23 ans !

Sa musique navigue aux confluents du rap français (Nekfeu, Alpha Wann), de la pop, de la trap et de la soul. Le style se distingue par une écriture introspective et mélodique.

Il débute la musique à domicile à 15 ans, entre guitare et beatmaking. Son premier Ep, « Dans ma tête » (2019), est suivi d’une mixtape « Pas d’épines, pas de roses », parue la même année.

Son opus, « Demain il fera beau », a été nominé aux Felix Awards 2024 (Album ‘rap’ de l’année) et aux Juno 2025 (Album francophone de l’année).

Son single, « Le stade », a dépassé les 21 millions d’écoutes et est devenu ‘single d’or’ au Canada.

Ses chansons touchent au quotidien et baignent souvent dans un spleen profond, comme sur « Ce soir – J’suis dans ma tête ».

Le public semble réceptif aux frasques du jeune homme, notamment lorsqu’il interpelle un Monsieur au premier rang et lui demande son nom. Il s’appelle Thomas. Tout de go, le chanteur annonce alors à son public que le concert sera dédié à tout le monde… sauf à Thomas.

Il met son succès sur le dos de chansons avec ‘3 accords’. Il le démontre en chatonnant cette comptine faussement légère.

Malgré son jeune âge, Fredz maîtrise les codes de la musique, des textes et de l’émotion, à l’instar de titres comme « Allo la lune » et « Dans les soirées ».

Force est de constater qu’au-delà de la musique, c’est l’ambiance qui a marqué la prestation, déclenchant l’enthousiasme au sein de l’auditoire, entre chants, battements de mains et sourires partagés.

Fredz est parvenu à créer un moment de connexion sincère, non seulement avec ses fans, mais aussi ceux qui le découvraient. Accompagné d’une équipe solide sur les planches, il a livré un spectacle sans temps mort, qui a capté l’attention du début à la fin, jusqu’aux derniers… accords.

Sur la grande scène, Léon attend sagement que le public se déplace en masse, pour un set inédit, puisque c’est la première fois qu’il se produit en solo.

Le type a déjà bien bourlingué. Il s’agit même de l’un des membres de Delta, un groupe belge de pop-rock bien connu, réunissant Benoît Leclercq et de Julien Joris.

En outre, Léon a collaboré avec des artistes comme Typh Barrow, Mustii, Florent Pagny, Yannick Noah et Arcadian.

Benoît se présente donc sans son comparse. L’estrade est parsemée d’instruments divers. Pourtant aucun musicien n’est annoncé, pour le soutenir. Ce qui laisse penser que le gars va devoir se charger de se coltiner la panoplie d’instruments en occupant tout l’espace sonore.

Il est venu défendre son premier Ep, intitulé « Aïe », tout fraichement sorti, qu’il a composé, enregistré et produit dans son propre studio à Bruxelles.

Le jeune homme semble assumer pleinement sa posture. Il enchaîne une série de titres issus de ce support. « Basique » et « Ça va pas durer » marinent au sein d’une atmosphère douce et mélodique. Mais, ne vous trompez pas, l’artiste sait aussi se montrer plus énergique en proposant, également, des titres chargés d’intensité.

Léon cisèle finement sa plume. Il explore, à travers ses textes, des émotions profondes, des blessures intérieures, entre pop, chanson et musique électronique contemporaine.

Afin de satisfaire les fans de la première heure, des chansons moins récentes sont également insérées dans sa setlist, comme une exploration intimiste d’un jeune chanteur cherchant sa voie.

Nonobstant une prestation relativement tendre, Léon est parvenu à susciter l’attention des plus curieux.

Le temps est de plus en plus menaçant. Il est temps de se mettre à l’abri. Et tant qu’à faire, y assister au concert de RORI.

Après avoir marqué les esprits en assurant la première partie de Lana Del Rey, au festival Rock en Seine, devant 40 000 spectateurs, RORI poursuit son ascension. Cet été, elle s'invite sur les scènes de plusieurs festivals dont Les Francos à Esch/Alzette, Les Gens d’Ere et Les Solidarités à Namur.

Nouvel espoir de la scène musicale belge, RORI s’impose grâce à un univers atypique, puissant et résolument moderne.

Portée par un style pop-rock instinctif et percutant, la jeune dame capture les tourments et les espoirs d’une jeunesse en quête de repères, devenant ainsi une voix authentique et inspirante. A travers des textes sincères et engagés, elle transforme ses émotions en hymnes générationnels, oscillant entre fragilité et intensité.

Les spectateurs les plus fervents auront remarqué qu’il ne s’agit pas d’une novice, puisqu’elle a milité aux côtés de Valentin Vincent – chez Beffroi, décédé à l’aube de sa vie.

La petite maîtrise les codes du marketing en faisant de la couleur rouge, une identité et sa marque de fabrique. On retrouve ainsi cette teinte sur le micro et son pied. C’est également celle qui domine le light show. Et puis celle qui a été choisie pour l’inscription sur la peau de résonnance de la grosse caisse.

Toujours flanquée de ses fidèles serviteurs, l’ex-The Subs, Hadrien Lavogez, préposé à la guitare, et Martin, caché derrière les fûts (NDR c’est aussi le batteur de Ykons), la demoiselle entame son tour de chant par « Ma Place », dont le phrasé, les sonorités pop et les appuis rythmiques sont très communicatifs.

Le band livre une forme de pop/rock chanfreiné, qui lui va comme un gant. Les fans de la première heure s’y perdront, l’artiste ayant jusqu’à présent chantourné dans la langue de Shakespeare.

Vêtue d’un crop-top de couleur noire, la jeune fille laisse apparaître un corps filiforme. Elle connait bien ce festival pour s’y être déjà produite dans le passé.

Capable de vous retourner de solides punchlines, l’ingénue est devenue une figure de proue de la scène musicale noir-jaune-rouge, pour l’avoir écumée depuis quelques années.

Aujourd’hui, elle s’affranchit des préjugés pour servir un répertoire cuisiné à la sauce pop acidulée, devant un public que l’on dit souvent élitiste. Mais « Ma place », met tout le monde d’accord. Les riffs de guitare, les frappes syncopées et la voix portante de RORI, font de ces ingrédients, une recette qui incarne une nouvelle génération d’artistes qui ramène le rock alternatif sur le devant de la scène pop, imposant son style avec une authenticité et une force indéniables.

Sur le percutant autant que ravageur « Vampire », la jeune dame vampirise complètement son auditoire. Un titre dont les sonorités résonnent encore aujourd’hui dans la tête de votre serviteur. Et donne le « Vertige » à son cœur, tout au long de cette compo livrée avec justesse et émotion.

Caractérisé par son phrasé haché, ses sonorités pop et ses appuis rythmiques, la musique de RORI, artiste manifestement charismatique et communicative, rallie rapidement la foule à sa cause et s'inscrit dans l'air du temps.

Malgré ce « Soleil » brûlant, les corps se dénudent. Force est de constater que cette situation suscite la « Jalousie ».

Alors que Rori embrasse différents styles, depuis la pop au rock en passant même par le funk, ses chansons abordent des sujets personnels et très intimes à l’instar de « Loser ». Alors qu’hier, ces thèmes la rongeaient, aujourd’hui elle semble les cultiver et en tirer parti.

Spasmodique, « Miroir » véhicule des accents nostalgiques. A moins que le rétroviseur ne soit un moyen de regarder le passé afin d’affronter l’avenir.

Touchante et la sensibilité à fleur de peau, Camille Gemoets (à l’état civil) a accordé un concert d’une intensité rare, dévoilant, un peu plus encore, le contenu de ses émotions.

Justement, « Docteur » vient doucement clôturer la fin d’un set très enrichissant. Une chanson ultra médiatisée dont les spectateurs semblent connaître les paroles du refrain et qui met exergue, ce sentiment de différence.

RORI a tout d’une grande : la musicalité, la justesse, l’émotion et ce désir de faire le bien à l’aide de textes dans lesquels le mélomane lambda s’y retrouve.

Amir est programmé sur la main stage. L’artiste avait été boycotté lors d’un festival précédent, organisé par un pair qui reprochait ainsi au chanteur franco-israélien d’être trop proche du Tsahal (l’armée israélienne pour laquelle il a servi) et du gouvernement Netanyaho.

A Ere, il semble avoir été épargné par ces frasques idéologiques. Mais, étrangement, au moment de son tour de chant, d’importantes trombes d’eau se sont abattues sur le site, contraignant les festivaliers à se mettre à l’abri. Y compris votre serviteur, trempé jusqu’aux os.

Le peuple attendra patiemment Cali pour les 20 ans de « L’Amour Parfait ». ‘Parfois on garde le meilleur pour la fin’. C’est par ces mots de Joe Strummer que Cali définit son album anniversaire.

Eh oui, vingt ans plus tôt, Cali présentait sa définition de l’amour parfait, un album qui s’est vendu à plus de 500 000 exemplaires et dont certaines chansons sont restées dans les mémoires.

En 20 ans, il a gravé 12 albums studio et accordé des milliers de concerts. 20 ans d’amour pour un public, et pour des artistes que Cali a eu la chance de côtoyer, d’admirer et d’aimer, dont certains constituent d’ailleurs, une influence majeure pour le chanteur.

La réputation suit l’artiste, inviter Cali dans un festival, c’est comme investir dans l’immobilier, cela reste une valeur sûre !

La pluie est tellement dense que l’estrade est inondée ; et ce malgré l’évacuation réalisée par des préposés, raclettes à la main. Ni une, ni deux, Cali accourt sur l’estrade et fait mine d’attraper les gouttes d’eau. Parfois en vain, mais souvent avec succès, il faut l’avouer.

« Elle m'a dit » donne le ton de ce qui sera un cocktail de fougue et de sincérité. Ce morceau met en lumière le choc émotionnel ressenti lorsqu'une relation s'effondre sans crier gare.

Le chanteur/amuseur ne cessera de faire le pitre durant le live et ce pour le plus grand bonheur des fans ébahis ! Serait-il dopé à une quelconque substance psychotrope ?  Grimaces, gestes amicaux, regards insistants accompagnent le gai luron lors de la seconde compo, tout aussi tonitruante, largement connue auprès du grand public : « C’est quand le bonheur ».

Pour cette tournée, il est accompagné d’artistes importants à ses yeux. Et la surprise est de taille ! A commencer par Noé Preszow, un auteur-compositeur-interprète et musicien belge venu le rejoindre pour un délire collectif.

La chanson à peine achevée, le troubadour de la chanson française commence à manifester une envie irrésistible de jouer avec le public. Et ce qui devait arriver, arriva. L'homme taillé comme un gringalet se hisse sur le frontstage, prend un élan, et s’abandonne au crowdsurfing pour entamer une danse du diable perché dans les airs. C'est un passage obligé chez lui et ce soir ne fera pas exception à cette règle, qui semble-t-il, est immuable ! Le tout sans perdre de souffle ! Pas mal pour un gars qui a la cinquantaine passée... Heureusement pour celles et ceux qui l'ont soutenu, le casse-cou doit à peine peser cinquante kilos, tout habillé !

Repoussant ensuite les principes des règles de sécurité, l'artiste dynamise un peu plus le spectacle et invite toute la presse à monter sur le podium devant un parterre de quelques milliers de personnes, pour immortaliser le souvenir d’une photo de famille puissance mille.

Sa réputation de personnage complètement déjanté est largement méritée.

Enfilant les tubes, le Toulousain, expose et s'expose à travers le prisme de sa vie, ses amours, ses attentes et ses envies. Et ce n’est pas « Elle m’a dit » qui va retenir les ardeurs des uns et des autres, lorsqu’on sait que le fanfaron se caresse la langue pour mieux se caresser le sexe, le tout sous les yeux ébahis des parents accompagnés de leurs chères têtes blondes. Proche de l’ignominie, Cali pose ensuite sa gratte sur le sol, s’y couche et fait mine de lui faire l’amour. C’est chic !

Preszow ne sera évidemment pas l’unique invité. Le suivant, Antoine Delie, un (autre) jeune Belge, affiche des allures d’intello. Ils forment à eux deux, un joli duo chic et choc.

Cali est connu pour être un artiste engagé qui traite souvent de sujets sociaux, politiques et des valeurs comme la liberté d’expression dans ses chansons et ses prises de parole.

Aujourd’hui, il sera notamment question de Paul Watson, officier de marine, militant écologiste et antispéciste canado-américain, détenu pour ses engagements. Ou encore des enfants qui décèdent chaque jour lors des conflits ou encore de Gaza.

Sur des musiques simples, mais accrocheuses, Cali a pris le parti de choisir ses mots avec une grande délicatesse afin de décrire intelligemment et sincèrement les maux de la vie et la difficulté d’aimer aujourd’hui. Au fond, n’est-il pas préférable de ne pas aimer plutôt que ne plus aimer ? A méditer...

Afin de tenir en haleine un public particulièrement en effervescence, Cali invite une jeune artiste belge bien connue des francophones. Il s’agit de Charlotte Foret, aka Charles, une auteure-compositrice-interprète belge, originaire de Braine-le-Château. Ensemble, ils entament une danse endiablée sur fond de décibels.

Cali entame enfin « Je m’en vais » et accompagne la parole aux gestes. Une fois de plus, il s’élance dans le public, obligeant les festivaliers à le transporter vaillamment pour quelques mètres. Et très rapidement, dans le feu de l’action, c’est Arno, récemment décédé, qui entre dans le cœur et la tête de celles et ceux qui chantonnent en chœur un « Putain Putain » acidulé. Au fond, il est vrai que nous sommes tous des Européens.

Delie refait surface pour un « La vie quoi », hymne à la vie et à l’amour, issu d’un album de 2015, qui n’a pas pris une ride. C’est franchement percutant, incisif et jouissif.

Mais c’est auprès de Nicolas Michaux qu’il termine les présentations. Un artiste qui s’est fait connaître en drivant Eté 67, une formation qui a sévi de 1998 à 2002. Depuis, il a embrassé une carrière solo. Il a vécu quelques années à Bruxelles avant de rejoindre l’île de Samsø au Danemark pour des raisons familiales. Retour donc dans le plat pays le temps d’un concert.

« 1000 cœurs debout » clôt le set. Un moment qui permet au drummer de se lâcher comme jamais et d'extérioriser toute sa technique de frappe.

Une page se tourne, mais un livre entier s’est écrit ce soir…

Généreux, Cali a offert une fois de plus un moment de pure grâce. Ses compos font mouche et il continue de partager son amour avec un public toujours aussi réceptif.

Une chose est sûre, le champ du possible de Bruno Caliciuri, à l’état-civil, est illimité. Véritable touche-à-tout, il respecte ses engagements, tant dans l’univers du théâtre, de la poésie, de la littérature et, bien évidemment, de la musique. Un artiste, un vrai !

Le dernier concert de cette édition du ‘Les Gens d’Ere’ sera assuré par Pascal Obispo.

La foule est compacte. Pas étonnant, puisqu’il possède une notoriété certaine. Auteur-compositeur-interprète français, il connaît le succès dès 1992, grâce au titre, « Plus que tout au monde ».

Parallèlement à sa carrière de chanteur, il signe de nombreux succès pour d'autres artistes, tels que Florent Pagny, Johnny Hallyday, Garou, Zazie, Marc Lavoine, Natasha St-Pier, Patricia Kaas, mais aussi la comédie musicale ‘Les Dix Commandements’. En tant qu'interprète, Pascal Obispo a vendu plus de cinq millions d'albums et en tant que compositeur quatorze millions.

Obispo a également mis sa popularité au profit d'œuvres humanitaires, et tout particulièrement au service des Restos du Cœur et de la lutte contre le SIDA.

Lorsqu’il se présente sur scène, il est habillé tout de blanc. Une bien belle idée, lorsqu’on constate l’état boueux du site, laissé par les pluies diluviennes qui ne cessent de tomber depuis quelques heures.

Il s’agit de sa dernière date en Belgique. Autant dire que la plaine est… pleine à craquer.

Entre moments au piano ou debout devant le public, guitare en bandoulière, alternant ballades et morceaux pop/rock, Obispo enchaîne les chansons. Celles de son répertoire, mais aussi composées pour les autres.

Mais c’est par un « Jamais » qu’il entame son show. Une aubaine, lorsqu’on sait qu’il va brasser 30 années d’une carrière riche et intense.

Ses chansons sont souvent ponctuées d’anecdotes et de souvenirs, l’artiste se remémorant les moments les plus marquants de sa carrière ou de ses rencontres.

Un concert au cours duquel il ne s’accorde aucun répit. Ses compos couvrent le temps d’une époque, à l’instar de « L’importance, c’est d’aimer », « Sa raison d’être » ou encore « Savoir aimer ».

L’artiste est soutenu par une kyrielle de musiciens. Des instrumentistes conventionnels, mais aussi des préposés aux cuivres et percussions. Ce qui donne davantage d’amplitude aux morceaux.

Pourtant, malgré une volonté certaine de bien faire et l’engouement du public, le concert peine à décoller, l’artiste se murant trop souvent dans des discours autocentrés.

Le live de ce soir constituera donc un best-of des chansons les plus populaires, depuis « Millésime » à « Un jour, une femme », en passant par « 1980 ». Des titres impérissables.

Le festival ferme boutique à deux heures du matin pour les plus courageux. Votre serviteur l’est moins.

Une fois encore, le festival ‘Les Gens d’Er’ a livré des concerts d’une qualité exceptionnelle. Tout y était : la joie, la bonne humeur, une musique de qualité et surtout une équipe entièrement composée de bénévoles largement récompensée par les sourires du public.

Vivement l’année prochaine !

(Organisation Les Gens d’Ere)

samedi, 26 juillet 2025 19:13

Les Gens d’Ere 2025 : samedi 26 juillet

Avant-dernière journée de festival. La chaleur est étouffante et le ciel est chargé de gros nuages orageux, de quoi craindre le pire !

Que cela ne refroidisse pas la joie et la bonne humeur des quelques impatients qui se sont pressés dès l’ouverture des portiques.

Votre serviteur arrive en début d’après-midi, la journée risque donc d’être longue. Autant qu’elle soit riche de découvertes !

C’est Coline BLF qui s’y colle ! Elle est accompagnée de ses quatre mousquetaires ! Exception faite, qu’à défaut d’épées, ils ont pour seules armes toute une panoplie d’instruments, basse, guitare, clavier et batterie.

Elle est originaire de Namur. L’univers musical au sein duquel elle baigne, oscille entre bedroom pop et French pop.

Chantant seule dans sa chambre depuis son plus jeune âge, accompagnée de sa gratte, ce n'est qu'à ses 18 ans qu'elle dévoile son goût pour le chant. Après une année passée en Californie, Coline se lance et travaille sur un premier Ep, « Blue Nostalgia », qui verra le jour en septembre 2022.

Elle entame son set en regardant droit dans les yeux votre serviteur pour lui balancer un je t’aime « A la folie », une compo au cours de laquelle ‘l’amour toujours’ est roi sur fond d’un flow down tempo.

Petite par l’âge, mais grande par la taille, elle se produit devant un parterre plutôt maigre, ce qui n’est pas sans rappeler que, généralement, le peuple ne se soucie guère des artistes émergents. Dommage parce que cette jeune fille possède dans la voix un grain virginal assez surprenant.

Elle aime les textes engagés. Que ce soient sur « Les poissons », Jours heureux » ou encore « Sunrise », la gonzesse s’interroge sur le monde et le devenir de la planète.

En quête de réponses existentielles, elle s’interroge à travers « Sunlight », sur toutes ces choses que l’on n’apprend pas à l’école. Une compo écrite lorsqu’elle avait 21 ans.

Sous le regard stupéfait des spectateurs, elle s’empare d’un drapeau palestinien, proclamant un ‘cessez-le-feu’ immédiat. Et quoi de mieux qu’un « Où on va », ersatz d’idéal idéologique, sociétal et politique pour s’en convaincre. Et tout cas, on peut affirmer que cette fille en a dans le…

Sa musique vintage et solaire est d'abord influencée par King Krule, Clairo et Mac Demarco, mais aussi par de nombreux artistes francophones tels que Lewis Of Man ou encore Claire Laffut. Et ce n’est pas « Cheveux argentés » qui démentira cette impression, une compo subtilement sautillante dédiée à sa mère, relative à la sénescence et à la honte qu’elle peut provoquer chez un individu ainsi que les dégradations causées par le temps sur le corps d’une femme.

Et puis, ses propos se transforment aussi en véritable plaidoyer à l’égard de l’inaction des politiques, tout au long de ce « Feu », bouillonnant de colère et caractérisé par son refrain entêtant, au cours duquel elle clame ‘Soyons heureux avec que le monde brûle’, véritable hymne repris en chœur par l’auditoire.

Parfois doux ou teinté d’une pointe de rock, l’univers de Coline BLF est protéiforme, passant à de jolies ballades aux textes plus rompus.

Loin des enjeux qu’elle défend, la belle sait se montrer davantage solaire lors de morceaux aux sonorités eighties, comme cette « Luna », personnage fictif qui invite le peuple à se déhancher. Une compo qui projette dans les esprits, l’image de la boule à facettes qui inonde le dancefloor de ses lumières…

Figure emblématique de la nouvelle chanson française, Coline BLF s’est montrée digne, sincère et hautement humaine transformant ses textes en combats contre un monde qu’elle dépeint avec hargne, mais dont elle ignore encore tout.

Direction ‘Babord’, où KOWARI est prête à en découdre sous le chapiteau.

C’est un projet au patronyme étrange drivé par le violoniste Damien Chierici (Dan San, Yew) et le pianiste Louan Kempenaers (Piano Club, Aucklane, au sein duquel il se consacre à la basse), tous deux issus de la scène pop/rock belge.

Si Kowari est un petit mammifère à la queue en plumeau, comme dans ‘Le Roi Lion’, le nom de scène évoque plutôt le totem scout d’une amie commune.

Bien qu’à la base, le projet était destiné à la musique de film, très vite on lui suggère le ‘live’, l’univers du duo s’y prêtant admirablement bien.

Tout en s’appuyant sur sa formation classique dans la structure des chansons, KOWARi propose une expression sonore qui navigue entre néo-classique et ambiant, Chierici se chargeant d’y apporter de la douceur alors que Louan la sublime de ses sonorités électroniques.

Une musique dont l’approche, la culture et l’instrumentation n’est pas sans rappeler celle du duo berlinois Two Lanes.

Cette formation s’inscrit au cœur de cette nouvelle génération d’artistes repoussant les frontières entre l’organique et l’électronique avec un souci de la précision et du show poussés à son extrême.

Secondé par un light show absolument délicieux, les deux comparses livrent un set nourri à l’instinct et l’expérimentation, grâce aux synthés et autres loops. Sans oublier les cut-offs sur les instruments. Bref, une panoplie technologique qui leur permet de s’exprimer cinématographiquement.

Sensorielle, profonde et altruiste, la musique de Kowari, entre passages calmes et envolées diaboliques, explore de grands espaces recouverts de sable chaud propices à la sensualité. Des chansons qui se vivent plus qu’elles ne s’écoutent.

Un groupe qui peut surprendre dans un festival où le line-up se veut plutôt populaire et accessible, mais ses élans sauvages et ses air(e)(e)s de liberté s’intègrent plutôt bien dans un tel environnement…

Autre endroit, autre style ! Cette fois, c’est au tour d’Elia Rose de grimper sur les planches !

Elle connaît bien la région. De son véritable nom Elia Fragione, cette auteure-compositrice-interprète est originaire de Tournai. Elle propose une pop éclatante, influencée par les années 80, à la fois funky, électro et très colorée à l’instar de « Gin Tonic ».

Elia est Issue d’une famille de musiciens : son père est un pianiste-chanteur italien et sa mère une chanteuse anglaise. Elle monte sur scène dès l’âge de 3 ans dans le piano-bar familial ‘Les Trois Pommes’ d’Orange. À 15 ans, elle est finaliste de l’émission ‘Pour la Gloire’, diffusée par la RTBF, au cours de laquelle, elle interprète une chanson de Vanessa Paradis. Plus tard, elle participe à ‘The Voice Belgique’ (2011 puis 2013), coachée par Natasha St-Pier.

Elia nous plonge au sein d’un univers pop électro vintage, très inspiré des années 80 (synthés, rythmes dansants, refrains catchy).

Elle enfile, à maintes reprises, une tête de licorne colorée. Un humour second degré et une auto-dérision qu’on retrouve sur « Colors ».

Parfaitement à l’aise tant à la basse qu’au un keytar (clavier-guitare), elle rallie un public particulièrement réceptif à ses frasques, à l’instar du succulent « Criminal », issu de « Album I Love It », caractérisé par son gimmick radiophonique.

Et pour couronner la fête, plusieurs danseuses s’invitent, le tout dans une ambiance foutraque.

Le show est visuellement intéressant, l’investissement personnel est à souligner, mais dans sa globalité, le set manque cruellement de constance et de cohérence.

Retour au chapiteau. Un artiste étrange s’y produit. I s’agit de Julien Granel. Lorsqu’il débaque, on dirait, à s’y méprendre, un clown tout droit sorti d’un cirque. Accoutrement bariolé, cheveux bicolores, lunettes trop grandes et moustache à la Magnum.

Auteur-compositeur‑interprète et producteur, Granel est réputé pour ses performances scéniques hautes en couleur. Son ascension sur la scène musicale francophone a été rapide.

Paru en 2019 et sculpté dans un électro‑funk-pop, son Ep, « Bagarre Bagarre », lui a permis de se faire remarquer. Tout comme ses multiples collaborations, et notamment celle opérée en compagnie de Léna Situations, pour « A la folie ».

Paru en 2022, son elpee « Cooleur » reçoit un accueil favorable de la part du public et des médias.

A l’aide de – notamment – son synthé OB‑6 analogique, soutenu par un Ableton Push, Julien Granel mise surtout sur l’improvisation et l’interactivité lors d’un show extrêmement énergique et visuel.

Le public ne s’y trompe pas, car avec Juju, c’est la fête. Invasives, mêlant fraîcheur, sophistication orchestrale et groove les compos tournoient dans les ‘portugaises’.

Bref, Granel est un artiste qui fait la fête visuelle autant qu’auditive. Une forme de kaléidoscope à l’esthétique flamboyante, entre mode colorée et ambiance kitsch assumée.

Juste le temps de rincer le gosier et votre serviteur est de planton face à la main stage pour y découvrir le set de Joseph Kamel.

Auteur-compositeur-interprète franco-égyptien, il grandit dans un univers musical riche, entre la France et l’Égypte.

À 8 ans, il commence la musique au Caire, apprenant le piano et l’oud, instrument traditionnel. Il s’installe en Normandie (Caen) à l’âge de 13 ans, découvre la guitare et la MAO, puis commence à écrire et composer ses propres titres.

Ses influences oscillent de la musique orientale traditionnelle à la pop urbaine, en passant par le slam, dans un style plutôt susceptible de rappeler Grand Corps Malade ou Ben Mazué.

Il se révèle auprès du grand public, en 2021, lors de l’émission ‘The Artist’ (France 2), en interprétant « Dis‑moi », un titre qui viralise ensuite les plateformes. L’année suivante, il assure la première partie de Julien Doré lors de ses tournées dans les Zéniths.

Doté d’une voix profonde, expressive et vibrante il est capable de transmettre émotion et authenticité, à l’instar de « Ton regard », une chanson écrite pour sa fille encore à naître et à… concevoir.

Kamel maîtrise sans aucun doute les codes du genre. Ce qui lui permet de s’attirer la sympathie du public. Ses interventions sont ponctuées de réflexions à l’humour tranchant, notamment lorsqu’il s’étonne qu’il fasse chaud en Belgique. Une première dit-il avec conviction.

L’artiste s’épanche sans fard sur sa vie personnelle et ses collaborations artistiques, notamment celle réalisée auprès de Mentissa pour « Tu vis », lors d’une alchimie vocale entre douceur et puissance, portée par une sincérité touchante. Mais, comme le binôme n’est pas présent, c’est le public qui se charge de pousser les petits cris.

Sans foi, ni loi, l’artiste-humoriste regarde dans le rétroviseur de sa vie, tout au long de « Miroir ». Le spectre de Garou rôde.

Le public est attentif lorsque Granel raconte que dans sa ville natale, un petit garçon écoutait en boucle le premier album de Julien Doré. Et lorsque ce garçonnet a pu lui parler pour lui prier de chanter avec lui, Sieur Doré de lui promettre qu’un jour son vœu s’exaucerait. Kamel ne tient en haleine le public que quelques minutes, avant d’avouer qu’en fait, ce petit garçon était un… copain de classe. Ce qui déclenche l’hilarité au sein de l’auditoire, qui, un instant, avait cru à ce conte moderne.

Il poursuit sa prestation en faisant croire que Julien Doré attend sagement en backstage afin de l’accompagner sur un titre. Un leurre évidemment. Mas pour l’artiste, un public émerveillé durant quinze secondes est un public envahi de bonheur. Et comme une surprise n’arrive jamais seule, il récompense le public, en interprétant « Beau ».

Il évoque aussi régulièrement sa famille, ses racines et sa double culture, et rend un hommage intime à ce frère cadet sur « Petit frère ». Et comme le public semble rempli de tristesse en apprenant que cette chanson était la dernière, il promet qu’elle va durer… deux heures. Ce n’est plus de l’interaction qui s’installe entre la foule et l’artiste, mais une communion. Peut-être solennelle.

A peine dix minutes plus tard, le chapiteau est prêt à accueillir Puggy, un groupe belge réunissant le chanteur/guitariste Matthew Irons, le bassiste Romain Descampe et le batteur Egil ‘Ziggy’ Franzén.

Fondé en 2005, à Bruxelles, la formation propose une musique, fruit d’un mélange entre pop et rock acoustique, et le tout est teinté de légères mais remarquables influences latines.

Irons est loin d’être un inconnu. Il était membre du jury dans le télécrochet, ‘The Voice’, sous sa version belge.

Le chanteur est assez classieux, il porte une petite veste bleue et un t-shirt blanc, impeccablement repassés.

« The way we thought it was », une toute nouvelle compo, ouvre les hostilités. Il s’agit d’un extrait du futur long playing. De quoi mettre forcément l’eau à la bouche. Alors que Matt cisèle les riffs, Romain frappe ses cordes avec acharnement, tandis que le troisième larron tambourine aussi fort qu’il le peut sur les nombreux fûts et cymbales dressés devant son corps raide comme un piquet. C’est énergique, c’est rock et c’est fun.

La furie gronde, le public s’exalte et très vite la sueur apparaît sur le front des musiciens alors que « Never give up » embraie. « I do » baigne au sein d’une atmosphère emphatique, impression amplifiée par les ivoires largement syncopés.

Irons troque sa gratte électrique pour une semi-acoustique. C’est alors que « Simultaneously » prend son envol. Une compo aigre-douce qui permet au chanteur de monter allègrement dans les aigus, tandis que le batteur s’amuse à jouer à contre-temps. Mais c’est encore dans les vieilles marmites qu’on fait les meilleures soupes. Et pour cause, « To wind the world », une compo acidulée qui remonte à 2013, rallie tous les suffrages.

Plus structuré, « Change The Colors » libère des sonorités pop/rock dansantes, réminiscences de l’identité primaire du band.

Après avoir fait le pitre, les zicos changent de registre. Matt reprend son rôle de préposé à la gratte semi-acoustique et entame une seconde ballade dans une configuration atmosphérique. On se sent alors bercé par ce « How I Needed You ».

Afin de garder le cap et l’attention des festivaliers (qui se sont soudainement pressés), « Last Day On Earth » permet aux percus de décoller, alors que les cordes de la basse sont mises à rude épreuve. Un morceau percutant, aux riffs singuliers et au solo tonitruant parfaitement maîtrisé par Irons lors du bridge.

Un moment solennel ! La frontière entre l’estrade et la plaine disparaît au profit d’une communion où Dieu n’a d’égard que pour lui-même.

Le set prend doucement des allures de fin. « When You Know » constitue la pierre angulaire d’un show solide comme un bloc de béton. Un titre qui se distingue par de belles progressions au clavier et un solo de batterie étourdissant. La foule se montre particulièrement réceptive au show et la formation se fend d’une attitude fédératrice.

« Numbers » et « On my mind » sont magistralement interprétés. Un set que les festivaliers de cette édition du ‘Les Gens d’Ere’ ne sont pas prêts d’’oublier.

Alors qu’il fait nuit noire, Hoshi est dans les starting-blocks. Elle a enfilé de grosses godasses et des chaussettes à damiers noirs et blancs, afin, sans doute, de signaler le début du tour de chauffe.

Avant d’entamer sa carrière solo, Mathilde Gerner, à l’état-civil, a effectué ses premiers pas au sein du groupe amateur TransyStory, formé en septembre 2011. Passionnée par la culture japonaise, elle a d’abord choisi pour nom de scène Hoshi Hideko, puis simplement Hoshi, qui signifie ‘étoile’ en japonais.

Ses musiciens entrent en scène, lentement, tour à tour. Et dans cette bande, il n’y pas que des inconnus. A commencer par Lola Frichet à la basse (Pogo Car Crash Control), Charlène Juarez aux claviers (Brigitte) et Enzo Gabert à la batterie (Skip The Use). Et c’est Lucie, un joli bout de femme, qui se réserve la guitare… d’un vert éclatant.

« Mauvais rêve », titre phare, retrace les étapes d’une vie que l’on comprend difficile, rejetée de tous et du système.

Hoshi impose un style musical bien à elle. Des textes simples, mais touchants, une musique entraînante et une aura exceptionnelle. Sans oublier cette voix haut-perchée et quelque peu nasillarde qui peut perturber les non-initiés. Pas étonnant donc qu’elle soit devenue l’une des révélations de la chanson française de ces dernières années.

Très vite, elle embraie par « Papillon », une compo aussi légère que les ailes d’un insecte holométabole auquel il appartient.

« Puis, t’as dansé avec moi », très vite, s’épanche sur la cruauté extrême dont elle a été victime à travers son appel au manifeste, « Amour censure », hymne à la tolérance et à la sincérité des sentiments amoureux.

Hoshi, elle-même victime d'agression homophobe, a écrit cette chanson en réaction à une certaine libération de la parole discriminatoire, notamment après la ‘manif pour tous’. Une composition qui malheureusement a encore des raisons d'exister auprès des ‘biens pensants’. Et pour contrer toute cette haine, rien de tel qu’un gros fuck à tous ces enculés dont elle n’a plus peur aujourd’hui, dit-elle, tout en agitant un drapeau arc-en-ciel, symbole du mouvement LGBT+.

Son grain de voix particulier est mis en exergue sur « Neige sur le sable », une compo issue de « Cœur parapluie », installant l’Amour au cœur des débats. 

Elle empoigne ensuite sa sèche, comme à ses débuts, pour y jouer « Manège à trois », lorsqu’en rue, elle essayait d’accrocher du regard les passants, sans parvenir à ses fins. Sauf sa mère et son père, dit-elle, entre rage et désespoir.

Douée pour les métaphores et autres figures de style, elle poursuit sur un ton nettement plus rock sur un « Femme à la mer », hymne à la boisson-trahison où on l’entend chanter avec exaltation que plus elle boit, plus elle croit…

Généreuse et humaine, on la sent fusionnelle au sein de son band. Une belle complicité la lie avec sa bassiste. Et les puristes auront remarqué l’inscription gravée sur l’instrument, ‘One woman on stage’.

Celle dont le physique a été quelque malmené par le journaliste-chroniqueur Fabien Lecoeuvre, entame un « Je partirai », chanson percutante qui parle du désir de partir loin d'un monde qui ne l'aime pas, la juge et la blesse. Bref, un exutoire où elle exprime sa souffrance, son incompréhension et son besoin de liberté. Elle veut rester éternelle dans les mémoires, comme une étoile ou une comète. Gageons qu’elle y parvienne.

Le set s’achève doucement. Après avoir interprété « Ta manière », elle scande au public un « Réveille-toi » mémorable avec au centre des débats la petite aiguille qui défile…

Que l’on aime ou pas cette artiste, elle détient la recette du succès ! Un brin de folie, beaucoup d'amour et une énergie communicative.

Il est près de 23 heures, lorsque votre serviteur, dans un sursaut de vitalité emprunte le chemin du Chapiteau pour y voir et écouter Henri PFR.

Si, dès l’âge de six ans, il poursuit durant neuf longues années une formation classique de piano et étudie le solfège, c'est véritablement vers l’âge de quatorze que le jeune Henri commence à s'orienter vers la musique électronique.

Surnommé ‘le petit prince des platines’, il s’est imposé comme la nouvelle sensation de la scène électro made in Belgium.

Mais pas seulement, puisque ses titres l'ont amené à s'ouvrir vers l'international. Aujourd'hui, il se transporte au gré des festivals ; depuis Tomorrowland, où il revient chaque année, en passant par l'Ultra Music, Lollapalooza et même Electroland, à Disneyland.

Aux ‘Les Gens d'Ere’, le DJ tient ses promesses. Un show dynamique et sans concession où la seule constante est la flexibilité de son matériel.

Si le genre ne séduit a priori pas votre serviteur, il est important de s'ouvrir à toute forme de culture musicale.

Entre ‘beatmatching’, ‘drop’ ou encore ‘cue’ (des termes propres à ce genre musical), survitaminé, celui qui se produit au-delà de nos frontières, se livre…

Les compos s'enchaînent à en donner le tournis, au sein d’un décor riche en prouesses pyrotechniques.

Aucun doute, Mister Peiffer était le ‘King’ ce soir, en s'imposant non pas comme nouvelle sensation, mais en talent confirmé.

Une première journée faite de belles découvertes. Le dernier jour du festival s’annonce plus délicat sur l’autel météorologique.

Quoiqu’il en soit, Pascal Obispo devrait attirer la foule, que le temps soit clément ou pas !

(Organisation : Les Gens d’Ere)

vendredi, 25 juillet 2025 17:24

Les Gens d’Ere 2025 : vendredi 25 juillet

Et pourtant ce festival est né d’une envie de faire de la musique, un lieu de concentration de joie et de bonne humeur ! Enfin, ça c’était avant, parce que Les Gens d’Ere jouissent aujourd’hui d’une renommée internationale et les formations qui veulent s’y produire sont légion.

Pour cette année, du ‘Belge’, évidemment, mais aussi des artistes issus de la planète dont, notamment, Obispo et Mel C. (une fille des Spice Girls, groupe de pop anglais formé en 1994, à Londres, et constitué à l'origine de cinq chanteuses et danseuses : Victoria Beckham, Melanie Chisholm, Melanie Brown, Geri Halliwell et Emma Bunton).

Au cours des dernières semaines, il a beaucoup été question des modèles économiques des festivals, notamment celui de Ronquières qui a invité Will Smith en guest, obligeant les organisateurs à ajouter 1 million d’euros à un budget déjà serré de 4,5 millions d’euros. A Ere, le modèle fonctionne à merveille, grâce notamment aux 500 bénévoles qui font office de capitaine, car, il faut bien le dire, le paquebot est de taille !

L’esprit de camaraderie, lui, n’a pas changé d’un iota depuis l’origine du festival ! Exit les trucs pompeux, la simplicité EST la règle ! Même le stand VIP fait les frais de cette culture ; il est réduit à sa plus simple expression ! Celui qui veut s’y restaurer ne trouvera ni caviar, ni champagne, mais de la bière et une bonne grasse frite ! Et celui qui n’est pas content ‘qu’il aille se faire voir !

Bref, Les Gens d’Ere est le festival par excellence où l’on s’y sent comme chez soi, entouré d’une équipe de gens, vrais, passionnés et souriants.

La configuration du site est identique aux années précédentes. Prix du ticket fortement accessible, parking gratuit et restauration pour toutes les bourses. La seule différence par rapport aux années précédentes, c’est l’existence d’une petite scène supplémentaire dispensant de la musique électronique aux plus jeunes. Sans oublier ‘Le Chapito’ et le ‘Plein Ere’ logiquement outdoor, les deux endroits principaux où les artistes se produisent, situés à une encablure l’une de l’autre, ce qui permet de s’y rendre en quelques pas seulement.

Les organisateurs ont flairé le bon filon en organisant les festivités en cette fin juillet. D’autant plus que le temps est de la partie, même si la veille quelques averses orageuses sont tombées, sans aucune conséquence directe en matière d’accessibilité et de mobilité.

Se déroulant sur quatre jours maintenant (rentabilité oblige), le jeudi fait la part belle à un groupe de covers qui sévit beaucoup dans la région : Zénith. Trop peu pour votre serviteur !

Priorité donc aux vendredi, samedi et dimanche !

Et comme mise en bouche, place à Lemon Straw. Le groupe, drivé par le charismatique Gianni Sabia, a l’honneur de se produire sur la main stage.

Le gars, longs cheveux huileux, poils sur la face, est plus en forme que jamais. Quoique les traits un peu tirés tout de même. C’est ça aussi la vie d’artiste : se produire aux quatre coins du plat pays (en Belgique) ou de la planète, le plus souvent dans un Berlingo, pour les néophytes, et un tour-bus pour les plus notoires.

L'origine du patronyme est relativement iconoclaste. Lemon Straw pourrait se traduire par une paille et un citron. Celle-là même que Gianni servait quand il vivait à New York et travaillait dans un bar pour subsister. C'est aussi là-bas qu'il a vécu ses premières expériences scéniques en chantant des reprises dans le métro ou en rue.

Ce soir, il est accompagné par Grégory Chainis (basse), Boris Lori (Steel) et Jean (batterie). L’habituel préposé de service aux fûts, Martin, est empêché pour raisons médicales.

Sabia a failli voir ses rêves se briser en 2017, à la suite du départ du claviériste Xavier Bouillon (qui avait lui-même déjà remplacé feu Renaud Lhoest). S'ensuit une période de doutes et de remises en question. L’idée d’un projet solo a même traversé l’esprit du frontman.

L'arrivée de Chanis (on a pu le voir au sein de plusieurs groupes qui sévissent dans la région) et de Martin (Minga Wash, Feel) a vraiment permis au combo de prendre un nouvel élan et d'insuffler une nouvelle énergie aux musicos.

Boris est coiffé d’une casquette. Il est assis, guitare steel sur les genoux. Parfois, il cale un harmonica entre les lèvres.

C'est par « Jump » que le band ouvre le set. Un titre issu d'un dernier LP éponyme, paru cette année. Une compo qui permettra au leader, posté derrière son clavier, d'explorer toute l'ampleur de ses vocalises chaudes et puissantes. Un outil qui représente le prolongement de son âme.

Hanté par une carrière professionnelle à l'usine dont il se sait à jamais éloigné, le Belgo-italien se déchaîne. Lorsqu’il se positionne, gratte sèche en bandoulière, il frappe ses cordes hargneusement et avec énormément de conviction. Entre folk, rock, blues et pop, sa musique reste sans doute le meilleur exutoire pour oublier les affres du passé.

Issu de « Jump », « Home » s'immisce alors dans les ‘portugaises’ des aficionados.

Lemon Straw nous réserve « Straw ». Issu de « Jump », ce single imparable constitue un virage important dans le parcours du combo. Surtout, quand on se remémore le premier essai (plutôt réussi), « See You On The Other Side ». En tout cas, une prise de risque qui n'a pas désarçonné les fans de la première heure.

« Mistery train » prend le relais. Boris tient la lap steel sur les genoux (NDR : une guitare que l’on tient à l’horizontale en utilisant un bottleneck pour former des accords sur le manche). Le versant rock et rageur de cette compo vient renforcer un peu plus encore cette atmosphère électrique.

Mais là où Lemon Straw brille le plus, c’est lorsque les compos trempent dans le spleen. A l’instar de « Home », un morceau que Gianni a composé seul dans sa chambre lorsqu’il avait 15 ans, entre la frustration de ne pas trouver d’inspiration et la générosité que lui procure la musique.

Le set touche doucement à sa fin. « Don’t Look Up », référence à la comédie dramatique américaine écrite et réalisée par Adam McKay, booste littéralement Gianni. Harmonica en bouche, il livre une démonstration haute en couleurs. Chapeau bas M’sieur.

Un set taillé dans le rock !

On regrettera l’absence de titres plus gracieux comme « See you on the other side », le titre éponyme du premier LP, qui raconte une histoire sur l’amitié. Une ballade douce-amère écrite pour l'arrangeur et multi-instrumentiste bruxellois Renaud Lhoest (Yann Tiersen, Pierre Rapsat, Dominique A), parti trop tôt (en 2014) des suites d'une longue maladie dont il souffrait depuis longtemps.

Son âme planait quand même quelque part aujourd'hui aux Gens d'Ere. De là où il est, il est peut-être fier du chemin parcouru par son pote de longue date.

Adieu l’ami !

Petit détour sous la tente pour y (re)découvrir Poulycroc. Le groupe pardi, pas l’espèce de fricadelle que l’on mange à toutes les sauces !

Il s’agit d’une belle bande franchouillards, ventres bedonnants, totalement sculptés dans l’esprit folklorique belgo-belge qui caractérise ce beau pays.

En chemin, il a déjà croisé quelques pointures ; et en particulier des noms qui font partie intégrante du folklore musical belge : Le Grand Jojo, Les Gauff’ Au Suc’, Urban Trad, Lou & The Hollywood Bananas (Lou Deprijck)  ,.. ou de la scène ska et punk : La Ruda, Les Cameleons, Babylon Circus, etc.

Les joyeux lurons adaptent une série de morceaux qui trouveraient facilement leur place lors de la ducasse à Bouboule, à l’instar de « A la queuleuleu » ou « La tactique du gendarme ». C’est sympa, vivant et fun, mais ça ne vole pas très haut, il faut bien l’avouer.

Poulycroc a mis un point d’honneur à poursuivre son aventure et à propager son folklore, sa manière festive de voir la vie, son goût immodéré pour le divertissement, sans oublier les styles musicaux qu’il apprécie. Mais surtout, et c’est l’essentiel, sa bonne humeur générale.

Mais, l’absurdité n’étant pas une option chez votre serviteur, il file tout droit au stand food, pour y manger… une fricadelle sauce mayo !

Le monde s’est pressé à l’extérieur pour y voir et écouter la formation liégeoise, Ykons.

Elle est une fidèle au festival. Il s’agit de son quatrième passage.

Chaque concert a connu ses contrariétés. Le premier s’est déroulé sous une chaleur caniculaire. Le second sous des torrents d’eau. Le troisième a essuyé quelques couacs techniques au niveau des liaisons entre les tables de retour et les tables de façade. Quelle surprise nous réserve le concert de ce soir ?

Ykons promet un set impeccable en tout cas !

Alors que le batteur assure derrière les fûts durant de longues secondes, le claviériste le soutient rapidement, puis le guitariste et enfin le bassiste embraient, alors que le chanteur est perché tout en haut d’une estrade plantée au milieu du podium. « Red light » ouvre alors les hostilités ! Et tout au long de cette compo, l’idiome du groupe s’illumine… en couleur rouge, évidemment !

Le line impliquait, à l’origine, Renaud, Yann, Patrick, David et Ben. Mais, le drummer originel a quitté le bateau. Il a, depuis, été remplacé par un petit jeune d’à peine 30 berges. Un certain Louis…

Né sur les cendres de Can D, le band emprunte un chemin initiatique, dès 2019. Le succès progresse lentement. Ykons grave un premier elpee, « Reflected », qui lui permet de se forger une solide réputation et par conséquent de disposer d’un répertoire substantiel pour les festivals. La suite ? Un beau succès critique et d’estime !

Le vif et entraînant « State of mine » permet à Renaud de jauger la forme du public. Il est chaud-boulette. En effervescence il s’emballe déjà, et les muscles, jusque-là statiques, sont pris de mouvements saccadés au gré de cette rythmique pourtant un brin indolente. Et s’il s’agissait du syndrome Gille de la Tourette ?

Le combo embraie par le notoire « Sequoia Trees », un message adressé à l’être humain et à sa responsabilité à l’égard de tout ce qui l’entoure. Et de rappeler également que c’est ce titre qui a permis au band d’acquérir une véritable aura au royaume du moules/frites.

Et si « Sequoia Tree » a propulsé le combo dans les charts, cette chanson a aussi servi d’emblème au personnel hospitalier lors de la pandémie, dans une nouvelle version acoustique, accompagné d'un clip tourné au sein du CHR de Verviers.

C'est techniquement époustouflant, humainement enrichissant et musicalement céleste. Un combo qui signe le retour à de la bonne musique comme sur ce « Open eyes », nourri à l’indie pop et coloré de touches électro.

Un mouvement de foule s’organise, jeunes et moins jeunes jumpent solennellement dans une ambiance bon-enfant lorsque survient l’inévitable « Have a great crash ».

Pour « Cloud nine », debout face aux ‘floortoms’ posés sur l’estrade, le frontman et un de ses comparses prennent le pouvoir en martelant avec force et conviction les peaux, pendant que la guitare post-pop aérienne et légère s’envole et que la basse vrombit dans les frontaux en transperçant les corps plantés devant les barrières.

Et « By the storm » prouve une fois encore qu’entre show diabolique, sueur, adrénaline et surprises, qu’Ykons détient toutes les cartes pour emmener avec lui les plus fidèles, dans un tourbillon insensé. Sa seule limite étant l'imagination !

Grâce à des effets de guitare aériens, il y a chez Ykons une filiation lointaine avec Coldplay (groupe de pop/rock britannique originaire de Londres en Angleterre, formé en 1997, et drivé Chris Martin), tant en termes de compositions que de l’approche sonore.

Le set touche à sa fin. Le personnel s’affaire derrière les coulisses pour installer une estrade. Renaud s’excuse auprès du public de devoir raccourcir le set d’une chanson. Mais surprise, c’est pour y découvrir deux jeunes artistes, Bastien et Quentin, fondateurs de Calumny.

Apportant une touche pop à leurs productions, ils enchainent les singles et les festivals jusqu'en 2021. En 2023, Calumny frappe encore los de la sortie de son tout premier elpee, « Hatch ». Mais ici, ce sera pour revisiter « Sequoia Trees » vs disco et boules à facettes. Pas mal, mais ça ne casse pas la baraque, non plus…

« Run little one » clôture un set décidément explosif, entraînant et hautement humain, mais au cours duquel on n’a eu guère de répit.

La suite du menu est amplement moins intéressante. Entre Mister Cover et Mel C., le cœur de votre serviteur balance. Direction le parking, la route du retour est longue et parfois semée d’embûches…

(Organisation : Les Gens d’Ere)

dimanche, 20 juillet 2025 17:54

Dour festival 2025 : dimanche 20 juillet

La pluie s’est invitée (une nouvelle fois) à Dour ! Mais aucune inquiétude, l’or bleu a formidablement percolé et la boue n’a pu rendre le site impraticable.

Et puis, il en faut plus pour entamer la joie et la bonne humeur de celles et ceux qui souhaitent profiter un maximum des derniers décibels. Car, oui, la seule certitude qui règne dans cette région située à l'extrémité Ouest du sillon Sambre-et-Meuse est que le fête sera digne de ce nom, peu importe le courant musical qui l’emporte.

Ce dimanche sonne le glas d’une édition qui aura marqué par son côté hétérogène, sa complexité, sa bonne humeur et sa programmation musicale d’un autre monde. Pas un adieu, juste un au revoir, les dates de la prochaine édition étant déjà annoncées.

D’un pas avancé, votre serviteur déboule sur la plaine comme un cochonnet sur un terrain de pétanque. Au loin des cris stridents se font entendre. Un festivalier serait-il en train d’agoniser ? De dégueuler ? Loin de là, un agitateur quelque peu éméché lance un ‘Dourreeeuuhhhhhhhh’ comme si on égorgeait un goret.

Turquoise a donné rendez-vous au ‘Garage’, lieu de rassemblement des vieux briscards amateurs de rock.

Drôle de nom pour un groupe ? La gonzesse qui drive le band aurait-elle la tignasse bleuâtre ?

Même pas ! Il faut entendre derrière ce patronyme, la fraîcheur, la pureté, et le renouveau, souvent associé à des environnements naturels comme la mer ou le ciel. Une couleur qui symbolise également la protection, la force, et l'équilibre émotionnel. Ça en jette !

Les trois musicos qui accompagnent la jeune dame enfourchent leur instrument tel le cycliste au Tour de France. Mais ici, pas de sprint, juste de l’endurance !

Le set débute par « Le bruit », réminiscence des années 80. Ça sent la VHS et la cassette audio pourrie. Mais c’est d’une puissance ventrale rarement entendue.

Impatiente de jouer devant un parterre aussi enjoué, la formation enfile les morceaux à la vitesse de l’éclair, se donnant à peine le temps de respirer entre deux compos.

 « Tumulte » ou encore « Les yeux verts », expriment la quintessence d’une rage chantournée en français. Une aubaine, l’essentiel du parterre étant constitué de francophones.

Et si la demoiselle qui se plante en milieu du podium a un visage de poupon, elle déborde d’une énergie post-punk sous ses airs faussement gentils. Ça sautille et ça virevolte, comme une sauterelle.

La basse est incisive. Sur « Paranoïa », on y perçoit l’effervescence d’un Peter Hook (bassiste et fondateur du groupe cold wave Joy Division). Même la guitare et ses riffs incestueux renvoient aux bons vieux sons de New Order, quand le groupe était au sommet de sa gloire. Ce n’est pas le fruit du hasard. Même si le combo est trop jeune pour avoir été biberonné à l’eighties, il y a le son et l’intention. Un manifeste au retour d’un passé pas encore révolu.

« Les yeux verts » particulièrement. Ce morceau ne fait pas dans le détail, son synthé généreux lui communiquant de faux airs à la Cure.

Et si le quatuor s’était encore montré clément, il faut maintenant montrer des dents acérées. Ni une, ni deux, « Miroir » et ses accents ravageurs et crasseux prennent le dessus, dépassant tout entendement.

Le quatuor n’a maintenant plus rien à prouver, le public s’étant rallié à sa juste cause dans un méli-mélo bruitiste et bestial.

Une prestation des plus intéressantes. Un groupe dont on entendra encore parler prochainement.

Et hop, direction ‘La Petite Maison dans la Prairie’ pour y écouter et voir Jan Maarschalk Lemmens, qui emprunte depuis environ dix ans le nom de Glints sur les planches.

Ancien enfant de chœur à l’Opera Ballet Vlaanderen, il a radicalement changé de registre pour développer un style rap hybride, mêlant hip hop, grime, indie pop et éléments électroniques.

Il se présente seul, habillé d’un training bleu. Tout laisse à penser qu’il va enfiler des baskets et entamer son petit jogging matinal.

Après une intro destinée à faire monter la pression, « Bugatti » permet au bonhomme de montrer toute l’étendue de son organe vocal. De manière à remplir l’espace, il fait les cents pas d’un bout à l’autre de l’estrade.

Au milieu trône une petite boîte blanche posée sur un pupitre. Il s’agit d’un sampler lui permettant de lancer l’instrumentalisation de ses compos. « Fear », « Get U What U Want » et « All Blue Hair » s’enchaînent dans un tumulte grandissant.

Rien à dire, Glints propose un univers singulier à l’énergie redoutable ! Et comparer l’artiste a un chanteur de rap pourrait s’avérer relativement réducteur et constituer une injure profonde. De sa verve raffinée, ce gars possède un talent inné pour le flow.

Reconnu pour son accent britannique distinct (hérité de sa famille habitant au Royaume-Uni), il fusionne avec une facilité déconcertante, chœurs, éléments d’opéra et beats incisifs. Cela s'entend clairement dans l’épique « Roma », un hit accrocheur issu de son deuxième album, 'The dark ! » paru en 2023.

Même si le style minimaliste surprend, on peut dire que Glints a le son de la formule hypnotique.

Tantôt sans fard « Minimum Wage », tantôt en véritable meneur de foule, Glints est un nom qui, assurément, restera marqué dans les annales de Dour.

Mais un des moments clé reste sa version très personnelle de « Acid », avec sa rythmique acidulée, son flow acéré et son prisme new beat rappelant les beaux jours des prémices de la musique électronique.

Glints s’en tire pas mal.

Stella Rose a giflé votre serviteur. Pas physiquement bien évidemment. Juste une baffe artistique.

Un nom qui ne vous dit rien ? Pourtant, vous connaissez son père qui n’est autre que Dave Gahan, chanteur emblématique de Depeche Mode, groupe britannique de musique électronique et de rock alternatif, associé à la new wave. Si Jennifer Sklias-Gahan, sa mère, a moins d’écho auprès du public, elle n’est reste pas moins une actrice, productrice et scénariste de renom.

La chanteuse est accompagnée d’un bassiste et d’un batteur. Une version minimaliste dans l’apparat, mais maximaliste dans le son.

Elle se charge de la sixcordes électrique. Chétive, elle est fringuée d’un chemisier blanc qui lui donne de faux airs de Sainte-Nitouche. Mais souvent, les apparences sont trompeuses...

Le set s’ouvre par le très corrosif « Hollybaby », titre éponyme d’un album récent. Le trio ne ménage pas ses efforts pour que les décibels s’agitent dans les ‘portugaises’ du peuple qui s’est déplacé pour voir ce personnage iconoclaste.

Miss Gahan utilise une technique de positionnement de la guitare bien personnelle. Elle la tient généralement de manière que le corps de l’instrument soit positionné entre ses jambes, la corne reposant sur sa jambe gauche, plutôt que sur la jambe droite comme c'est la tradition. Cette posture lui permet de maintenir une posture droite et d'atteindre facilement les cases graves, en évitant la tension dans le bras.

Alors que les premiers acouphènes apparaissent, très vite, « MS. 45 » (NDR : titre d’un film sanglant signé Abel Ferrara), est balancé au public, afin de faire durer la souffrance. Il s’agit d’une compo noire et abrasive relevée par une rythmique syncopée et qui accorde à Stella toute la crédibilité qu’elle mérite.

Naviguant entre Nick Cave pour son côté énigmatique et PJ Harvey pour son style, sa musique mêle rock alternatif des 90’s, punk, indus des eighties, post punk et blues. Sa voix est puissante et expressive. Bref, la Rose maîtrise les arcanes du genre. Nul doute que très vite, elle pourra se détacher de l’ombre du paternel et s’assumer comme une grande.

Sa dégaine colle parfaitement à l’univers cathartique qu’elle embrasse.

Le morceau « Drugstore Romeo » possède quelque chose de théâtral voire de dramaturgique. Tout y est impressionnant : le refrain, la voix haute perchée ou encore ces coups de gratte qui ne tarissent pas. Etrangement aussi, la compo recèle des relents à la Texas, le combo écossais drivé par la chanteuse Sharleen Spiteri.

Après un premier opus envoûtant, « Eyes of Glass », gravé en 2023, la chanteuse revient plus en forme que jamais et se livre sans pudeur dans « Maid », « Beautiful Twentysomethings » ou encore « Faithful ».

La belle termine son trop court show par « Angel », en guise de révérence. Mi-ange, mi-démon, Stella Rose détient toutes les cartes pour s’affranchir et se faire un… prénom dans l’univers de la musique.

Cap, ensuite, sur le ‘Garage’ pour le set de GRLWood.

C’est à nouveau un band féminin. Une quasi-constante depuis le début de ce festival. Alors qu’à l’origine, il était formé par Rej Forester (chant, guitare) et Karen Ledford (batterie, backing vocals), il a depuis été secoué par des affaires de mœurs, Ledford accusant Forester de viol, la question du consentement étant au centre des débats.

Si Karen a quitté le groupe, une nouvelle préposée à la batterie a pris sa place en la personne de Mia Morris.

GRLwood nous vient de Louisville (Kentucky, États-Unis). Le côté minimaliste de la formation n’est pas trop dérangeant, l’une et l’autre insufflant une énergie débordante dans la manière d’aborder la musique et de la restituer.

Elles mêlent habilement une multitude d’influences multiples, dégainant au riot gun des compos brutes et expressives, à l’instar de « Bisexual » ou encore « Nice guy », laissant peu de doute quant à l’orientation sexuelle des gonzesses. De la musique de mâles dans le corps de femmes !

Les guitares saturées, la batterie puissante et le chant rageur rappellent les influences punk, à l’instar de « Clean ».

GRLWood livre une prestation crue, imagée, sans fausse pudeur ni concession qui ravit les plus sceptiques.

A une encâblure, Dry Cleaning s’apprête à faire le ménage au sein de la ‘Petite Maison dans la Prairie’.

Le style est relativement éloigné du précédent. Tant l’énergie vorace de la chanteuse constituait le fil rouge de GRLWood, ici, c’est la nonchalance qui domine.

Dry Cleaning est une formation anglaise, unique dans le paysage post‑punk contemporain, impliquant Florence Shaw (spoken word), Tom Dowse (guitare, claviers, loops), Lewis Maynard (basse), et Nick Buxton (batterie, claviers, saxophone).

Le drummer s’est installé dans un cube ouvert constitué de plexis. Une image qui renvoie aux précautions prises durant la période Covid. Un peu touchy quand même…

Rapidement, « Leafy » ouvre les hostilités, suivi par « Gary Ashby » et « Don't Press Me », des titres post‑punk bruyants sur lequel Florence déclame. L’approche de la narration lyrique de la chanteuse surprend, compte tenu de la ligne mélodique des musicos. Mais, ça passe étrangement…

Alors que ses comparses se démènent comme de beaux diables, Florence, stoïque et presque passive, récite ses textes sans sourciller, ni exprimer la moindre émotion, si ce n’est quelques rares sourires détachés. Mais l'alchimie qui se dégage de cette formule unique est sincère et vraie et c’est finalement l’essentiel.

Alors que « Strong Feelings » et « Her Hippo font forte impression, certaines compos sont davantage plus nerveuses et incisives que d’autres, comme « Hot penny day » au cours de laquelle la basse de Maynard et la guitare de Dowse surpassent allègrement la voix de Shaw, comme s’il s’agissait du jeu du chat et de la souris.

Mais au fond, c’est le spleen qui règne en maître, chacune des impulsions sonores servant, avant tout, à sortir le public d’une léthargie bien normale après cinq longs jours de festival.

A l’issue d’un set d’une heure émaillé de titres plus curieux les uns que les autres, et notamment « Half Pint », « Evil Evil Idiot » ou encore « No Decent Shoes for Rain”, on a l’impression que Dry Cleaning s’est livré à un nettoyage à sec sur nos cerveaux, devenus parfaitement propres…

Curieux, efficace et soigné !

Alors que les orages commencent à menacer, votre serviteur décide de rester à l’abri en assistant à la prestation de King Hannah.

Il s’agit d’un duo anglais originaire de Liverpool, réunissant Hannah Merrick et Craig Whittle. La paire a gravé deux long playings. Un premier, « I'm Not Sorry, I Was Just Being Me », en 2022 et un second « Big Swimmer » en 2024.

Merrick est vêtue d’une longue robe rouge lui conférant un air de diva. Elle prodigue une musique à l’image de son physique. Il y a de la douceur, de l’espièglerie et une petite touche de fun. Un savant mélange qui… (dé)tonne !

Porté par la voix déclamatoire de Hannah et la guitare saturée de son comparse, « Somewhere Near El Paso » constitue une entrée en matière idéale. Un morceau vaporeux, atmosphérique et chargé de spleen bon marché qui fédère auprès des couples, ceux-ci se rapprochant amoureusement à chaque accord pour se rouler des galoches.

Et ce n’est sûrement pas « Milk Boy (I Love You) », malgré ses sursauts électriques, qui viendra contrecarrer cette ambiance chaudement partagée à la Cigarettes After Sex…

Alors que d’aucuns imaginaient le genre obsolète, force est de constater qu’il séduit plus que jamais, l’instrumentation éthérée permettant au corps et à l’esprit de s’autoriser un lâcher-prise poétique (!?!).

Les compos défilent : « Suddenly, Your Hand », « New York », « Let's Do Nothing » alors que le temps s’est arrêté, la petite aiguille demeurant figée sur ce spectacle magique.

Les riffs s’entrechoquent tandis que la voix est lascive. Aucun doute, il y a quelque chose de très sensuel voire de sexuel, dans la musique de King Hannah.

« Leftovers » s’avance sur la pointe des pieds, sans éveiller de soupçons. Puis le lyrisme et l’instrumentation ne font qu’un à l’image d’un couple uni face aux affres de la vie.

Clôturant le concert, la ritournelle douce-amère « Big Swimmer » est responsable d’un véritable choc émotionnel. Un rayon de soleil parmi les gros nuages qui attendent votre serviteur à l’extérieur comme s’ils s’apprêtaient à se venger de tout le bonheur jusqu’à présent accumulé.

Il est passé 23 heures. Bon nombre de festivaliers s’apprêtent à quitter ce champ de bataille incontrôlable.

Il est maintenant temps de saluer une dernière fois cette vaste plaine et ce public complètement barge. Ne garder que les bons souvenirs et oublier les mauvais, telle est la devise de ce festival basé sur la curiosité.

Les plus résistants et insatiables sont restés dans un brouhaha burlesque, la musique électronique ayant décidé de jouer les trouble-fêtes encore de nombreuses heures durant.

Et puis, résonne aussi au loin, ce Dourreeuuuuhhhhhh véritable cri guerrier distinct, les festivaliers à Dour se constituant en tribus pour se motiver avant d'aller au combat et aller au-delà de ses limites.

(Organisation : Dour festival)

 

 

 

 

 

 

 

 

samedi, 19 juillet 2025 19:28

Dour festival 2025 : samedi 19 juillet

‘On n’a plus 20 ans’. Cet adage n’a jamais reçu autant d’écho en ce samedi, avant-dernier jour d’un festival qui aura marqué par sa diversité.

Cette journée est traditionnellement plus ‘accessible’, le line-up des jours précédents se focalisant essentiellement sur la découverte, bonne ou mauvaise d’ailleurs.

Le soleil peine à montrer ses rayons. Les plus précautionneux ont scruté leur appli météo et ils ont pu constater qu’on annonce de la flotte. Mais ne dit-on pas que la météo est douroise ?

Comme la plupart des scènes sont couvertes, les permanentes des donzelles ne devraient donc pas trop souffrir.

Au moment où votre serviteur foule la plaine, YoussefSwatts vient d’entamer son set. Originaire de Tournai, c’est un rappeur dans l’âme, auteur et manager d’artistes belgo-algériens, connu pour son style introspectif, poétique, ancré dans le hip‑hop à l’ancienne, parce qu’il reste très digne dans ses propos en dispersant ici et là des messages remplis de bon sens.

Il a déjà bien bourlingué. Il compte plusieurs albums à son actif (dont un fraîchement tombé dans les bacs), des collaborations avec des artistes belges et français notoires tels qu’Oxmo Puccino (« Le poids des mots ») ou Demi Portion (« Maintenant ou jamais ») et a assuré le supporting act des concerts de IAM, en 2022, mais aussi de Bigflo et Oli, notamment en 2023. Une chance, le duo est aussi attendu en début de soirée sur ce même podium.

Swatt’s a très vite été popularisé lorsqu’il a remporté le concours organisé par l’émission française de rap, ‘Nouvelle Ecole’, d’autant plus qu’en apothéose, la finale a été diffusée sur Netflix.

L’histoire de cet artiste s’apparente à un véritable conte de fées. Âgé de seulement 14 ans, il sort un premier Ep, « L’Amorce », qui lui permettra d’être repéré par le phénomène belge, Scylla. Prolifique, il a déjà gravé « Vers l’infini et au-delà » en 2017, « Poussières d’espoir » en 2020, « Pour que les étoiles brillent », en 2022 et enfin « Chute libre » cette année.

Son histoire est belle et constitue une référence aux relations qu’il entretient depuis toujours avec sa fan base. Sa victoire n’est pas seulement sienne, mais celle de toute une équipe.

Alors que votre serviteur n’épouse pas nécessairement le genre, la musique du gars est différente, essentiellement pour deux raisons. Premièrement, il se produit en groupe, phénomène plutôt rare dans le style, les artistes se contentant souvent de recevoir le concours d’un DJ, derrière les platines pour l’enveloppe musicale. Ensuite, et surtout, son écriture n’est pas vindicative à l’instar d’autres de ses congénères. Et pas davantage d’insultes vis-à-vis des ‘keufs’ (Trad : les agents de police) et des ‘meufs’ (Trad : les femmes) qui ne sont pas toutes des putes. Ah bon ?

Youssef est soutenu par quatre musicos chargés d’appuyer ses propos tentaculaires (basse, guitare, clavier et batterie). Le parterre est plutôt timide, les festivaliers éprouvant des difficultés à se remettre des guindailles vécues les jours précédents.

Maîtrisant les codes du hip-hop grâce à des compositions enivrantes et chaloupées, l’artiste se livre entre lyrisme poétique et introspection maladive. Maniant une plume taillée comme du silex, il regarde dans le rétroviseur de sa vie avec humilité. Des compos touchantes et une expression sonore légère sur fond grave ainsi que des thématiques qui traitent de la vie, la mort ou la résilience.

Il se rappelle que jadis, il était lui-même festivalier à Dour et campeur. Et de ses propres aveux, le camping ‘D’ ne semble pas lui manquer. Et en guise de pied de nez à cette situation qu’il a éprouvée, à cette époque, il s’est offert le luxe de louer un teepee, afin de s’assurer davantage de confort.

Il rappelle s’être alors présenté devant un public alors qu’il n’avait pas la popularité qu’on lui connaît aujourd’hui. D’OVNI à artiste confirmé, il se remémore le temps passé, avec un brin de nostalgie. Généreux à souhait, afin de remercier celles et ceux qui le suivent depuis ses débuts, il offre une toute nouvelle compo « Je t’en veux », une ballade aigre-douce dans laquelle il exprime sa haine.

Après avoir servi ses titres les plus connus (mais pas nécessairement les plus joyeux, comme il aime le reconnaître), le set touche doucement à sa fin. Il lui reste exactement 5 minutes. Mais n’ayant pas d’autres matières à offrir sur sa setlist, il propose au public de lui dicter la prochaine compo. Espiègle, le public dourois joue le jeu, le chanteur troubadour s’exécutant forcément dans une belle communion.

Couronné de succès d’estime et critique, Swatt’s est devenu une figure de proue dans le paysage noir-jaune-rouge et attise la curiosité, tout en proposant une prestation éblouissante, où scintille une « Etoile filante ».

Et parlant d’étoile, il est temps de filer à l’anglaise pour y assister au concert d’Uwase, une artiste belge en devenir. Une chose est sûre, son univers suscite la curiosité.

Votre serviteur a déjà assisté à l’une de ses prestations, mais dans une dynamique différente, nettement plus familiale. Il est donc impatient de découvrir sa prestation dans un contexte différent.

Originaire de Bruxelles et bien qu'encore nouvelle sur la scène indie pop belge, elle s'est déjà distinguée par sa maîtrise de la production et de l'écriture, construisant un univers musical intimiste qui reflète ses pensées et émotions les plus profondes. C’est cette singularité qui a attiré l’attention de Jasper Segers (Sylvie Kreusch, Jaguar Jaguar), avec qui elle a coopéré pour produire son nouvel Ep.

Avant l’été, Uwase a dévoilé un premier aperçu de cette collaboration à travers le single « Chorus Baby », suivi de « Fine », à l’avant-goût prometteur.

Elles sont trois sur scène. Des blacks. Une préposée au chant, une à la batterie et la troisième à la basse.

Elles sont relativement jeunes, la trentaine à tout casser. Il va donc falloir jouer des coudes et bousculer les codes, afin d’assurer une crédibilité artistique auprès d’un public qui n’est pas forcément venu pour les découvrir. C’est ça aussi la force et la faiblesse des festivals, métisser le plus grand nombre pour satisfaire la franche la plus large. Et face à un auditoire qui peut se révéler impitoyable dans ses réactions Ainsi, BB Brunes, De la Soul ou Patrick Juvet en ont fait les frais. Dour est un laboratoire au sein duquel il est parfois préférable de ne pas s’exposer.

Le set débute par le percutant « Pls Don’t Take It Away » qui confirme le style dans lequel s’inscrit l’artiste. Un univers sonore empreint de sensibilité, une forme de dreampop mélancolique traversée d’instants groovy. Et ce n’est pas « Gone » ou « Other side » qui iront à l’encontre de cette constatation. 

La jeune fille a acquis une certaine assurance. Ce qui semble logique.

Poursuivant son concert intelligemment, elle alterne chansons douces et languissantes et compos un peu plus énergiques, tout en se frottant au blues et la soul, à l’instar de « Perfect Blue », qui fait mouche auprès de l’auditoire.

Le public qui ne s’est pas pressé en masse, semble tout de même réceptif à l’univers musical de cette belle et jeune artiste.

« Pedestal » sert de référence. Même les plus sourcilleux reconnaissent immédiatement le refrain de cette chanson largement diffusée sur les ondes radiophoniques.

Une autre artiste belge à se produire à une encablure d’ici est Sylvie Kreusch. En novembre, elle soufflera ses 34 bougies et pourtant elle a déjà bourlingué.

Originaire d'Anvers, Kreusch est âgée de seize ans lorsqu'elle fonde son premier groupe, Soldier's Heart, en compagnie d’amis d’enfance. Elle mène en parallèle de la musique une carrière dans le mannequinat. Pas étonnant au vu de son physique attrayant.

Elle s’est entourée d’une bande de musiciens pour servir un set qui risque de faire mouche. Pas mal de néerlandophones se sont donnés rendez-vous.

Tout de bleu vêtue, on pourrait la confondre avec la Schtroumpfette.

Le concert s’ouvre par « Ding Dong », une compo au cours de laquelle l’artiste joue de la mélodie en l’amenant là où l’on ne se doute pas qu’elle puisse aller, cette mélodie restant le plus important à ses yeux, au-delà des mots.

Il y a quelque chose de très organique dans la manière dont le live est construit, avec tous les musiciens, les chœurs, les percussions. C’est théâtral et ça incite à danser. La magie opère immédiatement, naturel donc qu’« Hocus Pocus » embraie.

« Let it all burn » met tout le monde d’accord. Au-delà de l’élégance du projet, de l’intelligence d’écriture et d’une voix au timbre atypique, la prestation de Sylvie est digne d’une messe envoûtante.

Mais, c’est encore lorsqu’elle s’exprime seule en piano-voix ou armée d’une sèche, qu’elle se sublime entre douceur et détermination.

Au cours de son spectacle, elle interagit énormément avec son public, comme lorsqu’elle s’amuse à l’aide d’un parapluie sur lequel figure un motif de pastèque. Original !

Elle est venue défendre son dernier né, « Comic Trip », une exploration audacieuse de l'identité et de l'indépendance.

Puisant ses influences dans la country et la pop expérimentale, ses chansons soufflent le chaud et le froid. Femme moderne, elle refuse de se conformer aux normes, laissant ses imperfections et sa vulnérabilité s'exprimer avec sincérité.

D’une durée approximative d’une heure, SK s’impose majestueusement en femme du monde, attentive à ce qui l’entoure et soucieuse de faire le bien.

Le ciel se couvre méchamment, des gros nuages surplombent le site, alors que Big Flo et Oli doivent y donner un concert sur la main stage, la seule non couverte.

Le décor est impressionnant. Une structure avec de part et d’autre des escaliers qui mènent vers une plate-forme destinée, semble-t-il, aux musiciens. Petit clin du jour, à côté de l’idiome ‘Big Flo et Oli’, est affiché en grandes lettres ‘Dour festival’. Une pensée émue, qui fait mouche !

La plaine est pleine à craquer.

Originaires de Toulouse, ces deux-là ont acquis une célébrité certaine bien malgré eux en devenant également jurés dans une célèbre émission de télécrochet sur la chaîne nationale. Ils ont même remis le couvert dans l’hexagone, ce qui leur a également permis d’y recueillir une reconnaissance certaine.

Selon leurs dires, ils sont heureux de se produire à Dour, le plus grand festival d’Europe.

Le premier disque des frangins, « La Cour des grands », gravé en 2015, est certifié disque d'or moins de quatre mois après sa sortie, puis de platine en France. Le second format « La Vraie Vie », devient disque d’Or après seulement trois semaines d’existence. Leur dernier né, date un peu, puisqu’il est paru en 2022 (« Les autres c’est nous »).

Bien que les goûts musicaux de votre serviteur soient à mille lieues de ce que propose le duo, il faut admettre qu’il va livrer un bon concert. A bien des égards !

D’abord, le rap qu’il prodigue est authentique, loin des clichés du genre, même si leur accoutrement, lui, suit la tendance…

Après une intro permettant à toute l’équipe de sortir d’un pas décidé depuis la grande porte au centre du décor, le show commence par « Papa » qui rend un hommage vibrant au ‘padré’ sur fond de musique latine.

La paire ne fragilise pas les faits sociétaux, mais les renforce par un positivisme élancé. Elle ne cherche ni à provoquer, ni à critiquer. La verve est plutôt à considérer comme une diction philosophique vue à travers le prisme du quotidien.

L’humour aussi alimente le show, « Pour un pote » proposé entre « Aujourd’hui » et « Demain », des morceaux où ils se racontent, leur enfance ainsi que leurs expériences récentes, abordent le sujet de leur renommée nouvelle. Des textes qui fédèrent auprès du plus grand nombre.

Les deux zigotos sont biberonnés à la musique et à la pratique des instruments depuis leur tendre enfance, n’hésitant d’ailleurs pas à mettre la main à la pâte, l’un à la trompette et l’autre à la batterie.

Les titres s’enchainent : « Je suis », « Comme d’hab », « Sur la lune », alors qu’une pluie diluvienne s’invite elle aussi. Mais, cela n’altère en rien la bonne humeur de tous.

L’amour fraternel qui lie le duo n’est pas feint, la complicité est belle à voir.

Le live durera une heure durant laquelle Florian ‘Bigflo’ et Olivio ‘Oli’ Ordonez ont transformé la plaine du festival de Dour en une célébration du rap francophone, les deux frères interagissant fortement avec la foule, la faisant vibrer au rythme de leurs succès, sans ménagement.

On peut dire que les Toulousains ont livré un set d’une grande ferveur, alors que ce n’était pas gagné d’avance !

Une sacrée jolie surprise !

Il faut attendre maintenant trois heures pour assister au concert de Parcels.

A l’heure prévue, les musiciens chevelus, moustachus comme feu Frank Zappa, vêtus de chemises venues d’un autre temps et de pantalons à pattes d’eph’, débarquent. Malgré la cascade de poils, ils ont des visages de poupon. Ils s’installent sur l’Autel. Seraient-ce les descendants des Beatles ? Pas du tout, les membres de Parcels (NDR : un patronyme qui s’inspire du nom d’un café/pâtisserie au sein duquel les musicos ont effectué leurs premiers pas), sont australiens.

Rappelez-vous, la formation avait fait, il y a quelque temps déjà, la une des médias en dévoilant « Overnight », un morceau réalisé sous la houlette du duo français Daft Punk.

Centenaire à eux cinq, Noah Hill (basse), Patrick Hetherington (clavier), Louie Swain (clavier), Anatole ‘Toto’ Serret (batterie) et Jules Crommelin (guitare), se sont rencontrés au lycée de Byron Bay, la ville sise la plus à l’Est du continent australien.

Entourés de parents encourageant l’expression artistique, ils sont parvenus à unir leur différente culture musicale pour former un savant mélange de pop, funk, et electronica.

Etablis à Berlin, ils sont vite repérés par label parisien Kitsuné (NDR : celui qui a découvert Two Door Cinema Club, Klaxons ou encore Hot Chip).

Aujourd’hui, le combo jouit d’une renommée internationale et sillonne les festivals et concerts, nous offrant régulièrement de nouvelles surprises sonores, bien que son dernier album date de 2018. Toutefois, la sortie d’un nouveau single pourrait bien présager celle d’un long playing…

Après une intro en guise de teaser, le groupe sert un « Overnight » qui, justement, ne manque pas de piment. Sourires béats, ils prennent manifestement leur pied. Le bonheur est communicatif, le public est complètement subjugué.

Grâce à des titres comme « Safeandsound » ou encore « Somethinggreater », les gaillards possèdent une maîtrise absolue de leur art ! On frôle la perfection harmonique ! C’est d’une justesse et d’une finesse sans pareil ! Les guitares délicatement pincées et le groove finement mené. On peut aisément parler de génie mélodique !

Toujours transportées par des cordes enjouées, les chansons se distinguent par leur simplicité et leur efficacité. Mais, sans contexte, c’est encore « Tieduprightnow » qui éveille auprès du public une joie onirique.

En permanente oscillation entre le rock et le funk des 60’ et 70’s, en passant les Beach Boys aux Bee Gees, Parcels a su trouver un équilibre en réinventant ce passé musical. Par ailleurs, l’influence de la musique contemporaine, de ses sons électroniques dans une vision pop et moderne sert de contrepoids aux sonorités surannées, mêlant plusieurs esthétiques musicales entre passé et présent.

Multi-instrumentistes et chanteurs, chacun des membres évolue autour d’un univers contrasté d’ombre et de lumière où le groove en est le maître.

Après plus d’une heure d’un ‘live’ surprenant, les superlatifs ne manquent pas ! Tout simplement impressionnant... à faire pâlir les plus grands !

Parcels a réconcilié votre serviteur avec la vie !

Il est minuit lorsque le set s’achève. Il est temps de reposer ses lombaires. La route est longue et parfois semée d’embûches…

Le festival de Dour tire doucement sa révérence. Demain clôturera une édition qui aura marqué les esprits par son esprit de tolérance, sa diversité et son empreinte musicale.

(Organisation : Dour Festival)

 

mercredi, 23 juillet 2025 10:52

Dour festival 2025 : vendredi 18 juillet

Il fait très chaud en ce vendredi. Cette seconde journée de festival risque cependant d’être non seulement riche, sur le plan de la découverte, mais aussi intense sur le plan physique.

Lorsque votre serviteur foule la plaine, elle est encore relativement clairsemée, les festivaliers accusant déjà la fatigue des deux jours précédents.

Il en faut du courage et de l’énergie à revendre pour couvrir un festival comme celui-ci dans son intégralité, car, pour la plupart, les scènes sont distantes de plusieurs centaines de mètres l’une de l’autre. Un kilomètre à pied, ça use, ça use, deux kilomètres à pied, ça use les souliers…

Si lors de certaines éditions, les détracteurs les plus virulents stigmatisaient la propreté du site, cette année absolument aucun déchet ne traîne sur sol. Les poubelles sont en nombre et bien réparties et largement présentes ; en outre, l’équipe de bénévoles accomplit un travail formidable, soulignons-le. On peine à croire que des dizaines de milliers de personnes passent quotidiennement ici…

Direction la main stage, toute proche de l’une des entrées du festival. Par chance, c’est Last Train qui s’y colle.

Il s’agit d’un groupe de rock français, originaire d’Altkirch, en Alsace. Il s’est formé en 2007, alors que Jean-Noël Scherrer (chanteur et guitariste), Julien Peultier (guitare.), Timothée Gerard (basse) et Antoine Baschung (batteur) sont encore au collège.

En 2015, la formation sort son leur premier Ep, puis en 2017, son premier album.

Last Train vient tout juste de graver un nouvel opus, simplement intitulé « III ».

Scherrer monte sur planches, accompagné de ses joyeux drilles. « Home » y est balancé à la figure au public, peu nombreux, mais curieux. Dès les premières notes, un constat s’impose : la musique de Last Train est le fruit d’un savant mélange de volume, de consistance, de précision et d’émotion, sans oublier cette dose de créativité qui fait la différence.

Les guitares rugissent de plaisir, la rythmique frénétique de Baschung apporte de la densité au morceau et Gerard fait gronder sa basse de ses grosses cordes. Une belle entrée en matière.

Le ton est donné. Très vite, les chansons filent à la vitesse éclair, à l’instar de « The Plan » ou encore « Way Out », des morceaux caractérisés par cette énergie que le band dispense depuis ses débuts.

Les compos sont denses et saturées. On est bien en présence d’un des groupes de rock les plus percutants et les plus prometteurs de la scène française contemporaine.

Scherrer impose sa voix rauque et ses riffs tranchants. Ses acolytes jouent de leur instrument de manière impétueuse, quasi-autistique.

« On Our Knees » pourrait constituer l’effervescence même du set, tant la dramaturgie sonore est au centre des débats.

Le public est vissé au sol, comme hypnotisé, le quartet livrant un concert sans concession, crasseux et sans fioriture, seul le son se révélant la valeur dominante.

Mais c’est sans conteste « The Big Picture », compo hybride naviguant entre ballade plaintive et rock assumé, qui marque les esprits grâce à ses ritournelles immersives.

Comme souvent lorsqu’une formation brille, le set est forcément de trop courte durée. Last Train pourrait très vite devenir le successeur de Noir Désir et pourquoi pas des Strokes.

Entre sueur, bruit et émotion, le dernier train a livré ce qui se fait de mieux dans le milieu.

Votre serviteur se laisser guider par la foule la plus jeune (et la plus vive) vers La Petite Maison dans la Prairie. A défaut d’y voir Charles Ingalls, personnage fictif de la série, ce sera Wallace Cleaver qui est annoncé. Et lui est bien réel.

Le gars milite dans l’univers du rap, un courant que fuit souvent votre serviteur. Et quitte à critiquer une ligne artistique, autant le faire objectivement.

Bonnet sur la caboche et lunettes rondes vissées sur le nez lui conférant un côté intellectuel, le lascar a en tout cas le souci du détail. L’estrade est en effet joliment enrichie d’un fauteuil, de plantes vertes, d’ustensiles divers et variés. Il y a même une porte blanche qui trône au milieu de l’estrade. Où mène-t-elle ? L’endroit a des allures de cabinet d’un psy.

Une batterie et un clavier y ont également été casés au beau milieu. Preuve que cette disposition n’a rien de médical.

Le chapiteau est bien rempli. Il faut dire qu’à cette heure, le soleil castagne sec. Et si les gens étaient ici davantage pour s’abriter que pour l’artiste ?

Très en verve, il distille un flow de mots que seuls les maîtres du genre ont le secret. S’il n’échappe pas aux écueils du style, sa musique épouse une direction intéressante, des pointes électro venant se mêler intelligemment aux samples. Certaines compos présentent aussi des aspects intéressants dans la manière d’aborder les thématiques, même si elles ne sont pas, il faut bien le dire, toujours très subtiles.

Le rappeur est loin d’être un idiot. De son vrai nom Léo Gond, il est originaire de Saint-Laurent-Nouan, dans le Loir-et-Cher. En 2023, le jeune homme a soutenu une thèse et obtiendra d’ailleurs un doctorat en droit (spécialité : droit des contrats spéciaux). Ce qui explique, sans doute, l’angle artistique et la manière de construire ses chansons.

Entre douceur et brutalité, Wallace se raconte à travers les histoires de son quotidien, aidé par un préposé au backing vocal.

Il émeut lorsqu’il est soutenu par un batteur et un pianiste et tout particulièrement sur « Pleurer pour nous », une belle compo engagée sur fond d’introspection. On comprend vite que celui qui se livre est un écorché vif qui (s’)exprime pour se libérer, sans être plaintif pour autant.

WC livre un set intelligemment structuré, épuré et d’une précision efficace, ses chansons regorgeant de véritables punchlines.

Très objectivement, un concert dont on ne se sort pas indemne, le gaillard se questionnant sur l’amour dans « Est-ce que je l’aime ? », une compo issue de l’album « Baiser ». Tout est dit…

Le bonhomme deviendrait-il le porte-drapeau d’un rap propre, sans animosité envers les femmes et les keufs (NDR : traduisez agents de police) ?

Le public dourois semble se satisfaire ce qui reste un live d’une qualité certaine.

Wallace se retire doucement… sans Gromit !

Affaire à suivre…

Après avoir déambulé de scène en scène, retour à la Petite maison dans la prairie. Au loin, on entend des sonorités de world music.

Fulu Miziki s’y produit. Il s’agit d’une formation née dans le quartier de Ngwaka, véritable labyrinthe de rues dans Kinshasa, capitale de la RDC.

Elle pratique une nouvelle musique, baptisée ‘Twerkanda’, une sorte d’afro disco-house, post soukous explosive, jouée uniquement à l’aide d’instruments fabriqués dans des matériaux que les musiciens ont eux-mêmes recyclés et assemblés.

Le concert est vraiment très intéressant. Les musicos s’investissent, la musicalité est légère, festive et pleine de sens. Le live est relativement rempli de toutes ces effluves qui sentent bon l’Afrique.

Les festivaliers qui se sont pressés à cet endroit sont essentiellement là pour danser au gré de ces sons venus d’ailleurs. Les autres préfèreront investir d’autres lieux. Et d’autres ambiances.

Justement La Femme s’apprête à livrer son set sur la main stage.

Quand on évoque l’étrange patronyme, on pense immédiatement à une icône plantureuse aux formes généreuses. Et pourtant, à l’origine, le projet était réduit à deux hommes, Sacha Got et Marlon Magnée.

Après avoir goûté à différents styles, la jeune fille est passée de l’adolescence à l’âge adulte. On pourrait même ajouter, en deux temps trois mouvements ! Elle a non seulement grandi (le line up recèle des gars et des filles, aujourd’hui), mais elle a surtout gagné en maturité. Surtout depuis la publication de son premier essai, « Psycho Tropical Berlin ». Ce qui lui a valu une récompense aux Victoires de la musique, dans la catégorie ‘album révélation de l’année’.

Depuis, on peut dire que le combo est sur le velours. Il a gravé un nouveau format. Qui s’intitule « Rock Machine », sorti l’année dernière.

Le concert est attendu pas une fan base. A l’heure dite, le set commence. Verdict ? Un condensé de compos décomplexées, insouciantes, délurées et fêtardes qui bouleversent les codes figés de la chanson française. Antithèses d’un Dominique A ou d’un Miossec, elles lorgnent plutôt vers Philippe Katerine !

Des chansons qui baignent au sein d’une forme de cold wave synthétique. Un brin rétro, elles sont saupoudrées, ci et là, d’un zeste de punk spasmodique…

Le mélomane lambda aurait tendance à se laisser bercer par une absurdité rafraîchissante où se mêle vrai/faux second degré. Le plus averti devrait y déceler en filigrane un message plus profond, davantage psychanalytique.

La prestation est tonitruante et envoie valser au placard cette sinistrose ambiante qui nous dévore au fil d’une actualité guerrière et politique bien trop présente. Ici, on est à Dour. Ça rime avec troubadour !

Cette gonzesse à six têtes est certes désinvolte, mais possède le don de plonger les aficionados dans une dimension propice à la schizophrénie.

Les thématiques abordées parlent du quotidien avec une légèreté frémissante, mais sans langue de bois. On y parle de tout et de rien à la fois. Les festivaliers sont après tout ici pour passer du bon temps et non pour philosopher.

Sur son dernier opus, La Femme revient à ses premiers amours new-wave de « Psycho Tropical Berlin (Machine) » qu’il fusionne avec un son rock anglo-saxon des années 80/90. Cet LP rend un hommage au rock, à son efficacité et à son intemporalité. La Femme fait du rock à l’aide de machines.

La Femme continue de développer un univers intemporel et multidimensionnel en se servant de son propre son et sa propre esthétique. Et ça fait mouche auprès du public.

Sur des titres comme « Ciao Paris » ou encore « Sacatela », derrière cette Femme mystérique, se cache une vraie musicalité. Comme quoi, la culture musicale a encore des chaumières à visiter !

Durant près d’une heure, La Femme s’est livrée, prostituée comme jamais, pour dévoiler un corps d’une beauté et d’une exceptionnalité rare. Un concert digne de ce nom !

Le temps de se désaltérer que la Last Arena accueille maintenant SDM, de son vrai nom Leonard Saddam.

Un rappeur lui aussi. Votre serviteur hésite. Mais puisque Mister Wallace avait réussi à arrondir les angles, autant prêter une oreille attentive à ce garçon.

Il se plante au milieu du podium, tel un shérif devant le bandit. Physiquement, il en jette. Black, bâti comme un bœuf, chaîne autour du coup, le gaillard a des allures de bad boy.

Après avoir aligné toute une série de chansons, un constat s’opère, ça ne vole pas bien haut. Très vite, le live devient d’un ennui sidéral, parsemé (trop souvent) de sons de kermesse. Quant à l’approche lexicale du gars, ponctuée de ‘frérot’ et de ‘ouais’ toutes les quatre secondes, elle est du même acabit.

Bref, écouter du SDM, c’est comme manger une tartiflette en pleine canicule. C’est indigeste !

Retour au Garage, lieu des découvertes inattendues et subtiles. Enfin, presque, Gustaf évoluant loin des codes du politiquement correct.

Il s’agit d’un groupe d’art punk de Brooklyn. Ils sont cinq sur scène. Un seul mec. Le veinard !

Lydia Gammill se pointe, godasses à franges de couleur verte. Elle ne passe pas inaperçue.

Très vite « Statue » annonce une suite d’accords tonitruants. C’est bruitiste à volonté !

Lydia captive. Par sa beauté évidemment, mais aussi et surtout par sa présence scénique. Lorsqu’elle se positionne en tant que femme, il est angélique. En tant qu’artiste, elle est démoniaque. Une Dr Jekyll et Miss Hyde a elle toute seule.

Pendant « What Does It Mean », « Starting + Staring », mais surtout « The Motions, le band nous gratifie de belles envolées forgées dans une énergie post punk expressive et rythmée. Le public, enjoué, s’en délecte.

Mais le plus surprenant reste l’attitude de Tarra Thiessen postée à droite du podium. Vêtue de rouge, elle est particulièrement sexy. Mais ce qui fait la beauté du set, c’est qu’elle dynamise le set à l’aide d’instruments spontanés (cornichons, poulet en caoutchouc, vibras lap) et joue avec un filtre ‘audio drag’ glissé dans sa voix, qui emprunte une dimension tantôt démoniaque tantôt comique.

Les chansons s’enchaînent sans temps mort sur fond de fantaisie, de légèreté et de profondeur.

Très rarement, un concert n’avait livré une telle intensité, le second degré constituant le fil rouge d’un moment qui restera ancré dans la mémoire des Dourois.

Et ce n’est certainement pas « Liquid Frown » qui démentira cette impression.

Après avoir déambulé au gré des différentes scènes, votre serviteur se rend une nouvelle fois au Garage, un endroit qu’il commence à connaître comme sa poche.

Ici, c’est Lambrini Girls qui est programmé. Trois gonzesses, démontrant ainsi que la parité est de plus en plus réelle dans l’univers rock indé du 21ème siècle.  

Il s’agit d’un groupe britannique formé à Brighton en 2019–2020, fondé par Phoebe Lunny (chant, guitare) et Lilly Macieira-Boşgelmez (basse).

Après avoir gravé son premier single en 2021 et signé chez Big Scary Monsters en novembre 2022, le groupe sort, en mai 2023, l'Ep « You're Welcome », qui reçoit un accueil critique positif de la part de la presse musicale. Le band défraie ensuite la chronique en se défendant contre les militants anti-transgenres. Paru en 2025, son premier elpee, « Who Let the Dogs Out », atteint la 16ème place des ‘UK Albums Charts’.

Son patronyme s’inspire de Lambrini, une marque de cidre de poire.

Autant le dire, ici aussi, on est loin des normes du genre. C’est brutal et sans filtre. Exagérément même !

Alors que « Big Dick Energy » ouvre les hostilités, très vite la chanteuse saute par-dessus les barrières de sécurité (au grand dam des agents censés maintenir le calme) et se mêle au public lui assénant une série de directives à suivre scrupuleusement, sans quoi les conséquences risquent de jouer en sa défaveur. Et pour n’allez pas le croire, mais le peuple suit. Ce que femme veut…

« God's Country » et « Company Culture », aux contours punk/noise/noir, embraient.

A vrai dire, pratiquement chaque chanson est ponctuée d’une intervention de Phoebe, qui ne peut s’empêcher d’en faire des tonnes afin de capter l’attention d’un auditoire pourtant très réceptif à ses frasques.

Globalement, le trio puise ses influences chez Bikini Kill, Amyl & The Sniffers et Idles ; et le résultat n’est pas avare de rythmes percutants, d’intensité et d’énergie tranchante.

Un des points fort des filles est sans conteste cette volonté d’impliquer la foule dans le show. Et puis cette approche tout autant politique que féministe.

Et ce qui devait arriver, arriva. Très vite, de nombreux pogos (NDR : danse énergique apparue dans les années 1970, notamment dans le milieu punk, caractérisée par des sauts désordonnés, souvent accompagnés de bousculades entre les danseurs) sont déclenchés par les plus... déjantés.

Une chouette découverte, hors du temps. C’est ça le Dour festival !

Ce concert signera le clap de fin d’une journée particulière, faite de découvertes utiles et futiles.

Le lendemain s’annonce tout aussi intéressant, sans doute un peu plus pop.

(Organisation : Dour festival)

jeudi, 17 juillet 2025 10:52

Dour festival 2025 : jeudi 17 juillet

Si en 1989, date de la première édition limitée à sa scène unique, qui avait notamment programmé Bernard Lavilliers en tête d’affiche, Dour était un festival, les choses ont drôlement évolué depuis, puisque les festivités se déroulent maintenant sur 5 jours, au cours desquels 230 artistes sont répartis sur 7 scènes. Sans oublier évidemment les 6 campings. Bref, d’un improbable festival artisanal, une machine industrielle s’est imposée aujourd’hui.

Le décor est à l’image de la Belgique ! Surréaliste ! Le site est entouré d’éoliennes gigantesques.

Le festival de Dour traîne, depuis ses origines, une mauvaise réputation : drogue, viols, décès, etc. A tort, évidemment, les services de police et de sécurité veillent au grain. Il n’y pas plus de problèmes ici qu’il n’en existe ailleurs. Ce n’est d’ailleurs pas l’évènement qui crée le problème, mais les individus, tout simplement.

Dour est synonyme de découvertes. A vrai dire, il y a peu de têtes d’affiche connues, surtout ces jeudi et vendredi. Le festival mise avant tout sur un concept unique en son genre, le concept se résumant à flâner entre les différents podiums, s’imprégner de ce qui existe en matière musicale, mais surtout de garder de bons souvenirs, dans la joie et la bonne humeur.

Outre ‘The Last Arena’, la plus grande scène qui peut accueillir 20 000 âmes, ‘De Balzaal’ consacrée à la musique électronique, la ‘Boombox’, qui fait la part belle au hip-hop, à la musique soul, au r’n’b et au swing, il reste ‘La Petite Maison dans la Prairie’ destinée aux fans de musique indie. Sans oublier le ’Garage’, scène mythique pour les amateurs de rock et de rock and roll. On a fait le tour du propriétaire. Enfin, presque, puisque de nombreux endroits proposent encore et encore du son aux potentiels insatisfaits.

Hormis la main stage, toutes les autres sont couvertes. Si la météo est agréable ce jeudi, elle risque de changer les prochains jours, notamment ces samedi et dimanche. Dour, victime d’un acharnement météorologique ? On pourrait le penser. Si certaines années, les pompiers ont dressé leurs lances pour arroser le public, à d’autres, ils sont intervenus pour empêcher la formation de torrents de boue.

Si depuis quelques années, la musique électronique, le hip hop et le rap étaient devenus la clé de voute du festival, le line-up est quelque peu revenu à ses fondamentaux depuis peu, puisque sous l’impulsion de vieux briscards, de temps à autre, des ensembles ‘guitare-basse-batterie’ ont à nouveau voix au chapitre.

Les festivités ont commencé la veille. Seules quelques scènes ont décidé de laisse tomber le rideau afin d’y servir de la musique… électronique aux plus fervents. Une mise en bouche en quelque sorte, puisque le repas et le dessert risquent d’être riches eux aussi.

Autant le dire, la journée du jeudi ne s’annonce pas spectaculaire pour autant ! Dour est par excellence un lieu de compromission à toute épreuve !

Question people, ici, on voit de tout. Tout et son contraire d’ailleurs. Inutile de vous mettre en quête de famille en emmenant un bambin. Au DMF, on ne badine pas avec les looks les plus exubérants : crêtes colorées et gonzesses à moitié à poils déambulent aux côtés de gars déguisés, tantôt en panthère, tantôt en ours. Bref, une style faunistique propre à cette région du centre. Mais toujours dans le respect, précisons-le.

Il faut s’y faire, les badauds vocifèrent ‘Douuuurreeeeehhhhhh’ à n’en plus finir. Un signe distinctif dialectal quel seuls les initiés comprennent.

Comme le système économique est au centre de toutes les préoccupations, les stands de boissons et de bouffe fleurissent comme des pâquerettes sur les pelouses. Le constat est sans appel, les prix deviennent excessifs. Il faut débourser au minimum entre 4€ et 5€ pour une boisson. Même chose pour la nourriture. Et que dire des parkings à trente balles ?

Votre serviteur, tel un explorateur, arrive sur le site, aux alentours de 16h30. Lovelace se produit sur la main stage.

Une sacrée belle expérience pour celle qui vient seulement de goûter aux joies des festivals. En effet, ingénue, elle avoue partager ce genre d’expérience depuis seulement 4 ans.

Elle nous vient de Bruxelles et appartient à la nouvelle scène pop alternative.

La demoiselle est fort sexy. Habillée d’un petit short et d’un corset, elle fait des envieux. Des jalouses également !

Un grand drapeau noir sur lequel est imprimé de grandes calligraphies trône en toile de fond, histoire qu’on se souvienne de cette artiste.

Elle n’est accompagnée que d’un guitariste, le reste de l’enveloppe musicale étant créée par des samples. C’est un peu dommage.

Le parterre est assez clairsemé, l’artiste ayant sans doute encore un peu de mal à se faire un nom alors que sa musique tourne pourtant en boucle sur les ondes radios, grâce à une collaboration avec Saule sur « Petite Gueule », un titre plein d’entrain.

Elle se plait dans une pop sucrée à décortiquer son existence (encore jeune), alternant murmures et envolées vocales.

A tendre l’oreille, sa tessiture vocale est proche de celle de Billie Eilish (NDR : une auteure-compositrice-interprète et actrice américaine) lorsqu’elle scande au public, les yeux dans les yeux ‘Ça te dirait bien qu’on s’aime’, un refrain tout droit issu de « Corps », une jolie balade émouvante. S’agit-il d’une invitation ?

Trop gentillette et manquant de relief, tant dans l’univers que de l’approche musicale, la musique de Lovelace souffre probablement d’absence d’aspérités pour ce genre de festival, raison pour laquelle elle peine à fédérer.

Trop de love et de mélancolie, tue l’expression musicale en quelque sorte…

Au ‘Garage’, se positionne les membres de Dog Race, un groupe dont la musique a adopté une configuration rock.

Les quatre membres sont prêts à en découvre. Le personnage qui drive la formation est une gonzesse, tout aussi sexy que la précédente.

Lunettes noires vissées sur la caboche, elle est vêtue d’un petit short et de collants noirs, de quoi affrioler même les plus fidèles compagnons.

Il y a peu de monde à cette heure, les festivaliers préférant prendre un maximum de plaisir en soirée.

Même si les patronymes riment, Dog Race est l’antithèse de Lovelace. Ici, c’est de l’énergie à l’état pur, des guitares cinglantes, une atmosphère tour à tour joyeuse ou claustrophobique et onirique.

Cette course de chien est venue présenter le dernier Ep, « Return The Day », un disque faussement mélancolique aux allures foutraques.

Dès la première compo, un constat s’impose : des guitares abrasives, une basse pénétrante et une rythmique implacable. La musique de Dog Race aurait pu naître d’une rencontre entre le profil grave voire gothique de Joy Division et les envolées pop lyriques d'Arcade Fire.

Le chant spectral de la jeune dame trahit parfois des intonations à la Sheryl Crow, lorsqu’elle vocifère ce qui semble être, a priori, des cris guerriers.

Des morceaux comme « The leader » ou encore « It’s The Squeeze » naviguent quelque part entre post-punk inclassable et new wave contemporaine.

Une musique particulièrement vivante à l’image de la vocaliste qui en fait des tonnes afin d’amuser son public.

Direction ‘La Petite maison dans la prairie’, un endroit situé à une encâblure de la précédente scène. L’endroit est parfaitement reconnaissable, grâce à ses couleurs vives et son inscription visible des kilomètres à la ronde.

C’est Nilüfer Yanya qui s’y colle, une autrice-compositrice-interprète britannique.

Son nom est étrange, tout comme ses origines. Elle est née à Londres, en 1995, d'un père turc et d'une mère d'origines irlandaise et barbadienne.

Elle débute en publiant des démos sur Soundcloud dès 2014, refusant un projet produit par un membre de One Direction pour rester indépendante dans sa création.

Son premier elpee, produit chez ATO Records, a reçu un accueil critique très favorable. Il fusionne indie rock, soul, jazz, grunge et trip hop, tout en laissant libre cours à son imagination introspective.

Ils sont cinq sur les planches. Mais c’est elle qui drive le band. Elle est très sexy. Décidément, un des éléments marquants lors de cette première journée de festival pour votre serviteur.

Le style est assurément différent une fois encore. Alors que les ‘portugaises’ de votre serviteur souffrent d’acouphènes, le style de Nilüfer Yanya pourrait y remédier.

Ici, pas d’exagération ni dans la forme, ni dans le fond, juste une musique douce et amère, épanouie, relativement épurée, explorant les tensions émotionnelles à travers des guitares semi-nerveuses, des interventions de saxophone et d’électronique dispensés avec une précision chirurgicale, et des paroles qui traitent des anxiétés contemporaines.

Une des particularités du band est de mêler acoustique et électrique afin d’obtenir un son gracieux, propre et glamour, laissant entrevoir de belles envolées sauvages grâce au saxophone joué magistralement par la dame plantée à gauche (qui se consacre également aux ivoires).

Si le set manque cruellement d’énergie, cette situation est largement compensée par la créativité artistique dont on se laisse bercer au gré des compositions, issues notamment du dernier album en date, « My Method Actor » (septembre 2024) ainsi que de l’Ep récemment tombé dans les bacs, « Dancing Shoes ».

Yanga brasse les genres et les sons, de manière presque poétique, voire cinématographique.

Son expression sonore est souvent comparée à celle de Siouxsie and the Banshees. Notamment à cause des riffs de guitare subtils ; et puis de ces sonorités inventives, surprenantes, mais ô combien intéressantes. Et le tout baigne au sein d’‘un univers feutré.

Une ouverture sur le monde de demain, un univers immersif qui sort des sentiers battus et une curiosité belle à entendre. C’est ça l’esprit du festival de Dour.

Retour au ‘Garage’, non pas pour y faire réparer sa bagnole, mais pour y assister au set de Marcel. Le déjanté de service. Enfin, plutôt LES déjantés de service, Marcel ne se cantonnant pas à une seule personne.

Ce sont des (presque) voisins, ils viennent d’Arlon.

Sur l’estrade, trône une inscription rappelant l’idiome de la formation, fabriquée dans une matière qui, à s’y méprendre, ressemble à de la frigolite.

Formé en 2021, ce groupe belge propose une musique hybride, entre post-punk, garage bruitiste et indie rock, tout en affichant une identité visuelle et sonore à la fois décalée et percutante. On est une nouvelle fois loin du style précédent. On a intérêt à se protéger correctement les feuilles de choux, si on ne veut pas, à nouveau, martyriser ses tympans.

A l’heure prévue, des cloches sonnent, comme dans une cour de récréation. Des bruits fusent en backstage. On entend crier froidement ‘Dourrreehhhhh’ repris (évidemment) en masse par le public qui s’est pressé massivement devant le podium.

Les premiers riffs de guitare ne laissent planer aucun doute. La musique immersive de Marcel est un savant mélange, presque improbable, entre celles de Dead Kennedys, Talk Talk, Nina Hagen, Jacques Dutronc, ; et le tout est ponctué de textes poético-horrifiques et d’instruments singuliers (kazoo, darbouka, sifflets).

Le style néo garage rappelle les heures de l’énergie Punk (is not dead), essentiellement dispensée par les Sex Pistols, connus pour être des pionniers dans le genre.

Derrière son micro, Amaury Louis remplit l’espace scénique à lui seul. Dynamique et espiègle, il livre une prestation de manière brute et sans équivoque.

Le combo est venu présenter son dernier né, « Ô  Fornaiz », un opus tout au long duquel instrumentation et bonne humeur font bon ménage.

Que ce soient sur des titres comme « Basho Basho Basho », « Six Seconds » ou encore « The Digger », Maxime d’Hondt (guitare), Benjamin d’Hondt (basse) et Ulysse Wautier (batterie) prodiguent un son qui oscille entre violence percussive, humour absurde et ruptures rythmiques constantes, tout en conservant une cohésion post‑punk extrêmement marquée d’un bout à l’autre du set.

Les titres s’enchaînent de manière irrévérencieuse. Le public est excité voire exalté.

A l’issue de ce concert, votre serviteur déambule de scène en scène pour y encaisser, la plupart du temps, des beats électroniques. Facile et pas cher…

On y croise une majorité de jeunes, en général torses-nus, en quête d’ambiance. La nuit risque d’être longue pour eux…

Le précepte ‘Sex and drugs and rock and roll’ serait-il en train de disparaître ?

La question mérite d’être posée.

A demain !

(Organisation : Dour Festival)

dimanche, 13 juillet 2025 19:08

LaSemo 2025 : dimanche 13 juillet

Clap de fin pour cette dix-huitième édition du LaSemo.

Un festival qui, bien que devenu grand, a gardé son âme d’enfant.

Une majorité qui signe un tournant dans l’histoire aussi, les organisateurs ayant obtenu l’accord de la Ville pour occuper le Parc d’Enghien durant encore au moins trois années, laissant entrevoir de belles surprises à venir.

De grands noms de la chanson française pop sont annoncés. Ce qui explique pourquoi il y a du monde, très tôt dans l’après-midi. Bien plus que lors des deux jours précédents.

Il fait très doux, les badauds déambulent à travers les nombreuses allées ombragées largement réparties sur le site.

Lorsqu’à 16 heures, votre serviteur arrive manu militari, deux artistes se produisent quasi en même temps, Vendredi sur Mer, côté prairie, et Coline BLF, côté guinguette. Le choix se portera vers l’endroit le plus rafraîchissant. Va donc pour la seconde option.

Comme de juste, de nombreux spectateurs ont envahi l’espace. Il fait noir de monde et se frayer un chemin n’est pas une sinécure.

La petite effarouchée se produit devant un parterre, davantage attiré par la soif que par l’artiste, avouons-le ! Mais, surprise, la demoiselle assure. Et son assurance a de quoi faire rougir les plus téméraires, alors qu’elle affiche à peine un quart de siècle.

Elle est originaire de Namur. L’univers musical aussi sein duquel elle baigne, oscille entre Bedroom pop et French pop.

Chantant seule dans sa chambre depuis son plus jeune âge, armée de sa guitare, ce n'est qu'à ses 18 ans qu'elle dévoile son goût pour le chant. Après une année passée en Californie, Coline se lance et travaille sur un premier Ep, « Blue Nostalgia », qui verra le jour en septembre 2022.

Sa musique vintage et solaire est d'abord influencée par King Krule, Clairo et Mac Demarco, mais aussi par de nombreux artistes francophones tels que Lewis Of Man ou encore Claire Laffut.

Ses compos sont parfaitement engagées. Elle s’interroge sur le monde et le devenir de la planète. Ses textes adoptent des opinions idéologiques, sociétaux et politiques. Elle ne mâche pas ses mots lorsqu’il s’agit de balancer du lourd, comme sur cette « Drôle d’Histoire », une compo subtilement chargée de mélancolie.

Parfois doux ou teinté d’une pointe rock, l’univers de Coline BLF sent bon l’été et l’herbe fraîche (celle que l’on sous nos pieds, pas celle que l’on fume). Quand il ne se transforme pas en véritable plaidoyer à l’égard de l’inaction des politiques, tout au long de ce « Feu », bouillonnant de colère et caractérisé par son refrain entêtant, au cours duquel elle clame ‘Soyons heureux avec que le monde brûle’, véritable hymne repris en chœur par l’auditoire.

Coline BLF appartient à cette catégorie rare d’artistes qui se servent de la musique comme son champ de bataille pour mener des combats, tout en promouvant un mode de vie épanoui et en phase avec les enjeux de notre époque.

Mais, elle sait aussi lâcher prise en dispensant des compos aux sonorités eighties, à l’instar de « Luna », personnage fictif qui invite le peuple à se déhancher.

Bref, Coline BLF est assurément une artiste au sens noble du terme qui mérite amplement que l’on s’y intéresse.

La scène du Château est à une encâblure d’ici. Et pourtant, il faut aller vite, le concert de Santa risque d’être pris d’assaut.

Inutile de préciser que l’icône de Hyphen Hyphen est attendue de pied ferme !

A moins d’avoir passé ces deux dernières années sur une île déserte, personne n’a pu échapper au succès fulgurant (presque inattendu) de Samantha Cotta (NDR : c’est son vrai nom !). Et confidence pour confidence, en solo, la demoiselle est impressionnante.

A 18 heures 30’ pétantes, des écrans de fumée envahissent la scène. Impossible de distinguer quoi que ce soit. S’ensuit presque immédiatement un décompte qui semble s’éterniser. Et lorsque ce ‘fog’ se dissipe, il laisse entrevoir une Santa, haute perchée, la tête en bas, pour descendre peu à peu, aidée de filins métalliques, entre des colonnes de feu qui jaillissent. Quelle richesse dans le souci du détail !

Après nous avoir bercé de sa douce ballade en mode piano-voix sur « Popcorn salé », une compo écrite dans l’urgence, presque par égarement, qui paraîtra sous l’impulsion et les encouragements de ses comparses Laura Christin, alias Line (basse, percussions), et Romain Adamo, aka Adam (guitare, synthé), la jeune dame s’émancipe et grave un premier album sobrement intitulé « Recommence-moi ».

Alors que la pop anglophone constituait jusqu’à présent sa ligne directrice, notamment au travers d’HH, la Niçoise prend un virage à 180 degrés en réalisant un très réussi premier essai solo, chanté dans la langue de Voltaire.

Toute de noire vêtue, elle est chaussée de grandes bottes qui lui confèrent un air très glamour. Soutenue par un batteur au drumming corrosif et une bassiste qui n’est autre que sa meilleure amie – Line, elle entame son tour de chant par un spectaculaire « Chanter le monde », une compo aux couleurs vives qui émeut par sa richesse sonore.

Vivant depuis peu de temps dans le plat pays, elle dit aimer se retrouver parmi les siens.

Multi-instrumentiste, elle alterne, au gré des compositions, piano et guitare, ses deux instruments de prédilection, qui viennent soutenir sa voix puissante. Qu’elle met parfaitement en exergue sur « Eva », une magnifique chanson qui s’impose sur fond d’appel à la résilience. Des cris d’amour fusent. Comme elle ne parvient pas à cerner leur origine, elle les rend, mais en plus fort encore.

Et comme le temps presse, elle lance, tout de go, sa gratte au crew (mot qui se traduit en français par ‘équipage’, ‘équipe’ ou ‘bande’, selon le contexte) posté à sa gauche. Le gars la rattrape in extremis à la grande surprise de tous et … surtout de l’artiste elle-même. Un risque démesuré…

Un concert ponctué de surprises ! Et tout d’abord lorsque, posée devant ce piano noir, elle entame « Les larmes ne coulent pas », qui a bénéficié, lors des sessions d’enregistrement, de la complicité de Christophe Willem, un artiste devenu aujourd’hui son ami. Il s’invite le temps d’une chanson, entre simplicité et fausse grandiloquence, lors d’un duo uni par des larmes amères. Mais n’y a-t-il pas larmes plus amères que celles qui ne coulent pas ? Quoiqu’il en soit, elle finit ce titre, le sourire et le regard sereins, debout sur les retours posés à front de scène.

Elle compte se jeter aujourd’hui à corps perdu dans un univers où règnent l’intime, la retenue et la douceur.

Pour ce faire, rien de tel que dénoncer « La différence », sorte de manifeste sur le bien vivre ensemble avec, en filigrane, cet espoir latent de tolérance, d’insouciance et de communion. Pour marquer le coup, elle enfile un drapeau dont les couleurs se réfèrent à l’arc-en-ciel, emblème de l'homosexualité. Le drapeau arc-en-ciel, créé par Gilbert Baker en 1978, est devenu un symbole international de la communauté LGBTQIA+. Il représente la diversité des orientations sexuelles et des identités de genre au sein de cette communauté. Chaque couleur du drapeau a une signification spécifique, comme le rouge pour la vie, le vert pour la nature, et le violet pour l'esprit.

Fidèle à son style unique et son spectre lyrique hors du commun, Santa se regarde ensuite dans le miroir avec introspection durant sa séance de « Popcorn salé » et le désir de recommencer son histoire, à l’instar d’une césure sur le temps. Entre ambition, espièglerie et qualité rare, l’artiste s’était essayée au métier de cascadeuse en interprétant ce premier titre, perchée à plus de 40 mètres de haut ! C'était à Bruxelles, sur la place de la Bourse. Un « Popcorn salé » à son apogée, en quelque sorte !

Et pour rappeler cette spectaculaire ascension, elle n’a rien trouvé de mieux que de jouer du piano en lévitation, grâce à un système de treuil, sous les yeux ébahis des spectateurs qui ont rarement vu un show rythmé digne de ce nom. C’est moins spectaculaire que dans la capitale, mais quand même…

L’émotion est grande. Elle en même oublie les paroles. Et pour se convaincre d’avoir encore toute sa tête, elle embraie dans un mashup, en associant le « Paradis blanc » de Michel Berger et Désenchantée de « Mylène Farmer ». Pour un résultat plus que convaincant !

Elle s’éclipse alors le temps de quelques secondes pour revêtir une cape de vampire. Assoiffée de sang, elle souffle le chaud et le froid lors d’un « Je brûle » qui n’est pas sans rappeler certaines sonorités pop/rock contemporaines qui ont fait les beaux jours de Hyphen Hyphen.

Et puis, dans une parfaite communion, les milliers de festivaliers se transforment en chorale parfaitement synchronisée, pendant « Dis-moi oui », une toute nouvelle compo annonciatrice, sans doute, d’un futur nouvel album. Un magnifique teaser !

Le set touche doucement à sa fin. Alors qu’elle s’apprête à s’éclipser pour une séance de ‘hugs’, des câlins posés délicatement à une poignée de chanceux, elle est vite portée par le public qui l’emmène, comme feuille portée par le vent, jusqu’à la régie, pour un « « Recommence-moi » tonitruant. Et en guise de ‘Happy end’ des canons propulsent des dizaines de milliers de confettis, rappelant les joyeusetés des festivités du carnaval.

Durant près d’une heure trente, Santa a une nouvelle fois démontré qu’elle méritait amplement la distinction du public et de la presse.

Dans l’univers de la chanson française, la jeune peut être assurément considérée comme une grande artiste. Et en livrant un concert d’une telle intensité et générosité, elle a emmené le public dans un tourbillon émotionnel et onirique d’une intensité rare.

MC Solar se produit à 22 heures 30’. Dans l’attente, il faut tuer le temps. Direction donc vers la scène de la prairie pour y découvrir Acid Arab.

Il s’agit d’un groupe français de musique électronique formé en 2012 par deux DJs, Guido Minisky et Hervé Carvalho, immédiatement rejoints par Pierrot Casanova et Nicolas Borne, puis par le claviériste Kenzi Bourras.

La formation est considérée comme pionnière de l'électro-orientale en France.

Vu son goût pour la musique électronique, votre serviteur préfère se nourrir, plutôt que de mourir… d’ennui.

La fin de soirée approche, la nuit a tiré son drap de lit pour s’endormir au côté d’un prodige de la chanson française, en la personne de MC Solaar.

C’est d’un pas résolu qu’il débarque sur l’estrade. Le podium est relativement épuré, une étoile géante trônant en fond de toile.

Vingt-six ans après avoir gravé « Bouge de là », la musique de Claude Honoré M'Barali n’a pas pris une ride et sa verve pointue et naturelle est demeurée intacte.

Son « Intronisation », plage titulaire d’un succulent elpee intitulé « Géopolitique » et dans lequel on entend une dame s’écrier ‘Mc Solar’, laisse entrevoir une musique solaire et positive où on apprend que ‘tout a commencé là-bas, dans la ville qu'on appelle ‘Maisons-Alfort/En jean, en short ou en djellabah’...

Alors qu’à « A dix de mes disciples » laisse dubitatif, « Qui sème le vent récolte le tempo » relève le tout. Ce titre issu du premier LP, paru en 1991, rappelle combien le flow transgresse le poids des âges…

Son obsession… textuelle laisse transposer des suggestions profondes et légères à la fois. Un véritable travail d’orfèvre pour ce… chercheur de phrases.

Mister Claude n’échappe pas à cette règle immuable. Il est également, lui aussi, une « Victime de la mode », comme sans doute les milliers de festivaliers amusés par la facétie de cette poésie urbaine. Dans un foutraque indéterminable, il scande haut et fort à un type « Bouge de là ». Pas une invective, mais une superbe chanson datant des débuts des années 90. Et afin de faire durer le plaisir, après une césure qui tombe à pic, la seconde partie du morceau mythique est jetée aux plus fervents.

Sa musique et la qualité littéraire de ses proses sont le fruit d'inspirations diverses, allant de Serge Gainsbourg – à qui il rendra hommage à travers « Nouveau western » et son sample mythique de Bonnie and Clyde - et aux musiques africaines (ivoiriennes, maliennes, tchadiennes), en passant par les classiques noirs américains (jazz et rap US).

MC Solar est un vrai « Dingue » et son « Da Vinci Claude », titres-phares, ravivent pas mal de souvenirs au sein de l’auditoire…

Alors que Bambi Cruz, de son vrai nom Gabriel Hoareau et par ailleurs rappeur lui aussi, « Ouvre les yeux », la douce et belle « Caroline » vient susurrer dans nos oreilles de jolis refrains pour le meilleur, pas pour le pire.

Le public semble ravi. Cependant « Solar pleure ». Des larmes de joie plus que d’amertume, sans doute. Car l’artiste n’a rien perdu de ces années. Sa plume est intacte, sa verve est plus tenance que jamais et ses textes sont d’une intensité rare.

Le spectacle s’achève, laissant des étoiles dans les yeux. On peut dire que ce soir, MC Solar était… solaire !

Après quatre jours de folie, de spectacles, de concerts d'anthologie et de détente, le festival familial et durable situé dans le parc d’Enghien se clôture ce dimanche soir.

Une édition marquée par un joli succès à tous niveaux. Une fois de plus, le LaSemo a tenu toutes ses promesses.

Gageons que l’édition 2026 sera, quant à elle, au minima aussi intéressante et riche que cette année. Les paris sont ouverts et les premières places déjà disponibles…

(Organisation LaSemo)

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